Che Guevara

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Philippe » 16 Juin 2005, 13:59

Petite précision :
Je reviens sur une remarque de Wapi, un peu plus haut : Ne pas le reconnaître, c'est simplement n'être pas marxiste, à la limite c'est même refuser d'adopter une explication scientifique de l'histoire au profit d'une mythologie paysanne ou autre, voire d'une "mystique".

J'aime bien Guevara pour son engagement, ses luttes, sa réelle proximité du peuple, son dévouement à la cause prolétarienne. D'autres personnages aussi eurent de tels engagements, même s'ils ne furent pas marxistes ou s'ils se trompèrent dans leurs interprétations ou dans leurs luttes.
Il est indéniable, selon moi, que le Che avait un fond marxiste mais aussi que son marxisme fut influencé par une dialectisation nord-sud du fait de la prédominance de l’impérialisme nord américain. C’est le vaste problème de nombreux combats tiers-mondistes.. D'où la justesse de la remarque d'Ottokar : "certes, mais pourquoi ses foyers de la révolution, ne s'est-il pas posé la question de les alimenter en Europe, aux USA, au Canada, en Australie, au Japon, bref dans les métropoles impérialistes ? Pourquoi n'a-t-il pas cherché à créer ou aider à la création de partis ouvriers révolutionnaires ici ?" et de Jacquemart :"C'est toute la différence entre une politique nationaliste radicale (même menée au nom de "l'internationalisme") et une authentique politique internationaliste, appuyée sur l'action et la conscience des travailleurs eux-mêmes."
Tout ceci marque aussi le problème des alliances. Le combat pour le non en France et pour une consultation populaire en Belgique s’est fait aussi avec des alliances non marxistes (ATTAC,….).
Avec la FGTB (syndicat belge dit rouge mais dont les membres ne sont pas tous communistes, loin s'en faut) et à côté de la CSC (syndicat belge d'obédience chrétienne) j'ai souvent manifesté, côte à côte. J'ai souvent apprécié les prises de position des uns et des autres, parfois moins, surtout au niveau de leurs compromissions. Cela n'enlève ni n'influence mon engagement à la cause révolutionnaire. Cela n’enlève rien à mes convictions marxistes.
Maintenant, entre être et se dire marxiste, il y a, certes, parfois un grand écart (voyez, par exemple, les staliniens). D’autre part, il faut être modeste, on ne naît pas marxisme, on le devient et ce devenir se construit tous les jours.
Hélas, la remarque d'Otthar me gène plus : "or les trotskystes ont toujours été coupés des masses (c'est une autre discussion de savoir pourquoi et comment!)"
Ce débat provient d’une histoire de bibliothèque. Suite à la découverte de ce site, j’y ai ajouté un livre : Mon communisme d’Arlette Laguiller – Edition Plon. A lire absolument si ce n’est déjà fait. On y apercoit, (si l'actualité et les combats du passé ne le prouvent pas suffisament) que non, les trotskystes ne sont pas coupés des masses.
Philippe
 
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Message par othar » 16 Juin 2005, 23:52

(Philippe @ jeudi 16 juin 2005 à 14:59 a écrit : Hélas, la remarque d'Otthar me gène plus : "or les trotskystes ont toujours été coupés des masses (c'est une autre discussion de savoir pourquoi et comment!)"
Ce débat provient d’une histoire de bibliothèque. Suite à la découverte de ce site, j’y ai ajouté un livre : Mon communisme d’Arlette Laguiller – Edition Plon. A lire absolument si ce n’est déjà fait. On y apercoit, (si l'actualité et les combats du passé ne le prouvent pas suffisament) que non, les trotskystes ne sont pas coupés des masses.
V'la que je me fais engueuler maintenant! :-P

:28:


Sinon:
a écrit :
(...)
Avec la FGTB (syndicat belge dit rouge mais dont les membres ne sont pas tous communistes, loin s'en faut) et à côté de la CSC (syndicat belge d'obédience chrétienne) j'ai souvent  manifesté, côte à côte. J'ai souvent apprécié les prises de position des uns et des autres, parfois moins, surtout au niveau de leurs compromissions. Cela n'enlève ni n'influence mon engagement à la cause révolutionnaire. Cela n’enlève rien à mes convictions marxistes.


"être marxiste", ce n'est pas faire des analyses dans sa Tour d'Ivoire...
Autrement dit c'est participer à des combats, en particulier les combats de la classe ouvrière.
Ces combats il faut les mener avec tous ceux qui veulent en être, fussent-ils réformistes.
Sinon on se complait dans le splendide isolement de ceux qui ont toujours raison, mais tout seuls. :hinhin:

Par contre, quand on est dans des combats comuns avec des dirigeants réformistes, on n'est pas obligé de leur donner des vertus qu'ils n'ont pas!
Mieux, on peut lutter "avec" eux tout en essayant d'éclairer les travailleurs (à notre échelle bien sur) sur la nature de leurs politiques, de leurs idées en dernière analyse.

Je crois que Lénine parlait de les démasquer mais dans un contexte politique où les bolcheviks, quoique minoritaire dans l'opinion ouvrière, avaient l'influence pour tendre réellement vers ces objectifs.
othar
 
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Message par Mariategui » 17 Juin 2005, 09:17

Oumf, j'ai pas vraiment le temps de me lancer dans ce débat mais une seule précision, sur la question des puissances impérialistes et de la possibilité de lancer la théorie de focos là-bas. Pour des raisons évidentes, et que d'ailleurs vous avez bien explicité (à savoir le rôle de la paysannerie dans la guerre de guerrilla), un foco dans un epuissance impérialiste est impossible. En revanche, penseur dialectique, Guevara inscrivait la politique de "un, deux, trois Vietnam" dans une démarche révolutionnaire au niveau mondial. La multiplication des affrontements périphériques des Etats Unis devaient se traduire par une radicalisation de ces rapports de classe interne (la guerre impérialiste américaine reposant sur la domination et l'utilisation des masses noirs domiénes et de la classe ouvrière exploitée) et par la crise de cette société impériale et la création d'une situation de crise révolutionnaire aux Etats Unis.

Sinon, il y a quelque chose d'un peu faible dans la comparaison constante avec les bolchéviques. LA question n'est pas de définir qui en a la plus grosse mais qu'est ce qu'on peut apprendre et tirer d'une expérience révolutionnaire concrète. Comme disait Mariategui (le vrai), le marxisme ne doit être "ni calque, ni copie mais création héroïque".
Mariategui
 
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Message par pelon » 17 Juin 2005, 09:30

(Mariategui @ vendredi 17 juin 2005 à 10:17 a écrit :Oumf, j'ai pas vraiment le temps de me lancer dans ce débat mais une seule précision, sur la question des puissances impérialistes et de la possibilité de lancer la théorie de focos là-bas. Pour des raisons évidentes, et que d'ailleurs vous avez bien explicité (à savoir le rôle de la paysannerie dans la guerre de guerrilla), un foco dans un epuissance impérialiste est impossible. En revanche, penseur dialectique, Guevara inscrivait la politique de "un, deux, trois Vietnam" dans une démarche révolutionnaire au niveau mondial. La multiplication des affrontements périphériques des Etats Unis devaient se traduire par une radicalisation de ces rapports de classe interne (la guerre impérialiste américaine reposant sur la domination et l'utilisation des masses noirs domiénes et de la classe ouvrière exploitée) et par la crise de cette société impériale et la création d'une situation de crise révolutionnaire aux Etats Unis.

Sinon, il y a quelque chose d'un peu faible dans la comparaison constante avec les bolchéviques. LA question n'est pas de définir qui en a la plus grosse mais qu'est ce qu'on peut apprendre et tirer d'une expérience révolutionnaire concrète. Comme disait Mariategui (le vrai), le marxisme ne doit être "ni calque, ni copie mais création héroïque".

Tu dis que le "foco" dans une puissance impérialiste est impossible, laissant entendre que dans le tiers-monde ... Mais je ne sais pas ce qu'Ernesto avait de dialectique mais le "un, deux, trois vietnam ..." c'était vouloir desserrer l'étreinte impérialiste sur Cuba, ce que l'on peut comprendre. Pourtant, le véritable affaiblissement de l'impérialisme pouvait naitre aussi de la lutte du prolétariat des pays riches. Utopique ? Pas plus que de croire que les indiens boliviens allaient se soulever parce qu'un beau leader à casquette étoilée était venu installer son camp dans leur coin. Le foco, théorisé par cette lumière du communisme qu'est Régis Debray (Révolution dans la révolution) c'est la nième mouture des petits bourgeois qui consiste à croire que l'on peut déclencher une révolution par la valeur de l'exemple.
pelon
 
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Message par Gaby » 17 Juin 2005, 09:57

(pelon @ vendredi 17 juin 2005 à 10:30 a écrit : Mais je ne sais pas ce qu'Ernesto avait de dialectique

Ouais pareil. Un jour j'aimerais bien qu'on m'explique cet argument autrement que par l'étiquette gratuite qu'on lui accole...
"Mao était peut-être un connard fini mais il connaissait un bout de dialectique pour sûr !"
C'est comme le patch "vu à la télé !", ca ne veut rien dire tout seul mais ca a des vertus publicitaires que rien ne peut contrer, si ce n'est le rationalisme. C'est vraiment faire trop de faveurs à Che Guevara que de lui prêter la paternité d'une théorie marxiste de la révolution... Comme le dit pelon, abandonner le terrain de la lutte de classes pour lui préférer le maquis, c'est croire en la possibilité de changer les choses en étant un exemple isolé des masses. L'apport de la bonne parole aux ignorants par la voie de la mitraillette, ce que l'excursion aventurière Bolivienne de Che Guevara montre bien...

La "comparaison constante avec les bolcheviks" a au moins le mérite d'appuyer sur l'importance de l'action politique de la classe ouvrière, ce qui est à mon humble avis la moindre des choses pour un activisme communiste ou ne serait-ce que comprendre l'histoire. Il ne suffit pas d'avoir un drapeau marxiste pour en être un.
Gaby
 
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Message par othar » 17 Juin 2005, 13:09

(pelon @ vendredi 17 juin 2005 à 10:30 a écrit : Le foco, théorisé par cette lumière du communisme qu'est Régis Debray (Révolution dans la révolution) c'est la nième mouture des petits bourgeois qui consiste à croire que l'on peut déclencher une révolution par la valeur de l'exemple.

c'est un peu en marge de la discussion, mais quand les dirigeants de la 4ème internationale (celle à laquelle appartient la Lcr) a décrété que ses sections sud-américaines devaient se lancer dans l'aventure du "Foco", savez-vous si ceux qui ont décidé cette politique l'ont appliqué eux-mêmes?

J'ai l'impression que c'était essentiellement des dirigeants européens qui , suivant le mouvement de l'Epoque, ont pris la décision (pour d'autres en l'occurence).

PS: Concernant Régis Debray, il semble qu'il a quand même payé de sa personne pendant quelques temps.

PSbis: dans le livre "Génération", consacré à la génération "68" (enfin surtout à ceux qui sont devenus des sociaux-démocrates bon teints), les 2 auteurs évoquent la mémoire d'une militante française (Lcr) qui s'est suicidée là-bas pour ne pas être prise par les flics). Avec des photos très émouvantes. Un exemple tragique parmi d'autres, tant de la répression des dictatures sud-américaines, que de cette impasse politique du "Foco".
othar
 
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Message par pelon » 17 Juin 2005, 15:44

Sur le SU, l'irresponsabilité et l'incompétence de ses dirigeants par rapport au foco et plus généralement à la guérilla, on pourra revenir.
Juste sur Debray. Bien entendu, Debray y croyait et il croyait aussi beaucoup en lui-même puisqu'armé de ses études à Normale Sup et de l'expérience de guérilla de la rue d'Ulm (n'oublions pas les barricades de mai 68 :hinhin: ) il s'est permis de théoriser sans complexe sur le foco. N'oublions pas que nombre de jeunes latinos se sont fait entrainer vers des massacres écrits d'avance.
Mais il y croyait suffisamment pour avoir accompagné le Che en Bolivie. C'est d'ailleurs à la suite de la défaite et de la mort de ce dernier que Debray a été condamné à 30 ans de prison, en 1967. Il en fit 4 et fut relaché suite à une campagne internationale.
Pour mémoire, après le coup d'Etat de septembre 73 au Chili, Jean Edern Hallier, autre "intellectuel", prend l'avion pour rejoindre les maquis andins et apporter des fonds à la résistance. Le courage du romantisme malheureusement pas bien résistant à l'usure.
Régis Debray est devenu ... conseiller de Mitterrand, J.E. Hallier (aujourd'hui décédé) était resté l'aventurier un peu dingue qu'il avait toujours été. Si ces gens là ne croient pas au prolétariat, qu'est ce qu'ils croient en eux !
pelon
 
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Message par souzon » 17 Juin 2005, 16:39

Le 7 Novembre guevara se trouve dans une hacienda de Ñancahuasú où, avec un petit groupe de combattants boliviens, cubains et autres nationalités, il fonde l’Armée de Libération Nationale de la Bolivie. Pendant ce temps aux pieds des montagnes fleurissent des grèves ouvrières importantes. Pourtant le Che n'y a pas participé et n'est pas entré en contact avec les grévistes; il s'organisait marginalement dans les montagnes.

Certes, le mode de guerrilla s'accompagne sans aucun doute dans le cas de cuba d'un soutien populaire mais même cela avec en plus l'honneteté du Che n'empeche pas pour autant qu'une prise du pouvoir de ce type, entraine la naissance d'une bureaucratie.... :D
souzon
 
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