Fusion Procter & Gamble et Gillette

Message par Barikad » 28 Jan 2005, 14:34

("Le Monde" a écrit :Procter  &  Gamble va racheter Gillette pour 57 milliards de dollars
LE MONDE | 28.01.05 | 13h35
Le rapprochement amical des deux groupes américains donnerait naissance au numéro un mondial des produits de grande consommation, devant l'anglo-néerlandais Unilever. La transaction ne sera finalisée que si les autorités de la concurrence donnent leur accord.

La taille reste une question critique pour les grands groupes américains. Le géant de la grande consommation Procter & Gamble (P & G) a annoncé, vendredi 28 janvier, son intention d'acheter le numéro un mondial des rasoirs Gillette, pour 57 milliards de dollars (43,7 milliards d'euros). Le nouvel ensemble, avec un chiffre d'affaires global de plus de 60 milliards de dollars, sera le nouveau numéro un mondial des produits d'hygiène personnelle et des produits de nettoyage vendus en supermarchés. Cette fusion permettra ainsi à P & G de précéder son grand rival européen, l'anglo-néerlandais Unilever.

L'offre publique d'achat (OPA) amicale a été approuvée par les conseils d'administration des deux groupes, jeudi. Elle sera soumise aux autorités de la concurrence américaine - et sera également étudiée de près en Europe -, et devrait être finalisée à l'automne.

L'opération, qui sera réalisée à 60 % par échange d'actions et à 40 % en numéraire, propose d'échanger 0,975 titre P & G pour chaque titre Gillette, soit une prime de 18 % par rapport au cours de Bourse de jeudi soir (45,85 dollars). Le géant de Cincinnati projette par ailleurs de racheter pour 18 à 22 milliards de dollars de ses propres actions dans les douze à dix-huit mois.

Cette acquisition, la plus grande depuis le rapprochement en 2004 des banques JP Morgan et Bank One, donnera-t-elle le coup d'envoi d'une nouvelle phase de concentration dans l'industrie ? Cette OPA ravit, en tout cas, les actionnaires de Gillette, dont le milliardaire Warren Buffett, qui détient 9 % du groupe de rasoirs : "C'est un rapprochement de rêve", a-t-il dit.

De fait, la combinaison de P & G et de Gillette ne devrait pas créer de conflits commerciaux majeurs, puisque les deux groupes affichent, sur le papier, une complémentarité quasi idéale.

P & G est à la tête d'un portefeuille de marques mondiales tels que les shampooings Head & Shoulders, le dentifrice Crest, les couches Pampers, ou les lessives Tide et Ariel. Plus petit, Gillette est le champion mondial des rasoirs et lames (dont le leader mondial, Mach3, qui a réalisé à lui seul 9 milliards de dollars de ventes depuis son lancement en 1998). Le groupe détient 70 % des ventes planétaires de rasoirs. Gillette commercialise aussi les piles Duracell. Quelques conflits d'intérêts pourraient toutefois apparaître dans les dentifrices et les déodorants.

Dans la foulée de l'annonce de cette méga-fusion, P & G a relevé sa prévision de croissance de chiffre d'affaires annuel entre 5 % et 7 % (contre une estimation initiale de 4 %). L'industriel ne devrait pas, non plus, voir ses profits plombés, puisque la société Gillette affiche des ratios de rentabilité supérieurs aux siens (la marge opérationnelle atteint 65 % pour Gillette contre 50 % pour P & G).

A l'international, la complémentarité devrait jouer à plein. Les deux entreprises, très européennes, réalisent chacune un peu moins de la moitié de leurs ventes en dehors des Etats-Unis. Elles ont d'ailleurs à faire aux mêmes clients, des chaînes de supermarchés principalement. Des synergies logistiques et dans la chaîne de distribution sont déjà annoncées. Les économies annuelles qui seront réalisées sont évaluées entre 14 milliards et 16 milliards de dollars.

Du point de vue social, l'addition risque en revanche d'être lourde. Le PDG de P & G depuis juin 2000, Alan Lafley, a d'ores et déjà annoncé que l'entreprise fusionnée devrait se séparer de 6 000 de ses 140 000 salariés. Pour relancer leurs opérations de marketing et doper leurs ventes, les deux groupes suppriment des emplois et réinvestissent dans la publicité (en 2004, P & G a dépensé 5,5 milliards de dollars en publicité).

Ce rapprochement montre à quel point les industriels de la grande consommation - dont le territoire de vente ne cesse de se réduire, en raison des nombreux produits sans marques désormais vendus par les enseignes -, sont contraints de resserrer les rangs.

Le nouveau groupe gagnera ainsi un poids plus important dans ses négociations avec les chaînes de la grande distribution (Wal-Mart aux Etats-Unis, Aldi ou Carrefour en Europe). Dans cette logique, et pour renforcer ses cœurs de métiers les plus rentables, P & G a racheté Clairol en 2001, puis l'allemand Wella en 2003, afin de faire grossir sa branche shampooings. Ce faisant, le groupe américain grignote du terrain sur le numéro un mondial des cosmétiques, le français L'Oréal, qui a annoncé, jeudi, sa vingtième année de croissance à deux chiffres en 2004.

Il y a cinq ans déjà, l'ancien PDG de Gillette, Durk Jager, avait évoqué l'idée d'un rapprochement avec P & G, mais il s'était fait rabrouer. Cette fois encore, le rapprochement a été suggéré par le patron de Gillette, James Kilts, venu du géant alimentaire Nabisco. Il devrait conserver un poste de vice-président au côté du patron de P & G, qui dirigera le nouvel ensemble.

Florence Amalou

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De la lessive aux rasoirs, en passant par le dentifrice, les couches-culottes et les chips...

PROCTER & GAMBLE (P & G)

Historique : la société a été fondée en 1837 par William Procter et James Gamble. Le groupe produit et distribue aujourd'hui dans le monde entier des lessives, des boissons, des produits de beauté, de la nourriture, des produits de santé...

Marques : Tide (lessive), Pampers (couches), Vicks (pastilles), Crest (dentifrice), Olay (cosmétiques), Pringle's (chips)...

Résultats financiers : P & G a dégagé sur l'exercice 2003 -2004, clos en juin, un profit de 6,5 milliards de dollars (5 milliards d'euros), pour un chiffre d'affaires de 51,4 milliards de dollars. Les produits de beauté ont représenté un chiffre d'affaire de 17,1 milliards, contre 13,8 milliards pour les détergents, 10,7 milliards pour la papeterie, 6,99 milliards pour la santé et 3,5 milliards pour la nourriture.

Capitalisation boursière : 150 milliards de dollars le 28 janvier.

International : P & G emploie 110 000 salariés dans le monde, et réalise un chiffre d'affaires de 27,7 milliards de dollars hors des Etats-Unis.

GILLETTE & CO.


Historique : société fondée en 1901 par King C. Gillette, un Canadien d'origine française, le groupe produit et distribue aujourd'hui les rasoirs à main du même nom, et s'est diversifiée dans les piles électriques et les brosses à dents.

Marques : Gillette (rasoirs), OralB (brosses à dents), Duracell (piles), Braun (rasoirs électriques).

Résultats financiers : Gillette a réalisé un profit net de 2 milliards de dollars en 2003, pour un chiffre d'affaires de 9,2 milliards de dollars. Les produits de rasage à main ont représenté 48 % des ventes et 62 % du profit en 2003.

Capitalisation boursière : 45,5 milliards de dollars le 28 janvier.

International : le groupe employait 29 400 personnes dans le monde en 2003, et réalisait 60 % de son chiffre d'affaires hors des Etats-Unis.

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 29.01.05
Barikad
 
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Message par Barikad » 29 Jan 2005, 11:41

("Liberation" a écrit :Monsieur Propre s'offre un rasoir

Procter & Gamble rachète Gillette et devient leader mondial des produits de consommation.


Par Fabrice ROUSSELOT

samedi 29 janvier 2005 (Liberation - 06:00)

New York de notre correspondant



C'est la révolution dans les salles de bains. Procter & Gamble (PG), le géant américain des cosmétiques et des produits de grande consommation, rachète les rasoirs et les mousses à raser de Gillette pour 57 milliards de dollars en actions (environ 44 milliards d'euros). Vendredi, lors d'une conférence de presse à New York, A.G. Lafley, le PDG de Procter & Gamble, n'a pas caché sa satisfaction : «Cette combinaison de deux des grandes compagnies dans le secteur des produits de consommation, qui occupent aujourd'hui une position de force, est une opportunité unique.» Avec cette opération, PG, basé à Cincinnati, vole la politesse à l'anglo-néerlandais Unilever et devient le numéro 1 mondial des cosmétiques et produits de grande consommation, avec un chiffre d'affaires estimé à 60 milliards de dollars.

Gillette représente sans aucun doute le plus gros «coup» de Procter & Gamble, qui collectionne déjà pas moins de 300 marques. Depuis 2000, date à laquelle le groupe faisait face à quelques difficultés, le PDG a multiplié les acquisitions afin d'occuper le terrain. Dans son panier notamment, la ligne de shampoings allemands Wella ou les produits de douche Clairol, qui ont rejoint M. Propre, les shampoings Head and Shoulders et les produits de beauté Oil of Olaz, entre autres. PG ajoute donc à sa besace les fameux rasoirs «qui rasent plus près», mais aussi les piles Duracell, propriété de Gillette.

Le mariage entre PG et Gillette confirme la multiplication des mégafusions constatée dans l'économie américaine depuis plusieurs mois. Procter & Gamble avait déjà tenté d'approcher Gillette il y a cinq ans, sans succès. Cette fois, l'initiative est venue de Gillette, puisque c'est James M. Kilts, le patron du groupe, qui aurait pris contact avec Procter en décembre pour entamer des négociations.

Pour les deux compagnies, ce regroupement a aussi une vocation défensive. Ensemble, Procter et Gillette espèrent résister aux grandes chaînes de distribution comme Wal-Mart, qui font pression sur les fournisseurs pour faire baisser le plus possible les prix des produits de grande consommation. Réduisant de facto leurs profits. Avec un sens non dissimulé de l'opportunité, Procter & Gamble a profité de l'annonce de la fusion pour réévaluer les prévisions de croissance de son chiffre d'affaires de 5 à 7 %, contre 4 à 6 % précédemment. Procter fait déjà savoir que la fusion se traduira par 6 000 suppressions de postes, soit 4 % des 140 000 personnes employées au total par PG et Gillette dans le monde.

Cette alliance cosméto-hygiénique a été saluée par le milliardaire Warren Buffet, détenteur de 9 % du capital de Gillette, pour qui «c'est un deal de rêve» ­ l'offre de Procter propose en effet une prime de 18 % sur chaque action Gillette. Le «gourou des investisseurs» outre-Atlantique a annoncé qu'il allait acquérir de nouveaux titres pour détenir 100 millions d'actions d'ici à la fin de l'année.


("Liberation" a écrit :Et Gillette sépara la lame du manche

Le modèle du groupe américain ­ brader l'unité de base et se rattraper sur les fournitures ­ est devenu un classique du marketing
.

Par Florent LATRIVE

samedi 29 janvier 2005 (Liberation - 06:00)

Si le nom de Procter & Gamble évoque avant tout la lessive avec Ariel ou Bonux, c'est un autre de ses produits qui symbolise le mieux sa proximité avec Gillette : Swiffer, ce balai rechargeable en lingettes imbibées pour nettoyer les sols. Le balai lui-même est vendu à un prix raisonnable ­ une douzaine d'euros, avec quelques recharges. Et les lingettes, autour de 40 centimes d'euro la pièce, ce qui propulse le coup de frais du carrelage à des sommes astronomiques par rapport au vieux couple serpillière-liquide pour le sol. Une pompe à pognon qui rappelle immanquablement les rasoirs vendus par... Gillette : Sensor ou Vénus, où le manche est bradé et les lames facturées au prix fort.

Fulgurant. En croquant Gillette, Procter s'offre ainsi l'inventeur de ce modèle marketing désormais omniprésent, souvent baptisé «rasoir et lames». Une idée féconde qui remonte aux origines de la firme, au début du XXe siècle : si King Camp Gillette a bien perfectionné les modèles de rasoir de sécurité, c'est avant tout sur la séparation d'un manche bradé et de lames plus coûteuses qu'il bâtira son succès, fulgurant dès les débuts de la Gillette Safety Razor Company. «Le modèle est excellent pour les firmes et très mauvais pour les consommateurs, estime Christophe Bénavent, professeur de marketing à l'université de Pau. Cela crée une sorte de dépendance, permet de fixer une base de consommateurs relativement stable, et l'entreprise peut en tirer les fruits et vendre les lames à des prix plus élevés.»

Avec l'innovation continue (toujours plus de fonctions ou de high-tech), le modèle «rasoirs et lames» est devenu un classique des entreprises de grande consommation pour muscler des marges étrillées par une concurrence sur les prix. Avec Swiffer et d'autres produits, Procter s'y essaie ainsi depuis quelques années. Les fabricants d'imprimantes bradent leurs machines (les manches) mais vendent très cher les recharges d'encre (les lames). Les opérateurs de téléphonie mobile subventionnent les appareils pour vendre leurs forfaits et les rayons brosses à dents des supermarchés se sont couverts, ces dernières années, de modèles électriques à bas prix... et à têtes remplaçables. Gillette et Procter en proposent d'ailleurs tous deux, respectivement sous les marques Oral-B et Crest. Dans certains cas, le «manche» et les «lames» sont plus difficiles à identifier. Apple pratique ainsi des marges quasi nulles sur la vente de chansons en ligne (le manche), via son service iTunes Music Store, afin de doper les ventes de son baladeur numérique iPod (la lame), l'un des plus onéreux du marché.

Brevets. La technique éprouvée de Gillette n'est pourtant pas une martingale. Les firmes qui l'adoptent doivent notamment empêcher la concurrence de proposer des «lames» à bas prix. Car le modèle n'est pas tenable si tous les éléments sont bradés. Gillette est ainsi devenu expert en dépôts de brevets sur la moindre subtilité de ses coupe-choux, afin d'empêcher quiconque de proposer des lames moins chères. Les fabricants d'imprimantes multiplient aussi les brevets et certains, comme Epson, ont même greffé des puces électroniques pour que les consommateurs ne puissent pas alimenter leurs appareils avec d'autres recharges que celles produites par la marque. Il ne s'agirait pas non plus de raser gratis.
Barikad
 
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