L. Trotsky, Comment la révolution s'est armée.

[Cyrano]

Longtemps, longtemps après la sieste…
Comment passer de l'agitation à la révolution? Houlà?! C'est pas rien, Vous vous posez la question? Justement, tiens, puisque on en parle… Lisons ce qu'il disait, au syndicat des ouvriers du transport en 1923…

Je n'ai bien entendu pas à vous expliquer en détail les conditions qui rendent la révolution possible et en garantissent le succès. Je ne les rappellerai que dans ses grandes lignes.
Pour qu’une révolution prolétarienne soit possible, il faut d’abord un certain niveau de développement des forces productives ; deuxièmement, le prolétariat doit avoir une certaine taille et jouer un certain rôle dans la production; et, enfin, il y a ce que l’on appelle le principe subjectif, à savoir que le prolétariat doit vouloir conquérir le pouvoir et savoir le faire. […]

Passer de l'agitation et de la propagande à une lutte directe et immédiate pour le pouvoir est toujours un processus très difficile pour tout parti révolutionnaire. C’est une chose que de se battre pour exercer une influence sur les masses par millions. Et c’en est une autre, après s’être mis à la tête de ces millions, d’entreprendre la tâche immédiate, dans les conditions et circonstances données, de mener à bien, contre l’ennemi désigné, un soulèvement et de prendre le pouvoir. Ici, l’avant-garde de la classe ouvrière doit faire un énorme bond en avant politique et psychologique, se dégager de la sphère purement propagandiste du travail pour amener la classe à accomplir un ample renversement social. […]

Les conditions objectives de la lutte imminente sont-elles favorables ou non? Quelles sont les prévisions, les augures ? Camarades, il n’est bien sûr jamais possible, avant de telles batailles décisives, de calculer les forces avec précision et, encore moins, de tirer une conclusion précise. Si cela était possible en ce qui concerne les batailles sociales, de telles batailles n’auraient jamais lieu. J’ai souvent eu l'occasion de mentionner le simple fait de penser que même lorsqu’un groupe de travailleurs est en grève contre un capitaliste, il est impossible de savoir avec précision, par avance, comment la grève va se terminer. Si cela était connu à l'avance, les travailleurs ne commenceraient pas leur grève ou le capitaliste céderait sans leur grève.

Chaque lutte développe ses forces intérieures : ces forces intérieures ont une influence sur le marché, elles évoquent soit la sympathie ou l'absence de sympathie chez les autres travailleurs, la sympathie d’un capitaliste pour un autre, etc. Si c’est ce qui se passe dans une grève, qu’en est-il dans une révolution du prolétariat, dans laquelle sont engagées des forces colossales, nombreuses et incommensurables – dans lesquelles intervient un pays de 60 millions d’habitants. Dans un tel cas, camarades, il est impossible de dire à l'avance que la victoire sera ici absolument garantie.

… et il dit quoi après? Bin, je ne vais pas scanner le bouquin en entier ! n'est-ce pas… Faut bien en acheter. La suite c'est page 152 et suivantes du volume 5. Voyez, j'vous dit tout.

[Cyrano]

Dans le même discours cité dans le message précédent, la pensée déliée de Léon Trotsky, hors de tout dogmatisme, de tout sectarisme.

… vous connaissez parfaitement l'attachement profond ressenti par le travailleur pour l’organisation qui l’a d'abord réveillé, élevé et organisée, pour éveiller sa conscience. Ce sentiment de lien intime est ressenti par les travailleurs allemands vis-à-vis du parti social-démocrate. Ce parti l’a, certes, trahi, mais tout de même, autrefois, sous les Hohenzollern, l'a réveillé et, pendant des décennies, l’a éduqué et éclairé, et, il est très difficile pour des travailleurs, même ceux qui savent que leur parti suit un mauvais chemin de rompre avec lui.
C’est pourquoi malgré toutes les trahisons et la bassesse de la social-démocratie allemande, la masse des travailleurs, mécontents, grondants, poussant leur parti en avant et de côté, n’a néanmoins pas rompu avec lui et n’a pas effectué le premier pas vers la sortie et vers le Parti communiste. C’est un pas très pénible pour un travailleur lié pendant de longues années à une organisation donnée, et il s’avère qu’i1 n’a pas besoin de le faire sous une forme aussi abrupte.

[Cyrano]

Dans un livre sur des écrits militaires, on ne peut pas oublier le génial Clausewitz, n'est-ce pas? Clausewitz est cité en tête d'une petite brochure : "Doctrine militaire ou doctrinarisme pseudo militaire", publiée en décembre 1921.

La brochure porte un en-tête, une citation de Clausewitz:
«Car ainsi que certaines plantes ne donnent de fruits qu’à condition de ne pas trop monter en graine. Il ne faut pas trop laisser croitre les feuilles et les fleurs théoriques des arts pratiques, mais les rapprocher de l'expérience qui est leur terrain naturel.»
Clausewitz. "De la guerre" (Théorie de la stratégie)»

Et on trouve un commentaire de la fameuse formule de Clausewitz:
«Le marxisme ne fournit pas des recettes toutes faites. Encore moins dans le domaine de l'édification militaire. Mais là aussi, il nous a offert une méthode. Car, s’il est vrai que la guerre est le prolongement de la politique mais avec d’autres moyens, une armée est la continuation et l'aboutissement de toute l'organisation sociale st étatique, mais avec une baïonnette au bout.»

[Cyrano]

Dans cette brochure citée, faut tout lire, ce sont les idées de Léon Trotsky versus celles de Frounzé. Aussi je ne cite qu'un tout p'tit bout. La brochure est divisée en 14 parties. Les intertitres donnent une idée des sujets qui sont abordés:

1 Notre méthode d'orientation
2 Avec ou sans doctrine?
3 Qu'est-ce qu'une doctrine militaire?
4 Clichés et verbiages
5 Avons-nous, oui ou non, une "doctrine militaire"?
[…]
13 L'esprit défensif et l'esprit offensif
14 Les objectifs immédiats

Et la conclusion de la brochure? Com_71 avait cité la fin de la fin de la conclusion de la brochure:
«J'apprécie bien cette mention :
Après avoir énuméré toutes les menues besognes qui jalonnent la vie du soldat et qu’il faut avant tout lui apprendre à bien faire, il affirme: « En un jour de fête, celui qui appellera doctrine militaire ce programme pratique ne sera pas puni »

Mais alors, ces menues besognes citées juste avant? Mais les voici, les voilà:

Toute notre attention doit se focaliser non pas vers une édification fantaisiste, mais vers plus d'amélioration et de précision. Ravitailler correctement les unités; ne pas gaspiller les denrées alimentaires ; cuisiner de bonnes soupes au chou; apprendre à exterminer les poux et maintenir l’hygiène corporelle; réaliser correctement les exercices d’entrainement, plutôt à l'air libre qu'à l'intérieur; préparer judicieusement et concrètement les discussions politiques ; fournir à chaque homme de l’Armée rouge un livret de service et le remplir correctement; apprendre à nettoyer les fusils et à graisser les bottes ; apprendre à tirer; aider les commandants à bien assimiler les règles en matière de communication, de reconnaissance, de rapports et dc sécurité; apprendre à s'adapter aux conditions locales, à emmailloter correctement les pieds et éviter les ampoules et encore une fois, graisser ses bottes - tel est notre programme pour l'hiver et le printemps qui viennent.
Et, si pendant ses congés, d’aventure quelqu’un appelle cela une doctrine militaire, il ne sera pas puni pour autant.

C'est un peu différent de la citation de Com_71, mais ainsi vont les traductions. Là, la traduction que je cite, c'est du Jean-Jacques Marie.
Et entre nous, dites, c'est un peu une gestion administrative des choses? Ou méthode Bonaparte, un truc comme ça? Ou bien selon une appréciation célèbre: «une disposition à être trop enclin à ne considérer que le côté purement administratif des choses.»
… et encore une fois, graisser ses bottes. En tout cas, il a bien vu qu'il commençait à nous prendre trop la tête avec son graissage de bottes.

C'est une bonne conclusion pour toutes les citations que je vous ai proposées? Qu'en pensez-vous? Je vais donc m'atteler à une menue besogne, ranger le bordel sur mon bureau.

[Gayraud de Mazars]

Salut camarade Cyrano,

Pour illustrer le propos de Léon Trotsky, et constater tout se que la Social-démocratie allemande avait apporté en terme d'éducation à son prolétariat, avant la trahison d'août 1914, il faut lire de Franz Mehring, Histoire de la social démocratie allemande de 1863 à 1891 édité par Les bons caractères.

On peut lire en présentation de cet excellent ouvrage :

Cet ouvrage n’avait jamais été traduit en français. Cette édition la rend enfin accessible, ce qui est d’autant plus important que très peu d’écrits sont disponibles en France sur la riche histoire de ce grand parti ouvrier socialiste, qui allait devenir, avant la première guerre mondiale, le plus important propagateur des idéaux de transformation sociale.

Le présent volume est consacré à la naissance du mouvement socialiste, à son développement, à sa transformation en parti de masse, pendant la période 1863-1891 que l’on appelle l’ère Bismarck. Face aux entraves du gouvernement et de nombre d’industriels par l’intimidation, le licenciement, la calomnie, et même les lois d’exception, les militants socialistes empruntèrent différentes voies: la propagande bien sûr, l’agitation politique et le travail parlementaire, puisque malgré l’interdiction, les socialistes conservaient le droit de se présenter aux élections ; le parti existait également au travers de ses syndicats, de ses coopératives, de ses caisses de secours, de ses associations culturelles et sportives. Les décennies 1870 et 1880 furent donc celles d’un fort développement du mouvement socialiste malgré la répression, dans le cadre d’un pays en plein essor économique, avec une classe ouvrière de plus en plus nombreuse.

En 1890, une importante radicalisation ouvrière, une montée socialiste aux élections et l’éviction du chancelier Bismarck vinrent se conjuguer pour provoqueret la fin des lois d’exception. Le parti revenu à la légalité put alors se donner un nouveau nom : SPD, Parti social-démocrate d’Allemagne.

Fraternellement,
GdM

[Cyrano]

Post-scriptum !
Oubli! Et Cronstadt ? Ahhh……
Dans les Ecrits militaires, le volume 4, "De Cronstadt à la NEP", l'épisode de Cronstadt n'occupe que 8 petites pages. Avant de s’énerver en mode trotskysme religieux, on peut lire quelques extraits de ce que disait Léon Trotsky, en mars et avril 1921 :

«Les événements [de Cronstadt] attendus et incontestablement préparés par le contre-espionnage français.»
«Le 28 février, des troubles éclatèrent à Cronstadt sur le navire Petropavlovsk. Une motion SR Cent noirs y a alors été adoptée.»
«Le 2 mars, dès le matin est alors ouvertement apparu sur la scène le groupe de l'ancien général Kozlovski. […] Ainsi, le sens des événements est apparu en toute clarté. Cette fois encore, un général tsariste se tenait dans le dos des SR.»
«Que la mutinerie de Cronstadt ait éclaté au moment de la signature de la paix avec la Pologne et d'un accord commercial avec l'Angleterre n'est pas dû au hasard.»
«La mission historique des SR et des mencheviks est, en tant qu'agents de l'impérialisme mondial, de mettre en selle la contre-révolution russe.»
«La Bourse européenne souligne : les actions des usine Poutilov sont montées de 10 francs.»
«Nos élèves officiers ont pris d'assaut [la forteresse de Cronstadt]. Sans tirer un seul coup de feu, ces fils de la Russie ouvrière et paysanne ont progressé sur la glace, ont péri, cherché à vaincre et ont vaincu. »

Voili, voilà. Si vous avez un moment, un retour amical et réfléchi serait apprécié sur toutes ces paroles centenaires.
Sur ces paroles-ci, et les autres.
Et croisons les doigts: le père Noël m'apportera peut-être les volumes 1, 2 et 3 des Ecrits militaires. Va falloir acheter des rayonnages…

[Cyrano]

Merci Gayraud! Je vois que tu suis attentivement! Ça, plaisir faire à moi.
Je suppose qu'en tant que prof t'as aimé le petit texte cité en entier : Lettre à un soldat de l’Armée rouge.

[Gayraud de Mazars]

Salut camarade Cyrano,

Oui bien sûr, j'ai lu la lettre à ce soldat rouge, elle est édifiante et très pertinente. Oui, le socialisme permettra à tout le genre humain de s'élever par l'instruction, à tous d'étudier toujours, et le savoir c'est toute la vie pour avancer dans tous les domaines. Comme la lettre en conclusion que je reprends ces termes, même si mes élèves ne sont pas des soldats rouge, cette maxime pourrait être mienne : "Etudie, ne perds pas ton temps. Mets-toi au niveau des plus avancés !"

Fraternellement,
GdM

[Cyrano]

Eh bin, dis donc, Gayraud, en tout cas, y'a de la lecture des messages. Même si y'a des robots, ça reste un bon paquet de lectures. Tant mieux!

[Cyrano]

Bin? Tout le monde est parti à Gaza? Hé, les forumeurs, ça ne vous inspire rien, ces citations de Léon Trotsky?