Sabotages à la SNCF : huit arrestations

Message par Sterd » 19 Nov 2008, 20:13

(Wapi @ mercredi 19 novembre 2008 à 08:59 a écrit : Mais on dirait qu'il commence à y avoir matière pour un polar ...  ;)

Oui, comme qui dirait de la littérature de gare
Sterd
 
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Message par Ottokar » 20 Nov 2008, 09:09

ne disons pas de mal de cette littérature, c'est comme cela que j'ai acheté une fois il y a 20 ans avant de prendre mon train un polar intitulé finement "Solidarmoche", avec les lettres de Solidarnosc, sans rien connaître de l'auteur, à cause du titre, de la photo de couverture (une fameuse photo de manif après le coup d'Etat de Jaruzelski en Pologne) et de la 4ème. Et que je n'ai pas regretté ma lecture !
Ottokar
 
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Message par Vérié » 21 Nov 2008, 15:36

UN ARTICLE DE ROUGE

a écrit :
Parano et criminalisation

À propos des actes de dégradation contre le réseau SNCF, Olivier Besancenot a déclaré : « Nous voulons plus de trains, pas moins de trains. Les cheminots et les usagers ont déjà assez à faire avec les saboteurs venus de la direction de la SNCF, du gouvernement et de l’Union européenne, qui font reculer le service public ferroviaire. » Et de condamner d’éventuels « agissements isolés qui ne profitent ni aux usagers, ni aux cheminots en lutte ».

Alors qu’aucune preuve matérielle irréfutable de culpabilité des neufs inculpés n’a pu être fournie, la ministre de l’Intérieur, Michèle Alliot-Marie, le procureur de Paris, Jean-Claude Marin, ou le juge d’instruction antiterroriste, Thierry Fragnoli, mènent une campagne délirante contre l’ultragauche, caractérisant ces actes de dégradation de « terrorisme », passibles dès lors de 20 ans de prison, et parlant « d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ». De quoi justifier, a posteriori, les invraisemblables filatures dont les inculpés ont été l’objet depuis plusieurs mois et les méthodes employées pour les arrêter qui ont suscité la colère et l’indignation des habitants de Tarnac, petit village de Corrèze où ils vivaient.

À quoi il faut ajouter une volonté sournoise d’amalgamer ces actes de dégradation avec la lutte des cheminots contre la privatisation de leur entreprise, ou avec les antinucléaires qui tentent de bloquer les convois transportant des déchets radioactifs. Une fois encore, il est nécessaire de résister à la volonté du gouvernement de criminaliser le mouvement social et de restreindre les libertés démocratiques les plus élémentaires.


Article globalement correct à mon avis, mais qui pourrait tout de même se conclure par un appel à la libération des détenus et à la déqualification de leur inculpation comme "terroristes".

A noter, dans Le Monde daté de vendredi un enquête d'une page sur les personnes arrêtées, description plutôt sympa, et qui en filigrane, riduculise les accusations policières.

Il est surprenant que LO n'ait pas consacré une ligne cette semaine a ce sujet, qui a fait la Une des médias et dont parlent pas mal les cheminots...
__

Voici des techniciens de la SNCF au travail sur des caténaires. On voit qu'ils utilisent une plate-forme spéciale montée sur un charriot circulant sur les rails (on ne voit pas le charriot). Cette seule photo devrait faire réfléchir M. Le procureur Martin sur les difficultés concrètes à atteindre les caténaires...
A noter : le courant a été coupé avant leur intervention.


Image
Vérié
 
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Message par com_71 » 21 Nov 2008, 16:14

(Vérié @ vendredi 21 novembre 2008 à 15:36 a écrit : Article globalement correct à mon avis

Il est plutôt emberlificoté...
Si c'est vraiment tout ce qui pouvait être dit, félicitons-nous que LO ait préféré se taire..
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par Vérié » 21 Nov 2008, 16:28

(com_71 @ vendredi 21 novembre 2008 à 16:14 a écrit :
(Vérié @ vendredi 21 novembre 2008 à 15:36 a écrit : Article globalement correct à mon avis

Il est plutôt emberlificoté...
Si c'est vraiment tout ce qui pouvait être dit, félicitons-nous que LO ait préféré se taire..

Oui, c'est vrai qu'il est un peu emberlificoté, comme tu dis. Je m'étais abstenu de cette critique pour éviter de me faire traiter une nème fois de donneur de leçon, dans la mesure où cet article est tout de même "globalement correct".

Mais ton argument est absurde : il était parfaitement possible de traiter le sujet d'une façon plus claire.
Vérié
 
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Message par Valiere » 24 Nov 2008, 07:22

a écrit :Communique du Collège des 22 et 23 novembre 2008

de Emancipation tendance intersyndicale et pédagogique
Libération immédiate des inculpés de Tarnac

Abrogation de la circulaire du 13. 06. 2008 !

Le 11 novembre dernier, 150 policiers cagoulés et 2 hélicoptères ont mené une opération coup de poing en présence des caméras pour interpeller et inculper neuf jeunes, soupçonnés d’ " association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ". Ils sont suspectés d’avoir dégradé et mis hors service des caténaires de la SNCF. Depuis la circulaire antiterroriste du 13 juin 2008, une telle inculpation est passible de 20 ans de réclusion.

Or, à ce jour, le dossier est vide, ce dont a témoigné leur avocate Me Irène Terrel ( "  découverte " d’un livre en vente libre dans n’importe quelle librairie de textes théoriques passablement abstraits,, de matériel d’escalade …). Cependant cinq de ces jeunes de la ferme de Tarnac sont incarcérés à titre préventif pour une durée indéterminée.
La disproportion grotesque entre les moyens policiers déployés, la qualification retenue par le procureur de paris, M Marin, et les faits incriminés, nous conduisent à exiger la libération immédiate des cinq jeunes.

Depuis des mois, la police, le Ministère de la Justice, les grands médias ont construit de toutes pièces une nouvelle figure de " l’ennemi intérieur " : le "  terroriste d’ultra-gauche ". Une image utilisée hier contre les militants du RESF, contre des sans-papiers, aujourd’hui contre des jeunes vivant en communauté à la campagne.

Qui peut, sérieusement, parler ici de "  terrorisme " ?

Qui a peur des jeunes de Tarnac ?

Qui est terrorisé par RESF ?

Nous dénonçons la législation antiterroriste de juin 2008 qui permet aujourd’hui d’inculper pour " terrorisme " n’importe qui pour n’importe quoi.

Nous dénonçons le terrorisme d’état , bien réel celui-là, qui, avec le fichier Edvige, Cristina et autres, les tasers, Vigipirate, les prélèvements ADN, le fichier base-élèves, le flicage " veille de l’opinion " de Darcos, le délit d’outrage, le GIGN envoyé contre des grévistes, traîne des fonctionnaires et des citoyenNEs devant les tribunaux et pousse des sans- papierEs à se défénestrer à la vue des forces de police. Face à ces lois d’exception qui se mettent progressivement en place et qui visent à réduire au silence toute tentative de contestation, il faut affirmer qu’aucune menace d’ " ultra-gauche " n’existe aujourd’hui dans notre pays.

Emancipation dénonce cette tentative de manipulation de l’opinion et la construction imaginaire d’un risque " anarcho-autonome ".

Emancipation exige que les jeunes de Tarnac soient libérés immédiatement, car il est insensé de les traiter en terroristes, alors que leur détention préventive risque de les condamner avant même qu’ils soient jugés.

Emancipation exige l’abrogation immédiate de la circulaire du 13 juin 2008 qui menace n’importe quel citoyen français de procédures d’exception inacceptables et promet de futures tragédies judiciaires, comme celles des " flops " des Irlandais de Vincennes, des "  Moujahidines " iraniens de Auvers-sur-Oise, etc.

Emancipation appelle à rejoindre le comité de soutien de Tarnac

www. soutien11novembre.org/

11novembre-soutien@gmx.com


Valiere
 
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Message par Vérié » 25 Nov 2008, 14:29

Voici un article assez intéressant de Noel Blandin - le fameux "entartreur" - pris sur le site de La République des lettres :
a écrit :
Comité invisible : l'affaire du sabotage des lignes SNCF.

Petit conte ordinaire de la paranoïa antiterroriste dans la France éminemment démocratique de Nicolas Sarkozy. Neuf personnes, quatre hommes et cinq femmes âgés de 22 à 34 ans, supposées être les auteurs d'actes de malveillance contre la SNCF, ont été déférées samedi 15 novembre devant les juges d'instruction Thierry Fragnoli et Yves Jannier de la section antiterroriste de Paris. Le Parquet les accuse d'avoir constitué une "association de malfaiteurs" et d'être responsables de "dégradations en réunion", le tout "en relation avec une entreprise terroriste", délit passible de dix ans d'emprisonnement. Quatre d'entre elles ont été remises en liberté sous contrôle judiciaire mais les cinq autres, considérées par la police comme le noyau dur d'un groupe révolutionnaire dénommé "Cellule invisible" ou "Comité invisible", ont été placées en détention provisoire et mises en examen. Julien Coupat, leader présumé du groupe, est poursuivi à titre de dirigeant d'une "structure à vocation terroriste", crime passible lui de vingt ans de réclusion. L'instruction judiciaire doit déterminer si les jeunes gens sont bien les auteurs des sabotages de cinq caténaires de voies ferroviaires, commis fin octobre et début novembre dans l'Oise, l'Yonne, la Seine-et-Marne et la Moselle. Les dégradations avaient perturbé une partie du trafic SNCF, entraînant des retards dans la circulation de quelques dizaines de TGV.
Après une série de perquisitions qui ont mobilisé pas de moins de 150 policiers dans toute la France, Michèle Alliot-Marie, ministre de l'Intérieur, se félicite du succès de son opération "Taïga" pilotée par la sous-direction antiterroriste (SDAT). Elle offre en pâture à la presse une dizaine de suspects qu'elle présente comme des "nihilistes" membres d'un réseau de "l'ultra-gauche, mouvance anarcho-autonome". Jean-Claude Marin, procureur de la République de Paris, lui emboîte le pas, affirmant disposer "d'indices graves et concordants" contre cette "cellule qui avait pour objet la lutte armée". Ministre et Procureur restent toutefois assez vagues sur les preuves matérielles. Et pour cause, lors des perquisitions, les policiers n'ont trouvé aucune arme ni aucun élément matériel permettant de confondre les suspects. À leurs domiciles, ils n'ont saisi que du matériel d'escalade, des outils de bricolage, un plan du réseau SNCF, une perruque de fête, un fugimène, quelques banderolles et talkies-walkies et divers documents de littérature anarchiste disponibles dans le commerce. Aucune preuve formelle, pas de témoin, pas de trace ADN, pas d'empreinte digitale sur les lieux des sabotages. En outre les accusés restent muets pendant leur garde à vue prolongée (96 heures en matière d'enquête antiterroriste). Enfin, malgré l'étroite surveillance policière dont était l'objet la fameuse "cellule invisible" -- une enquête préliminaire avait déjà été ouverte sur Julien Coupat et sa compagne Yldune en avril dernier dernier, à la suite d'un signalement du FBI aux autorités françaises car ils avaient été repérés lors d'une manifestation anti-militariste à New York -- aucune preuve tangible, pas même une écoute téléphonique ne permettent de les impliquer directement. Qu'à cela ne tienne, d'autres éléments qualifiés de "troublants" sont mis en avant par Jean-Claude Marin: les membres de la dite "cellule invisible" auraient été aperçus début novembre "par des policiers" en Seine-et-Marne, à proximité des lieux où les dégradations ont été commises. Il n'y a donc aucun doute. Quant au repaire des "anarcho-autonomes", la ferme dite du Goutailloux à Tarnac en Corrèze, c'est à coup sûr pour le Procureur de la République "un lieu d'endoctrinement et une base arrière pour des actions violentes contre des personnes". D'ailleurs, le fait que les suspects restent murés dans le silence pendant les interrogatoires "n'est pas une preuve mais il montre que ce ces gens sont déjà ancrés dans un parcours de marginalisation et de radicalisation violente".
Le lendemain des mises en examen, Michèle Alliot-Marie en rajoute une couche sur une radio juive sarkozyste, Radio J, afin de justifier les incarcérations et le déploiement des forces antiterroristes. Selon elle, "la justice dispose d'éléments suffisamment convaincants", sans préciser lesquels. Elle "sait" qu'il existe en France d'autres groupes de la mouvance anarcho-autonome, "probablement de l'ordre de 300 personnes", où "il peut y avoir une radicalisation allant jusqu'à des actions violentes". Pour la ministre de l'Intérieur, ces groupes anarchistes "qui refusent le dialogue démocratique" auraient en outre des "relais à l'étranger", notamment en Allemagne, en Italie, en Belgique en Grèce, au Canada et aux USA. Elle s'inquiète enfin de la sortie de certains films récents comme ceux sur Jacques Mesrine ou la Bande à Baader, craignant leur effet sur les "esprits fragiles".
Bref, ces monstrueux "nihilistes clandestins potentiellement très violents" (pour employer cette fois la terminologie du Figaro et de France 2, entre autres) sont coupables, même sans preuves. Identifiés par leur "philosophie d'insurrection contre les institutions", ils sont, c'est clair, membres d'une "entreprise terroriste" aux ramifications internationales dont le but est de "troubler l'ordre politique, économique et social et d'atteindre l'appareil d'Etat par la violence". Là encore, on a des preuves, et quelles preuves ! Tous les suspects arrêtés ont au moins bac + 5 et un casier judiciaire vierge. Mieux, Julien Coupat, 34 ans, diplômé de l'École Supérieure des Sciences Économiques et Commerciales (Essec) et doctorant en histoire et civilisation à l'Ecole des Hautes Études en Sciences Sociales (EHSS) jusqu'en 1999, a écrit un livre. Il est l'auteur avec Benjamin Rosoux d'un essai néo-situationniste intitulé L'Insurrection qui vient, publié en 2007 sous le nom de "Comité invisible" à La Fabrique éditions. Le livre s'est vendu à ce jour à quelque 7.000 exemplaires, mais il est également téléchargeable gratuitement sur internet. Pour les autorités judiciaires comme pour les principaux grands médias cet ouvrage est un dangereux manuel pratique de terrorisme. Il appellerait à la lutte armée, préconiserait les actions de sabotage et donnerait des consignes militantes à tenir face aux forces de police. Pourtant, pour qui sait lire et dispose de trois notions d'histoire littéraire, L'insurrection qui vient est un texte plus métaphorique et littéraire que théorique. Construit comme L'Enfer de Dante en sept cercles ou "impasses" (Le soi, les rapports sociaux, le travail, l'économie, l'urbain, l'environnement et la civilisation), il explique que "sous quelque angle qu'on le prenne, le présent est sans issue, ce n'est pas la moindre de ses vertus"; "Ce n'est pas l'économie qui est en crise, c'est l'économie qui est la crise"; "Le désert ne peut plus croître: il est partout, mais il peut encore s'approfondir". Quelques petites phrases ont surtout retenu l'attention des fins lettrés de la brigade antiterroriste: "Saboter avec quelque conséquence la machine sociale implique aujourd'hui de reconquérir et réinventer les moyens d'interrompre ses réseaux. Comment trouver les points faibles des réseaux informatiques, comment brouiller des ondes radios et rendre à la neige le petit écran ? A chaque réseau ses points faibles, ses noeuds qu'il faut défaire pour que la circulation s'arrête, pour que la toile implose" suivies d'un "Il n'est pas question d'occuper, mais d'être le territoire". Sur la question de la violence et de la lutte armée, ils ont également pu lire ceci: "Il n'y a pas d'insurrection pacifique. Les armes sont nécessaires: il s'agit de tout faire pour en rendre l'usage superflu", et en conclusion: "Rien ne paraît moins probable qu'une insurrection, mais rien n'est plus nécessaire". L'ambiguïté et le polysémantisme poétique, mais c'est bien sûr, voilà une preuve flagrante. Julien Coupat co-animait également une revue de métaphysique critique, Tiqqun, Organe conscient du Parti Imaginaire (autodissoute en 2001), inspirée par le Situationnisme et les travaux de Gilles Deleuze, Giorgio Agamben et Toni Negri, où l'on peut découvrir le même style de textes poétiques ironiques entre deux utopiques Théorie du Bloom et Théorie de la jeune fille. Toutes ces publications se trouvent facilement en librairie ou sur internet aux côtés d'autres livres de même nature: les Manifeste du Surréalisme d'André Breton, La Société du Spectacle de Guy Debord, La Critique sociale d'Auguste Blanqui, La Vie Innommable de Michel Bounan, Du progrès dans la domestication de René Riesel, La haine de la démocratie de Jacques Rancière, L'abîme se repeuple de Jaime Semprun, le TAZ d'Hakim Bey, Le Sabotage d'Émile Pouget, La vie sur terre de Baudoin de Bodinat, la Critique de la violence de Walter Benjamin, le Précis de décomposition d'Emil Cioran ou encore Le Gai Savoir de Nietzsche, preuve définitive s'il en est de l'existence d'un vaste réseau d'anarcho-autonomes en train de s'attaquer à l'Etat français. Reste à espérer que les magistrats qui jugeront Julien Coupat et ses amis ne s'exposeront pas au ridicule d'une lecture au premier degré d'un texte poétique, ce qui n'est pas gagné d'avance étant donné le niveau de haute culture du régime sarkozyste.
Pendant ce temps, il est inutile de préciser que, des journaux dits "de référence" aux chaines et radios publiques ou privées, l'affaire des "anarcho-autonomes" tourne en boucle, générant les pires délires sur la présence de "l'ultra-gauche", ce nouvel ennemi intérieur qui réunirait les enfants d'Action Directe, des Brigades rouges, d'Al-Quaïda, de l'ETA et de la Fraction Armée Rouge réunis. Spécialistes es Anarchie et Terrorisme occupent les plateaux entre deux flashs d'info TGV pour expliquer que la France risque bientôt de sombrer sous l'action violente des terroristes de "l'ultra-gauche".
Au vu des premiers éléments du dossier, les avocats des inculpés ramènent bientôt l'affaire de la "Cellule invisible" à ce qu'elle est réellement, à savoir plutôt une affaire politico-judiciaire pour délit d'opinion. Me Dominique Vallès, avocate de deux accusés estime qu'il y a "une disproportion totale entre la qualification d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et ce qu'on peut réellement leur reprocher", ajoutant qu'il est "choquant de stigmatiser à ce point à partir de données floues". Pour Me Cédric Alépée, avocat d'un autre accusé, "il n'y a strictement aucune charge" pouvant être reprochée à son client concernant des activités terroristes. "On a ratissé large, on a interpellé des gens sans prendre le temps de vérifier, de faire les investigations complémentaires pour être sûr qu'on avait des choses à leur reprocher", déclare-t-il. Me Steeve Montagne a lui aussi de son côté "le sentiment d'une instrumentalisation par le pouvoir de l'appareil judiciaire aux fins de restreindre la liberté d'opinion". Pour Me Irène Terrel, avocate de Julien Coupat, c'est également une "affaire aux dimensions totalement démesurées" [...] "Il n'y a aucune proportionnalité entre les faits reprochés qui ne sont en rien établis et qui, quand bien même ne seraient que des dégradations qui n'ont même pas mis en danger de vies, et une procédure terroriste", estime-t-elle. De fait, il semble bien que les faits reprochés au groupe "anarcho-autonome" de Julien Coupat sont montés en épingle par le régime et que ce dont on l'accuse réellement via des lois antiterroristes scélérates, c'est surtout de réunir des militants libertaires intelligents participant activement à la contestation du capitalisme et du contrôle social par des écrits, des pratiques de vie alternatives et d'improbables actions poétiques de désobéissance civile comme celles de ralentir les TGV (ceci avec suffisemment de précautions pour ne pas causer de victimes).
Pour Eric Hazan, éditeur de L'Insurrection qui vient et auteur notamment de Changement de propriétaire, la guerre civile continue, interrogé sur le site Médiapart, l'opération "Taïga" de Michèle Alliot-Marie est l'illustration d'un "antiterrorisme comme moyen de gouvernement" qui menace sérieusement la démocratie et les libertés fondamentales en France. Selon lui, l'Etat doit aujourd'hui "justifier l'empilement de lois antiterroristes qui n'ont plus rien à voir avec le droit" et "tous les moyens sont bons pour construire l'ennemi intérieur". Du côté de la ferme de Tarnac où vivait en communauté une partie des membres du groupe, les villageois ont pour leur part créé un un comité de soutien. Les inculpés étaient en effet parfaitement intégrés. Ils vivaient de façon ouverte, entretenaient d'excellentes relations avec le tout le monde et avaient même relancé l'exploitation de l'épicerie du village qu'ils ont transformé en bar magasin restaurant ouvrier, station-service et salle de spectacles fonctionnant sur un mode autogeré par plus de 150 habitants du village. Pour ceux-ci, "la façon dont on les présente est différente de la réalité partagée ici" et l'opération de police est "une rafle" doublée d'une cabale médiatique qui tombe bien pour Nicolas Sarkozy et Michèle Alliot-Marie. "Avec les actes de malveillance qui se passent sur le réseau SNCF [27.500 en 2007, ndlr], ça tombe à pic d'aller à Tarnac et de rafler quelques gauchistes. Souvenez-vous de l'affaire des Irlandais de Vincennes, cela tombait à pic aussi !" explique l'un deux. Un train peut en cacher un autre.

Noël Blandin / La République des Lettres, dimanche 16 novembre 2008


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Message par luc marchauciel » 25 Nov 2008, 15:03

Je suis ça d'assez loin et je ne sais pas de quoi il retourne dans les faits (sur la fonction politique du truc, ça me semble clair, là il y a manip du pouvoir avec l'appui des médias). Il me semble qu'il y a ou bien fait divers monté en épingle, ou bien cas de manipulation policière, mais en tous cas pas de danger de la montée d'un "terrorsime" d'ultra gauche.
Je voudrais juste dire qu'il faut faire gaffe au type d'argumentation développé, quand on ne sait pas grand chose. Par exemple, une photo d'un cheminot en train de bosser en hauteur ou des commentaires techniques sur les outils ne prouvent rien (en général, on ne peut pas fonder une contre enquête sur des photos trouvées sur Internet en expliquant à partir de là "je n'y connais rien mais il est évident que le pouvoir ment parce que tout le monde voit bien que...."). Rappelons nous que c'était le point de départ du délire de Meyssan sur le 11 septembre.
J'ai du mal à prendre les procureurs de la République pour des crétins complets (des salauds éventuels, ça peut se discuter), et même une manip doit avoir un minimum de crédibilité. Un avis de cheminot compétent pourrait par exemple être le bienvenu, en disant : "on leur reproche ça, mais moi qui bosse sur ce terrain précis je peux vous dire que cette accusation ne tient pas parce que..."
En l'absence d'éléments factuels vérifiables de ce type, il vaut mieux s'en tenir à ce qu'on peut commenter, quitte à être emberlificoté : l'utilisation politico-médiatique de l'affaire (par exemple allumer le Point qui fait des articles à sensation sur les dangers de l'ultra gauche en les illustrant avec une photo de manif d'extrême droite, saisir l'occasion pour parler du sabotage du service public par les politiques capitalistes, etc. ...)
Ou alors j'ai raté des trucs et il est manifeste que les accusés ne peuvent pas être coupables de ce dont on les accuse, mais, dans cas, aussi bourgeoise la justice soit-elle, ils ne risquent pas grand chose à terme (mais ils subissent oppression et vexations en ce moment)
luc marchauciel
 
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Message par luc marchauciel » 25 Nov 2008, 15:14

Un exemple de tripatouilage médiatique pour faire monter la sauce, sur l'excellent site de l'Acrimed :

http://www.acrimed.org/article3012.html


luc marchauciel
 
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Message par Vérié » 25 Nov 2008, 16:06

(luc marchauciel @ mardi 25 novembre 2008 à 15:03 a écrit : Je voudrais juste dire qu'il faut faire gaffe au type d'argumentation développé, quand on ne sait pas grand chose. Par exemple, une photo d'un cheminot en train de bosser en hauteur ou des commentaires techniques sur les outils ne prouvent rien (en général, on ne peut pas fonder une contre enquête sur des photos trouvées sur Internet en expliquant à partir de là "je n'y connais rien mais il est évident que le pouvoir ment parce que tout le monde voit bien que....").  Rappelons nous que c'était le point de départ du délire de Meyssan  sur le 11 septembre.
J'ai du mal à prendre les procureurs de la République pour des crétins complets (des salauds éventuels, ça peut se discuter), et même une manip doit avoir un minimum de crédibilité.

Je n'ai pas la prétention d'avoir mené une "contre enquête", ni de prouver l'innocence des suspects à l'aide de "photos trouvés sur internet", mais :
-Si je n'y connais rien personnellement, j'ai eu l'occasion de discuter de cette affaire avec des cheminots.
-On peut tout de même comprendre facilement - et une photo, ça aide - qu'il est difficile de placer des fers à béton et de les fermer sur des cables situés à 6,5/7,5 mètres de hauteur où passe un courant de 25 000 volts. Inutile d'avoir fait Centrale ou d'être diplomé d'une haute école de police pour ça.
-Comme les "arrêtés du 11 novembre" ne volent pas, ne disposent pas d'engins volants, n'ont pas à leur disposition les plate-formes spéciales de la SNCF, force est de conclure qu'ils auraient eu besoin d'une échelle, au moins. Et, une échelle de ces dimensions, ce n'est pas facile à dissimuler pour des gens soumis à une surveillance policière permanente.
-On est tout de même en droit de commenter les "indices" présentés publiquement par la police et le procureur.
-Comparer ces observations élémentaires - que certains cheminots font d'ailleurs immédiatement - avec le délire de Thierry Meyssan, c'est absurde et insultant !
-Sur l'intelligence et les compétences du procureur Marin, je ne me prononcerai pas. Mais ce ne serait tout de même pas la première fois qu'une accusation se
dégonflerait très vite. On aurait pu dire la même chose au moment de la fausse agression atisémite du RER B : "Tous les politiciens et tous les journalistes ne sont tout de même pas des crétins etc" (Cette fois, c'est la police qui était plus réservée...)

Si on cherche une explication, la plus probable est que la pression a été mise sur la police pour trouver rapidement des coupables, mais il peut y en avoir d'autres et je n'ai pas posé de micros place Beauvau pour savoir ce qui se raconte dans le bureau d'Alliot Marie.

Ton raisonnement est dangereux : il revient à dire "il n'y a pas de fumée sans feu". Le jour où ce seront des militants de la LCR ou LO qui seront accusés à tort, il y aura sans doute, hélas, bien des gens qui raisonneront de cette manière, surtout si ces accusations s'accompagnent d'un battage médiatique !

Le minimum, c'est que :
1) Les accusés ont droit à la présomption d'innocence,
2) La qualification de "terroriste" est absurde, même s'ils avaient commis les actes en question.
3) Ils doivent au moins être mis en liberté provisoire et pouvoir se défendre, le dossier doit être mis sur la place publique.
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