Autodestruction du capitalisme

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Trux » 14 Mai 2004, 21:21

D'abord merci pour les réponses de mon premier post "2 ou 3 questions".

J'aurais voulu un autre renseignement concernant ceci : ( tiré de l'encyclopédie encarta)


a écrit :"Cette recherche du profit amène l’entrepreneur à désirer sa maximisation.

Celle-ci est recherchée au travers d’une amélioration des techniques de production en vue d’accroître la productivité du travail : elle s’incarne dans la mécanisation de plus en plus poussée des structures industrielles.

Or, dans la mesure où Marx affirme que seul le travail est créateur de richesse, l’évolution du capitalisme tel qu’il le décrit conduit nécessairement à long terme à une baisse du taux de profit.
Le capitalisme se voit en quelque sorte condamné par là ou il a pêché.

Cette évolution liée aux effets de la lutte des classes permettra d’instaurer une nouvelle forme d’organisation sociale postérieure au capitalisme, qui est déjà condamné par l’histoire."



Je suis d'accord que le travail est seul créateur de richesse, mais pourquoi baisse du profit?
Et pourquoi dit-il que le capitalisme est condamnné par là ou il a pêché?

On voit aujourd'hui que le capitalisme prend de plus en plus d'ampleur, à vrai dire on dirait que c'est le communisme qui est condamné par l'histoire, et non pas le capitalisme.

Alors c'est quoi cette histoire de capitalisme kamikaze? :wacko:
Trux
 
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Message par Jacquemart » 14 Mai 2004, 22:05

Allez, je me lance.
Ce problème est à la fois un des plus importants et un des plus difficiles des raisonnements économiques de Marx.
Pour essayer de dire les choses de la manière la plus simple et la plus synthétique possible : dans la concurrence, l'arme la plus mortelle de chaque capitaliste est de baisser ses coûts de production pour évincer les autres capitalistes du marché. Or, un moyen privilégié de réaliser cette baisse des coûts est la mécanisation : le remplacement du travail vivant (les salariés) par des machines.
L'ensemble des capitalistes pratiquant cette méthode, ils diminuent, paradoxalement, leur taux de profit. Car si seul le travail vivant est à la source du profit, remplacer du travail vivant (porteur de plus-value) par des machines qui elles, ne rapportent rien par elles-mêmes, ne peut manquer de diminuer le taux de profit (le rapport entre les profits et l'argent qu'il faut investir pour les générer).
Au bout du compte, le capitalisme, qui a triomphé au XIXe siècle grâce à sa capacité de moderniser l'économie et de diminuer les coûts de production des marchandises, s'étouffera donc en raison d'un taux de profit de plus en plus bas, qui provoquera un ralentissement de la croissance, des crises économiques... et son renversement par le prolétariat.
Voilà en quoi le capitalisme mourra "par là où il a pêché" : par la mécanisation et le progrès technique.
Cela dit, je sens que la discussion ne fait que commencer -ou plus exactement de continuer, car cela fait 140 ans et quelques milliers de livres que cette question est débattue - et je m'en pourlèche les babines à l'avance...
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Message par Dolmancé » 15 Mai 2004, 02:45

a écrit :dans la concurrence, l'arme la plus mortelle de chaque capitaliste est de baisser ses coûts de production pour évincer les autres capitalistes du marché


Ce n'est plus vrai maintenant.
Dolmancé
 
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Message par Jacquemart » 15 Mai 2004, 07:33

(Dolmancé @ samedi 15 mai 2004 à 03:45 a écrit :Ce n'est plus vrai maintenant.

Mais si, Dolmancé. D'où la litanie des exigences de gains de productivité de la part des directions des entreprises, année après année.

Pour revenir au texte de Caupo, je voudrais relever ce qui me semble être une... triple erreur.
a écrit :En augmentant l'exploitation, donc en augmentant le taux de profit, la part du Capital Variable baisse et l'ouvrier gagne relativement moins, le marché ne peut pas absorver les produits et on se trouve face à une crise de surproduction. Ce que tu vois en ce moment même.

1. Pour Marx, la baisse du taux de profit n'est pas obligatoirement liée à l'augmentation du taux d'exploitation. Celle-ci peut avoir lieu, mais ce n'est ni nécessaire, ni même le plus probable.
2. L'augmentation du taux d'exploitation signifie en effet une baisse de la part du capital variable. Mais cela n'est pas du tout la cause des crises de surproduction, ni de près, ni de loin. A ce sujet, une citation très claire de Marx :
"C'est pure tautologie que de dire : les crises proviennent de ce que la consommation solvable ou les consommateurs capables de payer font défaut. Le système capitaliste ne connaît d'autres modes de consommation que payants, à l'exception de ceux de l'indigent ou du « filou ». Dire que des marchandises sont invendables ne signifie rien d'autre que : il ne s'est pas trouvé pour elles d'acheteurs capables de payer, donc de consommateurs (que les marchandises soient achetées en dernière analyse pour la consommation productive ou individuelle). Mais si, pour donner une apparence de justification plus profonde à cette tautologie, on dit que la classe ouvrière reçoit une trop faible part de son propre produit et que cet inconvénient serait pallié dès qu'elle en recevrait une plus grande part, dès que s'accroîtrait en conséquence son salaire, il suffit de remarquer que les crises sont chaque fois préparées justement par une période de hausse générale des salaires, où la classe ouvrière obtient effectivement une plus grande part de la fraction du produit annuel destinée à la consommation. Du point de vue de ces chevaliers, qui rompent des lances en faveur du « simple » bon sens, cette période devrait au contraire éloigner la crise" (Le capital, II, 20, 4)
3. Définir la "crise" actuelle comme une crise du surproduction ne me paraît pas être le plus pertinent. Où sont les stocks massifs d'invendus ?

Cela dit, si on veut commencer à se prendre le chou là-dessus, mieux vaudrait ouvrir un nouveau fil "crises", car là on s'éloigne de la baisse tendancielle du taux de profit...
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Message par Cyrano » 15 Mai 2004, 09:18

1. J'ai remarqué, dans mon coin, que les militant-e-s du PCF qu'ont suivi quelques cours ont bien retenu cette notion* (même si ils ou elles ne savant pas forcément expliquer précisément) :
Le capitalisme est condamné, il explosera sous le poids de ses contradictions… Un fatalisme de l'attente…
2. Au vu des profits réalisés, ça veut dire quoi la "crise" actuelle du capitalisme ?!?!
3. Pour la surproduction, si je comprends bien: ce n'est pas surproduction de marchandises, mais impossibilité d'écouler les marchandises avec un taux de profit "raisonnable" (du point de vue de celui qu'est du bon coté du manche) ?

* cette notion: la chute tendancielle patati-patata...
Cyrano
 
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Message par mael.monnier » 17 Mai 2004, 11:18

La Documentation française l'a très bien synthétisé :
a écrit :
Théorie marxiste de la crise

Seul le travail vivant crée de la valeur. Or poussé par la concurrence, le capitaliste utilise de plus en plus des machines et donc du travail mort. Il déclenche ainsi la crise. Même si le rendement du travail vivant augmente, sa quantité diminue. Il en résulte : 1°/ une diminution de la demande de biens de consommation puisqu'il y a de plus en plus de chômeurs ce qui diminue l'incitation à produire ; 2°/ un déséquilibre entre la section produisant des biens de consommation et celle produisant des biens de production ; 3°/ une baisse de la rentabilité du capital puisque les prolétaires, soit au niveau de la répartition (partage profits - salaires) soit au niveau de la production (lutte contre les cadences) lutteront contre les capitalistes ; 4°/ une baisse inéluctable du taux de rentabilité du capital puisque le capitaliste aura recours de plus en plus au capital constant (autrement dit aux machines ou travail mort). L'existence de contre-tendances : concentration du capital, prise en charge par l'Etat d'une partie du capital, ne sont que des solutions de court terme. (Marx, Engels, Lénine, Luxembourg)
(Source : http://www.ladocfrancaise.gouv.fr/revues/p.../macroeco.shtml)
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Message par Gaby » 17 Mai 2004, 12:35

Des marxistes d'aujourd'hui et d'hier ont toujours négligé les 6 facteurs allant à l'inverse de la baisse tendancielle du taux de profit, temporairement pour certains et indéfiniment pour d'autres :
1. les capitalistes peuvent augmenter l'intensité de l'exploitation.
2. abaisser le salaire du prolétaire en dessous de sa valeur de marché, par usage parallèle de positions hégémoniques.
3. le progrès technique provoque une dépréciation constante du capital fixe (** essentiel **).
4. l'armée industrielle de réserve, les chomeurs, pèsent sur le niveau des salaires (ca rejoint les points 1 et 2).
5. le commerce extérieur permet éventuellement de faire des profits supplémentaires (ce facteur là va s'étrangler de plus en plus).
6. les capacités toujours plus grande de concentration du capital, d'extension de l'appareil productif (avec l'accroissement du capital par actions).
Gaby
 
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Message par mael.monnier » 17 Mai 2004, 14:58

Sur le point n°1, effectivement les capitalistes essayent sans cesse d'intensifier la production, d'obtenir plus pour le même prix. Mais en faisant cela, dans le même temps, ils laissent des millions de personnes au chômage, ce qui leur fait des consommateurs en moins, donc des débouchés en moins, et donc une saturation plus rapide du marché des biens de consommation et des services aux particuliers, et donc ensuite du marché des biens de production et des services aux entreprises. Ils se tirent en réalité une balle dans le pied. Et ensuite, le plus grand risque, c'est qu'avec la paupérisation accrue des masses des grèves éclatent et fassent écrouler leur système d'exploitation capitaliste. Et enfin, cette intensification de la production ne fait que renforcer la quantité de travail mort (des machines) par rapport à la quantité de travail vivant (des êtres humains), et cela rejoint donc ce qui était expliqué par la Documentation française.

Sur le point n°2, cette baisse tendancielle des salaires rejoint en fait ce que je disais au point n°1 sauf qu'au lieu d'intensifier la production, ils réduisent le prix à payer en main-d'oeuvre. Cela se traduit encore par une baisse de la consommation, et ainsi de suite. Ils augmentent donc le rendement du travail vivant mais au détriment de la quantité de travail vivant, ce qui renforce le poids du travail mort.

Sur le point n°3, effectivement il y a une usure du travail mort. Mais les machines deviennent de plus en plus performantes, et de plus en plus solides avec les progrès scientifiques et techniques. Le travail mort a donc plutôt tendance à voir son poids augmenter puisque ce travail mort nécessite d'une part de moins en moins de travail vivant nécessaire à sa production, et d'autre part se renouvelle de moins en moins vite (la durée de l'amortissement s'allonge donc de plus en plus, les agent économiques recherchant la solution la moins coûteuse - le meilleur rapport qualité/prix -, et ne remplaçant les machines que si un gain de productivité peut être obtenu tel que celui-ci compense le remplacement de l'ancienne machine avant sa fin de vie).

Sur le point n°4, plus l'armée industrielle de réserve augmente, et plus la quantité de travail mort augmente par rapport à la quantité potentielle de travail vivant, et donc on rejoint la théorie marxiste encore une fois.

Quant aux points n°5 et n°6, "ces contre-tendances [...] ne sont que des solutions de court terme" dans le sens où le marché mondial n'est pas extensible à l'infini et est limité en termes de capacité d'absorbtion de la production, et dans le sens où l'impérialisme capitaliste qui s'exprime par une tendance à la monopolisation de plus en plus et à une tendance au capitalisme monopoliste d'Etat (C.M.E.) où Etat et Capital deviennent inséparables (L'Etat étant là pour collectiviser les pertes et pour privatiser les profits au plus grand bénéfice du Capital, ou pour piquer aux pauvres pour donner aux riches comme le fait l'Etat Chirac-Raffarin-Sarkozy).
mael.monnier
 
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