S'ils sont entrés au pds ou chez les verts , c'est un erreur de leur part.
a écrit :En Allemagne, les Grünen, du pacifisme au ministère des Affaires étrangères
Les Grünen (les Verts) en Allemagne n'eurent des ministres au sein du gouvernement fédéral qu'à partir de 1998, un an après qu'en France, Dominique Voynet soit devenue la ministre Verte de Jospin. Mais ils avaient eu bien plus tôt que les Verts français des élus au parlement fédéral, le Bundestag, puisque en 1983, avec 5,6 %, ils en obtinrent 26. Dans la même période, ils commencèrent non seulement à avoir des élus dans des parlements régionaux, ceux des lander, mais participèrent aux exécutifs de certains de ces parlements. Ce fut le cas en Hesse, à Berlin, à Hambourg, en Rhénanie du Nord/Westphalie en s'alliant à la social-démocratie, le SPD, mais aussi en adjoignant parfois un troisième partenaire à cette alliance, les libéraux du FDP, comme en Basse Saxe et en Saxe-Anhalt, à Brême et dans le Brandebourg. Localement, les alliances des Grünen ont parfois débordé ce cadre, puisqu'il existe, dans certaines villes, des accords, tacites ou formalisés, y compris avec les chrétiens-démocrates de la CDU.
Le courant écologiste s'est développé, en Allemagne, à partir du milieu des années soixante-dix, autour de mobilisations contre des grands travaux qui saccageaient l'environnement, tels par exemple ceux des aéroports de Francfort-sur-le-Main ou de Munich, ou de mobilisations contre la construction de centrales nucléaires. Ces manifestations rassemblaient un nombre important de manifestants, et aboutissaient bien souvent à de violents affrontements avec la police.
Le succès de ces mobilisations spectaculaires attira vers les écologistes un certain nombre de mouvements aux préoccupations et aux objectifs différents : des mouvements pacifistes, féministes, mais aussi, composante importante à l'époque, les « alternatifs », qui préconisaient un mode de vie hors des structures traditionnelles, vivant dans des logements communautaires, organisant des écoles non conventionnelles, rejetant la médecine classique, etc. Daniel Cohn-Bendit vécut plusieurs années dans une telle communauté, après son expulsion de France en 1968. Cette mouvance récusait l'activité politique, la qualifiant de récupératrice et de manipulatrice. Se joignirent alors aux écologistes des groupes politiques d'extrême gauche, se réclamant du maoïsme, parfois du trotskysme, qui militaient déjà dans le mouvement écologiste, et des anti-nucléaires, et qui étaient parmi les animateurs de ces mouvements. Ils finirent par s'y fondre complètement.
En janvier 1980, à Karlsruhe, lorsque les Grünen se constituèrent officiellement, ils regroupaient une mosaïque de groupes. A peine constitués, ils prirent la décision de se présenter aux élections fédérales prévues pour le mois d'octobre de la même année. Ils ne recueillirent alors que 1,5 % des suffrages exprimés, résultat qui était bien loin de leurs espérances.
Mais ils conservaient l'image de contestataires, une image qui s'était forgée au travers des campagnes pacifistes dans lesquelles ils s'étaient investis, militant pour le désarmement, s'opposant à l'implantation sur le sol de la République fédérale allemande des missiles américains Pershing. Cela leur valait un crédit certain au sein d'une fraction de la jeunesse. Cette image fut confortée par des gestes symboliques, comme le choix de se rendre dans les assemblées régionales dans lesquelles ils venaient d'obtenir des élus celle du land de Hesse et celle de Hambourg, dès 1982 vêtus de blue-jeans et de pulls à col roulé. C'était, de leur part, une façon de signifier leur refus d'entrer dans le jeu politicien, leur refus de participer aux combinaisons et aux magouilles. Mais surtout ils restaient intransigeants sur tout ce qui avait rapport avec l'environnement.
Cela n'allait pas durer.
Rapidement, les Grünen se divisèrent, entre Fundis (les fondamentalistes), qui se réclamaient des valeurs écologistes de départ, et les Realos (les réalistes) qui commençaient à se poser la question de leur intégration aux institutions politiques. Ce furent ces derniers qui l'emportèrent mais les autres se soumirent au choix majoritaire après des débats internes agités. Parmi ces « realos », on trouvait déjà Cohn-Bendit et Joschka Fisher. C'est à ce moment que les Grünen acceptèrent d'entrer dans les exécutifs des parlements régionaux. Une décision qui arrivait fort opportunément, au moment même où le Parti Social-Démocrate, qui gouvernait avec les libéraux du FPD, était lâché par ces derniers.
Aux élections européennes de 1984, les Grünen obtinrent 8,2 % des suffrages exprimés, score qui fut confirmé aux élections législatives de 1987, où ils obtinrent 8,3 %, suivi de 8,4 % aux élections européennes de 1989. Mais aux élections législatives de 1990, ils ne recueillirent plus que 3,9 % des suffrages, à l'échelle de l'Allemagne récemment réunifiée, ce qui n'était pas suffisant pour avoir des élus. En 1994, un score de 7,3 % des suffrages leur permit de disposer de 49 parlementaires au Bundestag. Mais ce ne fut qu'en 1998, pourtant sur la base d'un recul relatif puisqu'ils n'obtinrent que 6,7 % des suffrages, qu'ils purent enfin réaliser leur ambition affichée : participer au pouvoir. L'alliance avec les sociaux-démocrates du SPD leur permit d'avoir des ministres, trois ministres d'un coup, dont celui, prestigieux, des Affaires étrangères.
Dès lors, on put voir le réalisme des Verts dans toute sa réalité. On en avait déjà eu une idée à travers leur attitude dans les exécutifs des lander. Joschka Fisher, figure de proue des Grünen, mais surtout ministre des Affaires étrangères de cette coalition, proclama alors qu'il n'était pas un ministre des Affaires étrangères Vert, mais le ministre des Affaires étrangères de l'Allemagne. Et il le montra. Ainsi, par exemple, il fut un ferme partisan de l'intervention de l'OTAN en Serbie, expliquant, lui l'ancien pacifiste, que c'était le meilleur moyen d'assurer la paix dans cette partie de l'Europe. Par contre, pratiquant une diplomatie soigneusement équilibrée, il expliqua qu'il considérait que la question tchétchène, était une affaire intérieure russe, relevant de la seule responsabilité de ce pays. Il ne s'opposa pas à des ventes de chars allemands à la Turquie, en dépit des engagements et des conventions interdisant la livraison d'armes à des pays qui bafouent les droits de l'homme.
Les positions des Grünen, dans le domaine économique et social, expriment une attitude tout autant responsable à l'égard du système, c'est-à-dire à l'égard du patronat. Ils ont approuvé les allégements des charges du patronat, et les mesures d'austérité envisagées par le gouvernement Schröder. C'est ainsi, par exemple, que récemment, Rezzlo Schlauss, le chef de file des députés Verts au Bundestag, a suggéré que l'on puisse diminuer les salaires au dessous du niveau prévu par les conventions collectives dans les entreprises considérées en difficulté.
Pour ce qui concerne la sortie du nucléaire, revendication emblématique des Grünen, l'accord obtenu après négociation avec les représentants des compagnies productrices d'électricité a abouti à leur laisser le dernier mot, puisqu'elles pourront exploiter leurs centrales nucléaires jusqu'en 2018, au terme donc de trente ans de fonctionnement de chaque centrale. Cela correspond grosso modo à la durée de vie de ces centrales, qui, en fin de vie, auraient de toute façon dû être arrêtées.
Les Grünen ont donc bénéficié de l'opportunité que leur offrait la coalition avec le SPD. Cela ne signifie pas pour autant qu'ils ne conçoivent leur avenir politique qu'en alliance avec la gauche si l'on peut parler de gauche à propos de la politique incarnée par Schröder. L'hypothèse d'une alliance future avec des partis classés à droite est évoquée, non seulement par les commentateurs, mais par les Grünen eux-mêmes. C'est ainsi que Cem zdzmie, l'un des députés Verts au Bundestag, issu de l'émigration turque, s'est fait le héraut d'une telle évolution de son parti, rêvant à voix haute que les Verts s'enracinent plus encore dans les classes moyennes, et occupent le créneau qu'occupent actuellement les libéraux du FDP. Dans une telle perspective, il n'exclut pas que les Grünen s'allient avec les chrétiens-démocrates du CDU. Force est d'admettre que ce ne serait pas contre-nature de la part des Verts, à condition que les chrétiens-démocrates veuillent d'une telle alliance et y trouvent intérêt. Mais, à vrai dire, ce ne serait pas une innovation, puisqu'une alliance de ce genre existe déjà, en Allemagne, dans un certain nombre de localités.