LO-LCR veut jouer un mauvais tour à la gauche

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Message par faupatronim » 18 Mars 2004, 11:49

(Libération @ jeudi 18 mars 2004 a écrit : Un jour, une région : la Haute-Normandie

LO-LCR veut jouer un mauvais tour à la gauche

En cas de quadrangulaire, Alain Le Vern (PS), à la tête d'une liste d'union, serait menacé de perdre la région.
   
Par Pascal VIROT

 

«Si on n'a pas les moyens d'être au second tour, on ne donnera pas de consigne de vote.» Christine Poupin, tête de liste LCR    Rouen envoyé spécial

C'est là qu'ils ont obtenu leurs meilleurs scores à la présidentielle de 2002. C'est là qu'ils sont aujourd'hui en mesure de provoquer une quadrangulaire. Et c'est là que la gauche pourrait perdre à cause d'eux. «Ils», ce sont les trotskistes unis de LO et de la LCR. «Là», c'est en Haute-Normandie.

Christine Poupin milite à la LCR depuis 1980. Elle travaille à l'usine AZF de la banlieue de Rouen (Seine-Maritime). Qui licencie. Tête de liste LO-LCR pour la région, cette technicienne en chimie de 46 ans n'a quasiment qu'un discours à la bouche : non aux aides publiques aux entreprises. Son quatre-pages de campagne est limpide : «Le Vern, président socialiste de la région, ose se vanter de subventionner grassement les entreprises.» Suivent les sommes attribuées à Total, Sanofi, AZF, Renault et le nombre des licenciements... La thématique, bien rodée, est relayée sans peine par Gisèle Lapeyre, tête de liste LO pour la Seine-Maritime, puisque c'est son parti qui en est à l'origine, avec le slogan : «Interdiction des licenciements.»

Selon les deux chefs de file trotskistes, gauche et droite régionales sont, sur ce point comme sur bien d'autres, en totale symbiose. «Ce n'est pas une question sur laquelle ils se démarquent», relève Christine Poupin. Alors, gauche et droite, même combat ? «Si on n'a pas les moyens d'être au second tour, on ne donnera pas de consigne de vote, même si, pour nous, droite et gauche ce n'est pas pareil...», explique la candidate de la LCR.

Souci. Son alter ego de LO est sur la même longueur d'onde : «Un électeur de droite, c'est différent d'un électeur de gauche», note Gisèle Lapeyre. Mais elle persiste : «Leurs politiques sont faites pour le patronat.» Entre Rouen, Le Havre et Evreux, les candidats d'extrême gauche ne s'écartent pas de la ligne décidée au niveau national : pas de consigne de vote entre les deux tours, sauf si le FN est en mesure d'emporter une région contre un candidat de gauche.

Cette posture pourrait causer bien du souci à l'équipe régionale sortante. Car la Haute-Normandie est une terre d'élection pour les trotskistes. En 1998, ils ont obtenu 6,41 % des voix et deux sièges au conseil régional. A la présidentielle de 2002, les trois candidats d'extrême gauche ­ Arlette Laguiller, Olivier Besancenot et Daniel Gluckstein, pour le Parti des travailleurs Ñ ont obtenu plus de 13 % des suffrages. Si elle atteignait un tel score, la liste LO-LCR pourrait se maintenir au second tour. Et concourir le 28 mars au côté de la gauche, de la droite et de l'extrême droite.

Une hypothèse à laquelle ne veut pas croire le fabiusien Alain Le Vern. Le président sortant, chef de file d'une liste PS-PCF-Verts-PRG, table plutôt sur une triangulaire gauche-droite-FN, une configuration qui serait propice à son maintien à la tête de la région. Il situe l'étiage de l'extrême gauche à 6-7 %, mais doit reconnaître que «l'extrême gauche peut faire perdre la gauche».

Alors, il n'hésite pas à rappeler que les deux élus LO «ont voté contre [ses] six budgets», et donc contre «la gratuité des livres scolaires», mesure phare de son bilan. Sans oublier de jouer sur la corde du vote utile : «Voter extrême gauche risque d'être contre-productif : c'est sanctionner la gauche», alors que Le Vern veut faire de la Haute-Normandie un «bouclier» contre la politique de Raffarin.

Plans sociaux. Le terreau sur lequel prospèrent les deux formations trotskistes est fertile. Ici, le PCF, jadis hégémonique à gauche, est en voie de marginalisation. Certes, les communistes détiennent encore quelques bastions, mais ils ont perdu leurs grandes mairies : Le Havre en 1995, Evreux et Dieppe en 2001. Et le tandem LO-LCR espère bien attirer ce qui lui reste d'électeurs.

Face à ce danger, les communistes ont fait le choix de l'union dès le premier tour derrière Le Vern. L'autonomie n'aurait-elle pas permis de capter les suffrages des électeurs les plus modestes, dans une région où se succèdent les plans sociaux ? «Si les convergences permettent l'union, alors autant la faire dès le premier tour», justifie Roland Bernard, patron de la fédération PCF de Seine-Maritime. Avait-il vraiment le choix ? Une liste séparée aurait pu être synonyme d'élimination directe, au cas où la barre des 5 % des voix n'était pas franchie.

Il a tout de même obtenu du PS une certaine «autonomie» pour mener campagne. Dans le quatre-pages diffusé par le parti n'apparaissent ainsi que les noms et trombines des candidats communistes... «Nous sommes unis et différents. Ce n'est pas seulement l'affirmation de la pluralité de la gauche, mais aussi celle de l'identité de chacun», avance Roland Bernard. En tout cas, cette union réjouit l'extrême gauche : «Ça fait la vérité des prix», rigole Christine Poupin.

Pour concurrencer le discours trotskiste, le PCF ne rechigne toutefois pas à se démarquer du bilan régional de la majorité sortante. Les élus communistes de la région n'ont pas voté, à l'instar de ceux de LO, les subventions à Aventis et à Total. «Nous gueulons, mais nous essayons de changer les choses», assure le secrétaire de la fédération, pour qui LO et LCR ­ «c'est évident» ­ «ne veulent pas changer la société».

La droite observe tout cela avec gourmandise. En théorie, avec une quadrangulaire provoquée par la présence du tandem LO-LCR, tout serait ouvert. Mais la droite est tellement désunie, tiraillée entre l'UMP Antoine Rufenacht, maire du Havre, et Hervé Morin, président du groupe UDF à l'Assemblée, qu'elle pourrait bien passer au travers, d'autant que les deux hommes ont déjà prévenu qu'ils ne fusionneraient pas leurs listes. Une chance de plus pour la gauche.

faupatronim
 
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