L'Eglise catholique pour briser la grève

Dans le monde...

Message par Wapi » 10 Oct 2005, 19:31

Les enseignants des écoles publiques et privées catholiques (de loin les plus nombreuses dans le pays) étaient en grève ininterrompue depuis début septembre, date de la rentrée scolaire qui n'a pas eu lieu. Les grévistes se battaient pour que leur soient versés des salaires décents, dans un pays où le coût de la vie est extrêmement élevé. Cette grève avait même fait des émules de l'autre côté du fleuve, au Congo-Brazzaville.
C'est dans ce contexte que la hiérarchie catholique en RDC a pris position pour le gouvernement, contre les grévistes, en appelant à la reprise du travail ...

Mais il n'est pas sûr que les enseignants en lutte aient dit leur dernier mot...

Un article tiré du site radiookapi.net, la radio officielle de la MONUC.

a écrit :Epsp : l'Eglise catholique appelle les enseignants à reprendre le travail ce lundi 10 octobre

Cet appel a été lancé par le coordinateur national des écoles conventionnées catholiques, l’abbé Georges Mutshipay, indique radiookapi.net

Pour l’Eglise catholique, les enseignants doivent reprendre les enseignements dès ce lundi 10 octobre 2005. A ce propos, le coordinateur national du réseau catholique demande aux enseignants de la RDC d’accorder un peu de crédit au gouvernement et au chef de l’Etat et de les prendre au mot.

L’abbé Mutshipay a néanmoins précisé que l’Eglise catholique ne renie pas les revendications des enseignants. Elle voudrait éviter que ceux-ci portent la responsabilité d’une année blanche.

« Le chef de l’Etat nous a rassurés quand il nous a reçus. Nous ne sommes pas loin du 20 octobre, je suis sûr que toutes les batteries ont déjà été mises en marche pour que les promesses soient réalisées d’ici le 20 octobre. S’ils acceptent d’accorder ce crédit au président de la République, je crois qu’ils ne porteront aucune responsabilité d’une année blanche », a soutenu le coordinateur national des écoles conventionnées catholiques.

De leur coté, les enseignants disent ne pas être opposés au principe de la reprise des cours. Mais pour le moment ils affirment ne pas être concernés par l’appel de l’Eglise catholique. Leur souci, a dit le secrétaire général du Synecat (Syndicat national des enseignants des écoles conventionnées catholiques), Jean Bosco Puna, c’est de voir l’Etat congolais honorer ses engagements en payant aux enseignants un salaire décent.

« Aucun enseignant à travers la République Démocratique du Congo n’acceptera de reprendre les cours parce que l’Eglise a appelé. Il y a deux syndicats représentatifs, ce sont ces syndicats qui vont tout faire pour rencontrer les enseignants afin que la situation soit décantée », a répliqué Jean Bosco Puna, en réaction au message de la coordination nationale des écoles catholiques.

Selon ce syndicaliste, si le gouvernement donne au huissier la base de 69 dollars, comme premier palier du salaire de Mbudi, les enseignements vont reprendre immédiatement.



et un autre de digitalcongo.net

a écrit :Rentrée scolaire : Les enseignants disent non au cardinal Etsou 


Le Conseil de syndicat des services publics comprenant en son sein le Syeco a rejeté dimanche 09 octobre l’appel du cardinal Etsou qui a invité les enseignants à reprendre les cours ce lundi 10 octobre 2005 

Kinshasa , 10.10.2005 | Politics 



Au cours de son point de presse, animé au siège de ce regroupement syndical, il a été rappelé à l’autorité de l’Eglise Catholique de ne pas se dédire mais de continuer « à accompagner l’enseignant dans sa lutte pour le recouvrement de sa dignité et de sa place dans la société en conseillant l’autorité suprême de la nation ». Concrètement, il est demandé à l’Archevêque de Kinshasa le cardinal Frédéric Etsou de ne pas se jeter tête baissée dans ce dossier, alors qu’est bien connu le rôle joué par l’Eglise qu’il dirige en Rdc dans la suppression du système avilissant de la prise en charge des enseignants par les parents.
Toujours dimanche, le chef de l’Etat a été invité de reprendre l’initiative en dégageant des moyens supplémentaires susceptibles de ramener l’enseignant au point d’une concession et sauver ainsi l’année scolaire 2005-2006. A ce propos, il faut indiquer que le secrétaire général du Synecat bien que n’ayant pas été dimanche à la conférence de presse au siège du Syncass avec son collègue du Syeco, a été de communion de cœur en intervenant sur les ondes de Radio Okapi. M. Jean Bosco Puna attend le geste de bonne volonté de la part du gouvernement d’accepter même le premier palier de Mbudi fixé à Us 69 pour le huissier. Cette manifestation est importante pour ce syndicaliste en ce qu’elle peut mettre les enseignants en confiance et permettre la reprise des activités dans les différentes écoles du pays. Les appels entendus à longueur des journées sans proposition concrète risquent de continuer à se solder par de cuisants échecs.

En attendant le geste de bonne volonté, les enseignants qui sont prêts à toute concession ont, à travers le Cossep, demandé aux parents de garder leurs enfants à la maison pour ne pas les exposer. Ce regroupement syndical en appelle à un sit-in ce lundi 10 octobre au Palais du peuple. Par cette manifestation au siège des deux chambres du Parlement, il compte bien sensibiliser les autorités congolaises à la cause de l’enfant de la Rd Congo. Autant l’intérêt supérieur de l’enfant est à préserver, autant la dignité de l’enseignant, dont les conditions décentes de travail influent positivement sur l’éducation de l’écolier, doit faire partie des préoccupations des dirigeants, argumente-t-on au niveau du Cossep comprenant outre le Syeco, le Syncass, Fic, le Snpp et le Synamac. Ayant comme secrétaire général Kibiswa Kwabene Naupess, le Cossep compte en son sein les enseignants, les professionnels de santé, les fonctionnaires, les professionnels de presse et les magistrats.

La reprise des cours dans les écoles publiques toujours incertaines

La semaine dernière s’est terminée sur de nombreux appels essentiellement peu convaincants et lancés par des personnages peu convaincus, pour le retour des classes des le vendredi dernier 7 octobre 2005.

En effet, que ce soit l’appel fait par Zénon Kipulu de l’Association des parents d’élèves des écoles Catholiques (Apec), celui lancé par Thadée Onokoko Okende de l’Association nationale des élèves et étudiants du Congo (Anapeco) ou d’autres venus des autorités religieuses des écoles conventionnées catholiques, aucun n’a ému les enseignants outre mesure.

L’appel des syndicats autres que le Syeco et le Synecat, n’a fait qu’accroître la colère des enseignants grévistes qui, de toute évidence, attendent un mot de la part des désormais célèbres Jean-Bosco Puna et Jean-Pierre Kimpuya.

Mais ces derniers, marqués par les réactions inattendues des enseignants lors de la dernière assemblée générale tenue à Notre Dame du Congo et apparemment entre le marteau et l’enclume, ont préféré consulter « les délégués » en lieu et place de la base. Mais pour quel résultat face au slogan « Mbudi ou rien »?

Certaines personnes dont certainement Kipulu et Onokoko, ont trop vite fait de croire qu’en poussant les parents à se remettre encore la corde de la prise en charge des enseignants au cou, les grévistes allaient se précipiter de reprendre le travail. Certains chefs d’établissement des écoles conventionnées catholiques qui avaient réunis leurs enseignants en fin de semaine, a-t-on appris, se sont vus dire que la crise qui secoue l’Epsp oppose l’employeur (Etat congolais) aux travailleurs (enseignants). L’Eglise et les parents d’élèves n’ont aucune solution à apporter, soutiennent les enseignants. Et d’ajouter : « Si les parents veulent payer les enseignants, qu’ils ajoutent ce qui manque pour faire 208  au huissier ».

Tous ces faits ne rassurent pas quant à la reprise du travail dans les écoles publiques en grève depuis plus d’un mois déjà. Pendant ce temps, les enfants en ont marre de se tourner les pouces à la maison à cause d’une guerre sans merci que se livrent le gouvernement et les enseignants. Quant aux parents, dont la majorité ne se reconnaît pas dans la position prise par l’Apec-Kipulu et l’Anapeco-Onokoko, ils vivent dans la hantise d’une année blanche qui ne profiterait à personne, mais laisserait des traces indélébiles dans l’histoire de la nation congolaise toute entière.


A bas toutes les religions, toutes complices des exploiteurs !
Wapi
 
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Message par Wapi » 11 Oct 2005, 18:45

Selon la presse congolaise, la grève est en passe de se durcir, plus d'un mois après avoir commencé. Les enseignants tiennent tête aux ecclésiastiques, ce qui n'est pas du tout évident, vu que les écoles catholiques sont les principaux employeurs des grévistes.
Ils pointent du doigt la gabegie du pouvoir, et ont organisé un sitting devant la trésorerie générale, rencontrant la sympathie au moins des autres employés de la fonction publique. Il faudrait bien sûr que les travailleurs des autres secteurs rentrent aussi dans la lutte. Mais d'ores et déjà, on peut dire que les travailleurs congolais du secteur de l'éducation sont en train de mener une bagarre remarquable, et dans des conditions épouvantablement difficiles.

a écrit :      Grève des enseignants : la situation reste bloquée !

Le Phare (Kinshasa)

10 Octobre 2005
Publié sur le web le 11 Octobre 2005

Fidèle Musangu
Kinshasa

C'est toujours le blocage dans le secteur de l'enseignement primaire et secondaire!

Alors que l'on s'attendait à la rentrée des «bleu blanc» dans les rues et artères de la capitale dès ce matin, on va assister par contre à un sit-in organisé par les principaux mouvements syndicaux des enseignants et des fonctionnaires et agents de l'Etat devant l'autorité budgétaire, et cela quelques jours après le tollé suscité par l'opération Condor et la consommation par les députés et sénateurs de six mois de salaires présentés comme étant des frais de sortie aà valoir sur un budget non encore approuvé par le Parlement.


La confusion est telle que les parents d'élèves ne savent plus à quel saint se vouer et sur quel pied danser. Cela est d'autant plus navrant et déroutant que ceux des élèves qui vont reprendre le chemin des écoles ce matin courent le risque de se retrouver devant des salles des classes désertées par les enseignants qui ne vivent plus qu'au rythme de MBUDI, autrement dit des mots d'ordre lancés par leurs délégués syndicaux.

Interrogés le week-end dernier sur la Radio Okapi, les délégués de deux syndicats principaux ayant lancé cette grève qui paralyse depuis un mois le secteur de l'enseignement primaire et secondaire en RDC, à savoir le secrétaire général de SYECO et son collègue de SYNECAT ont fait savoir que leurs mouvements respectifs ne se sentaient pas liés par les déclarations de reprise des classes lancées depuis vendredi dernier par les associations des parents et les coordinations des écoles conventionnées catholiques. Etant donné d'une part que les contacts sectoriels se poursuivent encore et d'autre part la décision de reprendre le chemin des écoles, relève de la compétence exclusive de l'assemblée générale des enseignants comme cela se fait depuis le déclenchement de la grève.

Comme si cela ne suffisait pas, voilà que le COSSEP vient de donner de la voix en décrétant un sit-in dès ce matin devant le Palais du Peuple pour contraindre l'autorité budgétaire à prendre au sérieux les revendications des enseignants. Tout d'abord, le COSSEP s'élève contre tous ceux qui prennent plaisir à lancer des appels à la reprise des classes, alors qu'ils n'ont aucune qualité pour le faire, car n'ayant pas lancé le mot d'ordre de grève. En plus du fait que ces déclarations irresponsables en rajoutent à la confusion dans les relations entre employés et employeurs et rendent aussi un mauvais service pour la dignité de l'enseignant. Ensuite, cet appel s'adresse non seulement aux enseignants, mais aussi et surtout à la communauté internationale pour qu'elle pèse de tout son poids sur les membres de l'espace présidentiel, afin qu'ils puissent se défaire d'un certain pourcentage de leurs émoluments au profit des revendications des enseignants. Ces membres de l'espace présidentiel, a indiqué hier le secrétaire général du COSSEP lors de sa conférence de presse tenue à son siège social à Limete, consomment à eux seuls 29 % du budget annuel de l'Etat alors que les enseignants qui les ont formés végètent dans la misère.

La communauté internationale devrait saisir cet appel à la solidarité comme un cri de cour des centaines des milliers des enseignants et agents de l'Etat ainsi que leurs familles, afin que ce processus de transition puisse aboutir.

Un autre élément qui est venu en rajouter à la confusion, c'est l'accident survenu hier en la cathédrale Notre Dame du Congo où le cardinal Frédéric Etsou, terrassé par un malaise dont on ignore l'origine, n'a pu délivrer son message qui était très attendu par le gouvernement en ce qu'il pouvait contribuer à la chute de la tension qui caractérise actuellement les rapports entre le corps enseignant et le gouvernement.



C'est dieu qui a puni le cardinal d'avoir appelé à la reprise du travail ...
Wapi
 
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Message par Wapi » 11 Oct 2005, 20:15

Pour ceux que ça intéresse, j'ai trouvé un article sur le sort que les grévistes ont fait à un des bureaucrates syndicaux quand il a tenté d'appeler à la suspension du mouvement la semaine dernière.
Les grévistes sont très déterminés : ils n'écoutent ni les bureaucrates, ni les évêques qui leur enjoignent de reprendre le travail, et c'est tant mieux.

a écrit :Dans une salle électrifestive, le martyre de JBPuna, le patron chrétien des Syndicats enseignants

MISE EN LIGNE LE 4 OCTOBRE 2005 | «LE SOFT2» N°832-1 DATÉ 4 OCTOBRE 2005 | ÉDITION LOCALE RDCONGO.


À terre, JBPuna, le grand patron des syndicats Cathos, n’a pas eu le temps de compter le nombre de paires de pieds qui l’écrasaient avec fureur, il arrive juste à crier pour demander pardon. Un vrai martyre vécu par un homme qui croyait rendre service. Notre-Dame était prise d’assaut dès 8 heures du matin, lundi 3 octobre. Les enseignants étaient venus en grand nombre écouter leurs délégués syndicaux que le chef de l’État avait reçus, samedi 1er octobre. Écouter? Sans doute leur régler des comptes...

Dehors, il y avait foule qui n’avait pas pu avoir une place dans la salle. Sous les arbres logeant l’ex-avenue du 24 novembre, femmes et hommes étaient assis, attendant de connaître les propositions du Raïs.

LE PIRE FRÔLÉ.

Les nerfs étaient chauffés à blanc lorsque, lisant une déclaration, les présidents des deux syndicats des enseignants, Jean Bosco Puna pour le SYNECAT et Jean-Pierre Kimbuya pour la SYECO, ont annoncé la suspension de la grève. On a alors frôlé le pire. La situation a dégénéré. Les deux syndicalistes n’ont pas eu le temps de faire la restitution de la rencontre que des huées, insultes fusaient de partout. Les coups et les chaises volaient en l’air. Jamais une assemblée générale des enseignants ne s’est tenue avec une telle électricité en l’air. «Mbudi ou rien», scandaient les enseignants. On pouvait lire aussi sur des affiches de fortune et les banderoles: «RIP à la prise en charge de parents» ou encore «Mbudi, c’est la seule condition pour la reprise effective».

C’est à 10 heures 40 que Jean Bosco Puna et Jean-Pierre Kimbuya, débarquent au lieu de la réunion. À leur vue, la tension ne retombe pas. Au contraire, on leur lance sur la figure : «corrompus, démissionnez». Un enseignant du réseau d’écoles conventionnées protestantes crie même fort: «nous sommes au courant que Kabila vous a remis de l’argent pour lever la grève. Faites gaffe».

Mais les deux compères ne prennent pas la menace au sérieux. Puis vint, l’heure de la vérité. Puna fait amorce la restitution. Il se félicite de la «bonne volonté du chef de l’État». Avant de livrer les deux «avancées» auxquelles les syndicalistes sont arrivés avec le chef de l’État. Il s’agit, d’abord, de l’augmentation de l’enveloppe salariale de 1 milliard 172 millions de FC et, ensuite, de l’invitation lancée aux syndicalistes de participer - à quel titre? - à l’élaboration du budget 2006.

«Le chef de l’État est animé de bonne foi et de bonne volonté», déclare-t-il, le zèle en plus.

Il s’attarde sur le milliard du président, éloges à la clé. Les enseignants ne retiennent pas leur souffle. Ils déboulent: «tu n’avances pas. Arrête de nous vanter ce Kabila!», crie-t-on dans la salle. Puna, imperturbable, poursuit son dithyrambe. «Le chef de l’État a encore annoncé aux syndicalistes qu’il s’apprêtait à signer un décret, dans les tout prochains jours, pour créer un fonds pour l’éducation nationale». Avant d’ajouter que désormais, a rassuré Joseph Kabila, les enseignants toucheront leur salaire le 20 de chaque mois. «Tu nous prends pour des imbéciles ou quoi», hurle un enseignant, furieux, qui se dirige vers lui. Il est de justesse retenu. La salle se calme...

Puna appelle les enseignants à donner leurs avis dans le sens de suspendre le mouvement de grève. C’est le tsunami! Tous les intervenants n’ont qu’une phrase: « Mbudi ou rien», ressasse-t-on dans la salle.

La tension monte de plusieurs crans. Puna et Kimbuya sont débordés. Des grosses gouttes de sueurs perlent sur leurs visages. Ils finissent par perdre le contrôle de la situation.

CHAISES VOLANTES.
«Vous voulez nous piéger. Nous vous faisions confiance. Vous devez tenir notre langage et porter nos revendications partout où vous allez. C’est l’application de l’Accord de Mbudi», adresse un enseignant à Puna lors de son intervention. Et d’avertir: «Ces gens du gouvernement ont manipulé l’ANAPECO pour les convaincre à ce que les parents puissent revenir à la prise en charge. Le gouvernement est favorable à cette reprise mais nous qui sommes en même temps enseignants et parents, n’acceptons pas cela». Des enseignants cherchent à connaître la répartition de ce milliard. Un homme éclaircit l’assemblée: «ce milliard est, en réalité, destiné aux enseignants de l’arrière-pays. L’information vient des sources sûres», affirme-t-il.

Les enseignants de Kinshasa s’énervent. Ils demandent des explications à Puna et à Kimbuya. Dos au mur, Puna décide de couper court aux interventions en lisant le projet de la déclaration finale qui devait sanctionner cette assemblée générale. Un silence envahit l’auditoire. On entendrait une mouche voler. Avant de lire son document, il demande aux enseignants de soutenir la démarche du chef de l’État qui «a fait montre de bonne foi pour une issue heureuse de la crise». Finalement, il lit la déclaration. Après deux paragraphes sur les entendus, il déclare au nom du SYECO et du SYNECAT, la suspension de la grève.

La salle gronde. Il répète encore: «Au nom du SYECO et du SYNECAT, la grève est suspendue». C’est le déluge. La salle réplique par un NON massif.

Tout le monde est debout. Avec un zèle suicidaire, Puna insiste, pour la troisième fois, que la grève est suspendue. Il n’a pas terminé la phrase lorsqu’un enseignant se pointe devant lui et lance une chaise en plastique. C’est le ballet des chaises volantes qui commence, insultes à la clé. Les chaises volent et traversent la salle jusqu’au podium.

PUNA TREMBLOTE.

D’autres vont chercher des pierres à l’extérieur pour en finir avec lui. Ils veulent organiser la mise à mort en direct. La salle scande à tue-tête: «Jean Bosco corrompu». Dans ce brouhaha, Puna est extirpé par des sympathisants et mis à l’abri derrière le podium. Là, il tremblote comme une feuille morte. Les enseignants sont déchaînés et le pourchassent jusqu’à son dernier refuge. Ils tombent sur lui. Des coups pleuvent, pendant que d’autres tentent de lui arracher la veste volante. À terre, Puna n’a pas eu le temps de compter le nombre de paires de pieds qui l’écrasent avec fureur. Il arrive juste à crier pour demander pardon.

«Kabila l’a corrompu. Il a deux choix à faire, soit il démissionne, soit il laisse sa peau aujourd’hui», vocifère un enseignant de Ngaba. Pendant 20 minutes, les enseignants chantent, réclament la tête de Puna. Alertée, la police vient à la rescousse. Les enseignants, eux, donnent la chasse aux policiers qui ont compris qu’il vaut mieux qu’ils se tiennent à l’écart. Entre-temps, d’autres délégués syndicaux cherchent à calmer la tension. Ils discutent entre eux. C’est le chaos complet. «Que faire? Ils ne nous comprendront plus. C’est la faute à Puna. Il aurait dû prendre d’abord la température de l’assemblée avant de faire cette déclaration finale. Alors il s’est entêté en insistant qu’il tient à lire sa déclaration finale qu’il avait préparé chez lui à la maison», révèle un membre du SYECO. «Il faut faire un autre projet de déclaration finale pour le soumettre à l’appréciation de l’assemblée générale. Nous ne pouvons pas sortir comme ça», propose Kimbuya. Une autre déclaration est rédigée séance tenante. Les enseignants imposent sa lecture à Puna - le même!

Entre-temps, dans la salle, les enseignants psalmodient des chansons pour réclamer Mbudi. «Likambo, likambo na tango na yango. Oyo tango ya Mbudi» ou encore «Lokuta monene, oyo akanisaki Mbudi ekokweya waya». Trente minutes après, le s-g du SYECO appelle les enseignants à regagner leurs sièges pour une déclaration finale.

On la remet à Puna - le même! Il prend le micro sous les cris des enseignants: «toyebi ndaku, toyebi ndaku, Okozua» (Nous connaissons ta maison ; on va te faire la peau!) Il prend la parole. L’assistance lui prête l’attention. Il présente ses excuses et demande pardon- à nouveau! Les enseignants applaudissent. Il retire sa première déclaration et lit la version revue et corrigée. Il lâche: «le mouvement se poursuit jusqu’à ce que le gouvernement répondra aux ententes des enseignants selon l’esprit de Mbudi». Puna est ovationné. «Pourvu qu’il ait compris», déclare un enseignant. Les mêmes enseignants l’escortent jusqu’à la sortie.

Wapi
 
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Message par Wapi » 14 Oct 2005, 21:49

Les enseignants ont "suspendu" en fin de compte leur grève, pour une durée de trois mois. Ils ont subi des pressions énormes de la part du (des) pouvoirs politiques et de l'église qui n'a pas lâché le morceau.

Sitôt remis de ses émotions ex_cathedra, le cardinal Etsou a usé de toute son influence pour faire reprendre le travail...

a écrit :Grève des enseignants: le cardinal Etsou interpelle le gouvernement et les parents

L’archevêque de Kinshasa s’est exprimé au cours d’un point de presse au centre Nganda à Kinshasa ce mercredi 12 octobre 2005. Pour le prélat catholique, il n’est pas question de priver les enfants de l’école qui représente la seule sécurité, rapporte radiookapi.net.

« Il est temps pour que chacun assume ses responsabilités. L’école est la seule sécurité des enfants. C’est l’école qui a fait de nous ce que nous sommes aujourd’hui. Assurons cette même formations aux enfants qui prendrons la relève demain», a déclaré le cardinal Frédéric Etsou.

C’est dans ce cadre qu’il a demandé avec insistance au gouvernement et aux enseignants de faire preuve d’esprit d’ouverture. Pour l’archevêque de Kinshasa, seule doit l’emporter l’amélioration des conditions de vie et de travail pour le bien des enfants. Il reste optimiste quant à l’issue de la crise qui secoue le secteur éducatif : « Rien n’est perdu. Un avenir pour les négociations reste ouvert si à différents niveaux, nous assumons nos responsabilités dans la vérité et dans un esprit de solidarité»

S’agissant de sa santé, le cardinal a dit qu’il se portait bien. Son malaise de dimanche dernier était dû à l’insuffisance d’aération dans la cathédrale Notre Dame du Congo, a-t-il signifié.


Et devant tant de pression, relayées également par quelques pontes syndicalistes (voir article prédédent), les enseignants ont reculé, provisoirement. Espérons que cette "trêve" ne soit pas qu'un effet d'annonce.

a écrit :                  Les enseignants suspendent leur grève

La mesure a été annoncée à la télévision nationale ce jeudi 13 octobre 2005 par le Syeco (Syndicat des enseignants du Congo) et le Synecat (Syndicat des enseignants catholiques du Congo), les deux principales formations syndicales de l’enseignement, indique radiookapi.net

Jean Bosco Puna, secrétaire général du Synecat, précise qu’une trêve de trois mois sera observée par les enseignants. Par conséquent, les élèves doivent se préparer parce que les cours reprennent ce lundi 17 octobre à travers toute l’étendue de la République. Pour lui, le gouvernement doit saisir cette opportunité pour répondre aux préoccupations des enseignants. « Après ce délai de grâce, tout pourra déraper si rien n’est fait», a-t-il averti.

Cette levée de mesure de grève a été prise à l’issue de l’assemblée générale des deux syndicats tenue ce jeudi à Kinshasa à la paroisse Saint Pie X dans la commune de Ngiri-Ngiri.


Bien sûr, les enseignants congolais ne forment pas "la classe ouvrière" de ce pays rongé jusqu'au sang depuis 120 ans et même plus si l'on compte l'esclavage. Celle-ci transpire dans les mines pour produire les diamants, l'or, le cuivre, le coltan, le cobalt, le germanium etc... dont a besoin le capital mondial. Mais ce sont des travailleurs qui font un travail absolument indispendable pour que la société fonctionne et qui en ont fait la démonstration éclatante par leur grève, et qui ne sont nullement mieux traité que beaucoup d'autres avec leurs salaires de misère.

Ils ont montré en tous cas une forte détermination qui aurait peut-être pu des idées à d'autres, qui sait ? Mais comme toujours, ils ont rencontré en face d'eux les alliés traditionnels des ennemis des travailleurs : les religieux ... Saleté de papistes aux ordres du Vatican, ils sont toujours aussi nuisibles partout !

Mais ils se sont bien battus, et se sont fait respecter. Chapeau !
Wapi
 
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Message par Wapi » 17 Oct 2005, 19:09

des nouvelles de la grève ... ou plutôt de la reprise du travail, qui n'a eu lieu que du bout des pieds, au moins dans certains coins.

a écrit :

Reprise des cours à l’Epsp: formalité à Kalemie, statu quo à Kindu

C’est ce lundi 17 octobre que les enseignements devaient reprendre dans toutes les écoles publiques de la RDC, après la suspension de la grève des enseignants par leurs principaux syndicats, le Syeco et le Synecat. Mais l’appel à la reprise a été différemment accueilli dans les différentes provinces du pays, a constaté radiookapi.net

A Kalemie notamment, au Katanga, la situation de ce lundi a été plus une formalité. Elèves et enseignants ont certes été à l’école, mais les enseignements n’ont pas été dispensés. «Nous sommes en train d’observer», a dit à radiookapi.net un groupe d’enseignants postés à l’entrée de l’école primaire Maendeleo, l’une des plus grandes de Kalemie.

Abandonnés à eux-mêmes, les élèves de cette école n’ont eu que le temps de se livrer à des jeux divers. Quelques uns de leurs parents attendaient sous un manguier pendant que, plus loin, des délégués du Synecat discutaient entre eux. Deux heures plus tard, l’école Maendeleo s’était vidée de sa population.

La scène a été presque identique dans une dizaine d’autres établissements scolaires de la place ce lundi matin. Les enseignants de Kalemie ne semblent pas avoir le même langage. Ceux des écoles conventionnées catholiques ont déjà perçu le salaire des mois d’août et de septembre. Mais ils voudraient en avoir le cœur net sur les avantages obtenus par les délégués de Kinshasa du gouvernement avant toute reprise.

En revanche, leurs collègues des écoles du réseau non conventionné seraient plus ouverts. Ces derniers n’ont pourtant perçu que le salaire du mois d’août. Difficile de dire, dans ces conditions, si les cours vont reprendre effectivement ce mardi à Kalemie.

A Kindu, au Maniema, c’était plutôt l’inverse. Les écoles conventionnées ont ouvert les portes mais celles des écoles non conventionnées sont restées fermées. Celles-ci ont ainsi répondu au mot d’ordre de l’assemblée générale des enseignants de cette province qui a décidé la veille de poursuivre la grève.

Mais dans l’ensemble, les enseignants de Kindu se posent encore mille et une questions. Ils ne savent pas s’ils seront payés suivant le barème de Mbudi comme leurs collègues de Kinshasa, ou s’ils seront pris en charge par les parents. Ils insistent sur le paiement non discriminatoire du salaire ainsi que sur leur titularisation à l’instar des camardes de la capitale.


à suivre donc ...
Wapi
 
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Message par Wapi » 22 Oct 2005, 23:57

Les négociations continuent entre syndicats enseignants et gouvernement.

Le ministère de la justice est aussi en grève, et maintenant, les employés de commerce de certaines entreprises :

sur afrik.com :

a écrit :        Grogne sociale contre les patrons indo-chinois en RDC
                    Une grève paralyse les commerçants expatriés de Kinshasa

mercredi 19 octobre 2005


Plusieurs centaines de grévistes congolais, employés dans des magasins dirigés par des propriétaires indiens, libanais, chinois, pakistanais sont en grève depuis lundi à Kinshasa, la capitale de la République Démocratique du Congo. Ils réclament une augmentation de leur salaire et la réduction du temps de travail, conformément à la loi congolaise. La grève risque de durer plusieurs jours car les patrons ne semblent pas prêts à entamer des négociations.

Par Floréal Sotto

Les patrons asiatiques sur la sellette en République Démocratique du Congo (RDC). Depuis lundi, une partie des commerces de Kinshasa est immobilisée par une grève. Les magasins concernés sont essentiellement tenus par des expatriés d’origine indochinoise. Les grévistes dénoncent leur situation précaire (salaire en dessous du minimum fixé par l’état, heures de travail supplémentaires non payées...). Ils réclament du gouvernement un durcissement des sanctions en cas de non-respect des lois congolaises.

Un pouvoir exécutif affaibli

« Nous sommes sous payés ( environ 1 dollar par jour, ndlr), nous travaillons de 8h à 20h30 tous les jours, nos employeurs ne nous ont jamais fait signer de contrat, c’est pourquoi je fais la grève », a expliqué mardi à Afrik, M Tomas, un travailleur en grève. « Ce mouvement de grève est spontané et durera tant que les employeurs refuseront de négocier », a-t-il précisé. Le cas de M Tomas est similaire à des centaines d’autres employés des commerces de RDC, mais aussi à des milliers de fonctionnaires (enseignant,s personnels hospitaliers ...) qui multiplient les mouvements sociaux depuis le mois de septembre. Les enseignants ont été en grève pendant 42 jours à la rentrée, pour protester contre le non-respect de l’accord Mbudi signé en 2003 (où le salaire minimum mensuel est notamment fixé à 68 dollars par mois). Puis, à la mi-octobre, d’autres grévistes du secteur informel ont rejoint le mouvement pour protester contre la vente, à un Libyen, d’une partie du marché central de Kinshasa.

« Le pays est plongé dans un chaos économique, un Smig (salaire minimum interprofessionnel généralisé) a bien été fixé, mais même l’Etat ne peut pas payer ainsi ses fonctionnaires. Par conséquent tout le monde est prêt à accepter des salaires de misère plutôt que rien », nous a indiqué M Tambala, directeur du groupe syndicaliste Fasymine en RDC. Un confrère congolais nous a précisé à ce sujet que « même les inspecteurs du travail sont sous-payés, si bien qu’ils se laissent facilement corrompre par les chefs d’entreprise étrangers qui ne respectent pas les droits des travailleurs ». Le mouvement spontané de grève est en corrélation avec ces facteurs. Les employés exploités espèrent que l’Etat fera pression sur les patrons expatriés afin que leur statut s’améliore.

Impunité des chefs d’entreprises expatriés

Les employés des entreprises gérées par des expatriés sont particulièrement vulnérables. Avec un salaire oscillant entre 15 et 30 dollars par mois, des conditions de travail particulièrement difficiles, la discrimination qu’ils subissent, le mépris et les insultes, ces travailleurs, corvéables à merci, représentent une partie de la population la plus touchée par ce désordre économique. Ils n’ont même pas de recours à un protocole les protégeant (comme les fonctionnaires avec le protocole Mbudi).

Selon Le Potentiel, « cette grogne sociale devrait interpeller le gouvernement congolais car le phénomène est devenu cyclique ». Il apparaît en effet que l’Etat ne semble pas déterminer à contraindre d’avantage des chefs d’entreprises immigrés, car il aspire à ce que les capitaux étrangers investissent sur le territoire de la RDC, d’autant plus s’ils sont susceptibles de créer de l’emploi.

L’ambiance est donc tendue à Kinshasa autour du quartier du marché central. Les travailleurs grévistes sont réunis devant les boutiques et débattent de leurs revendications avec véhémence. Ce mardi après-midi, aucune réunion n’avait été envisagée entre les syndicats, le ministère du Travail et la Fédération des entrepreneurs du Congo (FEC). Néanmoins, tout se déroule dans le calme. Si les forces de l’ordre sont arrivées sur le terrain dès le début de la manifestation ce n’est que pour éviter tout incident. Cette grève se déroule dans un cadre légal et n’a pour l’heure donné lieu à aucun débordement.

Wapi
 
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