Informations Ouvrières N° 182, du 12 au 18 janvier 2012
On n’y touche pas !
L’emploi est au cœur de tous les discours.
Campagne électorale oblige, il n’y a, paraît-il, pas de sujet qui préoccupe davantage nos candidats et « grands » responsables politiques.
S’agirait-il d’interdire les 6 800 suppressions d’emplois à PSA, de réquisitionner le site de Petroplus, de garantir l’emploi des salariés de SeaFrance ?
Vous n’y êtes pas.
Pour « gagner la bataille de l’emploi », il faut... développer la compétitivité des entreprises.
Et, pour cela, abaisser le coût du travail.
La « reprise » (partielle, et pour combien de temps ?) de l’industrie automobile aux Etats-Unis est donnée en exemple.
Rappelons qu’au préalable, le syndicat UAW de General Motors (GM) avait accepté le licenciement de 21 000 salariés, la remise en cause des régimes d’assurance maladie et de retraite, le versement de 20 milliards de dollars de la caisse de retraite pour recapitaliser l’entreprise, et le renoncement à 10 milliards de dollars dus par le patron à la caisse de retraite gérée par le syndicat !
Mais ce qui aux Etats-Unis se négocie entreprise par entreprise constitue en France une seule et unique institution ouvrière: la Sécurité sociale.
La Sécu « ce pelé, ce galeux, d’où venait tout leur mal » aurait dit La Fontaine.
Depuis l’instauration de la CSG, plus de 200 milliards d’euros prélevés sur la Sécurité sociale ont été offerts en exonérations aux patrons.
Pour la seule année 2009: 30 milliards d’euros d’exonérations, bien plus que le prétendu déficit.
Mais les capitalistes veulent aller plus loin.
Madame Parisot revendique de récupérer 80 milliards d’euros sur le salaire différé qui appartient aux travailleurs.
C’est l’objectif du projet de loi Sarkozy qui prétend transférer le financement de la Sécurité sociale sur l’impôt.
Transfert qui permettrait au gouvernement de réduire la Sécu à peau de chagrin et d’utiliser cet argent à d’autres fins.
Il s’agit donc bien de confisquer ce qui appartient à la classe ouvrière: son salaire différé.
Ici, les travailleurs sont,malheureusement, confrontés à un problème majeur: le consensus général, parmi ceux qui se réclament des intérêts des travailleurs, pour accepter ce tour de passe-passe.
En tête de ce consensus, le Parti socialiste se dit opposé à la TVA sociale mais propose de transférer une partie de son financement sur l’impôt.
Président (PS) de la Cour des comptes, Didier Migaud appelle à « un redressement rapide des comptes publics » et dénonce les dépenses de Sécurité sociale qui « représentent 46 % des dépenses publiques et ne peuvent plus être financées à crédit ».
Qu’on arrête de vouloir nous faire prendre des vessies pour des lanternes !
La Sécurité sociale ne relève pas de la « dépense publique ».
C’est du salaire différé, propriété de la classe ouvrière, c’est en ces termes qu’elle a été arrachée en 1945.
La seule attitude conforme aux intérêts des travailleurs serait que ceux qui prétendent parler en leur nom reviennent à ce qui était naguère la position commune du mouvement ouvrier: la Sécu nous appartient, c’est celle de 1945, c’est notre salaire différé, on n’y touche pas (1) !
Daniel Gluckstein
Secrétaire national du POI
(1) A propos d’emplois: combien de dizaines de milliers immédiatement créés à la Sécurité sociale, dans les hôpitaux, les centres de santé et de PMI, dès lors que l’on rétablit la Sécu sur ses bases, celles du salaire différé et de la solidarité ouvrière ?