Grève chez Total en Angleterre

par **Matrok** » 06 Fév 2009, 19:38

On n'en a pas encore parlé ici, mais je transmet l'information parce que ça mérite d'en discuter... La limite entre grève pour la "préférence nationale" ou contre le "dumping social" n'est pas nette, et la démagogie chauvine des syndicats britanniques n'arrange rien (cf. la photo avec l'Union Jack...). En même temps les récriminations du New Labour contre la "tentation protectionniste", alors que ce parti s'est fait le champion du libéralisme le plus sauvage, sonnent comme une invitation à accepter le dumping social...

http://www.liberation.fr/monde/0101317506-...t-gain-de-cause

(Libération @ 5 février 2009 a écrit :Armistice entre ouvriers britanniques et étrangers

Après une semaine de grève contre l'attribution de postes à des travailleurs étrangers, les ouvriers britanniques d'entreprises travaillant pour une raffinerie Total ont obtenu des nouveaux postes.

De notre correspondant à Londres, Jean-Hébert Armengaud

Devant la raffinerie Total de Lindsey, le 4 février, alors qu'un accord est sur le point d'être trouvé entre grévistes et patrons. (REUTERS)

La grève autour de la raffinerie Total de Lindsey, en Angleterre, est terminée. Le mouvement d'employés d'entreprises sous-traitantes – construction et maintenance – s'était focalisé contre l'emploi de travailleurs italiens et portugais sur le site, comme dans une poussée de fièvre protectionniste alors que le chômage ne cesse de grimper au Royaume-Uni.

C'est en effet une entreprise italienne qui avait emporté le marché d'une partie des travaux d'extension de la raffinerie. Sous le slogan «UK jobs for british workers» (des emplois britanniques pour des travailleurs britanniques), la grève avait été suivie sur d'autres sites énergétiques du pays.

Selon l'accord trouvé mercredi entre les syndicats et les entreprises concernées – Total et son sous-traitant italien – une centaine de nouveaux emplois seront créés pour l'extension du site à travers des entreprises sous-traitantes britanniques. Et reviendront donc de fait à des locaux. De leur côté, les 200 employés italiens et portugais pourront commencer comme prévu les travaux pour lesquels ils avaient été embauchés.

Les grévistes britanniques se sont défendus d'avoir soulevé un mouvement xénophobe, mais le gouvernement travailliste de Gordon Brown avait sonné l'alarme contre la «tentation protectionniste» d'une grève «indéfendable». Le mouvement avait provoqué des protestations des chancelleries et des syndicats italiens et portugais. Malgré la fin de la grève, les syndicats britanniques ont averti que le problème risquait de se représenter bientôt sur d'autres sites.

par **com_71** » 06 Fév 2009, 19:50

Dans Lutte Ouvrière, cette semaine :

a écrit :Grande-Bretagne - Grève contre l'emploi de travailleurs étrangers : les leaders syndicaux détournent le mécontentement

Fin janvier, une grève doublée de manifestations a éclaté sur vingt sites situés aux quatre coins du territoire britannique, Irlande du Nord comprise, englobant plus de 15 000 ouvriers qualifiés, employés à la tâche au gré des besoins des entreprises sous-traitantes sur des chantiers de construction, de rénovation ou de grosse maintenance - centrales électriques, raffineries, unités de la chimie et sidérurgie lourde, etc.

Depuis plus d'un an que les emplois valsent du fait de la crise, c'est la première fois que se produit une telle mobilisation contre la montée du chômage. Et cela rend d'autant plus inquiétant le fait que ses instigateurs, les leaders des syndicats Unite et GMB, aient fait le choix de le placer sur le terrain du chauvinisme, en reprenant à leur compte un slogan lancé il y a quelques mois par le Premier ministre Gordon Brown : « Les emplois britanniques aux travailleurs britanniques » !

Cela fait trois mois que Unite et GMB mènent une campagne partout où ces travailleurs sont concentrés. Sous prétexte de lutter contre le chômage, ils invitent les ouvriers à se mobiliser pour imposer aux entreprises sous-traitantes d'embaucher en priorité des ouvriers anglais, au lieu de faire venir des travailleurs du continent.

Le 28 janvier, cette campagne démagogique a abouti à ce que 800 ouvriers du chantier d'une unité de désulfurisation de la raffinerie Total de Lindsey, dans le nord de l'Angleterre, se mettent en grève contre la présence d'une centaine d'ouvriers italiens. De là, le mouvement a fait tache d'huile et, en moins de 48 heures, une vingtaine de sites s'y sont joints par solidarité, bien qu'une grande partie ne compte aucun ouvrier étranger.

Cette politique scandaleuse des syndicats ne peut évidemment que faire le jeu du patronat, en dressant les travailleurs les uns contre les autres et en empoisonnant l'atmosphère dans leurs rangs, au lieu de les unir pour imposer un emploi et les mêmes conditions pour tous. Elle fait aussi le jeu de la racaille d'extrême droite, qui ne se prive pas de reprendre à son compte les slogans des syndicats devant les piquets de grève.

Cette politique réactionnaire est malheureusement conforme à la politique des appareils syndicaux depuis le début de la crise. Ils ont surtout brillé par leur silence, chaque fois que des travailleurs menacés de licenciements massifs auraient eu besoin d'une perspective de lutte pour riposter aux coups du patronat (y compris les collègues des ouvriers aujourd'hui en grève, d'ailleurs). En revanche, on les a beaucoup vus mendier, au nom du patronat, des subventions auprès du gouvernement pour « sauver l'industrie britannique ». En dévoyant la colère des sous-traitants de la construction sur le terrain du chauvinisme, les leaders syndicaux ne font que poursuivre la même politique, en se donnant l'air de faire quelque chose, sans risquer de compromettre les intérêts du capital.

Quelles que soient les limites de ce mouvement, Brown et ses ministres se sont très vite succédé à la télévision pour tenter de faire reprendre les grévistes à coups de discours rassurants, dans une volonté évidente de ne pas envenimer la situation.

Le patronat n'a sans doute rien à craindre de ce mouvement. Cependant, pour la première fois depuis très longtemps, un mouvement social englobe des travailleurs d'entreprises et industries différentes, et il s'est étendu comme une traînée de poudre dans le pays en dépit des lois antigrèves, que le gouvernement n'a d'ailleurs pas parlé de faire jouer. Cela constitue en soi un précédent dont d'autres sections de la classe ouvrière pourraient s'inspirer. Et cela, Brown et le patronat ne peuvent que le redouter.

Il reste évidemment qu'un tel mouvement, pour être à même de servir les intérêts du monde du travail, devra s'en prendre à ses véritables ennemis, le patronat et son gouvernement, et unir les rangs des travailleurs dans la lutte, au lieu de les diviser comme le font les leaders syndicaux dans le mouvement actuel.

François ROULEAU

par **artza** » 07 Fév 2009, 09:08

Il faut bien voir comme l'explique l'article, qu'il ne s'agit pas d'une xénophobie spontanée des travailleurs britanniques, comme les "bons esprits éclairés" de gauche ne vont pas manquer de le faire.

Il ne s'agit pas non plus du fruit empoisonné d'une importante propagande militante de l'extrême-droite.
Une extrême-droite heureusement pour l'instant plus folklorique que réellement dangereuse.

C'est le gouvernement travailliste et les syndicats qui désignent les travailleurs étrangers comme nuisibles aux travailleurs, responsables du chômage et des salaires insuffisants pour vivre normalement.
On en est pas à l'abri en France. On a connu le "produire français" auquel il ne restait qu'à ajouter "avec des travailleurs français" et les grèves menées par "des ayatollahs".

Tous ces gens là pourront ensuite se lamenter sur la boferie et l'égoïsme des travailleurs et faire semblant de s'affoler devant quelques résultats électoraux de l'extrême-droite.

Ils pourront proposer défilé impuissant, concert against tout ce qu'on veut et vote (in)utile!

par **Matrok** » 07 Fév 2009, 15:44

(artza @ samedi 7 février 2009 à 08:08 a écrit : On en est pas à l'abri en France.
Je suis bien entendu d'accord avec ce que tu dis, en particulier avec ça... Ce qui pose quand même la question de ce qu'il faudrait faire ! On est au moins autant exposés au dumping social en France qu'au Royaume Uni, quant à la xénophobie, elle se porte aussi très bien ici. Quelle devrait-être l'attitude des militants communistes révolutionnaires si un mouvement de colère éclatait en France contre ces pratiques et prenait les mêmes teintes chauvines et xénophobes ? Il n'est pas certain que les dirigeants syndicaux y pousseraient aussi nettement qu'en Angleterre, mais ça se pourrait...

Au fait, je parle bien d'un mouvement de grèves ci-dessus, mais ce genre de colère ambigüe, on a déjà connu ça en France : souvenez-vous du "plombier polonais", qui selon les uns était une victime du dumping social dont il fallait être solidaire pour qu'il ait les mêmes droits que les français, et selon les autres était l'étranger qu'il fallait bouter hors de France ; souvenez-vous de tous les aspects ambigus et parfois nettement chauvins des campagnes de certains partisans du "non de gauche", et de leurs dénégations à chaque fois qu'on leur rappelle l'existence d'un "non d'extrême droite" qui explique leur pseudo-victoire...

Grève chez Total en Angleterre

Qui est en ligne ?