La révolution russe

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par pelon » 11 Déc 2004, 18:44

(Narvalot @ samedi 11 décembre 2004 à 17:16 a écrit :Comment faire une révolution sans prolétariat? En effet, sous la russie de Lénine, la grosse majorité de la population était des paysans (8O%). Ensuite, Lénine va profiter du déroute de l'armée pour organsier un putch. Sous Lénine, il n'y aura pas disparition du salariat, bien au contraire. Avec l'industrialisation, Lénine va créer un véritable porlétariat. De plus, les quelques avancées démocratiques vont vite diparaitre (comme l'abolition de la peine de mort qui esst rétablie un an après le putch).
Bref, la révolution russe n'a jamais apporté l'émancipation de la classe ouvrière, bien au contraire. Ce qui explique aussi ca dégénéressence!!!!

Les points que tu veux discuter sont-ils les suivants :
1) Une révolution dans un pays où le prolétariat industriel est une infime minorité ne peut être une révolution ouvrière.
2) Octobre 1917 n'est pas une révolution mais un putsch de Lénine.
3) Preuve supplémentaire qu'il n'y a pas de révolution ouvrière, le salariat n'est pas aboli.
4) Le prolétariat ne va apparaître qu'après l'industrialisation de Lénine (?).
5) L'abolition de la peine de mort sera reprise un an après le putsch, preuve que les quelques libertés démocratiques octroyées n'ont pas été durables.
6) La révolution russe n'apportera pas l'émancipation de la classe ouvrière et du coup sera cause de la dégénérescence.

J'ai découpé ce que tu as dit pour pouvoir répondre en plusieurs fois. Peut-on se limiter à ces points pour ne pas partir dans tous les sens et avoir une vraie discussion ou veux-tu en ajouter dès maintenant. Si j'ai mal résumé une de tes affirmations, c'est le moment de le dire. Il serait bon que tu répondes avant que s'engage la discussion.
pelon
 
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Message par interluttant » 12 Déc 2004, 13:40

La question de Narvalot est une très bonne question, Trotsky y a consacré au moins deux livres !
Narvalot vas-y tu tiens le bon bout !
Bilan et perspective (édition du Seuil, ou de Minuit)
La Révolution Permanente (anciennement chez idées/gallimard, peut-être indisponible actuellement...)
Le premier se lit en une semaine, le deuxième en trois semaines.
C'est surtout dans "bilan et perspective que tu trouveras la réponse à ta question, chapitre
"les particularités du développement historique"
interluttant
 
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Message par Cyrano » 12 Déc 2004, 17:02

Et pour ceux qui n'ont pas une semaine (!!!) pour lire Bilan et Perspectives, un extrait, mais à lire, relire:

« Il n'y a pas de doute que le nombre, la concentration, la culture et l'importance politique des ouvriers industriels dépendent du degré de développement de l'industrie capitaliste. Mais cette dépendance n'est pas directe. Entre les forces productives d'un pays et la puissance politique de ses classes viennent interférer à n'importe quel moment divers facteurs politiques et sociaux d'un caractère national ou international, qui modifient, ou même parfois altèrent complètement l'expression politique des rapports économiques. Bien que les forces productives des États-Unis soient dix fois supérieures à celles de la Russie, le rôle politique du prolétariat russe, son influence sur la politique de son pays et la possibilité pour lui d'influer sur la politique mondiale dans un proche avenir sont incomparablement plus grands que ce n'est le cas pour le prolétariat des États-Unis.
Dans un récent ouvrage sur le prolétariat américain, Kautsky souligne qu'il n'y a pas de rapport direct immédiat entre le pouvoir politique du prolétariat ou de la bourgeoisie, d'une part, et le niveau de développement du capitalisme, de l'autre :
« Il existe deux États – écrit-il – qui sont en contraste absolu l'un avec l'autre. Dans le premier, l'un des éléments du mode de production capitaliste s'est développé démesurément par rapport au développement d'ensemble de ce mode de production : dans le second, un autre élément s'est ainsi développé démesurément. En Amérique, cet élément est la classe capitaliste, en Russie, c'est le prolétariat. Il n'y a pas de pays où l'on soit plus fondé à parler d'une dictature du capital que l'Amérique; cependant, le prolétariat n'a nulle part acquis autant d'importance qu'en Russie. »
[...]
Quel est le niveau que doit avoir atteint la différenciation sociale pour que puisse être réalisée la deuxième prémisse du socialisme ? En d'autres termes, quel doit être le poids numérique relatif du prolétariat ? Doit-il constituer la moitié, les deux tiers, ou les neuf dixièmes de la population ? Ce serait une entreprise totalement désespérée que de tenter de définir, de manière purement arithmétique, les limites de cette deuxième prémisse du socialisme. Pour tenter une telle schématisation, il faudrait, en premier lieu, savoir exactement qui il faut inclure dans la catégorie du "prolétariat". Faut-il y inclure la vaste classe des semi-prolétaires, semi-paysans ? Faut-il y inclure les masses de réserve du prolétariat industriel, qui, d'un côté, se fondent dans le prolétariat parasitaire des mendiants et des voleurs, de l'autre remplissent les rues des villes comme petits commerçants, jouant, à l'égard du système économique pris dans son ensemble, un rôle de parasites ? Voilà un problème qui n'est pas simple du tout.
L'importance du prolétariat dépend entièrement du rôle qu'il joue dans la production à grande échelle. Dans sa lutte pour la domination politique, la bourgeoisie s'appuie sur sa puissance économique. Avant de parvenir à s'assurer le pouvoir politique, elle concentre les moyens de production entre ses mains. C'est là ce qui détermine son poids spécifique dans la société. Le prolétariat, lui, en dépit de toutes les fantasmagories des coopérateurs, restera dépourvu des moyens de production tant que la révolution socialiste ne sera pas devenue une réalité. Les moyens de production appartiennent à la bourgeoisie, mais il est seul à pouvoir les mettre en mouvement : de là résulte sa puissance sociale. Du point de vue de la bourgeoisie, le prolétariat est aussi l'un de ces moyens de production qui, tout ensemble, ne constituent qu'un seul mécanisme unifié. Mais le prolétariat est la seule partie de ce mécanisme à ne pas être automatique, et, en dépit de tous les efforts, il ne peut être réduit à la condition d'automate. Sa situation donne au prolétariat le pouvoir de suspendre à volonté, partiellement ou totalement, le fonctionnement même de l'économie de la société, par des grèves partielles ou la grève générale. Il s'ensuit que l'importance du prolétariat – supposée numériquement inchangée – croît en proportion de l'importance des forces productives qu'il met en mouvement; c'est-à-dire qu'un prolétaire d'une grande usine est, toutes choses égales d'ailleurs, une grandeur sociale plus élevée qu'un ouvrier artisanal, et un ouvrier de la ville une grandeur plus élevée qu'un ouvrier de la campagne. Autrement dit, le rôle politique du prolétariat est d'autant plus important que la production à grande échelle domine la petite production, que l'industrie domine l'agriculture, et que la ville domine la campagne. [...]
C'est donc en vain – cela doit maintenant être clair que l'on s'efforcerait de définir à l'avance quelle proportion de la population totale doit appartenir au prolétariat au moment de la conquête du pouvoir politique. »

Léon Trotsky. "Bilan et Perspectives". (1906).
Cyrano
 
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Message par Puig Antich » 12 Déc 2004, 23:51

Lénine l'a dit parfois et des dizaines de marxistes l'ont également souligné : l'Etat issu de la révolution d'octobre est un Etat bourgeois sans bourgeoisie. Les tâches du nouveau régime, en l'absence de la révolution mondiale, sont l'industrialisation et l'accumulation primitive. Dans ce cadre là, que peut bien signifier "Etat ouvrier dégénéré", lors même que toute la politique du régime ne conduit qu'à la surexploitation ?...

Il est évident que le travail salarié ne pouvait être aboli avant que soit généralisé la condition prolétarienne et que soit accru le progres technique ; mais l'Etat russe prouve sa nature non-prolétarienne par la militarisation du travail - dont Trotsky fût, hélas, un inspirateur ; et d'ailleurs Lénine lui aurait dit plusieurs fois de modérer ses folles ardeurs - et par l'accroissement intensif et temporel de l'exploitation. Comme l'a dit un marxiste (je ne sais pas si c'est Engels ?) : le meilleur moyen pour vérifier la nature prolétarienne d'une dictature est l'abaissement continuel du temps de travail !....

Il est pour moi évident que la révolution russe reste une révolution prolétarienne, qui a mis fin à la boucherie impérialiste, mais qui n'avait aucun débouché économique socialiste possible, sans victoire de la révolution à l'échelle du monde. Elle reflue donc pour laisser la place à un nationalisme bureaucratique, le stalinisme, qui se cristallise en s'emparant de l'ossature même du triptique Soviets-Parti-Etat.

Je ne crois pas que la période en tout cas est à l'énervement sur ce sujet assez largement dépassé avec l'écroulement du bloc de l'Est et des formes économiques particulières qui formaient sa base, et qui ne doit être une entrave à une politique commune des internationalistes sur un certains nombres de sujets.

Les bolcheviks ont fait ce qu'ils ont pu.... Ils auraient certainement gagné à être plus attentif à certains aspects organisationnels et économiques de la révolution, mais le cadre de la guerre révolutionnaire n'encourageait certainement pas à ce genre de discussion...
Puig Antich
 
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Message par interluttant » 13 Déc 2004, 11:21

:(
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Message par pelon » 13 Déc 2004, 17:14

Et moi qui voulais vraiment discuter. Décidemment Caupo a raison. Pas moyen de discuter sérieusement. Un débat clair voilà l'ennemi... de Narvalot. :hinhin:
pelon
 
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Message par Puig Antich » 14 Déc 2004, 13:08

je pense, pour shématiser, que vu l'avancement économique de l'URSS, une révolution ouvrière ne pouvait aboutir que sur la gestion prolétarienne du capital (c'est à dire soit l'autogestion, soit la gestion planifiée de l'accumulation primitive) mais certainement pas sur un processus qui irait dans le sens de l'abolition du travail salarié

cette gestion prolétarienne ne pouvait durablement se maintenir dans l'état de désorganisation de la russie ; elle aboutie sur une gestion bureaucratique (la bureaucratie, agent de la bourgeoisie dans le mouvement ouvrier, selon ce que dit - parfois - Trotsky)

Lénine a aussi dit - parfois - que l'objectif immédiat était le capitalisme d'Etat, et il considérait ça comme un état d'avancement supérieur à la féodalité...


Ensuite il faut voir dans quel écrit Lénine fait preuve de plus de justesse de vue : à mon avis dans ceux où il montre la nature bureaucratique du régime, et son caractère de plus en plus étranger au prolétariat.
Puig Antich
 
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