bon, c'est un peu tard, mais voici ce qu'en disent les camarades de Spark dans le journal du même nom (n° du 5 au 19 mars)
a écrit :Critique de films : Mémoire de nos pères et Lettres d'Iwo Jima
Deux fims récents de Clint Eastwood, Mémoire de nos pères et Lettres d'Iwo Jima, racontent l'histoire de l'une des plus sanglantes batailles de la 2ème Guerre Mondiale - l'un du point de vue américain, l'autre japonais.
Mémoire de nos pères a le même titre que le livre écrit par James Bradley. Le père de l'auteur, John Bradley, fut un des six soldats qui furent photographiés en plantant le drapeau américain sur l'île japonaise d'Iwo Jima.
Le titre du film (Flags of our fathers, c.a.d. Les drapeaux de nos pères dans la vo, NDT) a certainement une résonnance patriotique. Et il conteste peu, sinon rien, de la version officielle américaine de la 2ème G.M. - à savoir que c'était fondamentalement une "bonne guerre", contre des dictatures agressives et expansionnistes d'Europe et du Pacifique. Cependant, en racontant les histoires individuelles des soldats, le film met en cause nombre de mythes sur la façon dont les USA ont conduit la guerre.
Trois des six soldats sur la photo furent tués dans la semaine après avoir planté le drapeau. Les trois survivants furent ramenés aux USA et envoyés en tournée dans tout le pays pour aider à vendre des bons de guerre. Le film montre comment ces trois jeunes hommes - à peine vingt ans - souffrent, à différents degrés, de ce qu'on appelle maintenant des désordres de stress post-traumatique : cauchemars, flashbacks, instabilité nerveuse, etc.
Parmi les trois, celui qui souffrit des symptomes les plus graves fut Ira Hayes, un Indien qui continua à endurer le racisme à son retour malgré son statut officiel de "héros de guerre". Il devint alcoolique, ne parvint jamais à garder un emploi, et mourut à l'âge de 32 ans. Un des deux autres, René Gagnon, succomba lui aussi à l'alcoolisme et travailla dans des boulots mal payés, se sentant toujours trahi par le gouvernement. John Bradley, qui possédait une entreprise de pompes funèbres et éleva une famille, souffrit de cauchemars et de crises d'angoisse consécutives à l'horrible violence dont il avait été témoin comme jeune soldat à Iwo Jima, et sa vie entière il ne voulut jamais reparler de la guerre.
Dans une interview, Eastwood dit qu'il décida de filmer Lettres d'Iwo Jima quand, pendant le tournage de Mémoire de nos pères il connut mieux ce qu'avaient vécu les Japonais sur l'île. Donc il tourna le film en version japonaise.
Il est difficile de ne pas être ému par ce film qui montre de façon crue, terre-à-terre, la réalité la plus basique de la guerre : ceux qui la font dans le camp opposé sont des êtres humains exactement comme nous, et la plupart n'ont pas choisi d'être là.
Le gouvernement japonais chercha-t-il à donner à leurs troupes une image fausse, raciste, du peuple et des soldats américain ? Oui, exactement comme le fit le gouvernement américain à propos des "Japs". Les soldats marchèrent-ils ? Certains le firent, exactement comme de ce côté-ci du Pacifique. Mais exactement comme ici, dans le camp opposé aussi, il y eut des soldats qui remirent en cause la propagande du gouvernement. Et même peut-être plus, étant donné que les japonais comprenaient le désespoir de leur situation : leur flotte déjà détruite, l'Etat-Major avait envoyé 20 000 soldats sans aucun soutien aérien ou naval, "mourir honorablement pour votre pays".
Des presque 100 000 Américains envoyés à Iwo Jima, 7 000 furent tués et 20 000 blessés. Dans le camp japonais, seuls 1 000 survécurent.
Interrogé s'il avait essayé de prendre position contre la guerre avec ces films, Eastwood dit qu'aucun film qui cherche à montrer la réalité de la guerre ne peut être pour la guerre. C'est ce qui rend ces deux films si puissants.
voilà voilà, ça fait plaisir de lire ça, non ? (et c'est instructif, dans la mesure de la traduction approximative)
Ceci dit, le film de Spielberg (producteur de ceux-ci, d'ailleurs, me semble-t-il) sur le
Soldat Ryan montre au contraire qu'on peut montrer la guerre et la soutenir dans ses côtés les plus affreux, et sa propagande la plus éhontée.