Forces productives et société

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Louis » 05 Jan 2003, 12:07

gipsy : je suis relativement (parce qu'il y a TOUJOURS des points de désacords n'est ce pas) d'accord avec cette partie (héhé) des résolution du congrès Maintenant, que l'économie capitaliste ne soit pas un long fleuve tranquille et que les soubresauts de celle ci se fasse aux prix de millions de morts (entre autre "mort de faim", mort de maladie, mort de guerres) du sang et des larmes, pour moi c'est évident !
Cela ne veux pas dire qu'il n'y a plus de possibilité dans une économie capitaliste d'accroissement possible des forces productives. Ni que l'incapacité de la bourgeoisie a passer un certain seuil qualitatif dans l'accumulation (qui pour moi n'est possible que dans une économie socialiste) ne soit visible de larges masses.
Maintenant Pelon, nous sommes d'accord sur la nécessité de construire des directions révolutionnaires communistes et pas du tout d'accord sur la façon d'y arriver. Et je me posais la question si la discordances entre les conditions objectives et subjective n'avaient pas pour origine une appréciation fausse de cette question d'accumulation Moi, je n'ai pas de réponse !
Louis
 
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Message par Weltron » 09 Jan 2003, 10:50

Tout cela est intéressant ... et porteur de nouvelles questions, naturellement ! En voici déjà deux :

a écrit :Donc le moteur social du changement n'est pas l'intérêt d'une classe - fut elle majoritaire comme le prolétariat. C'est la contradiction forces productives/rapports de production.

Maintenant, c'est évidemment une contradiction qui est tranchée par une classe donnée. Ce qui est impossible sans qu'elle n'y voie un intérêt.


Effectivement, cette précision est d'importance. Maintenant, ce que je ne comprends pas, c'est quel est le véritable moteur de la transformation sociale. L'inadéquation entre forces productives et cadre social en est la condition nécessaire et l'intérêt d'une classe en est la traduction pratique. Mais (pour poser la question autrement), pourquoi la transformation elle-même (une fois les conditions réunies) doit-elle nécessairement se produire ? Pourquoi ce changement ? Pourquoi l'inadéquation doit-elle entraîner une révolution (ou en tous cas y tendre) ? Bien sûr, la réponse que je cherche est à la fois sociale et économique ...

Enfin, une autre question concernant la théorie de Marx et d'Engels. Ils la fondent sur l'analyse du passage de l'esclavage au féodalisme et du féodalisme au capitalisme. Effectivement, il y a toujours eu lutte des classes. Mais à la lecture de certaines réponses de ce thread et d'une citation de Marx lui-même, il semble que la fin de l'esclavage soit marquée par la barbarie et celle du féodalisme par la révolution. On n'a donc que deux exemples. Comment peut-on, en ce cas, en tirer une règle générale ? Peut-être la contradiction peut-elle se résoudre autrement, non ?

Je me doute bien que ce n'est pas le cas et qu'il existe des objections/réfutations théoriques à cette thèse (selon laquelle la société pourrait changer d'une troisième manière), et j'aimerais les connaître ...

Merci d'avance pour vos éclaircissements.
Weltron
 
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Message par pelon » 09 Jan 2003, 19:13

a écrit :
Effectivement, cette précision est d'importance. Maintenant, ce que je ne comprends pas, c'est quel est le véritable moteur de la transformation sociale. L'inadéquation entre forces productives et cadre social en est la condition nécessaire et l'intérêt d'une classe en est la traduction pratique. Mais (pour poser la question autrement), pourquoi la transformation elle-même (une fois les conditions réunies) doit-elle nécessairement se produire ? Pourquoi ce changement ? Pourquoi l'inadéquation doit-elle entraîner une révolution (ou en tous cas y tendre) ? Bien sûr, la réponse que je cherche est à la fois sociale et économique ...

Ce qui se produit dans ces conditions, c'est une crise qui est d'abord économique puis sociale et éventuellement politique.
On a vu des situations où les gens n'acceptaient plus la situation et manifestaient alors qu'il aurait fallu faire la révolution (Bolivie par exemple). Dans des conditions où la bourgeoisie n'a pas les moyens de donner ne serait ce que 5% de ce que les gens estiment indispensables, que se passe-t-il ? La démocratie parlementaire ne fonctionne plus, le pays est paralysé. Soit il y a un coup d'Etat, c'est ce que l'on a connu pendant des années, soit on trompe les masses en amenant au pouvoir un faux ami comme Gomulka en Pologne (1956), soit il y a une révolution.
Donc "l'inadéquation" dont tu parles ne se résoud pas forcément par la révolution, malheureusement.
On peut réfléchir à ta question à partir de la France de 1789 (il serait aussi intéressant de prendre l'exemple de février et d'octobre 17). Les gens ne se sont pas réveillés un matin en disant qu'ils allaient faire la Révolution. c'est même le roi qui a déclenché le processus en convoquant les Etats Generaux pour régler ses problèmes d'impôts. Mais :
1) Les gens n'en pouvaient plus de cette situation économique; de tous ces impôts...
2) Une partie de la population était consciente d'engraisser des parasites. Les idées des philosophes circulaient. Il n'était pas rare que dans un village, une personne en ait entendu parler.
Mais la révolution n'était pas inéluctable pour autant en tout cas sous cette forme. En Allemagne la bourgeoisie ne réglera son problème vraiment que sous Bismarck, un siècle plus tard.

Nous ce que nous disons c'est que seul le socialisme, un système ayant aboli l'exploitation de l'homme par l'homme paut régler aujourd'hui les problèmes de l'humanité. Sinon, ce sera la barbarie, "le talon de fer".
pelon
 
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Message par Louis » 09 Jan 2003, 20:50

a écrit :Il n'était pas rare que dans un village, une personne en ait entendu parler.


Cela révolutionne ma façon d'apréhender la révolution de 1789 Tu es sur de ce que tu avance, scientifique ou "c'est ta souris qui a parlé pour toi" comme trop souvent dans le web. Parce que cette question est décisive (tu t'en doutes)
Louis
 
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Message par Louis » 16 Jan 2003, 21:34

a écrit :Etant un matérialiste et par là un deterministe je pense que nécessairement il y aura transformation sociale. C'est à dire passage à la courte ou à la longue au socialisme.


donc tu critique Rosa Luxemburg pour "déviation petite bourgeoise" quand elle fait des pronostics du type "socialisme ou barbarie" Pourtant, les pronostics de rosa se sont plus souvent réalisés que ceux de Léon

Aussi :
a écrit : Jusqu'ici le capitalisme à pu résoudre toutes ses crises (mais à quel prix !), la guerre mondiale, le fascisme ... sont autant d'armes utilisés pour résoudre les contradictions.

Si tu pense que le capitalisme a élaboré "en toute connaissance de causes" le fascisme ou la guerre mondiale, je pense que tu te trompe. Je pense au contraire que ce que l'histoire a montrée, c'est que le capitalisme était incapable de controler des forces centrifuges qui résultent de sa dégenérescence
Louis
 
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Message par Louis » 17 Jan 2003, 21:16

je te donne l'extrait in extenso

a écrit :
Dans l'histoire, le socialisme est le premier mouvement populaire qui se fixe comme but, et qui soit chargé par l'histoire, de donner à l'action sociale des hommes un sens conscient, d'introduire dans l'histoire une pensée méthodique et, par là, une volonté libre. Voilà pourquoi Friedrich Engels dit que la victoire définitive du prolétariat socialiste constitue un bond qui fait passer l'humanité du règne animal au règne de la liberté. Mais ce « bond » lui-même n'est pas étranger aux lois d'airain de l'histoire, il est lié aux milliers d'échelons précédents de l'évolution, une évolution douloureuse et bien trop lente. Et ce bond ne saurait être accompli si, de l'ensemble des prémisses matérielles accumulées par l'évolution, ne jaillit pas l'étincelle de la volonté consciente de la grande masse populaire. La victoire du socialisme ne tombera pas du ciel comme fatum, cette victoire ne peut être remportée que grâce à une longue série d'affrontements entre les forces anciennes et les forces nouvelles, affrontements au cours desquels le prolétariat international fait son apprentissage sous la direction de la social-démocratie et tente de prendre en main son propre destin, de s'emparer du gouvernail de la vie sociale. Lui qui était le jouet passif de son histoire, il tente d'en devenir le pilote lucide.

Friedrich Engels a dit un jour : « La société bourgeoise est placée devant un dilemme : ou bien passage au socialisme ou rechute dans la barbarie. » Mais que signifie donc une « rechute dans la barbarie » au degré de civilisation que nous connaissons en Europe aujourd'hui ? Jusqu'ici nous avons lu ces paroles sans y réfléchir et nous les avons répétées sans en pressentir la terrible gravité. Jetons un coup d'oeil autour de nous en ce moment même, et nous comprendrons ce que signifie une rechute de la société bourgeoise dans la barbarie. Le triomphe de l'impérialisme aboutit à l'anéantissement de la civilisation - sporadiquement pendant la durée d'une guerre moderne et définitivement si la période des guerres mondiales qui débute maintenant devait se poursuivre sans entraves jusque dans ses dernières conséquences. C'est exactement ce que Friedrich Engels avait prédit, une génération avant nous, voici quarante ans. Nous sommes placés aujourd'hui devant ce choix : ou bien triomphe de l'impérialisme et décadence de toute civilisation, avec pour conséquences, comme dans la Rome antique, le dépeuplement, la désolation, la dégénérescence, un grand cimetière ; ou bien victoire du socialisme, c'est-à-dire de la lutte consciente du prolétariat international contre l'impérialisme et contre sa méthode d'action : la guerre. C'est là un dilemme de l'histoire du monde, un ou bien - ou bien encore indécis dont les plateaux balancent devant la décision du prolétariat conscient. Le prolétariat doit jeter résolument dans la balance le glaive de son combat révolutionnaire : l'avenir de la civilisation et de l'humanité en dépendent. Au cours de cette guerre, l'impérialisme a remporté la victoire. En faisant peser de tout son poids le glaive sanglant de l'assassinat des peuples, il a fait pencher la balance du côté de l'abime, de la désolation et de la honte. Tout ce fardeau de honte et de désolation ne sera contrebalancé que si, au milieu de la guerre, nous savons retirer de la guerre la leçon qu'elle contient, si le prolétariat parvient à se ressaisir et s'il cesse de jouer le rôle d'un esclave manipulé par les classes dirigeantes pour devenir le maître de son propre destin

pour etre tout a fait exact, quelque mois plus tard, rosa luxemburg au coeur de la tourmente révolutionnaire, écrivait un texte largement plus "optimiste". Quelques mois encore plus tard, elle était assassinée. Je la laisse conclure

CODE
La classe ouvrière paie cher toute nouvelle prise de conscience de sa vocation historique. Le Golgotha de sa libération est pavé de terribles sacrifices. Les combattants des journées de Juin, les victimes de la Commune, les martyrs de la Révolution russe - quelle ronde sans fin de spectres sanglants ! Mais ces hommes-là sont tombés au champ d'honneur, ils sont, comme Marx l'écrivit à propos des héros de la Commune, « ensevelis à jamais dans le grand coeur de la classe ouvrière ». Maintenant, au contraire, des millions de prolétaires de tous les pays tombent au champ de la honte, du fratricide, de l'automutilation, avec aux lèvres leurs chants d'esclaves. Il a fallu que cela aussi ne nous soit pas épargné. Vraiment nous sommes pareils à ces Juifs que Moïse a conduits à travers le désert. Mais nous ne sommes pas perdus et nous vaincrons pourvu que nous n'ayons pas désappris d'apprendre. Et si jamais le guide actuel du prolétariat, la social-démocratie, ne savait plus apprendre, alors elle périrait « pour faire place aux hommes qui soient à la hauteur d'un monde nouveau ».
Louis
 
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