« La Mélancolie ouvrière » est un film de Gérard Mordillat qui sera sur Arte ce vendredi 24 août à 20h55… A voir sûrement !

Lucie Baud est l’une des premières syndicalistes françaises qui, en 1905 et 1906 mena les grandes grèves dans les filatures de tissage de la soie à Vizille et Voiron. Elle est une de ces femmes exemplaires, de ces héroïnes du quotidien dont la vie familiale, la vie amoureuse et la vie militante ne sont qu’une seule et même vie, une vie vouée à briser " l’infinie servitude des femmes"...
Lucie Baud (Virginie Ledoyen) est une figure oubliée de la lutte ouvrière. À travers une fiction engagée et émouvante, Gérard Mordillat, s’appuyant sur le travail de l’historienne Michelle Perrot, retrace le destin d’une des premières femmes syndicalistes, féministe avant l’heure.
Née dans une famille de paysans pauvres de la région de Grenoble, Lucie Baud commence à travailler à 12 ans dans une filature de soie. Jeune femme, après avoir perdu son mari prématurément, elle s’engage dans la défense des droits de ses collègues ouvrières, bientôt affermie dans sa détermination par sa rencontre avec le syndicaliste Auda.
C’est le début d’un long combat, celui d’une femme seule contre les préjugés de son temps.
Chansons contre l’oubli
Lucie Baud, belle et tragique figure de la lutte ouvrière, serait totalement tombée dans l’oubli si l’historienne Michelle Perrot n’en avait pas retrouvé la trace. Pièce à conviction : un mémoire signé par Lucie Baud elle-même, faisant le récit circonstancié de son combat social. Qu’une femme ouvrière du début du XXe siècle écrive en son nom était déjà assez extraordinaire pour être remarqué…
On comprend que le militant Gérard Mordillat se soit intéressé à cet étonnant personnage, poursuivant une exploration qui traverse toute son œuvre romanesque et cinématographique, de Vive la Sociale (1983) à Les vivants et les morts (2010).
Non pas qu’il y trouve la matière à un exposé didactique sur l’histoire des luttes prolétariennes, au contraire. Tout son travail a consisté à donner de la chair à l’engagement de son héroïne, à lui insuffler de l’émotion. Cela passe par la musique de Jean-Claude Petit, fidèle complice du réalisateur, et la place qu’elle accorde aux chansons fredonnées ou chantées par les personnages, qui du Temps des cerises au Va, pensiero de Verdi, se font les miroirs de leurs sentiments. Cela passe aussi par l’interprétation de Virginie Ledoyen, qui aux côtés d’un Philippe Torreton magistral, prête son regard noir et décidé à cette femme combative et généreuse, incarnant sa tragique destinée avec une intense sobriété.
Fraternellement,
GdM