«Mediator» : morts pour le profit des trusts pharmaceutiques

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Message par meichler » 21 Nov 2010, 09:26

«Le Monde» du 16 novembre 2010 :

a écrit :Derrière les morts du Mediator, des soupçons de collusion

LEMONDE.FR | 16.11.10 | 20h10  •  Mis à jour le 18.11.10 | 09h06

Le Mediator, un médicament pour diabétiques en surpoids produit par les laboratoires Servier et interdit depuis novembre 2009, aurait causé entre 500 et 1 000 morts, selon l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Mardi après-midi, Xavier Bertrand, le nouveau ministre de la santé, a appelé "tous ceux qui ont pris du Mediator" à consulter un médecin. L'avocat de plusieurs victimes évoque un "scandale sanitaire", alors que des connaisseurs du dossier dénoncent une interdiction trop tardive du médicament et le rôle joué par l'Afssaps elle-même.

Qu'est-ce que le Mediator ?

Le Mediator est un médicament réservé à l'origine aux diabétiques en surpoids. Son effet coupe-faim en a peu à peu fait l'un des médicaments les plus prescrits aux patients souhaitant maigrir. La molécule benfluorex, qui fait partie de la famille des fenfluramines et rentre dans la composition du Mediator, appartient à une famille cousine des amphétamines.

Le médicament est commercialisé depuis 1976 par le groupe Servier — deuxième groupe pharmaceutique français après Sanofi-Aventis. Il a longtemps été l'un des produits phare du laboratoire : 88 % des ventes mondiales ont été réalisées en France (en 2007, il était le 44e médicament le plus vendu dans l'Hexagone) ; deux millions de patients français en ont pris entre 1976 et 2009, selon les chiffres du député socialiste Gérard Bapt, qui a travaillé sur le sujet ; 7 millions de boîtes étaient encore vendues en 2009 et remboursées par l'assurance-maladie à hauteur de 65 %. Selon les estimations de M. Bapt, qui a travaillé sur le sujet, ce médicament aura généré un chiffre d'affaires de 1 milliard d'euros pour le groupe Servier.

Quels effets néfastes sur la santé ont été observés ?

En un peu plus de trente ans, entre 500 et 1 000 personnes seraient mortes des pathologies liées à la prise du médicament : ces données proviennent d'une estimation de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) et ont été relayées par l'Afssaps. Selon la même source, les effets secondaires du Mediator sont graves — maladies des valves cardiaques ainsi que des cas rares d'hypertension pulmonaire. Ils perdurent au-delà de la période de prise du médicament et entre 150 et 250 hospitalisations seraient directement liées à une toxicité du Mediator chaque année en France. Pour l'avocat Charles Joseph-Oudin, qui représente douze victimes qui ont décidé d'attaquer le laboratoire Servier, ces chiffres confirment l'existence d'un "scandale sanitaire majeur".

Quand a-t-on découvert le danger ?

En 1997, le New England Journal of Medicine publie un article détaillant les effets nocifs du dexfenfluramine sur les valves cardiaques. La même année, les fenfluramines — dont le célèbre coupe-faim Isoméride, également vendu par Servier — sont interdites aux Etats-Unis et en Europe. Le Mediator, qui n'est commercialisé qu'en Europe, échappe à l'interdiction, alors même que sa parenté avec les coupe-faim interdits est connue.

Le médicament est finalement retiré du marché français le 30 novembre 2009 par l'Afssaps, et la décision définitive d'interdiction prise le 14 juin 2010 par l'Agence européenne du médicament. L'interdiction fait notamment suite aux travaux menés à partir de 2006 par le docteur Irène Frachon qui mettent en évidence le rôle du Mediator dans les valvulopathies diagnostiquées chez les patients utilisant le médicament. Cette pneumologue au CHRU de Brest a raconté dans un livre — Mediator 150 mg (Editions-dialogues.fr) présenté dans Le Monde en juillet 2010 — l'inertie des autorités sanitaires et la façon dont le laboratoire Servier s'est employé à repousser l'interdiction. Lequel laboratoire obtiendra de la justice, en juin, le retrait du sous-titre du livre au motif qu'il causerait des dommages aux laboratoires Servier… si le médicament était remis en vente.


Pourquoi a-t-on autant attendu ?

C'est la question que pose sans relâche le député Gérard Bapt, par ailleurs médecin cardiologue. "Pourquoi le Mediator échappe-t-il [en 1997] à la proscription générale des fenfluramines ? Son appartenance à cette famille était pourtant anciennement connue !, écrivait-il en août 2010 dans une tribune au Monde. Le premier cas de valvulopathie sous Mediator est décrit en France en 1999, sans qu'une suite soit donnée. Le premier cas espagnol décrit en 2003 amène son interdiction dès 2005. Deux ans plus tard, Servier ne demandera pas le renouvellement de l'AMM [autorisation de mise sur le marché délivrée par l'Afssaps] en Italie. En France, (…) il est seulement demandé de nouvelles études."

Directement mise en cause, l'Afssaps se défend. Selon Fabienne Bartoli, l'adjointe du directeur général, "l'établissement a mis le médicament sous surveillance dès 1997, mais a concentré ses recherches sur les cas d'hypertension artérielle-pulmonaire, et non sur les pathologies des valves cardiaques", celles que provoque majoritairement le Mediator. Mais pour l'avocat Charles Joseph-Oudin, l'Afssaps a surtout joué le jeu du laboratoire Servier, contestant toutes les études qui auraient pu mener à une interdiction plus rapide.

Un avis que le député Bapt partage, évoquant une "insensibilité française au risque" : "Nous avons été le dernier pays au monde à interdire le Distilbène." Dans le cas du Mediator, "l'Afssaps prétend n'avoir pas trouvé de raisons d'interdire le médicament. Mais si on ne cherche pas, on ne trouve pas : jamais l'Afssaps n'a fait part aux médecins de ses doutes, alors que ce sont eux qui, par leur nombre et leur proximité avec le patient, peuvent fournir les informations qui permettent d'évaluer la nocivité d'un médicament. Que Servier diffuse des contre-vérités, c'est une chose, mais que l'Afssaps lui serve de relais…"

L'Afssaps est-elle la mieux placée pour délivrer les autorités de mise sur le marché ?

Cette mission est au cœur du travail de cet établissement public, mais de plus en plus de voix s'élèvent pour dénoncer son fonctionnement, estimant que celui-ci ne garantit pas une prise de décision indépendante. C'est notamment le cas d'Irène Frachon, qui a dû mener de son propre chef les études ayant amené à l'interdiction du Mediator puis batailler pour se faire entendre pendant de longs mois : "Les raisons de ce retard sont multiples, mais reposent essentiellement sur une gestion qui n'est pas satisfaisante des conflits d'intérêts au sens large et des pressions" au sein de l'Afssaps, explique-t-elle dans un chat au Monde.fr.

En cause dans ces "pressions" évoquées par la praticienne, le financement de l'organisme. En 2005, une commission d'enquête du Sénat avait dénoncé le désengagement de l'Etat dans cette structure censée pourtant être indépendante : "En 2003, les ressources de l'Afssaps provenaient pour 83 % de l'industrie pharmaceutique et pour seulement 6,4 % de l'Etat" écrivait la commission d'enquête. Conclusion des sénateurs : "N'étant plus soutenue financièrement par l'Etat, l'Afssaps n'ose plus prendre de décisions contrariant un tant soit peu les intérêts immédiats des firmes. (…) La préservation de la santé de l'industrie pharmaceutique semble ainsi passer avant celle des patients." Aujourd'hui, l'Afssaps dépend à 100 % des laboratoires pour vivre, même si, rappelle Fabienne Bartoli, cet argent est récolté par l'Etat via une taxe puis attribué à l'établissement, "exactement comme l'impôt".

Gérard Bapt critique quant à lui à le climat d'"opacité" dans lequel les décisions de l'agence sont prises, et leur caractère "anonyme". Il dénonce surtout la "collusion" existant entre les laboratoires pharmaceutiques et les organismes de contrôle : "Le trésorier de la société française de pharmacologie, qui a plus que son mot à dire dans les interdictions, est le directeur scientifique de Servier ; M. Servier lui-même a été fait grand-croix de la Légion d'honneur par Sarkozy…"

Autre exemple apporté par M. Bapt et développé dans ce courrier adressé en août au directeur général de l'Afssaps, Jean Marimbert : Gérard Bapt y fait part de sa "stupeur" d'avoir découvert que des courriels échangés entre deux membres de la commission d'autorisation de mise sur le marché au sujet du Mediator et des travaux d'Irène Frachon étaient également adressés "aux représentants du laboratoire Servier". Des mails envoyés "sous le coup de la colère d'avoir été traînés dans la boue", justifie Fabienne Bartoli, colère que les deux membres voulaient partager avec leurs "pairs" du groupe pharmaceutique.

Me Charles Joseph-Oudin, qui estime que "la question de la collusion se pose dans cette affaire", dit de son côté "envisageable" de poursuivre l'Afssaps dans ce dossier où le groupe Servier est déjà poursuivi au civil.

Benoît Vitkine


Les Inrockuptibles du 17 novembre 2010 :

a écrit :
Quand Sarkozy encensait Jacques Servier, fabricant du Mediator


17/11/2010 | 17H35

Crédits photo:  Nicolas Sarkozy élève Jacques Servier au rang de Grand Croix de la Légion d'Honneur en 2009 (Elysée).



Effets imprévisibles ou négligence? Le médicament qui aurait causé la mort d’au moins 500 personnes n'a été retiré du marché qu'en 2009. L'année où son patron a été fait Grand-Croix de la Légion d'Honneur par le chef de l'Etat.

Au moins 500 morts à cause d’un médicament contre le diabète, largement utilisé comme coupe-faim. C’est quatre fois plus que les décès officiellement attribués à l’hormone de croissance, objet d’un retentissant procès. Responsabilité du fabricant, des autorités sanitaires alors que le médicament avait été retiré du marché aux Etats-Unis en 1997, en Italie et en Espagne en 2005? Après son retrait en France en 2009, le bilan du Mediator reste à établir.

"En tant qu’entrepreneur, vous avez été souvent sévère à l’endroit de l’administration française. Vous critiquez l’empilement des mesures, des normes, des structures et vous avez raison", disait Nicolas Sarkozy de Jacques Servier, patron des laboratoires du même nom, en l'élevant au rang de Grand Croix de la Légion d'Honneur en 2009. Des "mesures", des "normes" qui auraient peut-être gagnées à être renforcées dans le cas du Mediator.

Deux études récentes de la Caisse d’assurance maladie concluent à la dangerosité du médicament. Selon la première, les diabétiques traités par le Médiator ont eu trois fois plus de risques de souffrir de cardiopathies vasculaires et quatre fois plus de risques d'avoir une chirurgie valvulaire que ceux suivant un autre traitement.

L’autre, à paraître dans les prochaines semaines et déjà citée par Le Figaro, se risque même à avancer le chiffre de 500 à 1000 décès sur toute la période de circulation du médicament, entre 1976 et l’an dernier. Environ une personne exposée sur mille serait victime de graves atteintes cardiaques.

Le député socialiste Gérard Bapt a demandé le 17 novembre la démission de Nora Berra, secrétaire d'Etat à la santé. Elle avait déclaré : "il faudra voir la relation d'imputabilité entre le médicament et ses effets". Le 16 pourtant, Xavier Bertrand, nouveau ministre de la santé, avait appelé "tous ceux qui ont pris du Mediator" à consulter un médecin. Il était interrogé sur le sujet à l’Assemblée nationale.


Depuis plusieurs années, la pneumologue Irène Frachon tentait d’alerter les autorités sanitaires sur les dangers du Mediator. Son livre Mediator, combien de morts? - le sous-titre a été censuré à la suite d’une procédure judiciaire intentée par le fabricant - synthétise ses travaux sur le sujet. La pneumologue souligne les risques que le médicament fait courir en terme de santé publique.

Reprochant aux autorités françaises leur inertie sur le Mediator, la chercheuse souligne également la responsabilité du fabricant :

“Très clairement, il y a un très gros problème de transparence du côté du laboratoire, notamment au niveau de l'information qu'il a donnée sur ce médicament. Il n'y avait pas assez d'informations sur la nature du médicament à la disposition des prescripteurs et des consommateurs."

Elle accuse même Servier d’avoir donné “des informations qui ne correspondent pas, je pense, à la réalité scientifique”. Ce n’est pas la première fois qu’un médicament coupe-faim se révèle nuisible: l’Isoméride, à la composition proche du Mediator, retiré du marché en 1997. Et élaboré par le même laboratoire : Servier.

Un labo dont le patron, Jacques Servier, a été distingué par le président de la République, qui l’élève au grade de Grand-Croix de la Légion d’honneur en 2009. Sans doute fier de sa breloque, le patron exhibe sur le site de son laboratoire l’allocution présidentielle débitée à cette occasion.

Nicolas Sarkozy a l’air content : après avoir vanté “un personnage hors du commun” avec “une conception profondément humaine” de son métier, le Président se lâche :

“Vous vous êtes battu toute votre vie pour soulager et pour guérir, pour proposer aux médecins et à leurs patients des médicaments efficaces. [...]

Vous n’avez eu de cesse de prendre des risques. Je sais bien que passer d’Orléans à Neuilly, c’était déjà, pour reprendre vos mots, se développer à l’international. [...]

La Nation vous est reconnaissante de ce que vous faites. Vous êtes une publicité vivante pour les médicaments SERVIER parce que, franchement, l’âge n’a absolument aucune prise sur vous.”

L’âge non, la justice peut-être : des patients traités par Mediator ont déposé plainte contre le groupe Servier.


«Le Monde» du 21 novembre 2010 :

a écrit :Jacques Servier rompt le silence sur le Mediator

Mediator : "C'est à se demander si cette affaire est une fabrication"


Agé de 88 ans, Jacques Servier, fondateur du groupe pharmaceutique du même nom, est toujours à la tête de l'entreprise qu'il a créée en 1948. Non coté en Bourse, son groupe a affiché un chiffre d'affaires de 3,6 milliards d'euros en 2008-2009. Violemment mis en cause par l'affaire du Mediator, un médicament destiné aux diabétiques en surpoids, mais dont l'usage était détourné par des femmes souffrant d'obésité, M. Servier a accepté de répondre aux questions du Monde, assisté par un cadre.

Le Mediator est à l'origine d'au moins 500 décès, selon les autorités sanitaires. Quelle est votre position ?

Je pèse mes mots : nous sommes sidérés, stupéfaits ! C'est à se demander si cette affaire est une fabrication. Le Mediator a été retiré par nous-mêmes en accord avec l'Agence (l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - Afssaps) après réévaluation du bénéfice/risque.

Une fabrication ? Dans quel but ?

Je ne sais pas. Il y a peut-être l'idée d'embêter le gouvernement. Nous, cette affaire nous choque !

Avez-vous été surpris par les résultats de cette étude ?

En trente-quatre ans, ce produit n'a pas suscité la moindre plainte. Il y a un mystère. En 2008, l'Afssaps autorisait deux de nos concurrents à produire un générique du Mediator. Puis, il y a un an, le produit a été retiré du marché, les médecins et les patients ont été informés et personne n'a évoqué le moindre décès. Il n'y en avait pas. Tout à coup, le bruit médiatique surgit, disproportionné.

Contestez vous le chiffre des 500 morts ?

Nous voudrions comprendre où ils sont. Qui a intérêt à tuer ses patients ? Ces statistiques sont basées sur des présomptions. Nous avons le souci d'élucider le chiffre de 500 morts avec le ministère de la santé, l'Afssaps, Mme Frachon (le médecin qui a révélé l'affaire) et la CNAM...

Le Mediator appartient-il à la famille des fenfluramines qui avaient provoqué le retrait du marché de l'Isoméride ?

Dans les articles, on confond l'Isoméride et le Mediator. C'est la même famille, mais deux molécules différentes. Pour donner un exemple, il y a plus de différences entre le Mediator et l'Isoméride qu'entre la testostérone et les oestrogènes, et pourtant, dans ce dernier cas, il s'agit de la différence entre un homme et une femme.

Le Mediator n'a-t-il pas un effet similaire à l'Isoméride ?

Non. Il y a un métabolite commun, en effet. Mais il est présent à 40 % dans l'Isoméride, et à 2 % dans le Mediator.

Reconnaissez-vous un lien entre Mediator et valvulopathie ?

Il faut étudier cette question. Les études qui ont posé le lien sont très récentes. Jusqu'à 2008, aucun cas de décès par valvulopathie avec le Mediator n'était signalé.

Le Mediator n'a-t-il pas été retiré en Espagne sur le soupçon d'un cas de valvulopathie ?

Non, c'est faux. C'est nous qui n'avons pas demandé le renouvellement de l'autorisation fin 2003 en Espagne et en janvier 2004 en Italie, en raison de problèmes logistiques et de rentabilité.

Le Mediator est-il un coupe-faim ?

Il n'est pas un coupe-faim et cette indication n'a jamais été demandée. Mais on estime qu'il a été utilisé dans 20 % des cas comme tel.

Vos visiteurs médicaux ne l'ont jamais recommandé dans cette indication aux médecins ?

Jamais ! Nos visiteurs médicaux tiennent à être reçus correctement par les médecins. Ils tiennent à leur réputation. Nous ne sommes pas une maison financière. Je vous rappelle que le Mediator ne représentait que 0,7 % de notre chiffre d'affaires. Prendre des risques pour un produit mineur en termes de chiffres d'affaires n'a pas de sens.

L'Afssaps est accusée d'être sous votre influence pour avoir tardé à interdire le Mediator. Qu'en pensez-vous ?

L'idée d'une collusion avec l'Agence nous fait sourire.

Yves Mamou et Marie-Pierre Subtil


Article paru dans l'édition du 21.11.10
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Message par meichler » 08 Déc 2010, 07:56

«Le Monde» du 08 décembre 2010 :

a écrit :La question qui fâche M. Bertrand

Dès 1997, son utilité était mise en doute. Pourtant, à son retrait en 2009, le Mediator était remboursé à 65 %. Les autorités ont-elles été " complaisantes " ?

Vous vous rendez compte de ce que vous venez de dire ! " Dans le studio de France Inter, l'invité du matin s'emporte. Son hôte, Patrick Cohen, vient, ce lundi 6 décembre, de lâcher le mot qui fâche : " On soupçonne les pouvoirs publics et les autorités sanitaires de complaisance à l'égard des laboratoires Servier. " L'échange entre Xavier Bertrand et le journaliste devient tendu. Très tendu.

" Complaisance ?

- Oui, complaisance.

- Vous plaisantez, ou quoi ? "

Au coeur de la polémique, un document paru dans Le Canard enchaîné le 1er décembre a propos du Mediator. Le fac-similé a jeté le trouble : sur du papier à en-tête d'une commission publique, une note décrit les effets nocifs du produit. Or ce document date d'avril 2006. Le ministre de la santé était alors... Xavier Bertrand. " Le ministre de la santé que vous avez été une première fois, entre 2005 et 2007, n'a jamais été alerté de la dangerosité de ce produit ? ", demande Patrick Cohen. " Franchement, non ! ", répond M. Bertrand.

Le 16 novembre, les autorités sanitaires ont admis que le Mediator, adjuvant au traitement contre le diabète, souvent utilisé comme coupe-faim, a fait plus de 500 morts et 3 500 hospitalisations pour atteintes des valves cardiaques, avant son retrait du marché, un an plus tôt. Dès le lendemain, tout juste nommé ministre du travail, de l'emploi et de la santé, Xavier Bertrand a demandé une enquête à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Selon le Canard enchaîné, les inspecteurs de l'IGAS, confrontés à une multitude de questions, la rangeront dans leur dossier " remboursement ". Au mystère central - le maintien sur le marché d'un dérivé d'amphétamines dont tous les " cousins " ont été retirés - s'ajoute celui-ci : pourquoi ce produit est-il resté remboursé au taux maximal de 65 % jusqu'à son retrait des pharmacies, le 30 novembre 2009 ?

" L'assurance-maladie doit-elle prendre en charge des prescriptions qui ne répondent pas à une utilité médicale ? " La question, qui se réfère au Mediator, date de... 1997. C'est l'Union régionale des caisses d'assurance-maladie (Urcam) de Bourgogne qui la pose, en lançant une enquête. L'étude qui en résulte évoque " des prescriptions inutiles, voire dangereuses pour la santé ".

Deux ans plus tard, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, lance une vaste réévaluation : 4 200 médicaments sont passés au crible, dans le but de combler le " trou " de la Sécurité sociale. En novembre 1999, la Commission de la transparence rend un verdict sans appel pour ce qui est du Mediator : le service médical rendu est insuffisant pour justifier sa prise en charge. Le taux de remboursement reste toutefois inchangé.

En 2006, une nouvelle réévaluation s'achève, qui s'est déroulée en trois vagues, sous des gouvernements de droite. A la Commission de la transparence, qui dépend désormais de la Haute Autorité de la santé, un chef de projet fournit, concernant le Mediator, un document préparatoire. Celui-ci reproduit l'argumentaire que la revue indépendante Prescrire martèle depuis des années : ce produit est un dérivé de " deux anorexigènes amphétaminiques retirés du marché du fait d'effets indésirables graves : hypertensions artérielles pulmonaires et valvulopathies ". C'est cette note que le Canard enchaîné vient de diffuser.

La Commission de la transparence n'a pas vocation à se prononcer sur les risques que présente un médicament, elle n'évalue que le bien-fondé de son remboursement. Son avis est consultatif, la décision est du ressort du ministre. Il n'empêche : voilà ses membres prévenus, et, avec eux, les fonctionnaires qui siègent sans voix délibérative (représentants de la direction générale de la santé, de la direction des hôpitaux et de l'Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé, l'Afssaps).

Le 10 mai 2006, cette commission rend son avis. Elle confirme que le service médical rendu est insuffisant en ce qui concerne une des deux indications (régime adapté dans les hypertriglycéridémies). Mais elle sursoit en ce qui concerne l'autre (diabétiques en surpoids), dans l'attente d'une réévaluation du rapport bénéfice/risque par l'Afssaps. Résultat : le Mediator reste remboursé à 65 %.

" Chaque commission répond à une question différente ", explique un des protagonistes de cet épisode. Le professeur Philippe Even parle, lui, d'" usine à gaz " à propos de l'Afssaps, l'établissement public qui a succédé à l'Agence du médicament en 1999 - et dont les numéros un et deux n'ont pas donné suite à notre demande de rencontre, réservant leurs réponses aux inspecteurs de l'IGAS.

Les comptes rendus de réunion des différentes commissions de l'Afssaps montrent que, depuis 1997, la question de la nocivité du Mediator était régulièrement posée. Les études, ou les demandes d'étude, se sont succédé, les responsables ont permuté (Fabienne Bartoli, numéro deux de l'Afssaps, était conseillère au cabinet de Xavier Bertrand jusqu'au 1er avril 2006 ; elle avait été remplacée par Françoise Weber, l'actuelle directrice générale de l'Institut de veille sanitaire, qui venait de... l'Afssaps), le Mediator est resté remboursé. Et il le serait toujours, puisqu'il serait toujours commercialisé, si l'alerte n'était venue de l'extérieur de ce petit monde.

Marie-Pierre Subtil


a écrit :
Le député PS Gérard Bapt mène son enquête

GÉRARD BAPT était cardiologue avant de devenir député (PS), il y a trente-deux ans. Le voilà détective. Depuis la publication de sa tribune " Mediator, combien de morts ? ", publiée le 24 août sur Lemonde.fr - élément déclencheur du scandale après le livre d'Irène Frachon, Mediator 150 mg (Editions-dialogues.fr) -, l'élu de la Haute-Garonne enquête. Seul, en attendant la création de la mission d'information qu'il rêve de voir naître à l'Assemblée nationale.

La publication par Le Canard enchaîné d'une note, datant de 2006, qui résumait les effets toxiques du Mediator, l'a lancé sur de nouvelles pistes. Il a demandé la liste des personnes qui avaient reçu cette note. Parmi elles figurent, selon lui, des représentants de différentes directions du ministère de la santé et de l'Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (Afssaps) : " Ces directions ont-elles fait parvenir l'information au cabinet du ministre ?Généralement, ça remonte au conseiller chargé du médicament ou au directeur de cabinet. Le ministre a-t-il été informé ? "

Certes, la gauche, en 1999, avait déjà laissé sans suite un avis favorable au déremboursement du Mediator. Mais " il s'agissait d'une décision économique ". En 2006, le risque étant énoncé, " une décision de santé publique aurait dû être prise ", estime le député.

Conseil de déontologie

L'ancien cardiologue milite pour une réforme en profondeur du système de pharmacovigilance : des représentants de patients, de consommateurs et des personnalités qualifiées devraient siéger à l'Afssaps et à la Haute Autorité de santé ; des moyens publics importants devraient leur être alloués ; et un conseil de déontologie et de prévention des conflits devrait être placé auprès de ces établissements - " Quand on découvre qu'un expert de l'Afssaps a un conjoint salarié chez Servier... "

Marie-Pierre Subtil
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Message par meichler » 25 Déc 2010, 09:46

a écrit :«Libération»


Société 24/12/2010 à 11h13 (mise à jour à 13h36)

Les patients ayant pris du Mediator intégralement pris en charge par la Sécu

Commercialisé en France de 1976 à novembre 2009, ce médicament aurait coûté 423 millions d'euros en dix ans à la Sécurité sociale et aux complémentaires santé.



Tous les patients qui ont pris du Mediator bénéficieront d'une «prise en charge intégrale par l'assurance-maladie», a annoncé vendredi le ministre de la Santé Xavier Bertrand sur RTL, en les invitant à «consulter».

«Ma priorité, c'est de renforcer notre système de prise en charge et de dire que pour tous ces patients qui ont pris du Mediator, il y a aura une prise en charge intégrale par l'assurance maladie et qu'il faut donc consulter», a déclaré le ministre. «Il y a un certain nombre de médicaments qui sont sous surveillance. (...) Quand il y a des questions sur le bénéfice et le risque d'un médicament, une préoccupation c'est de prendre les mesures qui s'imposent le plus vite possible», a-t-il ajouté.

Le ministre a demandé un rapport à l'Igas (Inspection générale des affaires sociales), attendu mi-janvier. En début de semaine, Bertrand avait évoqué de «fortes présomptions de défaillances graves dans le fonctionnement de notre système du médicament» à propos du maintien sur le marché du Mediator.

Une note confidentielle de l'Unocam révèle, par ailleurs que le Mediator, ce médicament utilisé comme coupe-faim qui a fait de 500 à 2.000 morts, a coûté 423 millions d'euros en dix ans à la Sécurité sociale et aux complémentaires santé, annonce Aujourd'hui en France.

L'Unocam réunit les fédérations d'assurances et mutuelles complémentaires santé et ses experts estiment que «l'assurance maladie a dépensé 324,89 millions d'euros au titre du remboursement de ce médicament», selon le quotidien.

L'addition réglée par les mutuelles et assurances se monterait, elle à 98,71 millions d'euros, selon la même source.

Les experts de l'Unocam s'étonnent de «l'octroi par les autorités d'un taux de remboursement de 65% en totale inadéquation avec le niveau de service médical rendu qualifié d'"insuffisant" par l'autorité de santé».

Commercialisé en France par les laboratoires Servier de 1976 à novembre 2009, le Mediator (benfluorex), destiné aux diabétiques en surpoids et largement détourné comme coupe-faim, a été utilisé par 5 millions de personnes, dont 2,9 millions pendant plus de 3 mois. Il a été retiré du marché en novembre 2009.

(Source AFP)


a écrit :«Libération»


Économie 23/12/2010 à 00h00 (mise à jour à 12h27)

L’avocat Sarkozy, conseiller «historique» de Servier


L’actuel président a travaillé pour le laboratoire pendant plusieurs années et il a décoré de la Légion d’honneur son fondateur en 2009.



Par GRÉGOIRE BISEAU


Opération déminage. Hier, à l’occasion du Conseil des ministres, Nicolas Sarkozy a demandé à ses ministres «la transparence la plus totale» sur l’affaire du Mediator. «Avec le Premier ministre et le ministre de la Santé, le président de la République est extrêmement attentif à ce sujet», a assuré François Baroin, le porte-parole du gouvernement. Et pour cause : Jacques Servier, le fondateur et PDG du deuxième laboratoire français, est une très bonne connaissance de Nicolas Sarkozy. Mieux, un proche du chef de l’Etat reconnaît même que Servier a été «un client historique» quand l’actuel président était encore avocat d’affaires.

En 1983, Sarkozy entre au cabinet de Guy Danet, bâtonnier. Très vite, il travaille pour le compte de Servier, à l’époque un tout petit labo français. Quand il quitte son cabinet en 1987 avec Arnaud Claude et Michel Leibovici (aujourd’hui décédé), le jeune avocat d’affaires emmène dans ses bagages le laboratoire Servier. Le nouveau cabinet de Sarkozy devient le conseil du laboratoire en matière de droit des sociétés et de droit immobilier. Il a fort à faire. Le groupe Servier est alors composé d’un entrelacs d’une centaine de structures juridiques différentes, rien qu’en France. «Le but, c’était d’éviter de payer des impôts», assure un ancien cadre (lire ci-dessus).

Fin des années 90, début 2000, Jacques Servier vient consulter Sarkozy au sujet de son projet de fondation. L’idée est la suivante : au lieu de faire hériter ses enfants, son groupe deviendra la propriété d’une fondation de droit néerlandais et donc protégé de toute menace d’OPA. Pourquoi les Pays-Bas ? Le pays bénéficie d’un droit particulièrement favorable pour le statut des fondations, notamment en matière fiscale. Le groupe a d’ailleurs toujours refusé de communiquer ses bénéfices.

Raymond Soubie, alors patron du cabinet de conseil en ressources humaines Altedia, travaille lui aussi sur le dossier. «On a été consulté sur la possibilité, qui finalement ne verra pas le jour, de créer un fonds d’actionnariat salarié pour les employés français», confie à Libération celui qui deviendra le conseiller social de l’Elysée entre 2007 et novembre 2010.

Sarkozy a donc cru bon réveiller ces doux souvenirs en juillet 2009 lors de la remise à Servier des insignes de la grand-croix de la Légion d’honneur. «Vous avez fait de votre groupe une fondation ; Raymond [Soubie] et moi y avons joué un rôle», s’est-il extasié, dithyrambique. Un an plus tard éclatait le scandale Mediator.


a écrit :«Libération»


Société 23/12/2010 à 00h00

Un labo dopé aux politiques

A coups d’embauches ciblées et de dîners huppés, Servier s’est construit un réseau sans égal.



Par CÉDRIC MATHIOT, YANN PHILIPPIN

Jacques Servier n’a jamais caché le peu d’estime dans lequel il tenait les hommes politiques. Il fait sienne cette note d’Anatole France : «Je pardonne à la République de mal gouverner parce qu’elle gouverne peu.» Mais rajoute : «Les temps ont changé : la voilà qui gouverne !» Cela n’a pas empêché le chef d’entreprise de cultiver au sein du monde politique honni l’un des meilleurs réseaux d’influence. L’intéressé n’en fait pas mystère : «Si j’habite Paris depuis longtemps, c’est pour la seule raison que dans notre pays, il faut constamment intriguer dans la capitale, multiplier les pas et les démarches», écrit-il en 2007 dans le Médicament et la vie.

Rares sont les politiques qu’il sauve. Comptons Nicolas Sarkozy (lire page 6), qualifié de «providentiel» dans une interview récente. Ou le centriste Jacques Barrot, un des rares à être cité de manière positive par Servier. L’éloge porte sur son action au ministère de la Santé en 1980. Servier s’en souvient sûrement quand il recrute au milieu des années 80 Madeleine Dubois, une proche collaboratrice de Barrot au ministère, pour s’occuper de la communication du groupe. Avant de repartir chez le même Barrot… pour devenir son chef de cabinet au ministère des Affaires sociales entre 1995 et 1997. Par la suite, Madeleine Dubois se partage entre les deux Jacques (Servier et Barrot). Sans quitter le giron de Barrot en Haute-Loire. Elle est alors conseillère générale du canton d’Yssingeaux. Et on lui prête la découverte d’un prometteur poulain local, un certain Laurent Wauquiez. Mais elle continue d’officier pour Servier, jusqu’à devenir responsable des affaires extérieures du groupe.

Invité au Brésil. C’est elle qui représente Servier dans les raouts internationaux, et qui accueille, en 2006, Philippe Douste-Blazy, alors ministre des Affaires étrangères, pour lui présenter la maquette du futur site du groupe à Moscou. En 1991, c’est Jean-Bernard Raimond, ex-ministre des Affaires étrangères (RPR), qui est recruté. Henri Nallet, ex-garde des Sceaux socialiste, est propulsé conseiller pour les affaires internationales de Servier. A l’inverse, certains anciens salariés de la maison ont bifurqué en politique. C’est le cas de Nicolas About, sénateur des Yvelines, président de l’Union centriste et membre de la commission des affaires sociales du Sénat, un ex-responsable des relations médicales du laboratoire entre 1981 et 1985. Interrogé par Libération sur les liens qu’il conserve avec Servier, il oublie de dire que, l’an passé, il a été invité par le groupe au Brésil, pour la présentation d’un site. Il s’y est rendu en compagnie de Janine Rozier, membre elle aussi de la commission des affaires sociales du Sénat et sénatrice UMP du Loiret, où se situent encore plusieurs sites du groupe…

Le tableau serait incomplet si l’on oubliait Michel Hannoun. Ex-député RPR, ex-président du Conseil général de l’Isère, mais toujours président de la fédération UMP des métiers de la santé, président du conseil d’administration de l’Association des cadres de l’industrie pharmaceutique, membre du conseil de surveillance de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris… et responsable «monde» des études chez Servier. Ainsi, quand le ministre de la Relance, Patrick Devedjian, reçoit les responsables de l’industrie pharmaceutique, c’est Hannoun qui représente Servier. On reste en famille.

Disserter. Le même Hannoun est aussi l’animateur du Cercle Hippocrate, un club de réflexion, financé par Servier, où l’on trouve un ex-directeur de la Haute autorité de santé, un responsable d’une mutuelle, ou des syndicalistes, médicaux ou non. Chaque mois, ils reçoivent un invité à dîner dans l’hôtel particulier de Servier à Neuilly, tout près du siège du labo. On y a vu disserter Jean-Pierre Fourcade, ex-ministre UMP, et responsable du comité de suivi de la loi «Hôpital, patients, santé et territoires», ou encore Elisabeth Hubert, ancienne ministre UMP de la Santé et présidente de la Fédération nationale des établissements d’hospitalisation à domicile. Les invités sont surtout des professionnels. Mais aussi des députés, dont certains rapporteurs du budget de la Sécu. «Ils viennent pour présenter la loi, pas pour qu’on leur dise quoi y mettre, assure un membre du club. Le Cercle Hippocrate n’est pas un instrument d’influence, mais un outil de veille qui permet à Servier de savoir ce qui se passe et de sentir où va le système de santé.»

L’hôtel particulier de Neuilly, qui a abrité, après Orléans, le premier siège francilien du groupe en 1954, sert aussi à inviter le gratin de la politique, de la médecine ou des affaires. On y est fort bien traité. «J’ai été accueilli et débarrassé par du personnel en livrée», raconte un invité. Ce jour-là, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, était aussi convié. «On a parlé de tout et de rien. Et de réglementation des médicaments.» Il ne faut pas gâcher.


a écrit :Mediator : questions sur un scandale de santé publique

Le Monde | 23.12.10 | 15h37  •  Mis à jour le 23.12.10 | 15h40


Nicolas Sarkozy a demandé "la transparence la plus totale" sur l'affaire du Mediator, mercredi 22 décembre lors du conseil des ministres. "Nous avons vis-à-vis de nos concitoyens un impératif de protection", a déclaré le président de la République, selon François Baroin, le porte-parole du gouvernement. "S'il s'avère qu'il y a des failles (dans le système de sécurité sanitaire), notamment sur le champ de la pharmacovigilance, elles seront corrigées", a affirmé M. Sarkozy, cité par M. Baroin.

Le scandale du Mediator a pris un tour politique, avec la mise en cause des ministres de la santé qui se sont succédé de 1999 à 2009. Le Mediator, un antidiabétique du groupe Servier largement utilisé comme coupe-faim, a été retiré du marché le 30 novembre 2009. Etat des lieux, dans l'attente des résultats de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS).

Combien de décès Mediator a-t-il provoqués ?


"On ne le saura jamais", répond Catherine Hill, l'épidémiologiste qui a réalisé une évaluation à la demande l'Agence de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Elle-même a conclu à "au moins 500 décès", mais ses travaux n'ont mis en exergue "que la partie émergée de l'iceberg". Le chiffre de 2000 parfois évoqué ne lui paraît "pas du tout déraisonnable".

Sommes-nous face à un scandale du type sang contaminé ?


Cette nouvelle affaire est du même registre que celle du sang contaminé, mais avec deux différences, dont l'une aggravante. Si les produits sanguins étaient vitaux pour les hémophiles, la consommation de Mediator n'avait pas de justification : depuis 1997, il était établi qu'il n'avait aucun intérêt médical. Autre différence : cette fois, c'est un groupe privé qui est en cause, les laboratoires Servier, et non un établissement public.

Tout a-t-il été entrepris pour connaître la vérité ?


Les inspecteurs de l'IGAS doivent rendre un premier rapport concernant Mediator le 15 janvier 2011. Sur cet aspect, c'est Aquilino Morelle, auteur de La Défaite de la santé publique (Flammarion) et ancienne plume de Lionel Jospin à Matignon, qui est rapporteur. Fin mars, l'IGAS rendra un second rapport sur la réforme du système de pharmacovigilance.

Par ailleurs, une mission d'information de députés et une autre de sénateurs commenceront leurs travaux en janvier. Une plainte pénale contre X déposée à Nanterre par des victimes a été transférée au pôle de santé publique de Paris. Une enquête préliminaire est en cours. En toute logique, une instruction devrait être ouverte.

Que savaient les ministres concernés ?


Les ministres de la santé qui se sont succédé au cours de la dernière décennie de commercialisation du Mediator (1999-2009) disent n'avoir jamais été saisis de la question, ce qui est vraisemblable et ce qui, justement, pose question. Le système de surveillance sanitaire est autonome du ministère de la santé : l'Agence du médicament, devenue l'Afssaps, a justement été créée en 1993 à la suite du scandale du sang contaminé pour éviter l'influence des politiques dans les décisions de santé publique.

Des représentants du ministère de la santé assistent toutefois aux réunions des agences sanitaires. Ils ont eu maintes occasions de voir que les alertes concernant Mediator restaient sans effet. Pourquoi l'information n'est-elle pas remontée ?

La gauche et la droite risquent-elles d'être impliquées ?


Xavier Bertrand était ministre de la santé depuis deux jours quand, le 16 novembre, il a demandé à l'IGAS de faire une enquête. Il ne savait sans doute pas que lorsqu'il avait été une première fois ministre de la santé, en 2006, ses services auraient dû le prévenir des risques que représentait le médicament. Ils en avaient été avertis dans le cadre d'un débat sur le déremboursement du Mediator - débat d'ailleurs resté sans suite. A cette époque, les effets toxiques figuraient sur les documents dont disposaient les représentants de l'Etat. Ce qui n'était pas le cas en 1999, lorsque Bernard Kouchner et Dominique Gillot, sous la tutelle de Martine Aubry, auraient pu (ou auraient dû) être avertis.

Quelle est la responsabilité des politiques ?


Depuis des années, les rapports se succèdent sur la nécessité de réformer le système de sécurité sanitaire en le dotant de vrais moyens. Quel responsable politique les a seulement lus ? Mais la question essentielle est de savoir si le monde politique a pu bénéficier d'éventuelles largesses du groupe Servier.

L'Afssaps, ancienne agence du médicament, a-t-elle failli ?


La réponse est affirmative. La sécurité sanitaire est le fait d'un petit monde où l'on cultive l'entre-soi, où les postes sont interchangeables, du ministère aux agences sanitaires, des agences sanitaires à l'industrie pharmaceutique. Eparpillement, conflits d'intérêts, absence de suivi et de réactivité aux alertes... Vu son mode de fonctionnement, l'Etat ne pourra pas faire l'économie d'une réforme du système.


Marie-Pierre Subtil

Article paru dans l'édition du 24.12.10
«Ni rire ni pleurer, comprendre.»

(Baruch SPINOZA)
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Message par El ultimo abanderado » 05 Jan 2011, 20:41

Bonjour,

Très intéressant...
...mais concrétement que pensent les militants Fo de ses profits rattachés au fonctionnement de ces laboratoires pharmaceutiques ?
El ultimo abanderado
 
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Message par Zelda » 05 Jan 2011, 20:56

Les militants FO ? Ils pensent bien ce qu'ils veulent, mais c'est pas ici qu'il faut demander... :hinhin:
Zelda
 
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Message par El ultimo abanderado » 05 Jan 2011, 21:05

(Zelda @ mercredi 5 janvier 2011 à 20:56 a écrit : Les militants FO ? Ils pensent bien ce qu'ils veulent, mais c'est pas ici qu'il faut demander...  :hinhin:

Bonjour,

Je me suis trompé, je voulais écriire "LO", bien sur...
El ultimo abanderado
 
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Message par com_71 » 05 Jan 2011, 22:19

(El ultimo abanderado @ mercredi 5 janvier 2011 à 20:41 a écrit : Bonjour,

Très intéressant...
...mais concrétement que pensent les militants LO de ses profits rattachés au fonctionnement de ces laboratoires pharmaceutiques ?
comme les allemands étaient coupables du massacre des juifs, les humains habitant en France tolèrent ce fonctionnement

Donc, très probablement, tu fais partie des responsables
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par El ultimo abanderado » 05 Jan 2011, 23:02

Rien à voir...

La culpabilité des allemands vient de leur complicité avec un régime non seulement élu démocratiquement (ou disons avec tous les artifices de la démocatie) mais qui n'a connu, sauf de rares cas (et surtout dans l'armée) que très peu d'opposition populaire armée.
La plupart des allemands en âge de voter en 1932/1933 sont donc bien coupables.

L'industrie pharamaceutique d'aujourd'hui, elle, se veut, sauveuse du monde et bienfiatrice de l'humanité. Elle est grande pourvoyeuse d'emploi et la recherche pharmaceutique compte même beaucoup de bénevoles pour les aider à se financer (comme dans des cas bien connus de notre belle télévision) et tout le monde trouve cela très bien...
... moi, toute ce cirque, j'en suis l'opposant depuis le 1er jour. Cela pue trop le fric et les bon sentiments. et je suis l'auteur d'une lettre d'opposant à ce système, bien connue sur internet et même publiée sur votre forum il y a déjà 7 ans !!

Donc, je ne suis ni coupable, ni responsable. :-P
El ultimo abanderado
 
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Message par yanzohounchi » 28 Fév 2011, 17:16

Servier pousse encore plus loin dans l'ignominie en faisant faire des expertises trop éprouvantes pour les patients malades et fragilisés par le Médiator.

http://www.france-info.com/sciences-sante-...8509-29-30.html
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Message par yanzohounchi » 28 Fév 2011, 17:45

D' aprés un autre site cette patiente avait fait un test d'effort dans le cadre de son expertise. Or un test d'effort est toujours potentiellement dangereux à plus forte raison pour une patiente malade.
Le médecin doit disposer d 'un matériel de réanimation dans la salle ou est réalisé l’épreuve d’effort, ce matériel étant par ailleurs obligatoire.

Servier fait courir de graves risques mortels dans le cadre de ses expertises.
yanzohounchi
 
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