Another year, film de Mike Leigh

Message par Zelda » 08 Jan 2011, 14:10

Vous l'avez vu ?
Moi oui, j'ai vraiment bien aimé, mais j'ai un peu de difficulté à savoir pourquoi.

Bien sûr il faut aimer les films psychologiques où il ne se passe pas grand chose.

Voici une excellente critique de Télérama, de Pierre Murat :

Non pas que je sois d'accord avec tout, pour ma part, j'ai beaucoup aimé le couple principal et tant pis si telle n'était pas l'intention de Mike Leigh. L'image même de la sérénité d'un vieux couple de petits bourgeois ouverts et équilibrés, éminemment sympathique, le fils aussi est super. Mais le jeu de Lesley Manville, qui interprète Mary, est à mon goût excessif au début...

Donc voici la critique que je trouve très bonne quand même, mais dont je ne partage pas l'avis. C'est marrant comme dans ce genre de films, on peut voir la partie du verre à moitié plein ou à moitié vide. Pour moi, c'est un film apaisant et optimiste, ces gens veulent profondément rendre service, mais pas se laisser bouffer tout cru par des gens qui vont trop mal. Quoi de plus normal ?

A noter pour moi, la meilleure scène d'enterrement au cinéma. D'un très grand réalisme et très pudique. J'y ai retrouvé deux trois détails d'enterrements que j'ai vécus. Bravo encore à Mike Leigh.

a écrit :LA CRITIQUE LORS DE LA SORTIE EN SALLE DU 18/12/2010

1 De tous les révoltés, de tous les agressifs des précédents films de Mike Leigh, il ne reste plus que Carl. Mais ce n'est qu'un second rôle. A l'enterrement de sa mère, il débarque, l'insulte aux lèvres, la rage au coeur, aussi noir, aussi dépenaillé que le héros de Naked, il aboie sa rancoeur et son dégoût au visage de ce père qu'il hait, puis disparaît aussi brusquement qu'il était apparu. Contrairement à lui, les autres personnages d'Another year n'ont plus la force de gueuler, et ça les rend presque plus dérisoires, davantage pantelants. Le temps de leur révolte est loin, c'est à peine s'ils s'en souviennent. D'ailleurs, seuls leurs corps bougent encore. Prenez le gros Ted, en visite chez Tom et Gerri (oui, ça fait plus de quarante ans que tout le monde les met en boîte, ils sont habitués !) : ses bras s'affairent pour porter à ses lèvres, à toute vitesse - on dirait qu'il ne s'arrête jamais -, de la bouffe, de la bière, des cigarettes. Il ressemble à un grand poupon au mécanisme déréglé... Il y a Mary, aussi. Elle, ce sont ses traits qui s'agitent en tous sens. Elle picole un peu. Beaucoup. Et elle parle, elle parle, pour tout et ne rien dire. Quand ça ne va pas, elle aussi se réfugie chez sa collègue Gerri. Elle y soliloque sur ses amours passées, sur ses pauvres projets d'avenir : si elle achetait la petite voiture rouge de ses rêves, sa vie changerait, elle en est sûre...

Peut-on aider les autres ? Comment ? Et jusqu'où ? Car ils ne sont pas faciles, ces éclopés égoïstes qui recherchent toujours plus de présence, toujours plus d'affection. En de rares instants, on sent une lassitude chez les vertueux que sont Tom et Gerri. Et peut-être même une vague condescendance pour ces pauvres malheureux qui n'auront pas su égaler leur équilibre et leur sagesse. Au vol, on saisit le sourire (compatissant ? moqueur ?) de Tom sur son pote en larmes. Et le regard (résigné ? méprisant ?) de Gerri pour sa copine, un peu ivre, qui s'est blottie dans ses bras.

A vrai dire, ces deux saint-bernard, ces deux « saints laïcs » doivent agacer Mike Leigh. Toute son oeuvre le prouve : il n'aime que les cinglés, les hystériques et les réfractaires. A ce couple gluant de bonté, il préfère, évidemment, cette Mary insupportable qu'une de ses actrices favorites, Lesley Manville, interprète avec la frénésie - très contrôlée - de Gena Rowlands chez John Cassavetes. Rien que pour Mary, il imagine un de ces face-à-face tragi-comiques entre solitaires extravagants qu'il affectionne tant.

Lorsqu'un après-midi d'hiver, de plus en plus défaite, Mary s'en vient frapper à la porte de ses amis, Ronnie, le frère de Tom, venu quelques jours en visite, refuse d'abord de la laisser entrer... On ne saurait trouver deux êtres plus dissemblables : elle est petite ; lui, immense. Elle ne cesse de pépier, lui semble n'avoir qu'un seul mot à son vocabulaire : yeah. Son visage à elle lance des SOS, son visage à lui, c'est RAS. Mais ces deux angoissés s'apprivoisent. Peu à peu, Mary se tait et Ronnie esquisse un sourire. Ils fument une cigarette. Naît, soudain, un bref instant d'espoir, où tout devient possible.

Il est si amoureux de Mary, Mike Leigh, qu'il lui offre le plus beau plan de son film. Et le plus inattendu. Lui dont les mises en scène se veulent invisibles, il invente un panoramique remarquable - et on le remarque ! -, qui glisse sur les personnages, devenus des comparses, des fantômes, pour s'arrêter sur elle et ne plus la quitter. Elle et ses mots en trop, ses mecs en trop, sa petite voiture rouge en trop - bref, sa vie en trop dont tout le monde se fiche...

La lumière des saisons change selon les sentiments des personnages. Tout - leurs petits malheurs, leurs mini-joies - passe dans un souffle. Comme dans ces pièces de Tchekhov où tout est joué, alors qu'il reste tant à faire, que nul, jamais, ne fera.


Pierre Murat
Zelda
 
Message(s) : 0
Inscription : 31 Jan 2010, 14:08

Message par Hum » 09 Jan 2011, 00:52

ha c'est marrant,j'ai vu le film d'une façon différente.
Je n'ai pas aimé ce film alors qu'il a pas mal de qualité (jeux d'acteurs, dialogues, cadrage)
Je n'ai pas aimé le couple principal qui donnait l'impression de vivre et d'exister par le malheur des autres, et que derrière leur air de petit bourgeois gentil bobo écolo ouvert...on sentait de la condescendance et du paternalisme(en croisé H/F le mari envers MAry, la femme envers Ken) envers leurs amis restait une position en dessous sur l'échelle sociale.

Je les ai trouvé assez dure et cruel avec Mary à la fin ( leur attitude lors du retour) et leur attitude envers au moment ou le fils présente sa nouvelle copine.

Leur vie était trop propre soigné (et les passages dans le potager était insupportable je trouve)

Après sinon les dialogues étaient vraiment de qualité même si certaines scènes sont trop longue ( le potager toujours ^^ mais surtout la scène entre Mary et le grand-père dans le jardin)
le role du Grand père sonnait était d'ailleurs très bien joué ( même si la scène dans le jardin était longuette). Ken était aussi bien joué ( et c'est dommage qu'on ai pas vu le personnage plus souvent) car il montrait une réalité assez juste de l'Angleterre.
Hum
 
Message(s) : 0
Inscription : 22 Déc 2010, 10:44

Message par Zelda » 09 Jan 2011, 10:22

Bon, je répondrai à Hum, parce que Granit donne un brin dans la caricature, et la caricature n'appelle pas de réponse, c'est une pose artistique.

Beaucoup de gens ont je crois raté la cause de la fâcherie entre le couple et Mary. Elle est assez feutrée, on en est Angleterre. :hinhin: Je la comprends comme ça : ton fils adoré te présente enfin par surprise ce qu'il croit être la femme de sa vie. Une amie par hasard est invitée le même jour, alors que c'est un événement familial pour des parents. Et cette amie passe tout le dîner à rabrouer la nouvelle copine de ton fils, au point de la mettre mal à l'aise.

C'est après cette scène que le couple décide de se fâcher définitivement avec Mary, qui l'a bien cherché.

C'est aussi simple que ça pour moi. J'aurais fait pareil. Et la phrase de Gerry "Il s'agit de ma famille Mary, il faut que tu le comprennes." signifie clairement et poliment : "Tu ne foutras pas la zone chez moi. C'est nous qui décidons des relations dans notre famille, pas toi."

Ni perversité, ni sadisme, ni égoïsme excessif dans tout ça. Un juste milieu.
Si une chose m'étonne dans ce couple, c'est plutôt qu'ils n'aient pas rompu depuis longtemps avec leurs deux amis respectifs. Bref, bien des gens montrent du doigt leur excès de bonté, et y voient une sorte de perversion. Un drôle de raisonnement.

C'est intéressant et vrai quand tu parles de "paternalisme" pour la relation entre le mari et Mary ou la réciproque. A la réflexion, je le vois comme ça. Mary est l'amie de Gerry. Aussi, Gerry passe l'éponge sur bien des défauts, tandis que Tom, qui n'a pas choisi, ne fréquente Mary que par amour pour son épouse, et réciproquement pour Gerry et Ken.
Du coup, effectivement, l'un comme l'autre supporte moins bien l'ami(e) de l'époux(se). Mais ce n'est pas du paternalisme, c'est de l'agacement. Faut avouer que pour plomber une soirée, ces deux potes se posent là. :hinhin:

edit :

Une critique du Monde dit un truc assez juste : que ce film est un test de Rorschardt de 2H, à savoir qu'en sortant, chacun a des sentiments différents, selon que l'on s'identifie à Mary ou au couple... :hinhin:

edit bis :

Je ne jardine pas et ne jardinerai jamais, mais ils sont adorables ces 2 ou 3 là dans leur petit jardin ouvrier. Au lieu de parler, ils se bougent gentiment.
Zelda
 
Message(s) : 0
Inscription : 31 Jan 2010, 14:08

Message par shadoko » 09 Jan 2011, 12:29

Par hasard, j'ai vu le film, et je vois plutôt les choses comme Zelda, avec un petit bémol: plus le film avance, plus on a l'impression qu'au fond, même avec la meilleure volonté du monde, ce que font Tom et Gerri pour leur deux amis à problèmes (Ken et Mary) ne les aide pas vraiment: ils leurs permettent de s'épancher un peu en écoutant leurs pleurs ou leurs délires, mais ils les laissent se complaire dedans et ne les contredisent pas, sauf au moment où ça commence à leur poser des problèmes directement à eux, après l'épisode avec le fils et la copine. On ne sait pas vraiment si c'est une méthode délibérée, ou si c'est simplement par une sorte de ras-le-bol parce qu'ils ont déjà essayé et qu'il n'y a aucune manière de les aider. C'est tout de même significatif que ce soit seulement après cet épisode, que Gerri conseille à Mary de parler à quelqu'un d'autre dans un cadre médical.

(Zelda a écrit :
Une critique du Monde dit un truc assez juste : que ce film est un test de Rorschardt de 2H, à savoir qu'en sortant, chacun a des sentiments différents, selon que l'on s'identifie à Mary ou au couple...

Moi, je m'identifie à Ron. :hinhin:
shadoko
 
Message(s) : 2
Inscription : 17 Juin 2004, 19:35

Message par Zelda » 09 Jan 2011, 12:49

Moi je m'identifie à un mix de Mary et Ken, mais comme repoussoirs.
'Voilà, exactement ce que je ne veux pas devenir, alors que ce serait plutôt ma pente naturelle.
Voilà ce qui m'arriverait si je me laissais totalement aller."

:hinhin:
Zelda
 
Message(s) : 0
Inscription : 31 Jan 2010, 14:08

Message par Zelda » 09 Jan 2011, 12:58

Ceci dit Shadok, à bien y réfléchir, peut-être qu'ils aident Mary et Ron à la fin... On ne sait pas. Ils ne prétendent pas aider plus que ça, mais ils sont là quand Mary et Ron sont au fond du trou, ils les aident à passer un cap difficile par leur simple présence, là tout de suite. C'est déjà ça. Après, ils ne peuvent pas faire des miracles, ce ne sont que de modestes jardiniers. Mais ils ne les engueulent pas assez pour leur bien, les gens qu'ils aiment, je suis d'accord avec toi.
Zelda
 
Message(s) : 0
Inscription : 31 Jan 2010, 14:08

Message par Zelda » 09 Jan 2011, 13:33

Mais granit, ça fait deux ans qu'il a rompu avec son père et sa mère et n'a donné aucun signe de vie. C'est un peu normal que son père pense qu'il ne viendra pas à l'enterrement. Même si l'on comprend que le fils souffre doublement de rater l'enterrement de sa mère... il le rate tout seul, et rejette la faute sur d'autres ensuite. Un coup classique de personne qui va mal.

Tu n'as pas été choqué quand il fout dehors les 2 collègues super gentilles qui sont venues à l'enterrement. Tu trouves que c'est lui qui a la bonne attitude ? C'est pas un peu égocentrique, de penser que l'on est le seul à souffrir à un enterrement ?

Tu vois, toi tu dis : le contraire de la déchirure, c'est la médiocrité. Mais c'est presque l'apologie de la déchirure que tu fais finalement...

Ah au fait, spoilers... :hinhin:
Zelda
 
Message(s) : 0
Inscription : 31 Jan 2010, 14:08

Suivant

Retour vers Livres, films, musique, télévision, peinture, théâtre...

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 1 invité