un article sur une pratique (courante?) des juges

Message par othar » 09 Fév 2005, 21:49

un article dans "le parisien" du jour:

sur des sans-papiers condamnés avant d'être jugés...

apparemment, les juges ne respectent même plus les formes de leurs délibérations

une copie pour quand le lien sera mort
a écrit :
Des sans-papiers condamnés avant d'être jugés

«C'EST UNE PARODIE de justice ! » Les avocats qui assistaient hier matin à une séance du tribunal administratif de Paris étaient ébahis : sept des dix sans-papiers pour qui cette audience était l'ultime recours avant d'être reconduits à la frontière ont vu leur demande rejetée... et ce bien avant que leurs avocats ne défendent et ne plaident leur cause devant le juge. Ce matin-là, comme à leur habitude, M e s Fabien Ndoumou, Aminata Nianghane et Irène Terrel se rendaient au tribunal pour défendre la cause de leurs clients.
« En salle d'audience, quelques minutes avant que la séance ne débute, j'ouvre le dossier de mon client que m'avait confié le greffier, raconte M e Irène Terrel. C'est alors que je tombe sur les feuilles contenant le jugement : il y était inscrit noir sur blanc que sa requête était rejetée. » Une main maladroite avait glissé dans les dossiers de chaque sans-papiers le jugement qui aurait été rédigé plusieurs jours avant par le président du tribunal. Sur ces feuilles que nous avons pu examiner, on peut lire la décision écrite à la main de refus d'annulation des arrêtés de reconduite à la frontière, précédée de longs paragraphes qui motivent le jugement.

« Une pratique courante »

Indignés, les trois avocats ont interpellé en pleine audience le président présumé auteur de ces jugements. « Nous demandons l'annulation de la procédure, s'exclame M e Nboemou en agitant les feuilles compromettantes qui préjugeaient trois de ses cinq clients. Nous avons la preuve que vous aviez déjà pris votre décision, c'est une mascarade à laquelle nous refusons d'assister. » Stoïque, le juge répond sans hausser le ton. « Ces documents sont-ils signés ou non ? demande-t-il. S'ils ne le sont pas, ils ne peuvent pas être considérés comme des décisions complètes. » L'argument fait mouche car en bas du document, au lieu de la signature, seul le nom du juge est inscrit à la main. « On peut demander une expertise pour vérifier qu'il s'agit bien de votre écriture », riposte M e Terrel.
Un brouhaha envahit la salle, les trois quarts de l'assistance sortent. Jean, venu soutenir la cause d'un des sans-papiers qui aurait dû être jugé, refuse de sortir. « C'est écoeurant ! Tout ce décorum pour en arriver à du toc ! » lance-t-il avant d'être évacué par les policiers. Le président finit par renvoyer les affaires défendues par les trois avocats. Outrée, Claude n'en croit pas ses oreilles. « J'étais venue apporter mon soutien à Moussa, membre de l'opposition démocratique en Guinée, résidant en France depuis 2001 avec toute sa famille, explique-t-elle. Comment après tout cela faire confiance à la justice ? »
Un avocat, venu pour une tout autre affaire, assiste à la scène sans vraiment s'étonner. « Rédiger à l'avance la quasi-totalité du jugement et ses motivations est une pratique courante ici et ailleurs, glisse-t-il. Mais le magistrat ne signe pas le document tant qu'il n'a pas entendu la défense au cas où un argument choc viendrait changer sa décision. » Pratique courante ou non, les avocats ont saisi l'Ordre des avocats avec l'intention de s'adresser à la Cour européenne de justice.

Géraldine Doutriaux
othar
 
Message(s) : 0
Inscription : 21 Mars 2004, 22:00

Retour vers Presse et communiqués

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 1 invité