(Zelda @ vendredi 9 novembre 2007 à 15:15 a écrit : Ils font partie de la petite-bourgeoisie, et en tant que tel, il y en a de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel politique et de toute obédience en matière d'honnêteté ou d'absence d'honnêteté.
(...)
Alors on peut réfléchir sur la société et son mode de sélection des artistes qui ont la chance de pouvoir vivre de leur art... Mais je me priverai bien pour ma part de généraliser sur "l'animal social" artiste.
Je pourrais signer des deux mains tout ce que tu écris, notamment sur la (hélas future) société socialiste et les artistes, Zelda, sauf ces deux passages.
Je crois que tu sousestimes la puissance de l'influence de la bourgeoisie, sa pression sur l'intelligentsia et, par voie de conséquence, son mode de sélection. Certes, il existe des artistes non reconnus qui croient être boycottés parce qu'ils seraient subversifs, voire dangereux. De même, il ne suffit pas d'être dans le courant dominant pour être reconnu, il faut un minimum de talent et de savoir-faire commercial et médiatique.
Mais tu remarqueras que, pour atteindre un certain niveau de notoriété et par conséquent de revenus, non seulement il ne faut pas cracher dans la soupe mais il faut donner des gages. Tous les artites méconnus ne sont pas des génies maudits, mais un certain nombre de gens d'un bon niveau sont, sinon mis sur liste noire, boudés voire carrément boycottés.
Voici quelques exemples :
-Howard Fast, qui a connu la gloire à l'époque de l'idylle entre les Etats-Unis et l'URSS puis ne pouvait plus publier un livre à l'époque du maccarthysme. Des années avant de réussir à publier Spartacus... en Angleterre.
-Dashiell Hammett, meme itinéraire.
Plus près de chez nous :
-Le chanteur anar François Béranger, interdit d'antenne jusqu'à sa mort, sauf sur Radio Libertaire.
-Lenny Escudero, ancien ouvrier carreleur, PC, grand succès à ses débuts, interdit d'antenne lui aussi.
-Yves Boisset, cinéaste détesté par toute une partie de l'intelligentsia, des critiques et de ses confrères pour ses succès des années 70, attribués à son engagement politique d'alors. Il ne tourne plus que des téléfilms.
- René Vautier. Depuis Avoir vingt ans dans les Aurés et ses reportages dans les maquis algériens, il n'a jamais réussi à tourner un film.
-Gilles Perrault, auteur de plusieurs best seller, très boycotté par les médias depuis sa son appel à déserter pendant la première guerre du Golfe.
Il y a certes des exceptions... qui confirment la règle, comme les réalisateurs de films cités sur le FALO, mais ceux-ci doivent généralement faire preuve de beaucoup d'habileté, jongler avec les tabous, louvoyer, alterner des films engagés et des films commerciaux voire des films complaisants. Ce qu'explique par exemple très bien le cinéaste néerlandais gauchisant Verhoeven (Basic instinct, Robocop, La chair et le sang).
Tous les artistes un peu professionnels savent cela et s'autocensurent plus ou moins pour survivre professionnellement. Les gens super honnêtes, super intransigeants restent dans leur coin et ne connaissent pas le succès médiatique auxquels tous aspirent, car personne ne tourne de film pour qu'il ne soit pas vu ou n'écrit de livre pour qu'il ne soit pas lu.
Les plus courageux - car il y en a tout de meme, peu nombreux - sont ceux qui attendent des années pour réussir à réaliser un sujet qui leur tient à coeur et survivent en attendant en tournant des clips de pub.