Plestin a écrit :L'église influence significativement une partie de la population sur sa façon d'être et de penser, je ne crois donc pas que son rôle soit si secondaire que ça dans la défense de l'ordre bourgeois même dans un pays comme la France.
Je suis d'accord que l'Eglise garde une influence significative, mais celle-ci lui sert plus à maintenir des préjugés réactionnaires (sexistes, homophobes) et à mobiliser autour de LMPT par exemple, qu'en défense de l'ordre bourgeois. L'ordre bourgeois s'appuie plus sur des institutions comme l'école ou les mass médias pour asseoir son emprise idéologique. L'Eglise ne lui est plus d'une grande utilité depuis longtemps, elle a même parfois pris position contraire aux intérêts bourgeois (soutien à la lutte des Lip par exemple). Laffargue faisait d'ailleurs ce constat dès le XIXème (La Religion du Capital), sur le fait que la religion était supplantée par celle du capital et les bourgeois ont effectivement mené une bataille d'influence contre l'Eglise pour s'accaparer l'intégralité du pouvoir politique et économique. C'est notamment ce qui a donné la loi de 1905.
Plestin a écrit :Quand tu discutes de la société capitaliste et d'une société meilleure qui serait nécessaire et que la brave dame antillaise te répond qu'elle est d'accord avec toi et que la solution, c'est de faire en sorte que le Seigneur règne à nouveau sur terre, eh bien sa croyance est un sacré obstacle, un obstacle favorable au maintien de l'ordre bourgeois.
Tout à fait d'accord avec toi. Dans ce cas là sa croyance est un frein, voire un obstacle. C'est du même ordre que quand je disais "tant que ça n'empêche pas de vouloir changer le monde réel ici maintenant sans attendre que ça aille mieux après la mort"....
Plestin a écrit : Tu prends l'exemple de la théologie de la libération, mais justement : en Amérique latine, de nombreux prêtres se sont faits les militants de cette façon de penser qui met au premier plan le partage en faveur des plus pauvres ; ce faisant, ils ont aussi contribué à prolonger l'emprise de l'église sur la population : pourquoi quitter l'église si elle dit des choses plaisantes comme cela ? Des tas de gens sont restés catholiques en s'accommodant des contradictions, grâce à la théologie de la libération qui prouvait qu'on pouvait être catholique et du côté des pauvres. Les sommets de l'église ne s'y sont pas trompés. Dans sa lutte contre la théologie de la libération, présentée comme trop complaisante vis-à-vis du marxisme, Rome a habilement manoeuvré. La reprise en main s'est faite en douceur, sans attaques frontales (si l'on met bien sûr de côté quelques assassinats ciblés organisés par des réacs également catholiques mais pas officiellement envoyés par Rome). On a commencé par passer de la pommade à la théologie de la libération, tout en rappelant quelques fondamentaux, que les pauvres c'était bien de s'en préoccuper mais qu'il ne faut pas pour autant s'éloigner de la foi et oublier de critiquer le marxisme (Ratzinger en 1984), et, avec Jean-Paul II, qu'il ne faut pas d'exclusive envers les autres classes sociales et que s'il faut un meilleur partage des richesses, la propriété privée reste indispensable...
Je suis d'accord avec les problèmes que tu pointes. Ça montre d'ailleurs à quel point le Vatican est un acteur
politique, qui agit de manière calculée en fonction d'intérêts matériels et non de manière purement idéologique.
Je pense que parmi les contradictions de la théologie de la libération, il y a la promotion d'une charité d'Etat qui a été le ciment du régime chaviste..... et donc d'un régime capitaliste extractiviste. Mais on est là dans des problèmes éminemment politiques et matériels, qu'il faut discuter comme tels. Pas juste dire c'est mal parce que c'est religieux. La charité d'Etat plutôt que l'émancipation des travailleurs par eux-mêmes est aussi promue par des athées.
Plestin a écrit :Au bout du compte, pour les idées marxistes, on a perdu beaucoup de temps. Il aurait mieux valu dès le départ que prédominent les critiques mettant l'accent sur le fait que les églises n'étaient absolument pas du côté des opprimés et tenter d'enfoncer un coin entre eux et l'église, plutôt que le débat soit monopolisé par ceux qui, avec la théologie de la libération, tentaient de concilier l'inconciliable et qui n'ont fait que prolonger... le règne de l'église sur terre !
Faire prédominer la critique de l'Eglise dans des pays ultra-religieux, pas sûr que ça aurait été efficace. En revanche construire un mouvement révolutionnaire en indépendance totale avec les institutions religieuses...... et étatiques, aurait été une nécessité. Le drame au Venezuela notamment, c'est l'absence d'une opposition indépendante un tant soit peu conséquente à la gauche du chavisme et du PSUV. Mais on en arrive à un tout autre sujet...

Rassuré en tout cas de lire tes positions...
