Critique de «Machine» sur Arte, kung-fu et lutte des classes dans une usine française
Créée par Thomas Bidegain et Fred Grivois, la série «Machine» suit une jeune femme au passé nébuleux de retour au bercail. As de kung-fu, cette dernière va se frotter à la lutte ouvrière qui sévit au sein d’une entreprise locale. La série fut sacrée meilleure série française au Festival Séries Mania 2024.
On ne sait rien d’elle, Margot Bancilhon, ni son prénom, ni ce qu’elle fait ou ce qu’elle veut. On en sait encore moins sur son passé mystérieux. Elle, c’est une ancienne militaire qui sait manier l’art du kung-fu comme personne. On la surnomme «Machine». De retour dans la ville où elle a grandi, elle trouve un boulot d’intérimaire dans une usine en proie aux dures lois de la globalisation. La menace de la délocalisation plane.
Parmi les employés de l'usine se trouve JP (JoeyStarr), ex-toxicomane. Très vite, il initie la jeune femme à ses activités fétiches: le vélo et les écrits de Karl Marx. Dans le même temps, la lutte ouvrière fait rage dans l’entreprise. Entre un syndicat bien décidé à obtenir des indemnités et JP qui rêve d’autogestion, les compromis sont durs à trouver. Une amitié improbable va pourtant se tisser entre les deux protagonistes, chacun aidant l’autre à sa manière. Et alors que la jeune femme tente de faire profil bas, son passé la rattrape et avec lui des ennemis peu scrupuleux.
Arts martiaux, action et lutte des classes, la série fait mouche sur Arte. Entre récit dramatique et comique, «Machine» c’est un peu la rencontre d’un Marx du 21ème siècle et d’un Kill Bill façon ouvrier de l’est de la France se balançant sur des titres de K. Maro ou Anastacia. Le mélange des genres est étonnant, la bande-originale et les rôles à contre-emploi le sont tout autant. À commencer par l’héroïne, figure aux airs manga, interprétée par Manon Bancilhon. L’actrice, récemment vue dans la série «De Grâce», change complètement de registre, arbore un look improbable et impressionne dans les scènes d’action pour lesquelles elle a réalisé la plupart des cascades. Face à elle, JoeyStarr se mue en travailleur amoureux de vélo et philosophe de comptoir.
Ce mélange des genres, on le doit à Thomas Bidegain, fidèle collaborateur de Jacques Audiard et réalisateur entre autres de «Soudain seuls» (2023), et Fred Grivois, réalisateur de «L’intervention» en 2019, qui officie également en tant que réalisateur dans le projet. Créateurs et scénaristes de «Machine», ces derniers ont imaginé un programme atypique, à mi-chemin entre réflexion sociale et divertissement teinté de pop culture.
Volontairement caricaturale, la série offre de nombreuses scènes d’action très réussies et des scènes de combat impeccablement réalisées. Des flashbacks énigmatiques aux tractations politiques, en passant par la révolte ouvrière, l’histoire tire pourtant un peu en longueur sur les 6 épisodes que compte la série. Si bien qu’il faut attendre le 5ème épisode pour en savoir un peu plus sur l’héroïne et les motivations des autres personnages tels que Benoît, un militaire bègue revanchard incarné par Guillaume Labbé. Si l’action sa paie la plus grosse part du gâteau, les personnages, eux, auraient mérité d’être plus développés.
«Machine» est à découvrir sur arte.tv dès le 4 avril et sur Arte les jeudis 11 et 18 avril.