Libéralisme ou impérialisme ?

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Vérié » 02 Oct 2007, 16:44

Peut-être qu'une partie de ceux qui emploient cette expression - "néo-libéralisme" -pensent que ça représente une phase du capitalisme, mais la majorité de ceux qui les écoutent ne voient pas la différence. Et l'emploi de ce terme trahit tout de même le rève de revenir à la phase précédente : le libéralisme pas néo, ou plus exactement le capitalisme un peu social, le keynesianisme etc.

Il me semble donc évident que le triomphe de ce vocabulaire trahit un recul ideologique assez net (qu'on peut d'ailleurs observer dans toutes sortes d'autres domaines).
Vérié
 
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Message par Louis » 02 Oct 2007, 16:52

Tiens je vais citer un membre éminent qui utilise cette expression. Je te dirais ensuite de qui il s'agit (enfin, c'est facile a deviner, enfin moi je trouve) Tu me dira si c'est un antilibéral de la premiére ou de la seconde espéce

a écrit :

L’offensive néolibérale s’est enclenchée au tournant des années 1980, sous Thatcher et Reagan. Ceci signifie que cette offensive dure maintenant depuis près d’un quart de siècle. Pendant 25 ans, une série de défaites - sur les retraites, l’emploi, la protection sociale, etc. - s’est abattue sur le mouvement ouvrier, et ses effets se font sentir aussi sur la perspective d’une renaissance des mouvements sociaux de contestation de l’ordre social actuel.

L’ampleur des dégâts

Les sociétés européennes avaient été habituées, dans l’après-guerre, à un quasi plein emploi, ainsi qu’à un chômage relativement limité. Les premières vagues de licenciements et de fermetures d’entreprises ont désorienté le mouvement ouvrier, notamment les directions syndicales et les partis de gauche. Pour celles et ceux qui les ont connues, les années 1980 ont été les plus sinistres sur le plan social et politique. A partir du milieu des 1990, on s’est déjà senti un peu moins seul, avec l’apparition d’une certaine contestation sociale. Il n’en demeure pas moins que, même depuis lors, bien qu’il y ait eu des luttes importantes, les victoires significatives ont été rares. Si l’abrogation du CPE au printemps dernier a fait tant de bruit, c’est parce qu’elle a été l’une d’entre elles. Parallèlement, l’offensive néolibérale n’a pas permis au capitalisme de relancer un cycle d’accumulation dynamique. Elle n’a pas non plus suffi à modifier autant que les classes dominantes l’auraient voulu les rapports de force sociaux, si bien que la spirale des contre-réformes est loin d’être parvenue à son terme. En France, outre le nombre de chômeurs-euses, il faut compter environ sept millions de travailleurs pauvres. Une partie d’entre elles et eux, malgré l’instauration de la couverture maladie universelle, n’a pas accès aux soins les plus élémentaires. On a également vu apparaître le phénomène des salarié-e-s sans logis, qui disposent d’un travail mais n’ont pas de logement. On assiste aussi au retour de maladies, comme par exemple le saturnisme, qu’on avait cru disparues, et qui étaient les maladies des taudis du 19e siècle. En Allemagne, six millions de personnes se trouvent en-dessous du seuil de pauvreté. Quarante-sept millions de citoyen-ne-s américains n’ont pas de couverture médicale. Bref, contrairement aux promesses du discours néolibéral, on constate un creusement profond des inégalités...

Guerre sociale et guerre globale

Tout ceci n’est évidemment pas sans effets sur la nature des rapports sociaux dans les sociétés contemporaines. Les dégâts induits par les politiques néolibérales sont considérables. La concurrence de tous contre tous, la mise en opposition des exploité-e-s avec celles et ceux qui sont encore plus exploité-e-s, la destruction des anciennes solidarités, tout ceci témoigne du degré de pénétration du néolibéralisme au sein de la société. C’est ce qui explique que les révoltes prennent souvent la forme d’explosions spontanées, déstructurées, comme ce fut le cas dans les banlieues françaises l’an passé. La guerre sociale n’est en réalité que l’un des versants d’un état de guerre global déclaré dès le lendemain des attentats du 11 septembre 2001 - même si la rhétorique « anti-terroriste » avait été élaborée dans les cabinets de l’administration américaine bien avant cette date. La guerre globale contre le « terrorisme » se caractérise d’abord par son caractère illimité dans le temps et l’espace. Contrairement aux guerres classiques, cette guerre est présentée comme une guerre non entre des Etats qui auraient des intérêts divergents, mais entre le Bien et le Mal. Des phénomènes comme Guantanamo, Abu Ghraib, ainsi que la re-légalisation de la torture par l’administration américaine récemment, sont inscrits dans la logique de ce type de conflits. Celui-ci implique par ailleurs une suspension du droit international. La plupart des expéditions militaires récentes - y compris l’invasion israélienne du Liban - se sont faites en dehors de toute juridiction internationale. En même temps, le discours néolibéral a perdu une part importante de sa légitimité. Certes, les contre-réformes se poursuivent, mais les idéologues satisfaits du néolibéralisme se font de plus en plus rares. Il y a une réelle prise de conscience, au sein de la population, et dans une fraction de la « classe politique », des ravages de cette idéologie sur le tissu social. On voit dès lors apparaître ce que j’appellerais un discours libéral « tempéré », qui cherche à aménager des filets de sécurité, tout en continuant à préconiser la soumission aux marchés. Construire de nouvelles solidarités Les mouvements d’opposition au néolibéralisme sont encore jeunes. Les trois dates habituellement retenues pour marquer leur naissance sont le soulèvement zapatiste de 1994, les grèves françaises de l’hiver 1995, et les manifestations de Seattle de 1999. Or, dans les trois cas, l’émergence du mouvement altermondialiste ne date que de 10-12 ans, ce qui, à l’échelle de l’histoire du mouvement ouvrier, est bien peu. La question est de savoir sur quelle base on peut construire aujourd’hui de nouvelles solidarités. A mon sens, l’une des principales tâches qui s’imposent à la gauche radicale est de faire apparaître les solidarités de classe là où elles ne sont pas forcément perçues. Un exemple. Azouz Begag, l’actuel ministre français de l’« égalité des chances », a publié pendant les luttes contre le CPE une tribune dans Libération. Il y affirme que les émeutier-e-s qui ont pris part à la révolte des banlieues au mois de novembre précédent, et qui ont été réprimés par la police et la justice, ne comprendraient pas que les étudiant-e-s, eux, puissent impunément occuper les universités. En somme, Begag cherchait à jouer la banlieue contre les étudiant-e-s pour délégitimer la lutte contre le CPE. Notre objectif à nous doit être, d’abord, de dénoncer ce type de manœuvres, et surtout de chercher à faire converger ces mouvements. Il faut insister inlassablement sur le fait que les problèmes de ces catégories de la population sont étroitement liés, et exiger des politiques sur la précarité, l’habitat, les conditions de scolarisation et d’accès à l’emploi, qui soient globales...
Louis
 
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Message par Vérié » 02 Oct 2007, 17:00

Euh... je sèche.

Une chose me parait certaine : ce n'est pas un texte de LO.
Vérié
 
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Message par Louis » 02 Oct 2007, 17:04

Allez je t'aide : il était invité par la Mouvement pour le Socialisme...
Louis
 
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Message par Vérié » 02 Oct 2007, 17:15

On voit que tu apprécies le suspense....
Vérié
 
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Message par Louis » 02 Oct 2007, 18:37

Ben :altharion: Mr "L'histoire nous mord la nuque" himself :prosterne:



Bon, là il est un peu fripé : la faute sans doute au séjour en altitude :w00t:
Louis
 
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Message par regivanx » 02 Oct 2007, 21:07

Pour toucher l'élève, frapper le maître.

Nous avons ici un échantillon de l'application de l'anti-libéralisme dans la théorie. Je me contenterai, par soucis d'économie, de ne faire que la critique du raisonnement générale de cet article.

Qu'est-ce que le néolibéralisme selon Daniel Bensaïd ? Vous ne trouverez pas de réponse directe à cette question. Cependant on apprend par des voies détournés que le néolibéralisme est :

_ un discours (« contrairement aux promesses du discours néolibéral... », « le discours néolibéral a perdu une part importante de sa légitimité. », « ce que j’appellerais un discours libéral ») ;

_ une politique (« Les dégâts induits par les politiques néolibérales sont considérables. »)

_ une idéologie (« des ravages de cette idéologie [le néolibéralisme]... »)

Bref qu'il appartient à la superstructure.

Or qu'apprend-on de cet éminent marxiste ?

« Tout ceci n’est évidemment pas sans effets sur la nature des rapports sociaux dans les sociétés contemporaines. » Malheur de malheur, Daniel Bensaïd ! Mais n'est-ce pas au contraire les rapports sociaux qui déterminent les discours, la politique, l'idéologie ? En voilà un triste résultat ! En inversant le libéralisme, on a du même coup inverser le matérialisme.

Ce n'est pas tout. On apprend encore que le néolibéralisme « induit » « La concurrence de tous contre tous, la mise en opposition des exploité-e-s avec celles et ceux qui sont encore plus exploité-e-s, la destruction des anciennes solidarités ». Ma parole, on nage en plein idéalisme.

Il y a plusieurs autres stupidités qui mériteraient elles aussi d'être discutées. Mais l'idéalisme de Daniel Bensaïd le condamne déjà pour la classe ouvrière. L'anti libéralisme se réduit à la croyance qu'une politique – ici le néolibéralisme – dirige le monde. Il ne fait pas de doute qu'une organisation s'appuyant sur des théoriciens aussi profonds nous mènera assurément à la révolution.
regivanx
 
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Message par Louis » 02 Oct 2007, 21:50

a écrit :Mais l'idéalisme de Daniel Bensaïd le condamne déjà pour la classe ouvrière.


:sygus: Ce que j'aime bien chez les gauchistes, c'est qu'ils n'ont jamais peur des phrases définitives (et de dire des conneries monumentales)

Bon, reprenons calmement :
a écrit :Le néolibéralisme est une idéologie 


c'est évident ! Suffit de voir tous les efforts (considérables) pour nous rendre les patrons "cools", l'entreprise "sexy", pour nous expliquer qu'on était dans une guerre, qu'on avait de toute façon pas le choix etc etc

Et en meme temps ce n'est pas qu'un discours, qu'une idéologie ! Cela implique aussi des forces matérielles, etc

Evidemment que les "discours" ne sont pas que des "purs" discours ethérés ! Et c'est toi qui traite Bensa d'idéaliste ??? C'est l'hopital qui se fout de la charité ! Parce que les discours peuvent etre suivi d'effet : quand les "néolibéraux" expliquent qu'il faut casser les "bastions", les coins ou la classe ouvriére est super concentrée, et ou elle a donc des possibilités d'actions qui font peur a la bourgeoisie, ils n'en restent pas qu'au discours !

C'est une chose (que ne fait pas Bensa) que de dire que "les discours" en soi ont une force performative (en même temps, c'est pas Judith Butler). Mais c'est vraiment une explication bas-du-plafond que de penser que cela se réduit a des structures, sans que les discours et les idéologies aient DU JEU, qu'il y ait des ajustements possible, etc
Louis
 
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Message par Puig Antich » 02 Oct 2007, 22:27

Certes. Mais il faut partir de la structure matérielle, y compris pour expliquer pourquoi tel discours est produit nécessairement, et pour bien voir la portée, et les limites, de ce que tu appelle sa valeur « performative ». C'est à dire de son action.
Puig Antich
 
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Message par regivanx » 02 Oct 2007, 23:17

Cher Louis,

je ne voulais pas te provoquer. Je voulais juste mettre en évidence la nature idéalisme du raisonnement de Daniel Bensaïd. Et tu fais la même erreur que lui ! Tu écris :

a écrit :
Et en meme temps ce n'est pas qu'un discours, qu'une idéologie ! Cela [le neolibéralisme] implique aussi des forces matérielles, etc.


En tant qu'il est une politique, une théorie ou une idéologie de la bourgeoisie, le néolibéralisme ne peut pas être une donnée première. La réflexion matérialiste du néolibéralisme posera nécessairement la question de quelles sont les « forces matérielles » les « rapports sociaux » qui sont à la source de cette idéologie. Prétendre que le néolibéralisme induit la concurrence, la destruction des solidarités, c'est prétendre que l'effet (ou la réflexion) induit la cause. C'est un raisonnement idéaliste.

Et puis ce n'est pas la peine de s'énerver quand on bouscule un peu Daniel Bensaïd. modération. Il n'y a qu'à voir comment il traite la question de la « guerre sociale ». Selon lui, « La guerre sociale n’est en réalité que l’un des versants d’un état de guerre global » ; c'est à dire que la « guerre sociale », qu'on appelle plus traditionnellement la lutte des classes, « n'est qu'un versant » de la guerre de Bush lancée contre son ennemi insaisissable le terrorisme. Tout marxiste te dira que c'est précisément le contraire. Toute guerre, tout évènement social est un effet (et non une cause) de la lutte des classes.

Comme il ne comprend pas la cause de la guerre de Bush, il est incapable de la décrire. Il nous dit qu'elle « se caractérise d’abord par son caractère illimité dans le temps et l’espace » bref, il nous dit la même chose que les faucons de la maison blanche. Comme pour le néolibéralisme, il nous dit qu'il est contre, mais il n'a pas d'autre analyse que celle de la bourgeoisie.
regivanx
 
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