Défense de la psychanalyse

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par Cyrano » 14 Jan 2005, 22:53

Je lis votre discussion, canardos et iko, et je suis dubitatif…
Par sur ton dernier message, iko, sur les quelques messages précédents...
Dans un bouquin : "La question de l'analyse profane" (parue en 1926), Freud énumère en 2 pages des raisons qui feront qu'on se dira : «Je ne vais pas bien, je vais aller voir un médecin.», puis celui-ci vous aiguillera vers… un psychanalyste.
Lorsque on lit ces raisons, je trouve qu'on est loin du psychotique incurable… Où trouve-t-on d'ailleurs des prétentions de Feud à guérir ce qui relève de la psychiatrie ? Ça doit bien être affirmé quelque part ?
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Donc, tiré du bouquin mentionné, les raisons, selon Freud, pour lesquelles on pourrait aller voir un psychanalyste :
Un individu «peut souffrir de changements d'humeur dont il n'est pas le maître»; ou il peut se sentir pris par un abattement, se retrouver sans courage pour faire des choses, «ne se croyant capable de rien de bon».
Il peut éprouver «une gêne anxieuse devant des étrangers.»; ou alors, il perçoit, «sans se l'expliquer», que l'accomplissement des tâches professionnelles fait difficulté, «comme aussi toute décision un peu sérieuse ou toute entreprise.»
Une personne peut avoir été un jour, «sans savoir d'où cela venait», assailli par des sentiments d'angoisse et elle ne peut qu'en se forçant traverser seule la rue ou voyager en chemin de fer, peut-être même y renoncer. Ou alors, on constate que «les pensées vont leur propre chemin» et ne se laissent pas guider par notre volonté. Nos pensées s'attachent à des problèmes qui nous sont indifférents mais dont on ne peut pas se libérer. Des tâches du plus haut ridicule s'imposent également à nous (dénombrer les fenêtres aux façades des maisons); les gestes les plus simples (mettre une lettre à la boîte, éteindre la flamme du gaz) deviennent compliqués, on doute même «l'instant d'après, de les avoir véritablement accomplis
Les angoisses peuvent être plus morbides, accompagnées de sentiments de culpabilité : on ne peut se défendre de l'idée qu'on a poussé un enfant sous les roues d'une voiture, précipité un inconnu dans l'eau du haut d'un pont, etc.
Ou bien encore, ça peut être une femme pianiste «mais ses doigts se crispent et refusent tout service.»; et rien qu'à l'idée d'aller en société «il se manifeste aussitôt en elle un besoin naturel dont la satisfaction serait incompatible avec la vie sociale.» On rajoute des migraines, des vomissements, et une hyper-émotivité qui lui fait perdre connaissance.
Et enfin, ça peut être des hommes qui «se sentent incapables de donner une expression corporelle aux émois les plus tendres que leur inspire l'autre sexe, alors que toutes ces réactions sont à leur disposition en présence d'objets peu aimés.»; ou bien des personnes dont «la sensualité les attache à des personnes qu'ils méprisent et dont ils voudraient se libérer.»; Des femmes peuvent se sentir empêchées «par l'angoisse et le dégoût ou par des obstacles inconnus, d'obéir aux impératifs de la vie sexuelle»
Dans cette liste, on ne trouve pas de psychotiques de chez psychotique, de déments de chez dément.
«Toutes ces personnes se reconnaissent comme malades et vont consulter des médecins, ceux justement dont on attend la délivrance de tels troubles nerveux. Les médecins établissent bel et bien les catégories sous lesquelles ranger ces maux. Selon leurs points de vue, ils les diagnostiquent sous des noms divers : neurasthénie, psychasthénie, phobies, névrose obsessionnelle, hystérie. Ils examinent les organes d'où proviennent les symptômes : le cœur, l'estomac, l'intestin, les organes génitaux, et les trouvent sains. Ils conseillent des interruptions du mode habituel de vie, des distractions, des pratiques fortifiantes, des médicaments tonifiants, parviennent ainsi à des soulagements passagers – ou aussi à rien du tout. Enfin, les malades entendent dire qu'il existe des personnes qui s'occupent tout spécialement de traiter ces maux et ils entrent en analyse
Sigmund Freud, "La question de l'analyse profane" (paru en 1926), Gallimard.
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La discussion sur psychotiques, autistes, me fait penser à ce qu'écrivait Eric Berne en assitant à un congrès de psy machin-truc :
« Se pourrait-il qu’on s’occupe de psychiatrie parce qu’on n’a pas grand chose à y faire, si ce n’est d’organiser des discussions de cas où il s’agit d’expliquer pourquoi on ne sait pas faire grand chose ? »
Eric Berne. Discours du 28 juin 1970 (deux semaines avant sa mort).
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Je ne sais que quelques trucs sur la psychanlayse, mais je croyais avoir compris que la parole était l'ément primordial de l'analyse. Mais si c'est bien ce que j'ai compris, alors ça exclut de l'analyse les personnes qui, momentanément ou de façon permanente, ne peuvent assumer un discours un minimum rationnel.
« Le traitement psychanalytique ne comporte qu'un échange de paroles entre l'analysé et Ie médecin. Le patient parle, raconte les événements de sa vie passée et ses impressions présentes, se plaint, confesse ses désirs et ses émotions. Le médecin s'applique à diriger la marche des idées du patient, éveille ses souvenirs, oriente son attention dans certaines directions, lui donne des explications et observe les réactions de compréhension ou d'incompréhension qu'il provoque ainsi chez le malade. »
Sigmund Freud, "Introduction à la psychanalyse" (rédigé en 1916), Pettie Bibliothèque Payot.

Cyrano
 
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Message par Cyrano » 14 Jan 2005, 23:01

Dans le bouquin que je cite dans mon message précédent "La question de l'analyse profane", je remarque qu'il est question justement de la simplicité…
Alors, une remarque pour caupo.
caupo, tu écris : « Ce qu'on ne peut pas rester simple, par la simple raison que le problème est complexe. toute science nouvelle créé ses "ismes" »
Mouaih…, OK, admettons, mouaih… Et puis, non, n'admettons pas, puisque tu rajoutes : « La prose de Freud est relativement simple ».
Alors, soyons relativement simple, bon sang !
Sur le site pseudo-medecines.org, les auteurs opposent à la psychanalyse de nouvelles psychothérapies :
« Elles [ces nouvelles psychothérapies] considèrent comme illusoire la guérison par un retour au passé et aux supposées origines inconscientes et psychogénétiques des troubles. D'ailleurs la plupart de ces techniques sont le fait d'anciens psychanalystes qui, constatant leur impuissance, ont cherché à agir efficacement "ici et maintenant ". On peut citer Albert Ellis, Aaron Beck, Frederich Perls, Eric Berne et bien d'autres. »
Eric Berne, mentionné ici, écrivait :
« Les mots simples peuvent exprimer ce que nous savons de l'esprit humain avec plus de concision, de force et de clarté que les mots savants. La terminologie de Freud a été utilisée abusivement dans un but que Freud aurait critiqué : pour obscurcir les faits. »
(Eric Berne “Que dites-vous après avoir dit bonjour ?” Tchou)
Justement, Freud s'exprimait ainsi sur la clarté :
« Vous contesterez sans doute que pour désigner ces deux instances ou provinces psychiques nous ayons choisi deux simples pronoms au lieu d'introduire pour elles des noms grecs bien sonnants. Mais nous aimons en psychanalyse rester en contact avec la pensée populaire dont nous préférons rendre les notions utilisables pour la science plutôt que de les rejeter. Nous n'en avons aucun mérite, nous ne pouvons pas procéder autrement, parce que nos doctrines doivent être comprises par nos patients qui sont souvent très intelligents, mais pas toujours savants. »
Sigmund Freud, "La question de l'analyse profane" (parue en 1926), Gallimard.
Contrairement à ce que tu écris, je ne crois pas qu'on doive forcément accepter les sentences alambiquées du verbiage psychanalyste – qui n'est pas loin, parfois, de s'apparenter à un "terrorisme" intellectuel. Et Jacques Lacan qui prônait un « retour à Freud » eut été bien inspiré d'inclure dans ce retour la clarté et la simplicité.
Cyrano
 
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Message par Cyrano » 14 Jan 2005, 23:08

En ce moment, que vois je sur ce fil?!
4, pas 5, mais 4 membres: canardos, iko, caupo, cyrano....
Cyrano
 
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Message par Cyrano » 15 Jan 2005, 09:00

Caupo :
« on arrive mieux à comprendre les motivations des individus avec la techinque pasychanalytique qu'avec n'importe quel autre outil. Ca devient même fastidieux à la fin, ce n'est pas que les gens sont transparents; mais pour tous ce qui savent plus ou moins lire, les gestes et paroles des gens "parlent"»
Caupo, en lisant ton message, je ne peux m'empêcher de te citer Sigmund lui-même :
« Chacun a sa vie psychique, c'est pourquoi chacun se tient pour un psychologue. Cela ne me semble pourtant pas être un titre suffisant » (Sigmund Freud)
Y'en a aussi qui trouvent qu'on comprend mieux les gens et les relations qu'ils entretiennent en connaissant leur signe astrologique.
« Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l'œil de ton frère, et n'aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil ?
Ou comment peux-tu dire à ton frère : "Frère, laisse-moi ôter la paille qui est dans ton œil !", toi qui ne vois pas la poutre qui est dans le tien ? Hypocrite, ôte premièrement la poutre de ton œil, et alors tu verras comment ôter la paille qui est dans l'œil de ton frère.
» (Évangile selon Saint Luc. VI, 41-42.)
On pourrait tout aussi bien dire qu'en "psychologisant" le moment relationnel avec une personne, on en dit plus sur soi-même que sur l'autre. Ça, oui, ça peut être fastidieux, et ce n'est peut être qu'une illusion d'optique.
Je ne comprends pas pourquoi les psy-machins, ou les psy-trucs auraient besoin de plusieurs séances pour affûter le profil caractériel d'une personne, et que nous, quidam, hop, au débotté, on sentirait tout de suite de quoi il s'agit. Ou alors, on ressent tout bonnement, comme le ressenti usuel de tout un chacun devant une autre personne, mais on l'habille avec les vêtements chamarrés de la psychanalyse.
Oui, c'est fastidieux : « la techinque pasychanalytique »… alors pas si analytique que ça ?
Cyrano
 
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Message par Cyrano » 15 Jan 2005, 09:14

caupo toujours :
« Il y a deux trucs la dessus: la connaissance même de la psychanalyse, et cela est relativement long parce qu'il y a non seulement un chapitre théorique assez vaste (les analystes sont les champions toutes catégories de l'écriture) mais aussi une histoire de la psychanalyse. »
OK, oui, on ne connaît pas vraiment une science si on n'en connaît pas l'histoire (Qui a dit ça ? Kant ? ou Engels ? Ou Kant cité par Engels ? ou qui ? Si y'en a une ou un qui veut se la péter, surtout ne pas hésiter à me dire qui a écrit ça, je ne crois pas l'avoir rêvé.)
Mais je trouve qu'il ne faudrait pas confondre le "chapitre théorique" avec la diarrhée théorique. Les psychanalystes sont vraisemblablement des champions de l'écriture…

Michel Rouzé dans la présentation d'un livre de Jacques Van Rillaer, "Les Illusions de la Psychanalyse" (Pierre Mardaga, éditeur) nous parle de Mélanie Klein…
« Mélanie Klein, spécialiste de l'enfance, que certains psychanalystes vénèrent presque à l'égal de Freud, attribue les difficultés dont souffrent quelques écoliers au fait qu'ils hésitent à tracer la lettre i, qui pour eux représenterait le pénis. Du psychisme des bébés, elle donne cette analyse magistrale :
"Le sadisme atteint son point culminant au cours de la phase qui débute avec le désir sadique-oral de dévorer le sein de la mère (ou la mère elle-même) et qui s'achève à l'avènement du premier stade anal. Pendant cette période, le but principal du sujet est de s'approprier les contenus du corps de la mère et de détruire celle-ci avec toutes les armes dont le sadisme dispose. A l'intérieur du corps de la mère, l'enfant s'attend à trouver le pénis du père, des excréments et des enfants, tous ces éléments étant assimilés à des substances comestibles... Les excréments sont transformés dans les fantasmes en armes dangereuses : uriner équivaut à découper, poignarder, brûler, noyer, tandis que les matières fécales sont assimilées à des armes ou à des projectiles."
Eh oui ! tout cela se passe, voudrait-on nous faire croire, dans la tête d'un bébé de moins de deux ans !
»

Eh bien, je vais le dire, sans jeu de mots, comme je le ressens : un "chapitre théorique" comme ça, c'est de la merde. Evidemment, alors, on peut caguer des bouquins entiers en imaginant n'importe quoi, en balançant des assertions qu'on devrait prendre comme si c'était gravé dans les cieux. Y'a qu'à voir le rayon psychanalyse dans une librairire... Ça croule sous les titres... Chacun, chacune peut broder à son aise... Ça ressemble à un jeu d'intervilles, avec des règles tarabiscotées inventées par Guy Lux.


Cyrano
 
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Message par Cyrano » 15 Jan 2005, 09:21

Caupo :
« la psychanalyse a été accusé de "séductrice" parce qu'elle propose une explication des phénomènes psychologiques très cohérente et qui "ouvre les yeux" litérallement. »
« on arrive mieux à comprendre les motivations des individus avec la techinque pasychanalytique qu'avec n'importe quel autre outil. Ca devient même fastidieux à la fin, ce n'est pas que les gens sont transparents; mais pour tous ce qui savent plus ou moins lire, les gestes et paroles des gens "parlent"»
Faut-il connaître pour reconnaître ?
Oui, moi aussi, j'ai été séduit, mais c'était dans une vie antérieure, y'a prescription…
Je ne sais pas qui a accusé la psychanalyse et ses explications délirantes caca-boudin d'être séductrice ? Mouih… les surréalistes, mouih… justement, littéralement, en littérature…
Mais d'autres pensent qu'elle ne fournit pas d'explication cohérente de la construction de notre personnalité… Un thème astral est aussi cohérent que certains bidouillages psychanalystes.
Armé du "chapitre théorique" de la psychanalyse, on peut proposer une explication qui semble cohérente… mais on peut tout aussi bien, sur cette base du "chapitre théorique" bricoler une autre explication, tout aussi cohérente… Avec les méridiens de la médecine chinoise, on peut même aussi bricoler une autre explication.
C'est exactement le p'tit curé, dans le film "Ridicule" qui bla-blate devant Louis XVI une démonstration de l'existence de Dieu. Les autres : ah ! bouche bée ! et le p'tit curé (Bernard Giraudeau) dit qu'il pourra tout aussi bien démontrer la non-existence de Dieu…
Comprendre quoi d'ailleurs ?! Si c'était aussi transparent, je ne vois pas ce que foutent les gens pendant 5 ans d'analyse, voire même 10 ans…

Je suis (en grande partie) en accord avec canardos, mais totalement sur : « La psychanalyse doit évoluer. »
Et en fait, je préfère parler plutôt de "freudisme" que de la psychanalyse, car je ne confonds pas Freud, Reich, etc. avec les héritiers terroristes.
Cyrano
 
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Message par Cyrano » 15 Jan 2005, 10:27

Je suis globalement en accord avec ce qu'écrit canardos dans son message du 15 janvier 2005 à 00:12…
Donc, y'a bien une programmation de l'enfant, cette programmation allant en partie être reléguée dans l'inconscient. Les neuro-sciences n'ont rien à dire la dessus, pour le moment.
a écrit :Ecrit par: rojo mercredi 9 juin 2004 à 15:52
Je ne crois pas beaucoup m'avancer en disant que l'existence de l'inconscient n'a jamais été prouvée scientifiquement.

Ça voudrait dire quoi, rojo, prouver "scientifiquement" l'existence de l'inconscient ?
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