(jedi69 @ lundi 15 décembre 2008 à 22:09 a écrit :
Mais je ne crois pas que ces quelques débordements de cette partie de la jeunesse encouragent les travailleurs à tenir tête à la bourgeoisie et son gouvernement. Les émeutes, le terrorrisme, c'est des signes de désespoir, plutôt que d'espoir, d'encouragement des travailleurs et là en particulier de leur jeunesse.
a écrit : Jedi
en Grèce, on voit les travailleurs agir autrement, ne pas se laisser entrainer par cette petite fraction de la jeunesse ... en gros les travailleurs doivent faire de la discipline dans leurs rangs pour combattre de manière efficace la bourgeoisie ...
En Grèce, Jedi, les travailleurs sont encadrés par les syndicats dirigés par le PASOK et par le KKE. Et, pour le moment, ils ne débordent pas ces syndicats de façon significative. Il est donc absurde d'opposer leur façon d'agir, dans le cadre de journées d'actions limitées, du style de celle que nous connaissons ici, à celle de la jeunesse.
Il me semble que poses très mal le problème. Si tous les travailleurs, en rangs serrés, organisés dans des conseils ouvriers, dirigés par un parti révolutionnaire etc affrontaient la bourgeoisie et s'emparaient du pouvoir, ce serait parfait. Tout le monde, j'imagine, sera d'accord. Mais, avant d'en arriver là un jour (peut-être, du moins nous l'espérons), il y aura de nombreuses luttes, des victoires et des défaites, des formes d'action différentes, et un parti révolutionnaire, peut-être plusieurs, on n'en sait rien, se construiront au cours de ces luttes, en prouvant aux différentes catégories de travailleurs, de jeunes et d'exploités qu'ils défendent leurs intérêts, que leurs méthodes sont effiaces, leurs objectifs justes etc.
D'ici là, si ça arrive, différentes catégories de travailleurs, de jeunes et d'exploités se révolteront, agiront, et certains se révoltent déjà. Pour se révolter, ils n'attendent pas les consignes des petits partis qui se disent révolutionnaires, et ils n'agissent pas nécessairement selon nos souhaits. Néanmoins, du moins si nous sommes de leur côté, si nous sommes authentiquement révolutionnaires, nous les soutenons, sans pour autant approuver tout ce qu'ils font.
Que traduit la "violence" de ces révoltes ? Elle traduit notamment la haine tout à fait légitime d'une partie de la jeunesse contre une police, héritée de la dictature (certains de ses chefs ont servi sous la dictature, comme au Chili ou en Argentine), qui se conduit avec brutalité et vient d'assassiner un ado. Cette haine contre l'appareil répressif est pour nous une bonne chose, car ce sera une composante indispensable pour abattre l'ordre social. Ca ne veut pas dire que nous préconisons d'attaquer les commissariats. Et cette haine, seule, ne suffit pas. Il faut qu'elle s'allie à la conscience de classe d'une partie importante des travailleurs. Mais, au nom de quoi, devrait-on condamner les révoltes et les actes de ces jeunes, qui veulent rendre les coups qu'ils reçoivent, même si leurs actions ne débouchent pas sur une révolution ?
Tu sembles te féliciter que cette révolte n'entraîne pas de travailleurs. D'abord, tu ne sais pas si, dans l'avenir, une partie des travailleurs, notamment des jeunes, ne vont pas les imiter. Il y a déjà des jeunes travailleurs parmi eux, comme lors de la révolte des banlieues, même si celle des jeunes Grecs est beaucoup plus politique. Ensuite, à un moment donné, les travailleurs affronteront sans doute eux aussi les forces de l'ordre capitaliste si leur lutte atteint un certain niveau. Donc, sans faire de la lutte de ces jeunes un "modèle", une "étincelle qui met le feu à la plaine" etc, on ne peut pas exclure que cette révolte encourage d'autres catégories à lutter, avec leurs propres méthodes de luttes.
Pour le moment, et c'est la signification de ce sondage - dans les limites de ce qu'on peut attendre d'un sondage évidemment -, cette révolte, non seulement n'effraie pas la majorité de la population, mais celle-ci la comprend ! Comme les travailleurs ont compris la révolte des étudiants en mai 68, en dépit des efforts désespérés du PC de les isoler, en dénonçant les "provocateurs gauchistes" etc, ce qui a obligé le PC à changer brusquement de position et à prendre le train en marche, sous peine d'être débordé.
Donc, décréter par principe que tout acte "violent" effraie les travailleurs, nuit à la lutte collective etc n'est pas juste, même si, encore une fois, nous ne sommes pour rien dans ces actes que nous ne préconisons pas.
Tu remarqueras que le tour pris par le mouvement lycéen en France, sur cet arrière fond de révolte en Grèce, fait très peur au gouvernement, au point que Sarkozy a reculé sur la réforme Darcos. Sa plus grande crainte est évidemment la jonction des jeunes lycées, des jeunes des banlieues et du mouvement ouvrier. Sarkozy vient donc de reculer pour la première fois, et la violence de la révolte en Grèce n'est pas complètement étrangère à ce recul. Ca ne fait que commencer, et il n'est pas exclu que le succès des lycéens encourage les travailleurs en montrant qu'il est possible de faire reculer un pouvoir qui prétend rester ferme sur toute la ligne.
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PS Méfie toi tout de même quand tu évoques le "terrorisme" - qui joue un rôle très mineur dans cette révolte. Car certains médias, politiciens etc ont tendance en ce moment à vouloir criminaliser toutes les actions et mêmes positions politiques un peu radicales (CF Tarnac) en les assimilant au terrorisme. Nous devons au contraire dénoncer fermement cette criminalisation de la pensée et de l'action contestataires, pas reprendre cet amalgame à notre compte.