par Matrok » 08 Juin 2009, 01:16
Bon, je vais tromper mon insomnie en tapant mon analyse des résultats...
L'abstention est très forte, et les résultats très distribués sur des listes nombreuses. Cela indique que les "grands partis", UMP et PS, n'ont pas réussi à pousser les gens à aller voter. C'est surtout vrai du PS.
Du côté de la droite et de l'extrême droite, guère de surprise : ils ne se sont même pas bougés en masse contrairement aux élections précédentes. Vraiment l'UMP n'a pas de quoi pavoiser, ils ont certes gagné partout mais juste grâce à leur avance de départ. En fait, ils faiblissent encore, mais sans opposition solide ni soudée ça leur permet de ne pas reculer. C'est tout. Quand à l'extrême droite on aurait pu craindre qu'elle progresse, vu la crise et le sentiment anti-européen exacerbé par l'adoption anti-démocratique du traité de Lisbonne, mais elle aussi ne semble que garder ses bases.
Là où ça bouge vraiment dans ces résultats c'est quand on voit à quel point ça se confirme que le PS est en train de perdre toute crédibilité comme "deuxième grand parti" en France. Après la grande frayeur que lui avait faite le Modem aux dernières élections présidentielles, c'est maintenant les écolos qui arrivent au même niveau. Dans les deux cas, un parti du "centre", sans lien avec le mouvement ouvrier mais considéré comme "moins à droite" que la droite décomplexée qu'incarne l'UMP. C'est surtout les chiffres de l'abstention qui me semblent révéler à quel point le PS n'a pas réussi à mobiliser son propre électorat.
La percée impressionnante des écolos, je la comprends comme ça: une bonne partie des classes moyennes (petite bourgeoisie, cadres, profs...) et en particulier de sa jeunesse en a marre de Sarkozy, depuis longtemps et même depuis avant les présidentielles, ils en ont marre de ce type vulgaire, de sa démagogie xénophobe, de ses fausses solutions sécuritaires et violentes, de ses abus de pouvoirs, de son cynisme, etc... Mais ils ont aussi en grande partie perdu confiance dans le PS pour incarner une alternative valable, ceci en raison tout simplement de la nullité flagrante de ce parti complètement sclérosé, bouffé par les querelles internes, déserté à sa droite comme à sa gauche, sans projet de société, sans rien qu'une étiquette "socialiste" qui ne correspond plus a rien dans son projet ni dans sa pratique.
Le Modem n'a jamais vraiment incarné une alternative crédible, Bayrou en tant que personne a pu sembler être un meilleur président possible que Ségolène Royal à ces mêmes électeurs, mais le centre fleure un peu trop la quatrième république et le catholicisme, c'est vraiment un truc de has been. À l'opposé, le Front de Gauche et LO ne se sont pas adressé à cet électorat là mais plus clairement aux classes populaires, aux travailleurs. Le NPA l'a fait un peu plus, mais pas exclusivement (encore heureux !), ces électeurs des classes moyennes ne sont pas près à suivre pour le moment un parti qui a un discours "anticapitaliste" et plus ou moins révolutionnaire. Alors les écolos ont pu sembler une alternative souhaitable à cette partie de l'électorat, parce qu'ils semblent avoir un vrai projet de société sans pour autant remettre en cause radicalement la domination de la bourgeoisie.
Les travailleurs, en revanche, se sont majoritairement abstenus (polo a raison la dessus au moins, maintenant le reste de son analyse est un peu... euh...) Les seuls qu'ils ont visiblement fait progresser électoralement c'est le Front de Gauche: c'est la seule formation à gauche du PS à avoir béneficié d'une campagne nationale conséquente, avec des spots longs et nombreux à des heures de grande écoute. Ceci allié avec la capacité de mobilisation du PCF qui a pu jouer par contraste avec la forte abstention, ça leur fait un score honorable. Pour LO on se retrouve avec en gros le score qu'on pouvait espérer, c'est quand même tout petit, souvent plus petit que les écolos indépendants de Wächter et Lalanne... Le NPA a sans doute bénéficié à la fois du vote ouvrier et des classes moyennes mais à petite échelle, néanmoins il s'en sort pas mal. Si on additionne LO + NPA on fait sans doute un peu plus que LO-LCR aux dernières élections européennes
Voila, on n'est pas dans une période pré-révolutionnaire, ou en tout cas il n'y a rien qui l'indique, mais pas de quoi désespérer non plus. On est toujours là, tout petits, mais si on réussit à s'implanter et à gagner la confiance de nombreux travailleurs, alors tout pourra être possible. En espérant que le NPA ne soit pas tenté de devenir un parti écolo bis (y'en n'a pas besoin, laissez ça à Francis Lalanne), et que LO ne soit pas tentée par le repli sectaire, bien sûr...