a écrit :Projet de communiqué de presse… que vous pouvez co-signer..
Monsieur Nicolas Sarkozy, président de la République Française, déclare, es qualité, dans un lieu et moment particulier, qu’il sera obligatoire, pour les élèves de CM2, de prendre conscience du drame de la déportation et des meurtres perpétrés par le régime nazi contre le peuple juif, au travers d’un « parrainage » de chacun et chacune de ces élèves, réalisé dans un travail scolaire d’identification et de recherche sur la vie d’une de ces victimes… françaises.
Pour reprendre l’expression de madame Simone Veil, cette déclaration nous « glace les sangs ».
Pourquoi ?
Parce que dans le nombre, à ce jour inconnu, des enfants déportés et assassinés se trouvent des milliers d’entre eux qui n’étaient pas « français », charriés sur le territoire national dans l’exode des juifs d’Allemagne, de Pologne, d’Ukraine, de ces juifs de l’Est pour lesquels le gouvernement Daladier avait rédigé les lois dites « des indésirables ». Même l’extraordinaire travail de l’association que préside Serge Karsfeld a trouvé ses limites dans la pré-existence d’une ‘’histoire’’ administrative de ceux-ci : ils étaient français ou, étrangers, identifiés parce que fichés par la police de Vichy. D’autre part, comment ignorer ces enfants de Tziganes et autres ‘’immigrés’’ brassés dans ce funeste exode vers les camps d’extermination ?
Pourquoi cet objet qui prétendrait œuvrer pour que se construise une mémoire de l’innommable devrait-t-il se constituer par omission, au travers du filtre d’une amnésie de circonstance ?
La République Laïque ne choisit pas ses enfants, Elle les honore et les instruit tous, indépendamment de leurs religions, origines sociales, ethniques…
De surcroît : pourquoi transférer ce travail de mémoire d’enfants à enfants, passant au dessus, exonérant ainsi les générations intermédiaires ?
Comment le médium, qui sera l’institutrice ou l’instituteur, pourra-t-il effectuer cette lourde tâche alors que le programme officiel de formation ignore cette approche particulière de cette part de l’Histoire ?
Enfin qui prétend mesurer, dans sa compétence ou supposée telle, l’impact de ce « parrainage » auprès d’enfants de moins de dix ans ? En particulier, que peuvent comprendre certains enfants récemment arrivés, qui sont, déjà à tord, confrontés, pour cause d’événements mondiaux actuels, à la fragilité de se construire comme élèves de notre école républicaine ?
Lors de la rentrée scolaire 2007, les collèges et lycées, leurs élèves et enseignants, furent confrontés à l’obligation de lire la lettre d’un jeune Résistant à l’aube de son assassinat. Tout le monde a encore, au bord des lèvres, le goût amer de ce que cela provoqua comme remous, incompréhension et confusion quant à la mission de l’Ecole en matière d’Histoire.
En conclusion, nous ne pouvons que contester, dans le fond et dans la forme, ce type de ‘’décision’’ qui va à l’encontre de ce travail de mémoire auquel nous sommes profondément attachés. Nous nous déclarons fermement opposés à toute manipulation de l’Histoire au profit d’effets politiques inavoués et sans lendemain.
Pascal Polisset, Instituteur, membre de L’Association pour la Perpétuation de la Mémoire des Internées des camps de Brens (81) et Rieucros (46).