L’Internationale sera le genre humain

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Message par com_71 » 26 Mars 2012, 21:39

(blog de Nathalie Arthaud 25 03 2012 a écrit :L’Internationale sera le genre humain

Au-delà de l’hor­reur des faits eux-mêmes, il y a une des consé­quen­ces du drame de Toulouse qui risque fort d’empoi­son­ner une cam­pa­gne qui vole déjà bien bas. J’entends déjà la droite et l’extrême droite se jeter comme des cha­ro­gnards sur cette ter­ri­ble actua­lité pour dis­til­ler leurs men­son­ges et leurs stu­pi­di­tés xéno­pho­bes. Avec pour résul­tat que toute cette fin de semaine, j’ai été inter­ro­gée encore et encore par les jour­na­lis­tes sur le « danger sala­fiste » en France. Les sor­ties de Marine Le Pen ont appa­rem­ment porté leurs fruits.

Je trouve insup­por­ta­ble de pro­fi­ter de ce drame pour relan­cer un débat sur l’immi­gra­tion. Dès le début des événements, j’ai dénoncé les arrière-pen­sées électorales des can­di­dats face à la tuerie de Toulouse. Eh bien, les faits n’ont pas mis long­temps à me donner raison ! Les voilà qui se ser­vent, sans ver­go­gne, des enfants tués devant l’école Ozar Hatorah pour dis­til­ler leur venin natio­na­liste – dans le but, encore, tou­jours, de divi­ser, de creu­ser un fossé entre les tra­vailleurs.

Alors, face à ce défer­le­ment attendu de stu­pi­dité xéno­phobe, je tiens plus que jamais à affir­mer mon inter­na­tio­na­lisme. À affir­mer l’idée que pour moi, la seule divi­sion réelle qui existe dans la société n’est pas entre les peu­ples mais entre les clas­ses socia­les, entre les riches et les pau­vres, entre les exploi­teurs et les exploi­tés, quelle que soit leur natio­na­lité.

La plu­part des can­di­dats enta­ment leurs dis­cours en don­nant du « chers com­pa­trio­tes », quand ce n’est pas « Françaises, Français ». Moi, comme l’a fait Arlette Laguiller pen­dant toutes les années où elle a repré­senté Lutte ouvrière, je démarre tou­jours par « Travailleuses, tra­vailleurs » Ce n’est pas, comme le disent bon nombre de jour­na­lis­tes, une « marque de fabri­que » – c’est-à-dire une espèce de « truc de com’ » – mais l’expres­sion de convic­tions pro­fon­des : il y a un cer­tain nombre de « Français » aux­quels je n’ai aucune envie de m’adres­ser (ils s’appel­lent, par exem­ple, Vincent Bolloré, Martin Bouygues, Robert Peugeot, Liliane Bettencourt, Bernard Arnault, etc.) ; et à l’inverse, il y a dans ce pays des mil­lions de per­son­nes à qui j’ai bien des choses à dire mais qui ne sont nul­le­ment « Français » : ce sont les tra­vailleurs immi­grés.

C’est cela, entre autres, que signi­fie être « inter­na­tio­na­liste ». Pour moi, la divi­sion essen­tielle qui marque la société ne se fait pas sur la natio­na­lité, mais sur la classe sociale à laquelle on appar­tient.

L’idée qu’il y aurait une com­mu­nauté d’inté­rêt, une soli­da­rité natu­relle, entre les per­son­nes par­ta­geant la même natio­na­lité, cache tou­jours un piège pour les tra­vailleurs. Les appels à la soli­da­rité natio­nale reten­tis­sent tou­jours avec d’autant plus de force que la situa­tion est cri­ti­que et dan­ge­reuse : lors des guer­res, et lors des crises.

Lors des guer­res, par exem­ple lors des deux guer­res mon­dia­les du XXe siècle, on a fait vibrer la corde de la « patrie en danger » pour envoyer les tra­vailleurs au mas­sa­cre – les tra­vailleurs fran­çais aussi bien que les tra­vailleurs alle­mands, et tant d’autres. Déjà à l’époque, bien sûr, les diri­geants de la société, les médias, les partis poli­ti­ques, expli­quaient que toute la « com­mu­nauté natio­nale » devait par­ti­ci­per à l’effort de guerre. Au final, « l’effort de guerre » a été par­tagé… à la manière qu’affec­tion­nent les bour­geois : pour les tra­vailleurs, des mil­lions de morts et de bles­sés et des souf­fran­ces sans nom. Pour les patrons, de gigan­tes­ques béné­fi­ces réa­li­sés sur les com­man­des de guerre.

Et il en va de même de la crise que nous tra­ver­sons : les Sarkozy et les Hollande n’ont à la bouche que « l’inté­rêt natio­nal », que « la néces­sité pour le pays de payer ses dettes ». Mais ces gens-là n’uti­li­sent ces termes que pour trom­per leur monde. Ils savent très bien, eux, que lorsqu’ils disent « néces­sité pour le pays de payer ses dettes », il faut enten­dre : « néces­sité pour les clas­ses popu­lai­res de ce pays de payer les dettes contrac­tées au profit de la grande bour­geoi­sie. »

L’extrême droite a tou­jours fait du patrio­tisme et du natio­na­lisme son fonds de com­merce. Mais, depuis des décen­nies, la gauche fait de même. Le Parti socia­liste, puis le Parti com­mu­niste, ont chacun leur tour cédé aux sirè­nes du patrio­tisme, du chau­vi­nisme ridi­cule, des hom­ma­ges à Jeanne d’Arc et autres bali­ver­nes. Au point que le natio­na­lisme affi­ché par les diri­geants de gauche ne choque aujourd’hui plus grand-monde : il n’y a qu’à écouter Jean-Luc Mélenchon et ses hom­ma­ges, répé­tés à chaque mee­ting, à « notre patrie ».

On en oublie­rait pres­que que le mou­ve­ment ouvrier, à ses débuts, s’est fondé sur le rejet absolu de tout natio­na­lisme, sur l’idée que les tra­vailleurs n’ont jus­te­ment pas de patrie, sur un combat sans relâ­che pour défen­dre la soli­da­rité inter­na­tio­nale des tra­vailleurs. « Prolétaires de tous les pays, unis­sez-vous ! », disait déjà le Manifeste com­mu­niste de 1848 : les tra­vailleurs du monde entier ne for­ment qu’une seule classe sociale, les ouvriers et les ouvriè­res du bout du monde, qu’on cher­che à nous pré­sen­ter comme des concur­rents – quand ce n’est pas comme des enne­mis – sont nos frères et nos sœurs ! Et nos enne­mis, nos pires enne­mis, c’est dans ce pays qu’ils se trou­vent : ce sont les capi­ta­lis­tes fran­çais.

À la fin des mee­tings de Lutte Ouvrière, on ne chan­tera jamais la Marseillaise – comme le font le Parti Socialiste ou le Front de gauche. Parce que la Marseillaise n’a, aujourd’hui, plus rien à voir avec ce qu’elle a été il y a deux siè­cles : le chant de la révo­lu­tion fran­çaise. Elle est aujourd’hui ce que je déteste le plus, c’est-à-dire un chant patrio­ti­que, un chant qui exprime le poison natio­na­liste, le chant qu’on entonne dans les défi­lés mili­tai­res… et dans les mee­tings du Front natio­nal.

Je laisse bien volon­tiers aux mili­tai­res et à l’extrême droite les chants patrio­ti­ques, où l’on veut abreu­ver ses sillons avec du « sang impur ». Mes cama­ra­des et moi, nous gar­dons L’Internationale, l’hymne des tra­vailleurs, le chant de la révo­lu­tion inter­na­tio­nale, le chant qui dit qu’un jour « l’Internationale sera le genre humain » !
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par Jean-Claude » 27 Mars 2012, 10:25

La division en classe est bien réelle. Et les classes dominantes manipule l'idée nationale. Pourtant en niant la réalité et la profondeur du sentiment national, en en faisant un pur effet de la propagande des classes possédantes, on se condamne à ne rien comprendre, à demeurer dans un splendide isolement, tout en développant des thèses d'une splendide cohérence.
Jean-Claude
 
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Message par Zelda » 27 Mars 2012, 10:52

Que fais-tu du sentiment international ?
D'ailleurs la haute bourgeoisie actuelle par toute l'éducation de sa jeunesse le promeut : Etudes et voyages à travers le monde, apprentissage précoce de plusieurs langues, chosir ce qu'il y a de meilleur sur la planète et non se cantonner à un petit pays...
Le "sentiment national" est une propagande bonne pour le bon peuple. Pour ses enfants et ceux à qui elle tient, la bourgeoisie sait déjà que les Etats nationaux sont des vieilleries bonnes à exploiter (en tirer des subsides et maintenir les peuples sous la coupe de ces Etats, pour simplifier à l'extrême).

Il faut une contre propagande saine qui promeut l'internationalisme pour la classe ouvrière, car c'est son atout fondamental, le nombre, et parce que c'est juste, tout simplement. Que cela soit à la mode ou non ne change rien au fait que c'est juste. Nous sommes 6 milliards d'hommes et de femmes sur une grosse pomme et pouvons communiquer à la vitesse de l'éclair, et voyager à la vitesse du son.
Le reste n'est que vue de l'esprit (et d'un esprit borné, au sens propre), les frontières qu'un vestige réactionnaire, les frontières linguistiques qu'un vestige culturel. Il faut regarder devant soi et pas derrière.

Pour qui comptes-tu voter, Jean-Claude ? (Je précise que c'est une vraie question dont la réponse m'intéresse, pas une agression).
Zelda
 
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Message par artza » 27 Mars 2012, 12:34

Le "sentiment national" n'a pas besoin de propagande pas plus que le "sentiment de classe" ou le sentiment d'être une femme etc...

Après tout dépend de ce qu'on en fait et où on veut aller ;)

OK Zelda il faut aller de l'avant mais pour ça tirer tout ce ce qu'il y a derrière, que tous les opprimés, peuples et nations s'y reconnaissent et s'y retrouvent.
artza
 
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Message par nnscrrtl » 27 Mars 2012, 19:23

a écrit :"DÉFENSE DE LA PATRIE" ? Mais, par cette abstraction, la bourgeoisie entend la défense de ses profits et de ses pillages. Nous sommes prêts à défendre la patrie contre les capitalistes étrangers, si nous garrotons tout d'abord nos propres capitalistes, et les empêchons de s'attaquer à la patrie d'autrui; si les ouvriers et les paysans de notre pays deviennent ses véritables maîtres; si les richesses du pays passent des mains d'une infime minorité dans les mains du peuple; si l'armée, d'instrument des exploiteurs, devient l'instrument des exploités.

Il faut savoir traduire ces idées fondamentales en idées plus particulières et plus concrètes, selon la marche des événements et l'orientation de l'état d'esprit des masses. Il faut, en outre, distinguer rigoureusement entre le pacifisme du diplomate, du professeur, du journaliste et le pacifisme du charpentier, de l'ouvrier agricole ou de la blanchisseuse. Dans le premier de ces cas, le pacifisme est la couverture de l'impérialisme. Dans le second, l'expression confuse de la défiance envers l'impérialisme.

Quand le petit paysan ou l'ouvrier parlent de la défense de la patrie, ils se représentent la défense de leur maison, de leur famille et de la famille d'autrui contre l'invasion, contre les bombes, contre les gaz asphyxiants. Le capitaliste et son journaliste entendent par défense de la patrie la conquête de colonies et de marchés, l'extension par le pillage de la part "nationale" dans le revenu mondial. Le pacifisme et le patriotisme bourgeois sont des mensonges complets. Dans le pacifisme et même dans le patriotisme des opprimés, il y a un noyau progressiste qu'il faut savoir saisir pour en tirer les conclusions révolutionnaires nécessaires. Il faut savoir dresser l'une contre l'autre ces deux formes de pacifisme et de patriotisme.


LT, PdT

(Désolé de poster ça sans aucun commentaire mais ça me semble entrer dans le sujet, même si j'ai vraiment rien de particulièrement intéressant à dire de plus...)
nnscrrtl
 
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Message par Matrok » 27 Mars 2012, 19:45

(nnscrrtl @ mardi 27 mars 2012 à 19:23 a écrit :LT, PdT

Ce qui veut dire Léon Trotsky, Programme de Transition (1938)...

Par contre
a écrit :nnscrrtl

Là je donne ma langue au chat.
Matrok
 
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Message par Zorglub » 27 Mars 2012, 20:05

Et moi qui cherchait qui était ce "lieutenant Pomme de Terre". :ermm:
Zorglub
 
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Message par Jean-Claude » 29 Mars 2012, 17:55

Pardon d'avoir tardé à te répondre Zelda.
J'avais l'intention de voter Mélanchon. Parce que même si vous avez dit à juste titre que penser du bonhomme, l'élan qui le porte est intéressant. Et aussi parce qu'il avait laissé entendre (ou j'avais cru comprendre) au début de la campagne qu'il ne se rallierait pas automatiquement à Hollande au second tour. C'était évidemment plus formel que réel, mais intéressant tout de même car chaque électeur était peut-être amené à se poser concrètement la question: "On y gagne quoi avec Hollande". Mais depuis il a clairement déclaré qu'il ferait le coup de la discipline républicaine automatique (Poutou et besancenot aussi d'ailleurs). Du coup, je ne sais plus. Le "dégage sarkosy" me semble crétin. A la limite on pourrait défendre que la défaite de Hollande ne serait pas une si mauvaise nouvelle que ça. Le PS apprendrait à ses dépens qu'il ne peut plus compter automatiquement sur un contingent d'électeurs qui le vomissent, mais finissent par voter pour lui au second tour.
Jean-Claude
 
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