Tensions sociales en Guinee-Conakry

Dans le monde...

Message par Combat » 22 Jan 2007, 18:44

CONAKRY (AFP) - lundi 22 janvier 2007 - 16h43 - Dix-sept manifestants ont été tués lundi par les forces de l'ordre en Guinée, dont treize dans la banlieue de Conakry, au 13e jour d'une grève générale illimitée, selon un nouveau bilan obtenu de source hospitalière et syndicale.Depuis le début du mouvement le 10 janvier, 27 personnes ont trouvé la mort. La journée de lundi est de loin la plus meurtrière.

Treize personnes ont été tuées et au moins 30 blessées par balles dans différents quartiers de la banlieue de la capitale Conakry, selon un responsable de l'hôpital Donka, un des deux plus grands hôpitaux de la capitale.

A Kankan (est), deux manifestants ont été tués et 11 blessés par les forces de l'ordre et à Siguiri, près de Kankan, deux manifestants ont été tués et huit blessés, a indiqué M. Mamadi Condé, secrétaire-général de la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG) dans la région de Kankan.

Le mouvement de contestation appelant au départ du président Lansana Conté entendait, à l'origine, dénoncer la corruption et l'ingérence dans les affaires judiciaires du président Conté, 72 ans.

Les manifestants exigent dorénavant la démission du Chef de l'Etat, au pouvoir depuis 23 ans mais affaibli par la maladie.

Selon des témoins, les victimes de lundi ont été tuées dans différents quartiers de la périphérie de Conakry lors d'échauffourées entre manifestants et policiers anti-émeute: trois manifestants ont été tués à Hamdalaye, deux à Lambania, un à Enco-Cinq et un à Matam, selon ces témoins.

Par la suite, plusieurs milliers de jeunes gens ont quitté la banlieue pour se rendre au centre de la capitale, faisant craindre de nouvelles violences. "On va au Palais, on va prendre le Palais (présidentiel)", criait l'un d'entre eux.

http://www.izf.net/izf/AFP2/francais/speci...4.qf6zovj0.html
Combat
 
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Message par Wapi » 22 Jan 2007, 21:12

Les ouvriers de la bauxite ont cessé le travail, et du coup les impérialistes s'affolent !

On peut vraiment dire que la classe ouvrière est rentrée en lutte. Le fait-elle sous son propre drapeau, s'affranchira-t-elle des partis bourgeois qui cherchent à lui voler sa colère pour arriver au pouvoir ? On verra bien, mais en tous cas, c'est déjà remarquable car ce n'est nullement fréquent que les mineurs cessent le travail.


a écrit :        Une dizaine de morts lors de heurts à Conakry

Reuters

Les affrontements entre les forces de l'ordre guinéennes et des partisans de la grève générale ont fait onze morts et une centaine de blessés lundi à Conakry, a annoncé le médecin d'un hôpital de la capitale guinéenne.

"Il y a au moins une centaine de blessés. Le nombre de morts peut être estimé à onze mais ce bilan n'est pas définitif (...) les blessés continuent d'affluer", a confié à Reuters, sous couvert de l'anonymat, ce médecin de l'hôpital Donka.

Auparavant, des coups de feu avaient éclaté dans la capitale au moment où des partisans de la grève générale observée depuis le 10 janvier pour obtenir le départ du général-président Lansana Conté tentaient de gagner le centre-ville.

Selon des témoins, les forces de l'ordre en tenue anti-émeute ont bouclé le centre-ville pour s'opposer aux marcheurs, qui scandent notamment "Nous voulons un changement".

Des tirs ont été entendus dans le centre ainsi qu'en quatre autres points de la capitale.

Les forces de sécurité ont pris position sur le pont de l'autoroute du 8-Novembre, qui traverse l'extrémité de la péninsule où se trouve le centre-ville.

D'après une source proche des forces de sécurité, des soldats d'élite, dont des bérets rouges de la garde présidentielle, ont tiré en l'air pour disperser la foule. "Nous avons réussi à les disperser", a ajouté cette source, sans mentionner de victimes.

Un témoin affirme avoir aperçu quatre corps ensanglantés dans un quartier. "Les marcheurs tiennent avec eux quatre corps ensanglantés et ils disent qu'ils vont vers le centre-ville", a confié cet habitant du faubourg de Dixinn.

LA FILIERE BAUXITE PARALYSEE

Les milieux diplomatiques estiment que le mouvement de grève qui paralyse le pays, dont le secteur stratégique de l'extraction de bauxite, est de loin le plus grave en termes de violences et d'importance.

"Cela semble plus sérieux qu'auparavant", note un diplomate en poste à Conakry. "Jusqu'ici, l'agitation n'avait jamais gagné le centre de la capitale."

"D'après ce que je comprends, il y a deux mouvements de protestation: il y a des gens devant la Bourse du travail et on parle de foules déferlant des faubourgs qui tentent de gagner le centre-ville", a-t-il expliqué.

Les manifestations, qui avaient fait huit morts dans tout le pays avant les heurts de lundi à Conakry, s'inscrivent dans le cadre d'une grève générale pour obtenir le départ du chef de l'Etat, malade.

Ce dernier, au pouvoir depuis le coup d'Etat militaire de 1984, a fait quelques concessions aux syndicalistes, qui jugent ces gestes insuffisants. Dimanche, il a invité l'armée à s'unir derrière lui.

Ces derniers jours, Conté a déserté sa résidence habituelle pour habiter dans l'enceinte du camp militaire Samory Touré, dans le centre de Conakry.

La grève générale, la troisième en un an, a par ailleurs interrompu l'acheminement du minerai de bauxite de la Compagnie des bauxites de Guinée (CBG), gérée par le géant américain Alcoa Inc. via sa coentreprise Halco avec le Canadien Alcan et Dadco. Halco possède 51% du capital de la CBG, le reste étant la propriété de l'Etat guinéen.

La Guinée possède 30% des réserves mondiales de bauxite, un minerai dont elle est le principal exportateur mondial et qui sert, une fois raffiné, à la fabrication de l'aluminium.

Dans un premier temps, les dirigeants de la CBG en Guinée avaient affirmé que les opérations d'enlèvement au port pourraient se prolonger pendant environ une semaine grâce aux stocks de sécurité.

Mais Alcoa a reconnu lundi que les opérations de chargement étaient au point mort depuis que les ouvriers ont arrêté le travail il y a trois ou quatre jours. Ce débrayage a entraîné la suspension des opérations d'extraction, de transport par le rail et de chargement du minerai au port de Conakry.

La CBG produit un peu plus de 14 millions de tonnes de bauxite par an provenant de sa mine de la région de Boké, dans le nord-ouest du pays. Elle exporte 13 millions de tonnes de minerai asséché, ce qui est fait le premier exportateur de bauxite de la planète.



Ah, quel dommage que nous n'ayons pas une Internationale digne de ce nom. C'est dans des moments un peu exceptionnels comme celui-ci que le manque s'en fait le plus sentir.
Wapi
 
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Message par Wapi » 24 Jan 2007, 14:33

La lutte des clans -et derrière eux, des pillards de l'Afrique- pour la succession du despote moribond s'intensifie alors que les masses se montrent de plus en déterminées, mais hélas sans autre perspective à ce jour que de remettre le pouvoir à "l'opposition". (pas l'opposition au système en tous cas).

Mais le pouvoir tient bon, enfin pour l'instant ... et la population en lutte va devoir à présent affronter les balles des soldats d'élite de la Guinée-Bissau voisine.

Pourvu qu'il n'y ait pas de morts pour rien. Et si certains doivent tomber sous les balles, qu'au moins cela ne serve pas au mieux à remplacer les vautours par des chacals, et que leur sacrifice pave la voie qui mène à la prise de conscience que seul le communisme est l'avenir du monde.


a écrit :
CONAKRY, le 23 janvier (IRIN) -

Une unité des forces spéciales bissau-guinéennes a été dépêchée en Guinée pour venir en aide au Président Lansana Conté qui fait face à un mouvement contestataire sans précédent, a indiqué lundi un haut responsable de l’armée bissau-guinéenne.

« Des troupes basées à Gabu, une localité située à l’est de la Guinée Bissau, ont été envoyées dimanche à Buruntuma, en Guinée Conakry, pour prêter main forte à l’armée du Président Conté, a précisé l’officier.

La frontière entre les deux pays est fermée depuis le 10 janvier, ont indiqué les autorités bissau-guinéennes. Selon certains témoins, l’armée et la police guinéennes ont tué une trentaine de personnes au cours des deux dernières semaines, lorsque des manifestants sont descendus dans les rues pour exiger le départ du président septuagénaire Lansana Conté, au pouvoir depuis près de 23 ans.

Les soldats dépêchés en Guinée Conakry appartiennent aux troupes d’élite Aguentas – les survivants, en français -. Ce corps d’élite a été formé à Conakry en 1998, puis est retourné à Bissau soutenir le Président de Guinée Bissau, Joao Bernardo "Nino" Vieira, lors d’une insurrection militaire menée contre lui, ont fait remarquer des analystes militaires.

Les Présidents de Guinée Conakry et de Guinée Bissau ont signé un accord de coopération militaire en 1996. En effet, une brève mutinerie avait éclaté cette année-là à Conakry, au sein de l’armée guinéenne, et avait contraint le Président Conté à se réfugier à Bissau.

« Le Président Vieira vole au secours du chef d’Etat guinéen, comme ce dernier l’avait fait par le passé pendant les insurrections militaires de 1996 1998 en Guinée Bissau », commente une source diplomatique.

En effet, en 1998, lors de la mutinerie contre M. Vieira, le Président Conté avait envoyé l’armée guinéenne pour soutenir le chef d’Etat bissau-guinéen. Mais en 1999, il a été renversé par une junte militaire, puis s’est exilé au Portugal.

De retour dans son pays en 2005, il est élu Président de la République à l’issue d’élections considérées comme libres, justes et transparentes par les observateurs de l’Union européenne.


Ici
Wapi
 
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Message par Wapi » 24 Jan 2007, 19:18

A propos de ceux qui sont auto-proclamés "représentants" de la population en lutte ... c'est encore plus clair quand ils disent à qui ils font confiance pour résoudre la "crise".

a écrit :Dialogue gouvernement-syndicats après les violences en Guinée Reuters

Les syndicats guinéens ont rencontré mercredi des représentants du gouvernement pour tenter de mettre un terme au mouvement de grève générale après les violences qui ont fait une quarantaine de morts ces derniers jours.

Le mouvement de protestation, lancé il y a deux semaines, a également provoqué un arrêt des chargements de bauxite, dont la Guinée est le premier exportateur mondial, et des pénuries alimentaires à Conakry, où les marchés et les banques sont fermés.

Les responsables des organisations syndicales estiment que le président Lansana Conté, septuagénaire diabétique à la santé fragile, n'est plus en état de gouverner le pays et ils réclament son départ.

Mais l'épouse du chef de l'Etat, Henriette, a réussi mardi soir à les convaincre de reprendre les négociations avec le gouvernement.

"Les syndicalistes et le gouvernement sont face à face sous la médiation des institutions républicaines, (des) confessions religieuses et (du) patronat. (Ce sont) des travaux préliminaires, il reste encore beaucoup de choses à résoudre", à déclaré à Reuters l'évêque anglican de Guinée Albert Gomez.

Ce retour à la négociation marque un tournant. Les syndicats avaient déclaré en début de semaine qu'il leur était impossible de discuter avec un gouvernement qui a fait donner lundi l'armée et la police contre des manifestants désarmés.

Cette journée, la plus sanglante depuis le début du mouvement de protestation, a fait au moins 33 morts et plus de 150 blessés dans la capitale, selon un bilan établi auprès des hôpitaux et des morgues.

APPEL AU DIALOGUE

Les mesures de sécurité restaient très strictes mercredi autour de Conakry, mais à la suite d'un appel au calme et de l'ouverture de négociations, davantage de personnes s'aventuraient dans les rues.

"On est fatigués. Il n'y a pas d'eau, il n'y a pas d'électricité, il n'y a rien à manger", déplorait Amadou Touré, un chauffeur de taxi de 32 ans qui, avec d'autres, patientait depuis l'aube à l'une des rares pompes à essence ouvertes pour faire le plein.

Des jeunes gens rassemblés au coin d'une rue se disaient prêts à manifester à nouveau si les discussions échouaient, mais d'autres habitants disaient que le départ de Conté était plus improbable que jamais après la violente répression de lundi.

"C'est le gouvernement qui a gagné cette grève", affirmait sous le sceau de l'anonymat un employé d'un restaurant.

Le régime de Conté, basé sur des affiliations claniques, est soutenu par l'armée depuis qu'il s'est emparé du pouvoir en 1984 à la faveur d'un coup d'Etat militaire. Conté n'a laissé entrevoir aucune intention de céder le pouvoir.

Or, des diplomates doutent que la seule nomination d'un nouveau Premier ministre sera à même de régler la crise politique.

La gestion de la crise par les forces de sécurité, ajoutent-ils, constitue un grave retour en arrière pour la Guinée, un mois seulement après que l'Union européenne a repris le versement de son aide en notant, à l'époque, des progrès en matière de réformes démocratiques.

Le commissaire européen chargé de l'Aide humanitaire, a exhorté toutes les parties à respecter la loi et il les a invitées au dialogue.

Les Nations unies et l'Union africaine ont critiqué le recours à la force par les autorités, mais peu de puissances étrangères semblent prêtes à s'impliquer dans ce qui apparaît comme une affaire essentiellement intérieure.

Les chefs d'Etat de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) ont décidé la semaine dernière d'envoyer une mission de haut niveau en Guinée pour y pousser à la négociation, mais un diplomate a rapporté qu'il semblait y avoir peu de progrès.

"Les Etats membres sont très divisés sur la question de savoir s'il est approprié pour la Cédéao d'intervenir. Même ceux qui voulaient participer à une médiation se demandaient s'il ne serait pas contre-productif de discuter avec Conté", a-t-il dit.

Wapi
 
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Message par Wapi » 25 Jan 2007, 12:30

Ici un article tiré d'un journal ivoirien qui risque un parallèle entre la situation en Guinée aujourd'hui et celle du Mali en 1991. Bon, évidemment, il ne va pas jusqu'au bout du raisonnement, mais ça éclaire la politique des centrales syndicales et des partis de l'opposition.

Il y a aussi à la fin une chronologie des évènements depuis le 13 janvier.
Wapi
 
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Message par Wapi » 30 Jan 2007, 23:22

Et voilà l'épilogue, peut-être provisoire.

http://fr.allafrica.com/stories/200701300722.html

Autour de la mangeoire, on se serre un peu et on fait de la place pour les nouveaux venus, et les "syndicats" appellent aussitôt à la reprise ("forcent" serait plus juste).

59 personnes sont mortes pour un "premier ministre de consensus" ...

Tant de combattivité et d'héroïsme pour en arriver là.

Mais peut-être que cette lutte a permi à la conscience des masses de progresser ? ça serait plus facile s'il y avait sur place un parti capable d'analyser ce qui s'est passé et d'en dégager des enseignements pour les travailleurs de ce pays.
Wapi
 
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Message par Wapi » 07 Fév 2007, 21:04

La crise n'est pas résolue en Guinée. Le Président a temporisé, mais les discussions entre les clans s'éternisent (probable). Le premier ministre "de consensus" n'a pas été nommé, alors les "syndicats" (i.e : "l'opposition") montrent à nouveau les dents en fixant un ultimatum pour le 12.

Mais s'ils le font, c'est qu'une fraction au moins de la population en lutte n'a pas encore complètement désarmé.

a écrit :
Guinée: Ultimatum des syndicats pour la nomination d'un Premier ministre

Le Potentiel (Kinshasa)

7 Février 2007

Pierre Emangongo
Kinshasa

Les syndicats guinéens ont lancé un ultimatum lundi au président Lansana Conté, le menaçant de nouvelles manifestations s'il ne nommait pas d'ici une semaine un Premier ministre aux larges pouvoirs, comme il s'y était engagé fin janvier dans un accord mettant fin à 18 jours de grève.

«Si d'ici lundi (12 février) nous constatons que la nomination du Premier ministre chef du gouvernement n'a pas lieu, nous reprendrons notre action» a , selon l'AFP,déclaré à Conakry Ibrahima Fofana, un des leaders de l'intersyndicale à l'origine de la grève générale.Ce mouvement, le troisième de ce type en un an, avait paralysé pendant 18 jours ce pays d'Afrique de l'ouest, premier exportateur mondial de bauxite. Au mois 59 manifestants avaient été tués par les forces de l'ordre entre les 10 et 27 janvier.

Sous la pression, le président Lansana Conté, au pouvoir depuis 23 ans et affaibli par la maladie, avait fini par accepter le 27 janvier la nomination d'un nouveau Premier ministre «de consensus» aux pouvoirs élargis et donné son feu vert à plusieurs mesures sociales et économiques.

Le nouveau Premier ministre doit désormais avoir fonction de chef du gouvernement, rôle rempli par le président depuis l'indépendance du pays en 1958.

Selon l'accord signé entre syndicats et gouvernement, ce Premier ministre devra être «un haut cadre civil compétent, intègre, et qui n'a été impliqué ni de près ni de loin dans des malversations». Sa nomination revient, selon la Constitution, au président de la République.

Le 2 février, M. Conté avait signé un décret définissant les pouvoirs du Premier ministre, répondant en grande partie aux exigences des syndicats, mais il tarde depuis à le nommer.

En outre, aucune consultation n'a été engagée avec les acteurs politiques et sociaux, et aucun nom ne circulait encore lundi dans les cercles proches du pouvoir.

Le président Lansana Conté doit saisir cette occasion pour nommer un premier ministre qui rencontrera les aspirations populaires. Ce qui lui permettra de mieux organiser son parti et trouver son successeur pour la prochaine élection.


La ballet diplomatique autour du moribond montre cependant que les impérialistes qui sont derrière tout cela se font un peu de souci pour la pérennité de leurs profits en Guinée; et que pour garantir ceux-ci, ils sont prêts à remettre la région totalement à feu et à sang, comme ils le font dire à leur valetaille locale.

ça fait froid dans le dos.

a écrit :
Arrivée à Conakry du président bissau-guinéen

GUINÉE - 3 février 2007 - PANAPRESS

Le chef de l'Etat bissau-guinéen, Joao Bernardo Vieira, est arrivé samedi en début d'après-midi à Conakry pour une visite de travail de quelques heures en Guinée.

Dès son arrivée, il s'est entretenu avec le président Lansana Conté sur divers sujets dont la coopération bilatérale entre les deux pays.

Selon des sources bien informées, la visite de Vieira s'inscrit dans le cadre de la recherche de solution suite à l'interdiction, par le gouvernement guinéen, de l'exportation des produits agricoles, halieutiques, forestiers et pétroliers des pays voisins jusqu'en décembre 2007.

Cette mesure a été prise à l'issue de la signature, le 28 janvier, d'un accord global entre le gouvernement et les centrales syndicales qui avaient déclenché, le 10 janvier, une grève générale illimitée.

Dans une récente intervention à la radio nationale, le ministre du Commerce, Kazaliou Baldé, a insinué que la Guinée Bissau et la Sierra Leone pourraient être les principales victimes de cette décision prise sous la pression des syndicats.
Wapi
 
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Message par Wapi » 08 Fév 2007, 10:11

Dans la LO de la semaine :

a écrit :
Guinée Conakry - Après des semaines de grève, le dictateur reste au pouvoir... jusqu'à quand?

Il aura fallu près de 60 morts, des centaines de blessés, un pays paralysé par la grève générale pendant plusieurs semaines, des dizaines de milliers de manifestants dans toutes les grandes villes du pays, en janvier dernier, pour que le président dictateur Lansana Conté fasse quelques concessions.

Le pouvoir et les syndicats étaient parvenus à un accord: le vieux dictateur s'engageant à nommer un Premier ministre et les syndicats acceptant de faire une «pause». Pour l'heure, fort du soutien de l'armée, le pouvoir joue la montre et la nomination du Premier ministre se fait attendre. Les syndicats ont lancé un ultimatum et menacent d'appeler de nouveau la population à la grève générale le 12 février, si le Premier ministre n'est toujours pas nommé d'ici là.

La grève générale avait été lancée, le 10 janvier dernier, par la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG) et l'Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG), soutenues par quatorze partis politiques. Les raisons du mécontentement sont nombreuses: vie chère, corruption généralisée à tous les échelons du pouvoir et de la société, détournements de fonds publics, «ingérence» dans la justice. Lansana Conté était intervenu pour faire libérer en décembre 2006 l'ancien président du patronat, Mamadou Sylla, richissime homme d'affaires et première fortune du pays, inculpé et incarcéré pour détournements de fonds publics, ainsi que son co-accusé l'ex-ministre Fodé Soumah. Ils étaient accusés d'avoir détourné l'équivalent de deux millions d'euros. Voilà ce qui avait mis le feu aux poudres. Syndicats et partis d'opposition avaient appelé à la grève et à la désobéissance civile.

Un mouvement de grève générale

Face aux manifestations qui ont très vite gagné les principales villes du pays, Lansana Conté a d'abord fait tirer sur la foule, puis a lâché du lest avant qu'il ne soit trop tard. Le 26 janvier dernier, il a signé un accord s'engageant à nommer un Premier ministre pour former un gouvernement de transition, principale revendication des partis d'opposition. Aussitôt, les dirigeants des centrales syndicales ont appelé à la «suspension » du mouvement gréviste. Certains hommes politiques, à l'instar de Sidya Touré, Premier ministre de 1996 à 1999 et aujourd'hui opposant, préfèrent que le mouvement gréviste rentre dans le rang le plus vite possible. En appelant «à la pause », les organisations syndicales ont pris le risque de démobiliser la population avant même d'avoir obtenu gain de cause. Et cela est d'autant plus préjudiciable aux intérêts des masses pauvres de Guinée que, dans ce pays comme ailleurs, l'armée reste le principal garant du régime du dictateur et des intérêts des grandes familles qui ont mis le pays en coupe réglée.

Jusqu'à quand l'armée restera-t-elle le pilier du régime?

Cette armée a été choyée par Lansana Conté et formée grâce à la coopération militaire française. Mais la question qui se pose aujourd'hui est de savoir jusqu'à quand celle-ci restera fidèle au régime en place. L'armée n'est pas à l'abri de dissensions internes, liées aux ambitions personnelles et aux calculs politiques de ses chefs, surtout si l'agitation sociale continue. Si les intérêts des caciques du régime et des grandes multinationales - qui voient chaque jour leurs intérêts lésés par l'agitation sociale - le commandent, il se peut qu'une partie des militaires basculent dans la rébellion. Seconde incertitude: l'attitude des masses ouvrières et paysannes. Il n'est pas dit qu'elles se contentent de la simple nomination d'un Premier ministre pour rentrer dans le rang. Cela ne changera rien à leurs conditions de vie, faites de répression et de misère, et cela tout le monde le sait. La situation est explosive et le pouvoir actuel redoute par-dessus tout la relance de l'agitation sociale.

Il est à espérer que, dans les jours à venir, les masses pauvres des quartiers populaires de Conakry, de Labé et des autres grandes villes du pays, au cœur de cette agitation sociale qui secoue la Guinée depuis plusieurs semaines, ne se laisseront pas berner par des opposants qui n'aspirent qu'à participer au pouvoir à leur tour, et imposeront au mouvement de grève leurs propres revendications politiques et sociales.

René CYRILLE


a écrit :          Guinée Conakry - Un pays riche et une population pauvre
À l'instar du Congo Kinshasa (République Démocratique du Congo, ex-Zaïre), la Guinée, en Afrique de l'Ouest, constitue une véritable exception géologique: son sous-sol contient un tiers des réserves mondiales de bauxite, dont il est le second producteur mondial, le minerai qui sert à fabriquer l'aluminium, de l'or, des diamants, du fer, et d'autres minerais. La société canadienne Global Alumina, à la tête d'un consortium comprenant des entreprises françaises et européennes (dont Technip), a signé en juin 2005 un contrat de 1,5milliard de dollars pour la construction d'une usine de production d'alumine et la rénovation du port de Kamsar. Tandis que des grands groupes comme l'Anglogold Ashanti de Siguiri et la Société minière de Dinguaraye s'intéressent plus particulièrement aux réserves d'or de la Guinée.

Même si une grande partie des richesses naturelles ne sont pas exploitées, celles qui le sont rapportent. Comme dans le reste de l'Afrique de l'Ouest, la France est au premier rang dans l'économie de la Guinée: on retrouve les noms de BNP Paribas dans la banque, Bolloré dans les services maritimes, TotalFinaElf dans la distribution pétrolière, Alcatel dans les télécommunications. Près de 70 entreprises françaises, dont 25 filiales installées en Guinée, se partagent le gâteau avec les entreprises américaines.

En revanche, la grande majorité masses pauvres guinéennes vit avec moins d'un euro par jour. Le revenu moyen par habitant n'atteint que 40 euros par mois, tandis que l'espérance de vie ne dépasse pas les 54 ans, et le taux d'alphabétisation des adultes les 30%. La vie chère est telle que la population n'arrive plus à se nourrir. Ainsi le prix du riz, aliment de base importé d'Asie, a doublé. Avant la grève, un sac de riz de 50 kg coûtait 22 dollars. Aujourd'hui, il en coûte 40 à Conakry, mais 53 à Kissidougou, la principale ville de la région du sud-est du pays, le reste étant à l'avenant. Corruption et vie chère sont les principales raisons de la colère.

R.C.
Wapi
 
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Message par Louis » 09 Fév 2007, 13:00

et dans Rouge :

a écrit :GUINÉE
La victoire de tout un peuple
Après dix-huit jours de grève générale, organisée par le mouvement syndical, le président de la République de Guinée, Lansana Conté, après de multiples tergiversations et une répression féroce, accepte de négocier sur les revendications des grévistes, ouvrant la voie à une nouvelle situation politique dans ce pays.

C’est avec des sanglots dans la voix que Hadja Rabiatou Serah Diallo, secrétaire gé¬né¬ral de la Confé¬dération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG), a annoncé au peuple guinéen le résultat des négociations entre syndicats, patronat et gouvernement. Con¬cernant le pouvoir d’achat, une baisse du prix de tous les produits pétroliers est prévue - y compris du pétrole lampant qui permet à un grand nombre de foyers guinéens sans électricité de bénéficier de la lumière -, la baisse du prix du riz, l’augmentation des pensions de retraite et des traitements des fonctionnaires. L’accord porte aussi sur l’arrêt du pillage des ressources naturelles du pays, avec le gel pour un an de toutes les exportations de denrées alimentaires, des produits de la mer et des forêts, le rapatriement du chiffre d’affaires des sociétés minières et autres opérateurs guinéens, la modification des conseils d’administration avec le retrait du poste de président aux gouverneurs, l’indépendance de la Banque centrale de la République de Guinée (BCRG) vis-à-vis de la présidence de la République. Au niveau politique, la négociation a abouti à la décision de nommer un « Premier ministre qui doit être un haut cadre civil, compétent, intègre et qui ne soit, ni de près ni de loin, impliqué dans des malver¬sations », et à la poursuite des enquêtes pour corruption et détournement des fonds publics avec les inculpations de Mamadou Sylla et Fodé Soumah. Rappelons que la grève a éclaté quand Lansana Conté a été libérer lui-même ces deux individus accusés d’avoir détourné 16 millions de francs guinéens (Fg) à la BCRG et d’en devoir une dizaine de milliards aux impôts et à la douane. Enfin, il est mentionné la libération de tous les syndicalistes emprisonnés et l’arrêt de toute répression dans les lieux de travail pour faits de grève. Ce résultat est un coup porté à la politique de Lansana Conté, qui a pris le pouvoir en avril 1984 à la tête d’un quarteron de militaires. Il perpétua la dictature initiée par Sékou Touré, qui, s’il fut le seul dirigeant africain à appeler à voter « non » au référendum organisé par de Gaulle en 1958, ouvrant son pays à une indépendance immédiate, n’en fut pas moins un redoutable tyran. Le pouvoir de Lansana Conté s’organise autour d’un petit noyau - de généraux fidèles, de membres de sa famille et de quelques hommes d’affaires, comme Mamadou Sylla - pillant allégrement le pays et s’appuyant sur les forces armées, enfant chéri du pays. Ce système fonctionne à coup de répression féroce et d’élections truquées, comme ce fut le cas pour les présidentielles de 1993, 1998 et enfin de 2003.

La France coopère à la répression

La France, mais aussi les États-Unis, a toujours soutenu ce régime, gage de stabilité dans un environnement régional éprouvé dans les années 1980 par les guerres civiles toutes proches du Liberia et de la Sierra Leone, et, aujourd’hui, par la scission de fait de la Côte d’Ivoire. Les forces répressives de l’armée, de la gendarmerie ou de la police, n’ont eu cesse de pratiquer emprisonnement, racket et torture contre la population qui, à l’occasion de la grève générale, a payé un lourd tribut avec 70 morts et des centaines de blessés. Cela n’empêche nullement la France de déployer neuf coopérants militaires pour structurer et former l’appareil répressif en déclarant hypocritement : « Les formations dispensées visent le renforcement de la capacité opérationnelle des unités avec le souci général du respect des règles d’éthique et de déontologie.1 » On peut juger de la déontologie et de l’éthique de ces formations par ce témoignage : « Des militaires sortis d’une camionnette remplie de militaires ont tiré des rafales dans toutes les directions, semant la terreur et la panique dans tout le voisinage. Toutes les portes des cases et des maisons ont été défoncées et l’intérieur mis à sac. Après cette sale besogne, ces hommes sans foi ni loi nous arrêtèrent puis nous frappèrent devant nos enfants, nos épouses et nos voisins avant de nous jeter dans leurs camionnettes déjà bourrées d’autres malheureux. Au camp Soundiata Keïta, ils nous agenouillèrent sur le goudron rocailleux pour être soumis à des traitements inhumains : se déplacer sur les genoux, puis ramper à plat ventre. Au cas où l’une de ces consignes n’était pas rapidement exécutée, nous recevions des coups de crosses et de bottes. [...] Plus tard, nous nous sommes retrouvés dans les locaux de la gendarmerie départementale pour subir un autre calvaire [...]. Nous étions 22 et chacun de nous, tendu par les agents de sécurité, a reçu vingt coups de cravache, avant d’être jeté dans le violon où nous sommes restés jusqu’à 18 heures. Quand il s’est agi de nous libérer, nous avons reçu encore chacun 30 coups de cravache et avons dû payer chacun 20 000 Fg2. » Un coup sévère à la dictature de Lansana Conté a pu être donné grâce à l’unité du peuple guinéen autour des syndicats, seules structures qui ont une couverture nationale et représentent l’ensemble des ethnies, contrairement aux principaux partis d’opposition qui sont chacun identifiés à une région du pays. C’est peut-être là une formidable leçon, la possibilité de faire vaciller une des plus vieilles et féroces dictatures en menant une bataille politique sur le terrain social et non ethnique.

Tout aussi remarquable est l’axe choisi de défense des richesses du pays. C’est un coup porté à la corruption mais aussi aux multinationales qui pillent sans vergogne, notamment la bauxite, minerai essentiel dans la fabrication de l’aluminium.

La nouvelle situation donne une marge de manœuvre étroite au nouveau Premier ministre qui devrait être nommé dans les prochains jours, coincé entre l’exigence de Lansana Conté et de l’armée de ne rien changer, et celles d’un peuple mobilisé et conscient de sa force. Dans cette future épreuve de force, il est de notre devoir militant de manifester notre solidarité avec les organisations syndicales et la population guinéenne.

Paul Martial

1. Mission de coopération militaire et de défense, in Ambassade de France en Guinée. 2. Témoignage de l’intersyndicale et des organisations de la société civile de Kankan in .
Louis
 
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Message par Wapi » 09 Fév 2007, 15:55

Je ne connais pas ce Paul Martial, mais je trouve le titre de l'article très gonflé ...

Pour l'instant, le "peuple" n'a rien vu venir ... et les accords, pour relativement favorables qu'ils paraissent, peuvent parfaitement rester lettre morte à 90% (le plus probable).

Quand à ceci :

a écrit :Dans cette future épreuve de force, il est de notre devoir militant de manifester notre solidarité avec les organisations syndicales et la population guinéenne.


je ne sais pas ce qu'implique pour le rédacteur de l'article cette idée de manifestation de la solidarité avec les "organisations syndicales". Cela veut-il dire qu'il faudrait renoncer à expliquer aux travailleurs que celles-là les trahiront au pire moment et qu'ils ne peuvent compter que sur leur propre force ?
Wapi
 
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