Extrême Gauche en ex-URSS

Dans le monde...

Message par Pascal » 07 Mars 2004, 13:49

Dans la discussion sur la culture soviétique, Caupo écrit :

"Las camarades soviétiques (s'il y en a) devraient rescater ce patrimoine de toute l'humanité."

Pour lui répondre, et comme cela dépasse le sujet de la culture en ex-URSS, voilà quelques sites internet de groupes d'extrême-gauche en Russie :

http://socialism.ru/index.html
Il s'agit d'un groupe trotskiste, "Социалистическое Сопротивление" (Résistance Socialiste), section russe du Comité pour une Internationale Ouvrière (dont la section française est "L'Egalité"). Leur site est régulièrement mis à jour, avec notamment un appel au boycott des élections présidentielles du 14 mars. Leurs activités principales en 2003, selon leur site, semblent être surtout la participation à différentes manifestations contre les guerres (Irak et Tchétchénie) et une participation au mouvement altermondialiste.
Selon leur site, ils ont des militants non seulement en Russie (à Moscou, Leningrad et à Voronej, peut-être ailleurs), mais aussi en Moldavie, en Ukraine et au Kazaksthan.

http://www.aurora1917.org/
Site de la section de Leningrad de Résistance Socialiste.
On peut y trouver quelques textes de base de Marx, Lénine, Trotski et Rosa Luxembourg, ainsi qu'une rubrique sur les luttes de la classe ouvrière. Le site est régulièrement mis à jour.
A noter une page culturelle, où on peut (entre autre) écouter l'internationale en russe.

http://resist.ru/
Site essentiellement consacré aux mouvements altermondialistes et aux luttes contre les guerres en Irak et en Tchétchénie, régulièrement mis à jour, semble être animé par des militants de Résistance Socialiste.

http://www.1917.com/
Site du groupe trotskiste "Рабочая Демократия" (Democratie Ouvrière), section russe du Comité pour une Internationale Marxiste, ont un lien vers le groupe français "La Riposte". Ont une activité régulière, ils ont entre autre participé à la manifestation contre la guerre en Tchétchénie du 24 février dernier à Leningrad.

http://www.geocities.com/marxparty/
Site du "Марксисткая Рабочая Партия", Parti Ouvrier Marxiste : ce ne sont pas des trotskistes, si j'ai bien compris ils se réclament de Marx et de Lénine, mais considère l'URSS Stalinienne comme un régime capitaliste d'Etat. Ont des liens vers les groupes français "Echanges et Mouvements" et "Parti Communiste International". On peut lire leur programme en anglais et il y a une page en français exclusivement consacré à l'événement majeur de ces dernières années pour le prolétariat mondial : la sission de cu Parti Ouvrier Marxiste avec le Parti de la Dictature du Prolétariat. Le site ne semble pas avoir été mis à jour depuis l'été 2003, et je n'ai trouvé aucune info sur l'actualité de ce groupe.

http://avtonom.org/
Site de l'organisation "Автономное Действие" (Action Autonome), fédération de groupes anarchistes-communistes, le site régulièrement mis à jour comporte pas mal d'infos sur leurs activités et la situation en Russie, présentation du groupe et quelques infos en anglais.

http://chechnya.solidarity.users.btopenworld.com/menu.html
Page de la campagne "Solidarité contre la guerre en Tchétchénie" animée essentiellement par le Centre Praxis / Bibliothèque Victor Serge, groupe de Moscou qui rassemble des anarchistes et des marxistes (dont certains qui se réclament du "bolchévisme des débuts" et des travaux de la fraction "Centralisme Démocratique"). En plus de leur campagne contre la guerre en Tchétchénie, ils mènent aussi un travail d'archivage et de recherches sur l'histoire du mouvement ouvrier russe et international, et ont en particulier traduit et publié (pour la première fois en Russie) le livre de Victor Serge "Mémoire d'un révolutionnaire". La site est consacrée uniquement à la campagne sur la Tchétchénie, avec quelques textes en français et en anglais.

Donc voilà quelques sites de l'extrême-gauche russe. Il y en a d'autres bien sûr, et j'ai exclu de cette liste tous les sites staliniens et néo-staliniens (très nombreux) : non seulement pour des raisons historiques, mais aussi et surtout parce qu'un nombre important de ces groupes et partis ont souvent des positions très éloignés des principes communistes : nationalisme exacerbé, soutien à la guerre en Tchétchénie, etc, etc.

PS : Je précise que je parle et comprends mal le russe, aussi j'ai peut-être fait quelques erreurs dans les descriptions des groupes.
Pascal
 
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Message par boispikeur » 07 Mars 2004, 22:11

J'ai trouvé un site qui fait (enfin, essaie!) de traduire du russe au français.
http://www.online-translator.com/srvurl.asp?lang=fr
Franchement, ce n'est pas génial, mais ça permet de survoler qq trucs (mais pas de lite un texte théorique)
boispikeur
 
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Message par Nadia » 09 Mars 2004, 16:14

(Pascal a écrit :Il y en a d'autres bien sûr, et j'ai exclu de cette liste tous les sites staliniens et néo-staliniens (très nombreux) : non seulement pour des raisons historiques, mais aussi et surtout parce qu'un nombre important de ces groupes et partis ont souvent des positions très éloignés des principes communistes : nationalisme exacerbé, soutien à la guerre en Tchétchénie, etc, etc.
Tu m'étonnes ! Moi qui désespérais de trouver quoi que ce soit de "potable"...

Merci donc pour cette liste. Tu les as trouvés comment ? Par simple recherche genre Google ou autrement ?
Nadia
 
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Message par Nadia » 09 Mars 2004, 16:34

Il y a aussi le site traducteur russe qui marche pas mal (jamais essayé pour une page entière)
Nadia
 
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Message par boispikeur » 09 Mars 2004, 23:43

[quote=" (Nadia @ mardi 9 mars 2004 à 16:34"]
Il y a aussi le site traducteur russe qui marche pas mal (jamais essayé pour une page entière)
Euh.... je crois que c'est le même :emb:
boispikeur
 
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Message par Pascal » 10 Mars 2004, 01:06

(Nadia @ mardi 9 mars 2004 à 16:14 a écrit :Tu les as trouvés comment ? Par simple recherche genre Google ou autrement ?

Je suis tombé sur le site de la section de Leningrad de Resistance Socialiste par hasard (j'avais du taper Lénine en cyrillique dans le moteur de recherche), ensuite j'ai suivi les liens, et regardé un peu ce qu'étaient les sites proposés.

Pour le site de la Campagne Solidarité contre la guerre en Tchétchénie, je connais une camarade de Moscou qui milite au Centre Praxis.
Pascal
 
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Message par Nestor Cerpa » 10 Mars 2004, 11:22

En voici d'autres:
Belarus:
Autonomous Action (anar)->http://www.avtonom.org/

Estonie: (anar)->Estonian Anarchist Party ->http://www.hot.ee/anarhism/

Russie->
anar->
http://vintovka.front.ru/ ->Association of Anarchists' Movements
Confederation of Revolutionary Anarcho-Syndicalists-> http://www.geocities.com/libcomru/


trots->Revolutionary Workers Party-> http://www.rwp.ru/
Revolutionary Workers Party-> http://www.revkom.com/
Socialist Resistance->http://www.socialism.ru/ (CWI) (fondé 1993)
Workers Democracy-> http://www.1917.com/ (f. 1990, formerly called Revolutionary Workers Party (RRP), led by Alexei Petrov and Sergei Marski)


et des maos-> Russian Maoist Party-> http://rmp.maoism.ru/

Ukraine
trot->Union "Struggle"-> http://www.union-borotba.ukrbiz.net/

Sinon par international:
CMI->
Workers Democracy (Rabochaya Demokratiya), Russia -> http://www.1917.com/

CWI->
Socialist Resistance (Sotsialisticheskoye Soprotivlemiye), Russia-> http://www.socialism.ru/
Nestor Cerpa
 
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Message par Nestor Cerpa » 10 Mars 2004, 12:49

Russie
" C’est le pouvoir qui fabrique le parti dominant"
Interview d’Oleg Shein*


Comment pourrais-tu rapidement caractériser les résultats des dernières élections législatives de décembre en Russie ?

Oleg Shein : Je dirais qu’il s’agit d’une victoire du pouvoir, plus que de la droite dans son ensemble. Car celle-ci recouvre diverses composantes, dont plusieurs ont été laminées. Mais, sans aucun doute, le pouvoir mène une politique de défense des intérêts du gros business. Cependant, la particularité du système politique russe est que ce n’est pas le parti majoritaire qui forme le pouvoir, mais le pouvoir, au travers du gros capital et de la bureaucratie, qui fabrique le parti dominant.

L’une des surprises de ces élections est sans doute le score important d’un nouveau groupement politique, Rodina (La Patrie), qui a remporté 9 % des voix. La presse occidentale et les forces de droite russes évoquent surtout son nationalisme et/ou une création artificielle du Kremlin. Tu t’es affilié à la fraction parlementaire du bloc Rodina, pour quelles raisons et peux-tu nous en dire plus sur cette nouvelle formation politique ?

Oleg Shein : Il faut comprendre que Rodina n’est rien de plus qu’une coalition électorale entre candidats à la députation démarchés pour les uns par Segueï Glazev (1), pour les autres par Dmitri Rogozin (2). Elle n’existe pas en tant qu’organisation politique digne de ce nom. En même temps, le succès électoral de Rodina découle de la profonde crise que connaît le Parti communiste de la fédération de Russie (KPRF) de Ziouganov. Il reflète l’aspiration d’une partie importante de la population à une alternative réelle de gauche à l’ordre existant. Je me suis personnellement présenté aux élections comme candidat indépendant dans ma région natale d’Astrakhan. Je suis sorti du bloc Rodina lorsqu’il a pris un tour trop nationaliste, notamment avec l’arrivée de Sergueï Babourin (3). Mais, par la suite, une grande partie des candidats nationalistes ont été exclus du bloc. Aussi est-t-il finalement intervenu dans les débats préélectoraux sur des thèmes plus sociaux que nationalistes. En tout cas, c’est la perception des gens qui ont voté pour lui, à partir d’un clair positionnement anti-oligarque et de la proposition, théorisée par Glazev, de l’impôt social sur la rente issue des ressources naturelles. Il ne reste désormais que quatre groupes parlementaires à la Douma. Un député non affilié ne dispose d’aucun moyen d’action, il fallait donc choisir. Mon adhésion aux fractions pro-gouvernementales de Russie unique ou du groupe de Jirinovski était exclue. J’ai préféré Rodina au parti communiste parce que c’est le seul groupe qui admet le principe de la liberté de vote. De plus, il est possible que, sur la base d’une partie de Rodina (la tendance animée par Glazev), finisse par se former une nouvelle tendance social-démocrate ou socialiste. Le bloc Rodina tel qu’il existe ne présente absolument aucune unité et ne s’homogénéisera pas avec le temps, tout au moins sous sa forme actuelle. Il suffit de dire que Dmitri Rogozin se positionne publiquement comme un partisan absolu de Poutine, alors que Sergueï Glazev est un homme politique très indépendant du Kremlin et l’un des rares possibles prétendants au leadership d’une éventuelle opposition.

Rodina veut dire "Patrie", dans un sens plutôt positif (émotionnel et familial) en russe. Qu’elle est la signification de cette appellation pour les gens du bloc ? Comment comprends-tu toi-même le mot ?

Oleg Shein : Le bloc s’appelait d’abord Camarade (Tovarich), ce qui me convenait bien davantage. De plus, il avait été formé à l’origine sous l’impulsion de Glazev, Rogozin n’étant arrivé que deux mois après le lancement du projet, ce qui a entraîné une évolution droitière de son ensemble. Pour moi, "rodina", ma patrie, c’est avant tout ma région natale, Astrakhan (4). J’y suis né et y milite depuis 1986. D’abord en tant que syndicaliste puis député local. Le mouvement social local a grossi au fil des années, surtout dans les années fastes de 1997-98. Socialement et politiquement, c’est là que je me sens le mieux, entouré désormais de tout un réseau d’organisations et de syndicats différents. Politiquement, et au niveau de toute la Russie, je me considère comme internationaliste mais ne suis pas indifférent à un certain patriotisme de défense des intérêts de la population russe face à ceux du gros business international et à l’impérialisme américain. Cependant, en ce qui concerne le bloc Rodina, il ne s’agit de rien d’autre que d’un sigle électoral pour un regroupement politique qui est déjà en train de se dissoudre. Il est symptomatique que le candidat à la présidence officiellement soutenu par le bloc soit devenu Victor Guerachenko, ex-président de la Banque centrale de Russie. Sergueï Glazev se présente également, mais en candidat indépendant, avec le soutien d’une minorité de ceux de Rodina et en opposition certaine avec les vues du Kremlin et celles de Rogozin.

Les communistes du KPRF sont également appelés "patriotes" et ils ont subi une lourde défaite, ne remportant que 13 % des voix. Comment expliquer le succès propre à Rodina, à quoi est due son attractivité ?

Oleg Shein : La première des explications est liée à la crise profonde que traverse le KPRF. Les fonctionnaires du parti communistes sont habitués à penser que, quoi qu’ils fassent, il leur est garanti de 12 à 13 millions de voix, alors qu’il ne leur en a été accordé que la moitié. D’année en année, le parti s’enfonce dans l’inaction. Toute l’activité de ses dirigeants se résume à expliquer aux gens que les communistes sont trop peu nombreux au pouvoir et qu’il leur est donc impossible de faire quoi que ce soit. Ils n’ont jamais organisé une seule grève, pas une seule action de protestation réelle pour résoudre les problèmes les plus concrets et sensibles pour la population, comme la hausse des tarifs communaux ! Avec l’arrivé du patriote Poutine, le patriote Ziouganov est devenu inutile et non attractif. Enfin, lors des élections de 2003, le KPRF s’est ouvertement allié avec les oligarques, en particulier avec Berezovski (5) et Khodorovski (6). Une partie importante des places sur la liste du KPRF, que j’estime à près de 40 %, a été tout simplement vendue au plus offrant des hommes d’affaires souhaitant avoir leur entrée au pouvoir, pour une somme variant de 1 à 2 millions de dollars selon la fortune des prétendants. Evidemment, les propagandistes du Kremlin se sont fait une joie d’expliquer tout ça à la population pendant toute la campagne électorale ! Cette situation a encore accru l’aspiration sociale à un autre bloc politique de gauche anti-oligarchique, voire anticapitaliste. Rodina a capté cette aspiration populaire, sur des bases confuses. Sans aucun doute aidée par le Kremlin au début pour faire concurrence au KPRF, elle a néanmoins échappé au contrôle total, en tout cas sur toutes ses composantes. Surtout, elle s’est positionnée clairement et radicalement contre les oligarques, combattant activement et publiquement certaines des figures les plus impopulaires de la droite et de l’oligarchie, en particulier Anatoli Tchoubaïs (7). Enfin, elle a clairement défendu l’idée selon laquelle la richesse nationale du pays devait profiter à toute la société et non pas à quelques clans minoritaires.

Et qu’en est-il des positions de Rodina sur les questions nationales et notamment sur la guerre en Tchétchénie ?

Oleg Shein : En dehors des slogans abstraits sur le maintien de l’autonomie nationale et la défense de la patrie, il n’y a pas de programme sur ce point, encore moins que sur les autres questions. Le bloc n’a pas abordé la guerre en Tchétchénie. Ce fut le silence total là-dessus, comme de la part des autres blocs électoraux d’ailleurs. La guerre en Tchétchénie ne constitue malheureusement pas un enjeu, la population ne veut pas en entendre parler. C’est le non-dit politique et le refoulé social.

Et quel est ton propre point de vue sur Poutine ? Celui du bloc Rodina ?

Oleg Shein : Deux ans auparavant on observait une déception croissante à l’égard de Poutine dans la population, j’ai pu m’en rendre compte lors des réunions de quartier que je faisais dans ma région et dans les rencontres avec des habitants d’autres villes. Or aujourd’hui il me semble qu’on assiste au contraire à une reconsolidation autour du président. C’est lié à ce que Poutine a commencé à suivre réellement une ligne dirigée vers l’éloignement des oligarques de la prise de décision politique. Certes, sa politique sert toujours les intérêts du gros capital en général, mais la manipulation directe du gouvernement et du président par certains clans oligarchiques est en train d’être reléguée dans un passé révolu. De mon point de vue, c’est indéniablement une tendance progressiste puisqu’elle met en place les conditions d’une démocratisation future de la société, atténuant l’aspect mafieux du pouvoir. En ce sens, il est important de noter que tous les partis employés par les oligarques pour la lutte contre Poutine (l’Union des forces de droite, Iabloko et le KPRF) ont subi une défaite sévère lors des dernières élections. Cependant, il faut également prendre la mesure d’une autre tendance : la pente autoritaire que prend le régime politique russe. La Chambre haute du parlement (le Soviet de la Fédération) est depuis deux ans déjà sous contrôle total du pouvoir, ses membres n’étant même pas élus. Désormais la Chambre basse (la Douma d’Etat) est dominée par un seul parti, Russie unique, qui contrôle 305 sièges sur 450, ce qui signifie qu’un parti unique, celui du pouvoir, est en mesure d’adopter n’importe quelle loi et même de modifier la Constitution. De plus, les lois initiées par le pouvoir ces dernières années tendent clairement à limiter les droits des gens à s’auto-organiser, qu’il s’agisse de la loi sur les partis, sur l’extrémisme, du nouveau code du travail. Et le cours politique général est anti-social, passant par une réduction des dépenses sociales déjà peu importantes et par une dissolution du système de protection sociale. Quant à la position du bloc Rodina à l’égard de Poutine, elle n’est pas affichée. A l’exception de Rogozin qui ne cache pas son soutien, personne ne s’exprime ouvertement à ce sujet. La situation politique est telle en Russie que soit on dit du bien de Poutine, soit on s’abstient de tout commentaire.

Peux-tu nous en dire plus sur le Parti du travail dont tu es à la tête et sur sa position à l’égard de Rodina ?

Oleg Shein : Le Parti du travail de Russie (RPT) a été fondé en janvier 2002 sur la base des syndicats alternatifs, dans le prolongement de la lutte commune contre la réforme ultra-libérale du code du travail. Y ont adhéré en particulier des syndicats de Sotsprof, Zachita truda, des syndicats professionnels comme ceux des dockers, des contrôleurs aériens, des machinistes, etc, auxquels se sont adjoints par la suite des non-syndiqués et d’autres associations. Mais les élections ont montré la dureté des conditions limitant le champ de la politique militante dans le pays. Tous les syndicats à l’origine de la fondation du RPT n’ont pas résisté à l’épreuve préélectorale et à l’attrait de l’aide financière promise par certaines forces politiques plus riches et visant à utiliser l’autorité du mouvement ouvrier dans la campagne. Ainsi, une partie importante du syndicat Sotsprof, sous l’influence de son leader, a conclu une alliance électorale, motivée par des questions financières, avec le parti eurasiatique, un obscur parti fondé par une partie du clan eltsinien dirigée par Pavel Borodin (8). En passant, il faut malheureusement constater que l’importance de l’argent prend des proportions hallucinantes dans la politique russe, alors que le mercantilisme de la société en général s’accentue également et que les militants syndicaux, pourtant formés par des années de militantisme de terrain, ne sont pas toujours armés pour y faire face. Mais pour revenir au Parti du travail, la majeure partie de ses membres a soutenu le bloc électoral de Glazev j’insiste sur la dénomination, il ne s’agit pas de soutien à Rodina dans son ensemble mais d’un crédit personnel accordé à Glazev et à ses propositions sociales et anti-oligarchiques. Ce conflit au sein du RPT a conduit à une profonde crise. Lors du Congrès prévu pour février 2004 nous allons discuter des différentes variantes dans l’évolution de notre parti : scission formalisée, continuation en deux tendances adverses, choix d’une autre voie que partisane, transformation en une sorte de parti de Glazev. J’attends que les délégués en débattent mais je dois dire qu’aucune des solutions ne me satisfait pleinement et que celle qui me conviendrait le plus la formation d’un vrai parti militant de gauche autonome pose d’énormes problèmes de ressources. Quoi qu’il en soit, à la suite de la crise interne au parti, les positions du RPT ont été affaiblies au sein du bloc Rodina, ce qui a renforcé sa pente nationaliste et nous a fait perdre les places éligibles sur sa liste électorale. Résultat des courses : Rodina se présente aujourd’hui comme un groupement politique beaucoup moins à gauche qu’il aurait pu l’être, et du RPT, je me retrouve le seul candidat élu au scrutin uninominal (9), avec un autre leader syndical de la région de Togliattigrad, Anatoli Ivanov (10), qui vient d’adhérer au RPT. Il faut noter cependant que, pour une première tentative d’entrée sur la scène politique fédérale, les leaders syndicaux du RPT qui se sont présentés au scrutin uninominal ont fait de bons scores, remportant de 5 % à 15 % des voix.

Où en est le mouvement ouvrier en Russie aujourd’hui?

Oleg Shein : C’est une vaste question, pour y répondre brièvement, je dirais que nous avons raté notre entrée dans la politique fédérale et que nous n’assistons pas à une activisation du mouvement. Mais, de façon générale, les positions du mouvement ouvrier restent inchangées. Malgré les réformes libérales et anti-syndicales, nous avons réussi à conserver nos positions, même si l’on ne peut pas parler de dynamique positive.

Le tableau est le même à Astrakhan?

Oleg Shein : Non, à Astrakhan nous avons renforcé nos positions. En 1999, 22 % des électeurs ont voté pour moi, en décembre 2003 : 37 %. Mes deux principaux concurrents, un député régional soutenu par le groupe Youkos et un candidat du KPRF, ont fait respectivement 20 % et 10 %. Ce succès est à mettre au compte du réseau militant que nous avons réussi à mettre sur pied dans la région. Une coalition intitulée " Soviet de solidarité sociale " y regroupe toutes les associations et organisations les plus militantes : les syndicats Zachita mais aussi de nombreux syndicats traditionnels, en particulier chez les instituteurs, les associations d’invalides, de défense des droits des petits entrepreneurs, des consommateurs, le parti du travail régional, le parti eurasiatique régional, etc. Nous réussissons à créer cette dynamique en menant un travail pratique sur les problèmes concrets qui préoccupent la population. Ainsi, nous avons récemment gagné deux batailles importantes : la baisse des tarifs du chauffage communal (11) et la confirmation par la justice d’une surfacturation de 20 % des loyers communaux. Il y a de grandes chances pour que nous prenions la Mairie d’Astrakhan lors des élections municipales de décembre 2004. Dans cette perspective, nous considérons comme essentielle l’expérience de démocratie participative qui est menée dans plusieurs villes au niveau mondial, Porto-Alegre par exemple ou peut-être Saint-Denis. Et nous développons notre propre expérience. Dans un certain nombre de quartiers plus défavorisés, notamment sur le plan écologique (des habitations soumises à la pollution des entreprises de Gazprom), des comités populaires fonctionnent avec succès depuis déjà plusieurs années pour obtenir le relogement des habitants. Nous organisons également des réunions de quartier assez régulièrement. Mais ces réunions sont surtout animées par moi ou d’autres leaders du Soviet de solidarité. Notre problème est de pérenniser cette forme d’auto-organisation et de faire que ce système fonctionne à partir d’une mobilisation d’en bas. J’espère qu’en conquérant la Mairie nous arriverons à créer les conditions d’un réel contrôle démocratique.

Et quelle est l’évolution de ton syndicat, Zachita truda ?

Oleg Shein : A l’image du mouvement dans son ensemble, ses positions sont stabilisées. Je tiens à préciser qu’il s’agit du syndicat le plus clairement à gauche et anticapitaliste, même s’il n’est soumis à aucun parti. Les membres du syndicat sont affiliés soit au RPT, soit au Parti communiste ouvrier de Russie (12), soit sont sans parti. Nous considérons comme vital pour le syndicat de maintenir cette pluralité politique, dans un cadre général de gauche.


Dans la gauche occidentale, nous connaissons surtout les intellectuels de gauche comme Alexandre Bouzgalin, Boris Kagarlitski, le couple des Rakitski, et plus récemment les jeunes altermondialistes, comment s’opère la collaboration avec eux ?

Oleg Shein : Le problème de la gauche en Russie, c’est qu’il n’y a pas de mouvement social. Ce qui commence à se former sur le modèle de l’altermondialisme ne fait que créer des ponts fragiles entre les différents groupes. Dans les conditions d’inexistence d’une quelconque dynamique sociale, on comprend qu’une part importante des efforts se perde en débats internes sur des désaccords liés à des questions n’ayant presque aucune signification pratique. La majorité des intellectuels de gauche, surtout les Moscovites, et la plupart de la jeunesse radicale de gauche que je respecte de toute façon pour leur militantisme et leurs positions affirmées à gauche ne s’occupent pas des problèmes concrets. Ce travail pratique est routinier, gris, invisible, apparemment non politique, mais sans lui il est impossible de créer les conditions nécessaires à la mobilisation de la population.

Propos recueillis par Carine Clément


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* Oleg Shein, 32 ans, est député d’opposition de la région d’Astrakhan à la Douma d’État de Russie, co-président du syndicat "Zachita truda" ("Défense du travail"), président du Parti du travail de Russie.
1. Sergueï Glazev est le leader du bloc Rodina. Ex-membre du groupe parlementaire communiste, il fait autorité en tant qu’économiste et s’est forgé une solide popularité en obtenant un score assez important aux élections du gouverneur de la région de Krasnoïarsk contre deux oligarques dominant la région.

2. Dmitri Rogozin est la deuxième figure du bloc Rodina. Élu de la région de Voronej, il est également représentant officiel du président sur les problèmes liés à la région de Kaliningrad.

3. Leader du Parti de la volonté populaire (Partia narodnoï voli), propageant clairement des idées d’extrême droite.

4. Au Sud de la Russie, sur les bords de la mer Caspienne.

5. Oligarque de la "famille eltsinienne" aujourd’hui exilé à Londres.

6. Patron de la compagnie pétrolière Youkos aujourd’hui emprisonné.

7. L’un des leaders de l’Union des forces de droite, initiateur des privatisations oligarchiques des années 1990, aujourd’hui à la tête du monopole de l’électricité russe.

8. Ex-dirigeant de l’administration présidentielle sous Eltsine.

9. Le système électoral russe prévoit deux modes de scrutin pour les élections législatives : la moitié des députés est élue au scrutin de liste, l’autre au scrutin uninominal. Chaque électeur vote à la fois pour une liste et pour un député nominalement.

10. Leader du syndicat Unité (Edinstvo) de l’usine automobile Lada dans la ville de Togliattigrad, élu pour la deuxième fois député au scrutin uninominal dans sa région et ayant intégré la fraction parlementaire de Russie unique.

11. Qui concerne en Russie la majeure partie des habitations.

12. Le Parti communiste ouvrier de Russie (RKRP) a fait alliance avec le Parti communiste de la fédération de Russie (KPRF) de Ziouganov aux dernières élections. Son leader, Viktor Tioulkin, a été élu député de la Douma au scrutin de liste.
Nestor Cerpa
 
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Message par Nestor Cerpa » 10 Mars 2004, 12:49

euh ca vient d'inprecor
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