par Karib » 16 Fév 2005, 10:09
Permettez au syndicaliste révolutionnaire que je suis de trouver touchante cette polémique entre trotskystes....
Mais mon cher Valière, ta position me semble difficile face à tes camarades qui ne font pas mystère de juger "dépassée" ou "chaotique" l'indépendance syndicale, et, au-delà, très certainement, la doctrine même du syndicalisme révolutionnaire.
Car derrière Trotsky, c'est l'ombre de Lénine qui se profile, et celle de sa théorie de la conscience de classe, qu'il a le mieux développée dans son ouvrage Que faire ?
L'indépendance syndicale peut n'être qu'un refrain idéologique si l'on ne postule pas que c'est dans l'existence même des rapports de production capitalistes que se trouve sa transcroissance vers le communisme.
Pourquoi, en effet, l'indépendance syndicale, si on considère que "livrés à leur propres forces, les prolétaires ne peuvent atteindre qu'une conscience trade-unioniste" ? Si l'on part de ces prémisses, la position léniniste est en effet cohérente : Le syndicalisme, par essence, ne peut être que réformiste, et c'est la tâche des communistes d'en prendre la direction et d'en infléchir le cours vers l'affrontement décisif contre le capitalisme. C'est là une position partagée, il me semble, par l'ensemble des courants léninistes, quelles que soient par ailleurs leurs analyses et leurs traditions. Et il y en a de tout à fait honorables.
Le syndicalisme révolutionnaire, en revanche, création typiquement française, faut-il le rappeler, récuse l'idée même de parti d'avant-garde et voit dans l'auto-organisation du prolétariat, à partir du lieu même de l'exploitatation, le seul chemin possible vers le communisme. Il emprunte à la fois à l'anarchisme et au marxisme ses outils d'analyse et sa pratique de la lutte des classes.
On objectera certainement que la CGT de 1914 a sombré dans l'union sacrée, ce qui est vrai du courant majoritaire, mais force est de reconnaître que le bilan des partis se réclamant du bolchévisme n'est guère plus brillant. Un mauvais point partout.
La théorie du communisme reste à construire. Et elle ne pourra se bâtir, à mon sens, en faisant l'impasse d'une critique du léninisme.
C'est là que nous divergeons, camarades.
Ce qui n'empêche pas, encore une fois, de partager notre combat pour le communisme.
Comme disait l'autre, il n'y a que deux côtés de la barricade.