par Puig Antich » 23 Juil 2012, 18:19
La gratuité permet d'abord de s'adresser aux gens dans un langage compréhensible, de défendre une théorie économique sans faire de coquetterie terminologique comme gage d'orthodoxie. Nous disons que " Leur accumulation individuelle sera limitée par les règles simples de la décence. " (les produits gratuits, issus de la production planifiée). Dire que le logement, l'eau, la nourriture devraient être gratuits comme l'air, la santé et l'éducation, c'est dire une évidence et en même temps remettre en cause tous les présupposés de la production capitaliste.
Ensuite, partir des rapports de distribution, sans obliger à oublier de discuter du contenu de la production, c'est discuter aussi les rapports de production, de manière radicale. Car c'est bien l'argent et la propriété qui dominent aujourd'hui les forces productives sociales, qui obstruent leur développement.
C'est, enfin, une question de parti : la transformation de la production, c'est avant tout l'affaire de l'activité quotidienne non seulement de la classe ouvrière, mais également de la science. C'est quelque chose qui n'est pas à la portée immédiate de la conscience, surtout dans notre situation actuelle : classe ouvrière émiettée, sans politique propre, etc. La revendication du droit de vivre qui s'exprime par la gratuité de façon communiste lorsqu'elle s'exprime de manière simplement syndicaliste par les revendications d'augmentation de salaire, de salaire social, de meilleures indemnités chômages, est au moins quelque chose d'immédiatement saisissable, et en même temps évident compte tenu de l'abondance, de la surraccumulation de richesse qui nous entoure d'autant plus qu'on nous dit que " les caisses sont vides ", c'est à dire que le capital argent n'est plus à même d'assurer la circulation, la distribution. C'est un moyen de surmonter cette contradiction.
Enfin, sur la persistance de l'économie marchande, elle est inévitable pendant la phase de transition, compte tenu précisément des conditions de production et de circulation dans lesquelles sont pris des millions, des milliards de petits artisans, petits commerçants, petits paysans, sous-prolétaires dépendant de l'économie informelle, etc. On ne peut pas raisonnablement dire : nous abolirons cela dès le pouvoir conquis, c'est une perspective utopique, qui condamne la révolution à paraître elle-même utopique. Par contre, dire qu'il faut un fort secteur directement socialiste, que la grande production permet cela, c'est à dire un secteur qui n'échange pas en argent, mais tout au plus dans la première phase un travail individuel à durée réduite contre un bon de consommation donnant accès à toutes les denrées nécessaires, c'est tout à fait possible et tout à fait nécessaire. Si les biens d'équipements individuels et industriels, les médicaments, l'eau, le pain, sont fournis gratuitement à toutes fins utiles, alors le marché s'éteindra progressivement, comme le salariat. Il est plus juste de parler d'extinction, à ce stade, que d'abolition, qui est un mot d'ordre choc, mais qui ne peut se réaliser par décret.