ex-sovietisation et nouvel ordre international

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par zarta » 27 Juil 2004, 11:54

a écrit :En 1989, la chute du mur de berlin (sous la poussée des masses)


Justement, je voyage souvent en Rép. Tchèque, où je rencontre des ouvriers et je m'aperçois de plus en plus qu'ils n'étaient pas si nombreux à vouloir le retour au capitalisme. En fait, seul un groupe d'intello issu du mouvement de 1968 a fait monter le jeu en épingle pour renverser la dictature - comme c'était grosso modo déjà le but en 68 - pour finalement proclamer qu'il fallait renverser le capitalisme. La dessus s'est greffer l'europe qui leur a dit "si vous renverser le socialisme, vous quitter le joug soviétique, et nous on vous aide financièrement, mais seulement si vous renverser le socialisme".
Des ouvriers moraves m'ont raconté que pendant les manifs de prague en 89 contre le régime (et c'était surtout des masses qui étaient contre la dictature et pas contre le socialisme), il y avait des manifs en Moravie contre les manifs de Prague...
Certains (des anciens de 68) étaient même au Forum Civique de 89 pour empêcher un retour au capitalisme.
Ceux-là ont été assez nombreux à me dire que la situation actuelle est pire que l'ancienne parce qu'avant 89 tout le monde s'intéressait à la politique, même s'ils n'avaient pas de parti de classe, ils formaient une certaine classe non organisée pourrait-on dire. Mais maintenant, c'est pire dans le sens où on leur a mis dans la tête qu'il n'y avait pas d'autre alternative que le capitalisme, que le chômage était inévitable, parce qu'avant le chômage n'existait pas mais les emplois étaient "fictifs" etc. De sorte que maintenant plus personne ne se bat, n'a d'opinion politique claire. Les jeunes courent après un emploi, et font tout pour être le plus "compétitif" possible, quitte à écraser tout ce qu'il y a sur leur passage. Avant 89 cet état d'esprit n'existait pas. Lorsque les gens faisaient quelque chose, ils le faisaient dans l'intérêt de tous, ou du moins du plus grand nombre, même s'ils ne parlaient pas forcément de lutte de classe parce que ça leur semblait des termes vidés de leur sens par le PC.
Maintenant comme certains se sont bien enrichis grâce au capitalisme, tous ont ce modèle dans la tête. Chez les Tchèques, les intellectuels ont une grande importance dans l'histoire et dans la vie politique depuis le 19e siècle. C'est eux qui ont proposé des modèles politiques d'organisation de l'Etat etc. depuis 1918. Certains ont soutenu le Parti en 48, d'autres ont commencé de réfléchir sur les déformations du stalinisme dès 1956. Bref, maintenant ils sont tous relégués au rang des "non-rentables".
Quelques partis politiques semblent tenter une alternative, mais ils sont d'ores et déjà discréditer par leurs anciens liens au PC. Le plus drôle - ou le plus cynique - c'est que Vaclav Havel, celui-là même qui a livré son pays au capitalisme clef en main - était lui aussi au PC..., mais il était aussi fils et petit-fils de bourgeois (c'est aussi pour ça que sur un autre fil je disais que je m'éfiais toujours des bourges), et ce qui importait avant tout pour lui en 89, c'était de récupérer tout les immeubles qui appartenaient à sa famille avant 1948. C'est ce qu'il a fait en deux minutes, alors que d'autres anciens proprio attendent encore.
Malgré l'écrasante "pensée unique", il semble que les ouvriers aient acquis une certaine conscience politique, mais quand je dis ouvriers, je pense vraiment ouvriers, pas ensemble de travailleurs. Même ceux-là, on a du mal à voir comment ils pourraient s'organiser parce qu'ils n'ont pas de partis, et ne veulent même pas entendre parler de syndicat (l'ancien syndicat était utilisé par le parti pour faire appliquer les décisions du gouvernement dans les entreprises, et n'était donc pas perçu comme un élément de lutte). Un des partis de gauche parle d'un syndicat indépendant, mais il semble que ce soient des anciens du pc...
Tout ça sans parler des ravages de l'alcoolisme chez tous et de la drogue chez les plus jeunes...
zarta
 
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Message par othar » 27 Juil 2004, 13:20

(zarta @ mardi 27 juillet 2004 à 12:54 a écrit : Justement, je voyage souvent en Rép. Tchèque, où je rencontre des ouvriers et je m'aperçois de plus en plus qu'ils n'étaient pas si nombreux à vouloir le retour au capitalisme.
(...)
Des ouvriers moraves m'ont raconté que pendant les manifs de prague en 89 contre le régime (et c'était surtout des masses qui étaient contre la dictature et pas contre le socialisme), il y avait des manifs en Moravie contre les manifs de Prague...
Certains (des anciens de 68) étaient même au Forum Civique de 89 pour empêcher un retour au capitalisme.
Ceux-là ont été assez nombreux à me dire que la situation actuelle est pire que l'ancienne parce qu'avant 89 tout le monde s'intéressait à la politique, même s'ils n'avaient pas de parti de classe, ils formaient une certaine classe non organisée pourrait-on dire. Mais maintenant, c'est pire dans le sens où on leur a mis dans la tête qu'il n'y avait pas d'autre alternative que le capitalisme, que le chômage était inévitable, parce qu'avant le chômage n'existait pas mais les emplois étaient "fictifs" etc. De sorte que maintenant plus personne ne se bat, n'a d'opinion politique claire.
(...)
Malgré l'écrasante "pensée unique", il semble que les ouvriers aient acquis une certaine conscience politique, mais quand je dis ouvriers, je pense vraiment ouvriers, pas ensemble de travailleurs. Même ceux-là, on a du mal à voir comment ils pourraient s'organiser parce qu'ils n'ont pas de partis, et ne veulent même pas entendre parler de syndicat (l'ancien syndicat était utilisé par le parti pour faire appliquer les décisions du gouvernement dans les entreprises, et n'était donc pas perçu comme un élément de lutte). Un des partis de gauche parle d'un syndicat indépendant, mais il semble que ce soient des anciens du pc...
Tout ça sans parler des ravages de l'alcoolisme chez tous et de la drogue chez les plus jeunes...

parmi ces gens dont tu parles, il n'y en a pas qui ont envie de se regroupe politiquement? (ça peut-etre l'embryon d'une organisation)
othar
 
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Message par Nadia » 27 Juil 2004, 13:39

(wolf @ mardi 27 juillet 2004 à 14:16 a écrit :...
Le mouvement des masses exacerbait cette crise et s'engouffrait dans les failles qui apparaissaient. Ainsi, du 10 au 20 juillet 1989, c'est la grève des mineurs du Kouzbass (Sibérie) puis du bassin du Don (Ukraine).

Gorbatchev reconnaît que la situation met en péril le "rôle dirigeant du parti" et annonce l'achat à l'étranger de biens de consommation, notamment alimentaires, en quantités massives. Le 24 juillet, il déclare devant le "Soviet" suprême que la grève des mineurs est "l'épreuve la plus difficile qu'ait connue la Pérestroïka".

...

Sans parler même ici du prolétariat de l'URSS, ce rappel succinct montre à l'évidence que ces régimes bureaucratiques de l'Est de l'Allemagne et de l'Est de l'Europe, vassaux de la bureaucratie du Kremlin dont ils étaient une excroissance, sont tombés sous le coup des masses. Certes ces régimes étaient dans une impasse totale ; certes ils ont été lâchés par la bureaucratie du Kremlin elle même en crise ; encore a-t-il fallu que le prolétariat et la jeunesse montent à l'assaut du pouvoir de la bureaucratie.

L'ensemble de ce processus a constitué un mouvement révolutionnaire qui pouvait être la préface à la révolution politique, à la prise du pouvoir par le prolétariat pour instaurer sa dictature, la démocratie des Soviets. La révolution politique était bel et bien à l'ordre du jour.

C'est vraiment les grèves des mineurs qui ont mis fin à l'URSS ? :blink:


Et :
a écrit :Le 11 décembre, en Tchécoslovaquie, commence la démolition du rideau de fer.
Ils en ont fait quoi, de ce fameux rideau ? :roll:
Nadia
 
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Message par ravine chien » 27 Juil 2004, 13:53

(zarta @ mardi 27 juillet 2004 à 12:54 a écrit : Tout ça sans parler des ravages de l'alcoolisme chez tous et de la drogue chez les plus jeunes...
C'était déjà le cas avant le changement de régime. Petite précision, ma mère est tchèque, j'ai la double nationalité, toute sa famille est à praha ou à liberec. Quand j'ai eu 12 ans, parceque j'étais devenu "homme", mon arrière grand-mère me servait un verre de vodka au petit déjeuner. L'alcool a toujours été présent. Pour ce qui est des drogues, la cité universitaire du strahoff (je ne suis pas sûr de l'orthographe, située au dessus du funiculaire) était un supermarché des drogues(héroïne et canabis, puis toutes sortes de pillules). Cela avait commencé avant la chute du régime policier.
tak...
Mes grands parents, oncles, tantes et cousins... manifestaient en 89 pour le départ des russes, pour la fin de l'état policier. c'était insupportable de devoir faire des déclarations à la police au moindre déplacement de plus de 40 km. C'était insupportable de devoir payer systématiquement un policier pour qu'il vous donne l'autorisation de déplacement. C'était insupportable à mon oncle de devoir confier ses enfants à la police, pour avoir l'autorisation de pouvoir partir 15 jours en france. Les gens quand ils ont manifesté, c'était pour se sentir un peu plus libre et échapper à cette préssion policière et militaire.
ravine chien
 
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Message par zarta » 27 Juil 2004, 19:35

a écrit :Les gens quand ils ont manifesté, c'était pour se sentir un peu plus libre et échapper à cette préssion policière et militaire.


takze to nebylo za kapitalismus... :roll:

On ne dit pas qu'il n'y avait pas des milliers de gens à manifester, reste à savoir pour quoi exactement ils manifestaient. Apparemment, c'était pas du tout pour retourner à une organisation capitaliste de la société.

quant à organiser éventuellement les gens avec qui je peux avoir contact : je suis presque totalement pessimiste. Ya ka prononcé le mot "syndicat" pour obtenir un tolé général, un éclat de rire qui s'entend de Paris à Moscou... et quand tu précises "indépendant" ils te répondent "laisse tombez, tu peux pas comprendre..."
Et si tu insistes en disant que tu peux comprendre dès lors que c'est bien expliqué (et toc), ils insistent à leur tour en disant "viens on va boire une bière".

ceci dit c'est vrai que l'alcool et la drogue étaient là avant 89. Mais maintenant ça apparait comme la seule issue des jeunes. alors qu'avant yavait au moins des "philosophes" quoi.
zarta
 
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Message par zarta » 27 Juil 2004, 19:40

a écrit :le prolétariat et la jeunesse montent à l'assaut du pouvoir de la bureaucratie


dans le cas de la Tchécoslovaquie, c'était plutot les intellos qui sont montés à l'assaut du pouvoir; le prolétariat ou plutot l'ensemble des travailleurs réclamaient juste un peu plus de liberté, comme le rappelle Ravine-chien

Pour l'urss, je connais pas trop, mais il ne me semble pas que Esline et Cie fasse vraiment parti du "prolétariat" étant donné qu'il me semble qu'il n'avait, comme Havel, qu'une idée en tête, c'était leur propre intérêt.
zarta
 
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