par Karib » 19 Fév 2005, 10:52
L'indépendance syndicale ? Certes... mais encore ?
Si le syndicalisme révolutionnaire et l'anarchosyndicalisme ont toujours défendu l'indépendance syndicale face aux partis politiques et à l'Etat, c'était dans une optique révolutionnaire, communiste.
Indépendance par rapport à l'Etat soupçonné (à juste titre) de vouloir intégrer les syndicats dans des relations contractuelles, de vouloir l'amadouer, le domestiquer.
Et indépendance par rapport aux partis (essentiellement le parti socialiste de l'époque, mais ensuite, aussi, indépendance par rapport aux groupes anarchistes) parce que soupçonnés (à juste titre ?) de vouloir instrumentaliser les syndicats pour leurs manoeuvres électorales réformistes.
Ce qui fait le socle commun du syndicalisme révolutionnaire et de l'anarchosyndicalisme c'est le postulat que le prolétariat est de par sa nature même, destiné à abolir le capital.
Qu'il n'a nul besoin de la médiation politique (c'est ce que l'on appelle l'action directe) pour parvenir à ses fins.
Qu'il doit trouver en lui-même les ressources morales et organisationnelles pour mener la lutte en vue de l'abolition du salariat.
Qu'il doit fuir toutes les compromissions avec l'ordre institutionnel bourgeois, qu'il doit placer son espoir uniquement dans sa lutte et non dans les chimères d'une instauration graduelle du socialisme par la voie de réformes décidées par le parlement.
Et enfin que seul le syndicat, parce qu'il naît du sol même de l'exploitation, parce qu'il est le prolétariat s'organisant pour ses luttes quotidiennes et pour la réalisation du communisme, pour l'abolition du salariat, que donc... seul le syndicat peut mener le prolétariat à la victoire.
Telle est, à grands traits, ce qui fait la spécificité du syndicalisme révolutionnaire.
Telle était la doctrine de la CGT de 1895.
Que tout cela ait pris les couleurs sépia des photos d'avant 1914. C'est possible.
Qu'on y retrouve des faiblesses du socialisme du XIXème siècle, avec toutes ses composantes, et notamment libertaires, c'est également possible.
Que les syndicalistes révolutionnaires et les anarchosyndicalistes aient à réfléchir sérieusement aux conditions du capitalisme d'aujourd'hui qui ne sont plus seulement celles de 1895, c'est également une évidence.
Mais on ne peut commodément jeter le bébé et l'eau du bain en même temps, c'est à dire identifier les centrales syndicales d'aujourd'hui, dont la fonction est essentiellement une fonction d'intégration du prolétariat à la mécanique du capital, à la tradition et à l'action du syndicalisme révolutionnaire de l'époque.