(artza @ dimanche 12 octobre 2008 à 09:26 a écrit : Si tu as un peu de temps Vérié pourrais-tu nous faire un petit tour d'horizon des partis, groupements politiques, syndicats ouvriers et paysans de Bolivie.
D'avance merci
Voici en gros ce que je sais ( des forumeurs pourront peut-être complèter)
Syndicats :
-La COB Centrale ouvrière bolivienne.
Confédération syndicale historique structurée nationalement, dont le bastion reste toujours la FSTMB, fédération des mineurs, en dépit de la chute considérable du nombre de mineurs depuis la grande époque de la révolution de 1952. Les enseignants représentent l'autre composante importante de la COB
Les COR sont les centrales ouvrières régionales. Mais elles sont souvent "interclassistes", c'est à dire qu'elles regroupent aussi bien, à El Alto par exemple, des ouvriers salariés que des artisans et des commerçants (mais dans les "commerçants", on compte les vendeurs des rues...
La COB est dirigée par Jaime Solares, affreux bureaucrate, qui disait préférer un chef militaire énergique du genre de Chavez à Morales, lors des élections. Solares vient toutefois de signer un "pacte de défense de la démocratie" avec Morales... sans consulter sa base qui proteste contre ce pacte et l’abandon des revendications sur les retraites, La FSTMB et notamment la COR de la région d’Oruro sont très critiques.
-Les syndicats étudiants. Certains se rattachent à la COB, d'autres sont tenus par des corporatistes et meme par les Civiques et les fascistes dans les grandes villes de l'Oriente où ils ont participé aux attaques contre les institutions publiques.
-La CSUTCB confédération unitaire des travailleurs paysans de Bolivie, fondée en 1979 sur le modèle de la COB. Elle a connu une scission en 2003, sous l’influence du MAS. Il y a donc désormais deux CSUTCB :
-Une dirigée par des membres du MAS
-Une dirigée par Quispe, leader indigéniste du MIP (voir plus loin)
Globalement, la CSUTCB est passée – ses deux composantes - d’un discours de classe à un discours indigéniste. Ses dirigeants se plaignaient notamment d’être sous représentés dans la COB qui, statutairement, accorde un rôle dirigeant aux fédérations ouvrières, en premier lieu à celle des mineurs.
-La FCCC Fédération des cultivateurs de coca, les fameux cocaleros du Chiapare, dont Morales était le chef. (Il dirige toujours officiellement plusieurs fédérations). Parmi ces cocaleros, on compte pas mal d’anciens mineurs licenciés qui ont apporté leurs traditions et méthodes de lutte. C’est la force de frappe de Morales.
-Il y a d’innombrables autres organisations paysannes locales, souvent indigénistes sur une base régionale-semi tribale et des organisations cathos dirigées par des prêtres avec l’aide de coopérants-missionnaires étrangers, comme la CIOEC qui affirme regrouper 20 000 familles dans 70 regroupements.
-La FEJUVE. La fédération des comités de quartiers de El Alto, la plus forte concentration prolétarienne de Bolivie (750 000 habitants, avec de très nombreuses entreprises dont certaines de 2000 salariés – textile, cuir, pharmaceutique etc) La FEJUVE est interclassiste puisqu’elle rassemble aussi bien des salariés que des commerçants et artisans.
La FEJUVE est dirigée par la famille Mamani, dont le chef Abel Mamani, surnommé le « petit roi » a été nommé ministre de l’eau par Morales. (Morales donne systèmatiquement des places aux chefs syndicaux). Mamani est très contesté au sein de la FEJUVE, ce qui a entrainé diverses scissions, mais le clan Mamani reste puissant.
A El Alto, la FEJUVE est en concurrence avec la COR qui est elle-aussi interclassiste.
-Les fédérations corporatistes, par exemple celle des « gremiales » (petits artisans et commerçants souvent très pauvres) et celle des transporteurs, propriétaires de minibus, de « collectivos » (taxis collectifs) etc.
La Bolivie est un pays où tout le monde est organisé. Par exemple, les vendeurs de billets de loterie sur les trottoirs ont leur syndicat. Lors d’une grève, tous les vendeurs avaient des panneaux manuscrits et des tracts explicatifs à coté d’eux, à tous les coins de rue de La Paz. Aussi étonnant qu’impressionnant !
-La fédération des coopératives minières : les « coopérativistes ». Ca regroupe aussi bien de véritables coopératives que des coopératives qui sont devenues de fait des entreprises privées avec des capitaux d’origine diverses, des joint-venture avec des trusts étrangers etc. Le problème est que les « coopérativistes » mineurs sont assez souvent manipulés par leurs « patrons » contre les mineurs du secteur public. On l’a vu par exemple lors de l’affrontement.
sanglant de Huanuni. Mais les coopérativistes sont aussi très hostiles aux oligarques de l’Oriente car les coopératives voudraient bénéficier de la manne des hydrocarbures pour se développer.
Partis
Gauche
-Le MAS – Mouvement vers le socialiste – créé dans les années 1990. Ce n’est pas un parti proprement dit, mais une fédération de « mouvements sociaux », ça va des cocaleros au gremiales en passant par la CSTUCB-MAS et les coopérativistes. La COB n’en fait pas partie, mais envoie des représentants aux assemblées. J’ignore comment les candidats aux élections locales et nationales ont été désignés par le MAS. Toujours est-il que le MAS est déjà très corrompu.
Le terme « socialiste » n’a aucune signification particulière. Le MAS a en fait hérité du sigle d’une scission de la Phalange socialiste – nationaliste de droite, voire d’extrême droite qui n’avait évidemment rien de socialiste.
-Le PC bolivien, très faible mais encore présent parmi les cadres syndicaux, mineurs, enseignants et certaines entreprises. Très nationaliste et très suiviste vis à vis de Morales. Le ministre de l’enseignement, ancien dirigeant de la COB enseignants, appartient au PC. Pour avoir une idée de la politique du PCB : ce parti a critiqué les positions de la COB sur les retraites et les a renvoyé dos à dos avec… les oligarques. Le PCB a meme prétendu que les grèves de mineurs et d’enseignants opposées à Morales s’expliquaient par l’infiltration d’agents nord-américains dans ces syndicats !
-Le POR – le Partit ouvrier révolutionnaire, le plus ancien parti trotskyste, qui a mené une politique suiviste vis à vis de la bureaucratie syndicale de la COB après la révolution de 1952.
Aujourd’hui, le POR n’est plus que l’ombre de qu’il a été. Il ne compte quelques dizaines de militants, mais intervient chez les enseignants (une dirigeante très connue à El Alto, qui avait
Eté emprisonnée sous Goni), les étudiants et a des contacts chez les mineurs.
-La LOR-CI. Née en 1999 de la fusion d’une scission du POR et d’un groupe de Morénistes.
Critique le POR pour sa politique dans les années cinquante, son adaptation à la bureaucratie syndicale et son manque d’intérêt pour la politique mondiale. Il l’accuse de « national trotskysme » (sic). En pratique, la LOR-CI et le POR se distinguent par leur attitude vis à vis des assemblées populaires locales, que le POR présente fréquemment comme des « embryons de soviets », alors que la LOR-CI est beaucoup plus critique et prudente sur ce point.
La LOR-CI ne compte aussi que quelques dizaines de militants. Elle intervient parmi les enseignants, les étudiants et plusieurs entreprises de El Alto, dont les services de l’aéroport où travaille un de ses dirigeants. Pas chez les mineurs, d’après la lecture de sa presse : le quinzomadaire Palabra Obrera. La LOR-CI appartient au courant dont fait partie le CRI en France, qui publie d’ailleurs certains de ses textes.
-Le POR comme la LOR-CI préconisent l’organisation de comité d’autodéfense ouvriers et populaires sur des bases de classe contre la menace fasciste. Certains de ces comités semblent regrouper des jeunes en différentes villes : El Alto, Cochabamba, Plan 3000. D’autres mini groupes trotskystes y participent.
-D’autres organisations trotskystes plus petites interviennent surtout parmi les étudiants, dont la LIT, émanation du MST argentin qui a pour politique d’envoyer des groupes de militants essaimer dans les autres pays d’Amérique latine.
Indigénistes
-MIP. Mouvement indigène Pachacuti. (De Pachacutec, célèbre empereur inca). Dirigé par Felipe Quispe, qui s’est pris une veste aux élections. Sscission du MRTK.
-MRTK Mouvement Révolutionnaire Tupac Katari (du nom du chef de la révolte contre les espagnols au 18ème siècle.) Ce parti s’est complètement déconsidéré quand son chef historique, Victor Hugo Cardenas – un prof de fac – a accepté de servir de potiche comme Vice-président de Gonzalo Sanchez de Lozada, le sinistre Goni, en échange de… l’adoption du drapeau indien aymara dans les manifestations officielles !
Droite
Les partis de droite ont éclaté et sont très nombreux.
-Podemos. Le plus important actuellement. Centrte droit.
-ADN parti de l’ex dictateur Banzer, auquel appartient le prefet assassin Ferndandez.
-Union nationale
-MIR. Rien à voir avec le MIR chilien meme si ce fut à l’origine un parti guérillériste. C’est aujourd’hui un parti de droite réputé pour sa corruption (plusieurs scandales.)
Une des caractéristiques de la Bolivie, c’est que de très nombreux « militants » ex-gauchistes, ex-PC ex guérilléristes se sont reconvertis dans des partis de droite.