baisse du taux de profit

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Jacquemart » 04 Août 2008, 23:21

Euh... Que répondre, sinon :
(Je m'autocite moi%même et c'est bon a écrit :La question n'est pas de savoir si l'outillage a augmenté en masse (d'ailleurs, comment comparer douze robots à un laminoir "en masse" ?) mais de savoir s'il a augmenté en coût par heure de travail vivant qui l'emploie. Or, quand la productivité augmente, la valeur du capital baisse (toutes choses égales par ailleurs).
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Message par Vérié » 05 Août 2008, 09:29

(Puig Antich @ lundi 4 août 2008 à 21:37 a écrit :
a écrit :Ah ? Tous les chiffres que je connais sont très loin d'indiquer une telle tendance. Peut-être en as-tu d'autres ?


Peut-être à l'échelle globale as tu raison, mais si on regarde une usine moderne d'aujourd'hui et une usine à l'épôque où les OS était le pôle de référence de la classe ouvrière en France, on voit clairement que la mécanisation a augmenté, réduisant en tendance le rôle des hommes à la simple surveillance et maintenance des robots qui produisent - après bien sûr avoir été produit par des hommes.
A l'échelle mondiale, il me semble en effet qu'on a assisté à une augmentation considérable du "travail vivant", avec l'industrialisation de la Chine notamment, où la composition organique du capital est sans aucun doute beaucoup plus faible qu'en Europe ou aux Etats-unis. Par exemple dans les mines de charbon encore peu mécanisées.

Cette prolétarisation de dizaines de millions de personnes contribue certainement à compenser cette fameuse baisse tendancielle du taux de profit. D'autant qu'une proportion importante de la plus value réalisée en Chine, e Inde, au Brésil etc est accaparée par des capitalistes des pays impérialistes. On peut d'ailleurs penser que le jour où le prolétariat chinois se mettra en branle, le capitalisme va se trouver en difficultés.

Cela-dit, calculer la "moyenne" de l'volution de la composition organique du capital à l'échelle mondiale semble très difficile. Existe-t-il des études sérieuses sur ce sujet ? :33:
__

Une question à Jacquemard : qu'est-ce qui te fait dire que le fordisme a permis de diminuer la composition organique du capital ? Le fordisme ne s'est-il pas accompagné d'un progrès de la mécanisation ?
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Message par sylvestre » 05 Août 2008, 10:07

Je trouve étrange que personne n'ait encore cité de chiffres. On peut se battre à coup de "non, c'est pas vrai, y'a qu'à voir les chiffres" de part et d'autre, mais sans en citer, on ne vas pas avancer.

Ici on trouve ça :

Capital fixe par emploi en France. (P.Villa)



Ici on trouve ça



Peut-être que dans un premier temps la délocalisation dans des pays à faible coût de main d'oeuvre permet de diminuer la composition organique du capital, mais cela ne fait que faire repartir la tendance de plus bas - et je ne suis même pas bien sûr de l'étendue du phénomène de désindustrialisation du processus dont parle Canardos : on a en Chine plutôt un exemple de développement inégal et combiné faisant que les moyens de production y sont beaucoup plus perfectionnés que dans beaucoup d'usines européennes. En tous cas en Chine, la composition organique du capital monte :

a écrit :Entre 1980 et 2003, le capital global de la Chine a augmenté de 11,3 % par an en moyenne, soit beaucoup plu srapidement que la croissance moyenne annuelle de 1,6 % de la main d'œuvre"


(Lavina, Editha, and Emma Xiaoqin Fan, 2008, “Diverging Patterns of Profitability, Investment and Growth in China and India during 1980-2003”, World Development, volume 36, number 5., cité par Chris Harman)
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Message par Vérié » 05 Août 2008, 10:25

(sylvestre @ mardi 5 août 2008 à 11:07 a écrit :
a écrit :Entre 1980 et 2003, le capital global de la Chine a augmenté de 11,3 % par an en moyenne, soit beaucoup plu srapidement que la croissance moyenne annuelle de 1,6 % de la main d'œuvre"



Que le pourcentage de capital fixe monte aussi en Chine, ça ne peut pas faire de doute, puisqu'une partie de l'économie est passée de l'industrie de main d'oeuvre, sous-traitanteetc à une industrie comparable à celle des pays occidentaux, voire une industrie de pointe dans certains domaine. (Avec une part de capital fixe encore plus forte, en raison du développement inégal et combiné comme tu le soulignes à juste titre.)

Mais il faudrait être en mesure de comparer la moyenne de cette composition organique et son impact sur la moyenne de la composition organique du capital à l'échelle mondiale.

Alors, bien sûr, cette tendance à l'augmentation du % de capital fixe en Chine (comme partout) tend à réduire l'impact "positif" du développement du capitalisme en Chine pour le capitalisme mondial. Mais ce n'est qu'une tendance générale, avec des contre-tendance, et il faudrait être en mesure de savoir où on en est sur ce plan, ce qui ne semble pas facile. A moins que tu aies aussi trouvé des chiffres fiables sur cet aspect ?
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Message par Puig Antich » 05 Août 2008, 10:28

Donc pour résumer, si on regarde les chiffres - pour autant qu'ils sont justes -, Jacquemart a raison pour le fordisme (sans pourtant qu'on puisse parler de diminution véritable), autant il a tort pour la période actuelle, et effectivement le "toyotisme" correspond à une augmentation vertigineuse de la composition organique.
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Message par piter » 05 Août 2008, 10:42

d'une part il me semble que Marx dit bien que la baisse du taux de profit (du fait effectivement de l'évolution de la composition organique du capital) est généralement compensé (c'est à dire dans le cadre du fonctionnement "normal"), par l'augmentation de la quantité de capital qui est valorisé, en gros le capital est moins valorisé mais comme il augmente en quantité, meme si le taux de profit diminue, la quantité de profit, elle, augmente.
si je n'ait pas été clair assaillez moi...

d'autre part je ne dirais pas que la chute tendencielle du taux de profit est pour Marx (peut etre pour certains marxiste par contre) la limite du développement capitaliste.

pour Marx la limite du développement capitaliste c'est la classe ouvrière.

(le capital est un rapport antagoniste entre des classe et c'est dans le cadre de ces rapports antagonistes que doit etre saisi la chute tendancielle du taux de profit, de meme que l'augmentation de la composition organique du capital qui n'est pas seulement issue de la concurrence entre capitalistes mais aussi et peut etre surtout est un résultat de la résistance de la classe ouvrière à l'exploitation. rapport entre classes, entre le travail mort et le travail vivant, etc...si cette chute tendencielle du taux de profit est une loi, c'est alors une loi qui relève de la lutte des classes, comme toute les soi-disant "lois" capitalistes d'ailleurs...c'est dans un sens bien particulier que Marx parle de "lois" capitalistes).
voilà pour l'irruption "opéraiste/autonomiste"...qui était peut etre bien nécessaire...(allez donc voir tout ça chez Tronti, Negri (les vieux), Cleaver et M.A.Lebowitz)
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Message par Vérié » 05 Août 2008, 10:42

(Puig Antich @ mardi 5 août 2008 à 11:28 a écrit : Donc pour résumer, si on regarde les chiffres - pour autant qu'ils sont justes -, Jacquemart a raison pour le fordisme (sans pourtant qu'on puisse parler de diminution véritable), autant il a tort pour la période actuelle, et effectivement le "toyotisme" correspond à une augmentation vertigineuse de la composition organique.
Où vois-tu dans les chiffres présentés des éléments permettant d'affirmer que le fordisme aurait fait baisser la composition organique du capital ? :33:

Aucun de ces graphiques ne concerne la période d'introduction du fordisme et tous ces graphiques font apparaître une augmentation continue du pourcentage de capital fixe, avec seulement un léger recul et un palier en France pendant la période de la deuxième guerre mondiale, ce qui est facilement compréhensible.
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Message par Puig Antich » 05 Août 2008, 10:45

Oui, relis ma phrase. On ne peut pas parler de diminution, et même il y a augmentation continue, contrairement à ce que disait Jacquemart, néanmoins l'augmentation est lente, stagnante, et cela confirme ce qu'il disait sur le fait que la méthode fordiste permettait aux capitalistes de combattre cette tendance.

Par ailleurs, un peu plus haut je disais :
a écrit :Le fordisme est un exemple intéressant pour illustrer les contre-tendances. Mais, même si ce que tu dis est dans une grande mesure juste, on ne peut quand même pas dire que la période qui lui correspond n'a pas vu augmenter la composition organique, si on réfléchit à l'échelle de la production en entier - ou alors il faut des chiffres.



En tous cas le marxisme orthodoxe sort encore une fois victorieux de l'épreuve des faits et les tableaux nous annoncent, comme la réalité, la crise capitaliste qui vient.
Puig Antich
 
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Message par Vérié » 05 Août 2008, 11:02

(Puig Antich @ mardi 5 août 2008 à 11:45 a écrit : En tous cas le marxisme orthodoxe sort encore une fois victorieux de l'épreuve des faits et les tableaux nous annoncent, comme la réalité, la crise capitaliste qui vient.

Que le marxisme représente la meilleure méthode pour comprendre le système capitaliste, je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus.

En revanche, je ne crois pas que la baisse tendancielle du taux de profit permette de prévoir LA crise. Le capitalisme connait régulièrement des crises plus ou moins importantes et les surmonte pour le moment.

L'explosion d'une crise de nature à ébranler le système (dans le sens où tu l'entends, je suppose), dépend de nombreux autres facteurs. Ce n'est pas une conséquence mécanique de la modification de la composition organique du capital.

En particulier, tant que les exploités acceptent de subir les effets de la crise, acceptent l'augmentation du taux d'exploitation, le chomage etc, le capitalisme s'en sort.

Par exemple, selon les derniers chiffres, ce seraient trois millions de ménages américains qui perdraient leur maison achetée à crédit en raison de la crise des subprimes. Et pourtant les protestations sont faibles (il y a eu quelques manifs, j'ai vue des photos, mais j'ignore leur ampleur). Mais trois mllions de ménages ruinés, c'est monstrueux, et il n'y a pas de réaction à l'échelle de ce drame.

C'est pourquoi, il me semble que le réveil du prolétariat chinois, dont la surexploitation, permet de fournir les pays riches en produits courants à bas prix, pourrait aggraver la crise. Mais ce n'est évidemment qu'une hypothèse.

__
Piter s'était exprimé avant moi, je ne l'avais pas lu. Entièrement d'accord avec son post.
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Message par sylvestre » 05 Août 2008, 11:04

Il y a souvent un problème dans ce genre de discussion, c'est d'une part la simplification de l'analyse de Marx qui inclut des tas de facteurs complexes (évolution de la population, inclusion plus ou moins grande de la population laborieuse dans la classe ouvrière - diminution de la petite-bourgeoisie - impact de la productivité dans différents secteurs - productions de moyens de production, de moyens de consommation), consommation improductive...)

D'autre part, la tendance à la baisse du taux de profit est évidemment un problème pour le capitalisme ! "le taux d'auto-expansion de capitalisme, ou le taux de profit, étant l'aiguillon de la production capitaliste, (...) sa baisse (…) apparaît comme une menace pour le processus de production capitaliste ». (Le Capital, III)

Comment le capitalisme résout-il ce problème ? Par divers moyens, mais qui tous connaissent des limites : limites de l'expansion du capitalisme à des territoires ou des secteurs qui ne l'étaient pas encore, limites dûs à la capacité des travailleurs à résister à l'augmentation de leur exploitation, ou tout simplement limites du minimum requis pour reproduire la force de travail, enfin faux moyens qui ne font que retarder la crise et la rendre plus cataclysmique: bulles spéculatives, etc.

Mais le moyen principal pour rétablir le taux de profit c'est précisément la crise, et plus généralement la destruction de capital (la guerre étant un autre moyen pour ce faire).

Un article utile sur le taux de profit et le monde d'aujourd'hui
sylvestre
 
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