discrimination homophobe et antisyndicale

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Un syndicaliste homosexuel saisit les tribunaux pour discrimination

LE MONDE | 06.01.06 |

D'une voix blanche, Charles Roca, 46 ans, explique comment sa vie professionnelle est devenue, en trois ans, "un enfer". Brancardier et délégué syndical CGT dans une clinique privée de Bordeaux, il affirme avoir été victime d'une double discrimination, à la fois syndicale et homophobe. Vendredi 6 janvier, les conseillers prud'homaux de Bordeaux se sont penchés sur son dossier. L'affaire a été renvoyée au 24 février. Très affecté, Charles Roca demande que soit prononcée la résiliation de son contrat.

En 2002, Charles Roca est brancardier à la clinique Tourny, à Bordeaux, depuis une dizaine d'années, quand l'établissement est racheté par un groupe financier. La nouvelle direction impose des conditions de travail différentes. Charles Roca, l'un des plus anciens employés, devient "naturellement" le porte-parole des revendications du personnel, au départ sans avoir de mandat, avant de devenir en avril 2003 délégué syndical CGT.

"AMALGAME"

"C'était la première fois qu'il y avait un délégué CGT dans cette clinique. Et lui qui, pendant dix ans, n'a eu aucun problème dans le déroulement de sa carrière, est tout d'un coup frappé par de multiples sanctions", explique Me Agnès Courty, son avocate. Me Courty détaille les erreurs comptables "exclusivement à son encontre", puis les avertissements et une mise à pied.

L'événement le plus grave survient en juillet 2003. Le 9 juillet, l'un de ses collègues, qui comme lui est brancardier au bloc opératoire, est surpris par les parents d'un enfant de 3 ans sur lequel il est en train de se livrer à des attouchements. Les policiers viennent interpeller l'homme dans la clinique, le soir même.

Dès le lendemain, Charles Roca est convoqué par son chef de service : "Il m'a dit : on ne peut pas se permettre qu'un autre petit garçon soit abusé, donc tu changes de service."

Pour son avocate cet "amalgame" a une portée évidente : "On l'a désigné comme étant homosexuel et donc pédophile en puissance ; c'est comme cela qu'il l'a vécu et c'est pour cela qu'on l'a fait." Selon Dominique Réthoré, du collectif antidiscrimination de la CGT Gironde, la discrimination syndicale porte souvent sur les choix de vie des personnes : "On a attaqué Charles sur sa vie privée, son homosexualité, qu'il n'affichait pas et qu'il n'assumait pas à l'époque."

Depuis, Charles Roca a une appréhension lorsqu'il doit prendre en charge des enfants : "J'ai peur que ça recommence, qu'on puisse m'atteindre". Il a également du mal à supporter les réflexions sur son homosexualité et il désire aujourd'hui changer de milieu professionnel.

Pour l'avocate de la clinique, Me Carole Moret, il n'y a eu "ni discrimination syndicale ni homophobe". Elle estime qu'il y a "une forte pression syndicale".

Hugues Daniel (Bordeaux, correspondance)

[Gertrude]