Suite de la revue de presse, ce matin dans Libération une
interview de Bernard Hourcade, présenté ainsi:
a écrit :Bernard Hourcade est géographe au CNRS et spécialiste de l'Iran. Très prudent au départ sur les accusations de fraudes formulées à l'encontre de Mahmoud Ahmadinejad, il a étudié les résultats électoraux et estime aujourd'hui que la fraude est avérée.
L'interview oscille entre description savante de la situation politique en Iran, supputations sur l'avenir, et tentatives d'expliquer la fraude électorale, sans d'ailleurs (c'est une constante) tenter de la prouver. Intéressant pour voir comment le discours sur la fraude se construit à partir des faits et des chiffres connus, mais sans véritablement d'information factuelle supplémentaire. Je cite la fin (le reste de l'interview est sans aucun intérêt à mon avis, on n'y lit strictement rien de nouveau ni de définitif):
a écrit :Vous avez analysé en détail les résultats électoraux du scrutin présidentiel. Dans quelle mesure y a-t-il eu une fraude?
On a toujours surestimé la capacité de révolution en Iran. Je me méfie d'ailleurs énormément du wishful thinking. Au départ, les résultats donnés par Ahmadinejad étaient «crédibles». Mais désormais, on constate qu'une fraude lourde a été organisée et planifiée. Le dépouillement, semble-t-il, s'est déroulé normalement. Il n'y a pas eu de bourrage d'urnes. C'est au bureau centralisateur de Téhéran que cela s'est mal passé, dans la nuit de vendredi à samedi.
Comment les résultats ont-ils été truqués?
Des gens proches du pouvoir sont venus remplacer les fonctionnaires chargés de centraliser les résultats. Ils se sont basés sur la géographie électorale de l'élection présidentielle de 2005, en laissant à Moussavi des zones gagnantes, pour que la carte des résultats soit crédible. Mais on a multiplié le précédent résultat d'Ahmadinejad par x. Il est passé de 20% lors du premier tour de 2005 à 62% cette année. Les partisans d'Ahmadinejad ont paniqué au cours des quinze derniers jours de campagne quand ils ont vu la montée de Moussavi. En quelque sorte, ils ont trop bien réussi leur fraude.
Notez bien l'attitude du journaliste: "dans quelle mesure y-a-t-il eu une fraude". Il ne lui demande pas si il y a eu une fraude, encore moins comment prouver qu'il y a eu une fraude, mais tout de suite il l'interroge sur le comment et l'ampleur de la fraude. Pour le moins curieux... mais il est vrai qu'il y a des faits qui vont dans ce sens.
Pour Bernard Hourcade la fraude massive a bel et bien eu lieu "au bureau centralisateur de Téhéran," non pas au niveau du dépouillement. Il dit également qu'il n'y a pas eu de bourrage d'urnes: comment le sait-il ? mystère. Tout cela va dans le sens de la thèse qu'il y a effectivement des résultats réels quelque part qui seraient différents des résultats officiels.
Il fait référence à "des gens proches du pouvoir venus remplacer les fonctionnaires". J'ai déjà lu ça quelque part ces derniers jours, il faudra que je recherche. Si c'est avéré en effet cela donne corps à des fraudes probables à ce niveau là, et sans doute massives... et vérifiables aussi sans doute, le dépouillement n'a-t-il pas eu lieu ? n'y-a-t-il aucun journaliste qui a chercher à vérifier la différence entre les résultats de certains dépouillements et les résultats annoncés officiellement ?
Quant à la "montée de Moussavi" de nombreux reporters y faisaient référence avant le scrutin et la puissance des manifestations des 14 et 15 juin à Téhéran vont dans ce sens. La "panique" des "partisans d'Ahmadinejad" n'est pas impossible, en tout cas les bassidji ont été fortement mobilisés et ce sont eux, autant voir plus que la police, qui assurent la répression ces derniers jours.
On constate qu'il ne dit pas un mot au sujet des résultats parus dans la presse ces derniers jours (dernièrement dans El Pais ce matin même).