Informations ouvrières N° 711 - Semaine du 29 septembre au 5 octobre 2005
En partant des faits...
Quels sont les faits ? Hewlett-Packard, multinationale américaine, réalise de gigantesques profits : plus de
3,5 milliards sur l’exercice 2003-2004.
Pour réaliser encore plus de profits, elle décide de « dégraisser » : 6 000 suppressions d’emplois en Europe, dont 1 240 en France.
Le Premier ministre déclare que Hewlett-Packard devrait rembourser les aides publiques dont il aurait bénéficié. Puis, il nuance ses propos et se prononce pour un « dialogue constructif » avec Hewlett-Packard.
Ami de Sarkozy, le sénateur UMP François Fillon souligne que le plus important, c’est de ne pas rendre « le territoire français de plus en plus inhospitalier pour les investisseurs étrangers ».
Des centaines de travailleurs sont sur le carreau… et ce qui compte, c’est de ne pas fâcher les licencieurs !
Et à gauche ?
Michel Destot, député-maire (PS) de Grenoble, accompagné de deux autres élus, se rend le 19 septembre au siège mondial de Hewlett-Packard, à Palo-Alto, en Californie (Etats-Unis). Selon le communiqué de la mairie de Grenoble, « la direction mondiale (du groupe — NDLR) a indiqué que la forte restructuration au niveau français avait été fondée sur le type d’activité menée sur les sites et non sur une quelconque défiance vis-à-vis de notre pays et de ses législations sociales ».
Les travailleurs licenciés peuvent être rassurés : ils seront au chômage demain… mais Hewlett-Packard aime la France !
Le même communiqué précise : « Ce rendez-vous s’est révélé particulièrement utile auprès d’un groupe qui s’est engagé auprès des élus à maintenir une activité en France » ! Une activité ? Mais que vont devenir les 1 240 à ce jour menacés de licenciement ?
François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste, déclare que s’il avait été au pouvoir lors de l’annonce des licenciements chez Hewlett-Packard, il aurait demandé que « les aides qui ont été versées à cette entreprise par l’Etat, les collectivités locales, soient immédiatement reprises ».
Cela confirme l’illégitimité de toutes les aides publiques déversées depuis vingt ans par les gouvernements de toutes couleurs politiques au nom de « l’aide à l’emploi ». Cela confirme en particulier que les 155 milliards d’euros volés à la Sécurité sociale au titre des exonérations depuis 1992 devraient lui être immédiatement restitués, et on n’entendrait plus parler du prétendu « trou » ! Mais ce ne sont là, comme on dit, que des promesses verbales : les exonérations n’ont-elles pas débuté sous la gauche au pouvoir, avec Michel Rocard ? Ne se sont-elles pas poursuivies et amplifiées sous Jospin ? Quant à la question essentielle, François Hollande ne répond pas : que vont devenir les salariés de Hewlett-Packard ?
Le président Chirac s’est, lui, adressé à l’Union européenne, s’attirant cette réponse de son président, Barroso : « Il n’est pas de la compétence de la Commission d’empêcher Hewlett-Packard de licencier des salariés. » Réponse incroyablement perfide. D’un côté, l’Union européenne édicte à tour de bras directives et traités qui font obligation de délocaliser, de déréglementer, de restructurer et de liquider les emplois… au nom de la compétitivité et de la libre concurrence ; de l’autre côté, l’Union européenne n’est pas « compétente » en matière de licenciements…
Où est l’issue ? Elle n’est pas dans « l’entreprise citoyenne », chargée d’un « rôle social ». Le seul rôle « social » de l’entreprise, c’est d’exploiter les ouvriers. L’issue n’est pas davantage dans l’Union européenne : son seul rôle, qu’elle revendique ouvertement, c’est d’organiser délocalisations et surexploitation.
En partant des faits, il apparaît que la seule issue, c’est l’unité pour : aucun licenciement. Les suppressions d’emplois peuvent et doivent être interdites. Si pour cela, les avoirs de Hewlett-Packard en France doivent être confisqués, qu’ils le soient !
Tout le reste n’est que verbiage et accompagnement. Les travailleurs de Hewlett-Packard ne veulent pas rester sur le carreau. Est-ce, de leur part, une exigence démesurée ?
Non, c’est une question de survie !
Daniel Gluckstein