Lointains échos des dictatures africaines

Dans le monde...

Message par Antigone » 29 Sep 2009, 15:48

a écrit :AFP - RFI - France24

Guinée: manifestation anti-junte réprimée dans le sang

Les militaires ont utilisé lundi leurs armes et tiré à balles réelles sur les manifestants qui s'étaient regroupés dans le plus grand stade de Conakry pour dénoncer la possible candidature du chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, à la présidentielle prévue en janvier.
Au moins 157 opposants ont été tués lors du rassemblement.


Quelques heures après avoir violemment réprimé, lundi, une manifestation d’opposants dans les rues de Conakry, la capitale de la Guinée, les militaires se sont chargés de faire le ménage.

"Un camion est venu pour ramasser des dizaines de corps" emmenés vers "des destinations inconnues", témoigne anonymement à l’AFP un médecin de l’hôpital Ignace-Deen de Conakry. Un membre de la Croix-Rouge a, d’autre part, évoqué une "volonté de dissimuler les corps des victimes".

Ces corps sont ceux de dizaines de manifestants qui, avec des milliers d’autres, avaient bravé l’interdiction de se rassembler décrétée un peu plus tôt par la junte, au pouvoir depuis neuf mois. Munis de pancartes "A bas Dadis, à bas l’armée au pouvoir", les manifestants s’étaient dirigés vers le stade de Conakry pour marquer leur opposition à la probable candidature du chef de la junte, Moussa Dadis Camara, à l’élection présidentielle de janvier 2010.

"Une boucherie, un carnage". "Il y a 87 corps qui ont été ramassés dans et autour du stade après le passage des militaires", a témoigné un responsable de la police, sous couvert de l’anonymat. "C’est la boucherie, c’est un carnage", a lâché un médecin dans un centre hospitalier.

Plusieurs témoins contactés par FRANCE 24 et RFI rapportent que de nombreux civils ont été tués à bout portant et des femmes violées par les forces armées. Trois leaders de l’opposition, dont les ex-Premiers ministres Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, ont été blessés. "Il y avait une volonté délibérée de nous éliminer […] nous, les opposants", a déclaré Sidya Touré, blessé à la tête à "coup de crosse". Après avoir été hospitalisés, les trois opposants ont pu regagner leur domicile, selon leur entourage.

Selon RFI, l’armée a poursuivi les manifestants dans les rues de Conakry, et des coups de feu ont continué à retentir dans la ville, plusieurs heures après l’évacuation du stade.

Interrogé par RFI, Moussa Dadis Camara a affirmé "être très désolé" de la mort de manifestants. "J’attends qu’on me fasse le point [sur le nombre de morts] pour savoir comment procéder", a-t-il ajouté.


Interview du président Ubu: http://www.rfi.fr/player/popUpMultimedia/p...26x4%3D%26x5%3D
Antigone
 
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Message par bennie » 29 Sep 2009, 19:52

J'ai lu dans "jeune Afrique" de cette semaine, un article sur Dadis, qui annonçait la récente répression.

Dadis est un dictateur qui improvise, apparemment, qui gouverne façon télé réalité, qui pique des colères et vire des membres de son équipe en direct.

a écrit :
28/09/2009 08:20:15 | Jeune Afrique | Par : Cheikh Yérim Seck Docteur Dadis et Mister Camara

Après avoir revêtu les habits de sauveur du pays, à la mort de Lansana Conté, le chef de l’État glisse vers un régime autocratique et ubuesque : dérapages incontrôlés, improvisation permanente, autoritarisme... De quoi inquiéter, alors qu’il ne cache plus sa volonté d’être candidat à l’élection présidentielle de janvier 2010.


http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJ...ter-Camara.html

nombreuses réactions dénonçant le retour aux affaires de ce symbole vivant des dérives du régime Conté.

Ces dérapages répétés ont fait de leur auteur, aux mimiques inimitables, un nouveau « guignol de la Toile » au français très approximatif. Les comportements de Dadis font certes sourire mais, surtout, ils intriguent et inquiètent. Ce capitaine petit et mince, agité et colérique, dépourvu de retenue et allergique au protocole, a les épaules trop étroites pour le costume de chef d’État. Ayant beaucoup de mal à se tenir en public, il peut, au beau milieu d’une rencontre officielle, griller une cigarette, se lever pour serrer la main à une personne dans l’assistance, applaudir à tout rompre, rire à tue-tête, interrompre le maître de cérémonie pour discuter ou pour distribuer la parole… Né dans une famille modeste à Nzérékoré, une contrée rurale reculée de la Guinée forestière qu’il n’a quittée qu’après son bac pour rejoindre Conakry, le soldat Dadis, qui n’a pas intégré les manières de la bonne société ni les codes du pouvoir, avoue lui-même n’avoir « pas connu l’opulence ». Mais, à 45 ans, ce militaire de carrière affiche un goût certain pour les montres et les lunettes de luxe. [....]
bennie
 
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Message par Antigone » 29 Sep 2009, 20:52

Un article de Courrier International lui est consacré cette semaine.

a écrit :Dictateur le jour, animateur télé la nuit

Un dirigeant africain qui s’en prend aux riches et aux puissants en direct à la télévision, ça marche. Les taux d’audience de son émission le confirment. Toutefois, le capitaine Moussa Dadis Camara, star des animateurs de la télévision publique guinéenne, dispose d’un avantage de taille sur les autres inquisiteurs télévisuels. Dans la journée, il est le président de la Guinée, et si ses techniques d’interview à base de cris et de harcèlement ne donnent rien, la vue de la horde de gardes du corps armés de kalachnikovs qui l’entourent dans le studio contribue certainement à délier les langues.
“Les problèmes liés à la corruption et au trafic de drogue que j’ai découverts dans le précédent gouvernement ont contribué à détruire le pays”, gronde-t-il avant de se lancer dans une tirade contre les méfaits de l’ancienne équipe dirigeante. “Mais nous allons nous battre contre tout ça. Aucun cartel de la drogue ne pourra m’acheter.” C’est ainsi que commence le Dadis Show, émission qui captive les Guinéens depuis que son présentateur a pris le pouvoir, après la mort du vieux dictateur Lansana Conté en décembre 2008. Les aveux que Dadis extorque à ses invités ne sont pas du tout-venant et ne touchent pas seulement le public guinéen. Dans les émissions précédentes, il a révélé avec force détails que l’ancien gouvernement avait été “acheté” dans son intégralité par des barons de la cocaïne latino-américains, pour qui l’Afrique de l’Ouest constitue désormais un point de transit clé pour les exportations vers l’Europe.

Nuit après nuit, les membres de la propre famille de Conté, ainsi que des responsables de la police, de l’armée et des douanes, passent sur le plateau de l’émission pour avouer leur implication dans ce qu’on peut considérer comme le premier “coup d’Etat de la cocaïne” au monde. Un aérodrome spécial avait même été construit dans le nord du pays pour les avions du cartel, avec un hôtel destiné à accueillir les trafiquants. Quand les membres des cartels de Colombie et du Venezuela se rendaient à Conakry, la capitale, ils étaient reçus dans une maison qui appartenait à la première dame du pays. La cocaïne était même expédiée en Europe par la valise diplomatique. A la tête du système, on trouvait le fils aîné du président, Ousmane, qui réceptionnait personnellement la cocaïne à l’aéroport de Conakry, où elle arrivait dans un avion portant l’emblème de la Croix-Rouge. “Je reconnais que j’ai participé au trafic de drogue et je le regrette”, a-t-il déclaré au pays dans des aveux enregistrés. Avec deux de ses frères et les anciens chefs de l’armée et de la police des stupéfiants, il fait partie aujourd’hui des vingt personnalités jadis redoutées de l’ancien régime qui devraient se retrouver devant la justice après avoir subi un “entretien” en direct dans le Dadis Show. Bakary Thermite, l’ancien patron de la police des stupéfiants, a ainsi été accusé d’avoir revendu les marchandises confisquées. Comme il refusait de répondre aux questions, le capitaine Dadis a alors explosé de rage, lui lançant : “Réponds-moi, sinon je pense qu’on va devoir passer toute la nuit ici.” Il s’est exécuté, faute de quoi le pays aurait sans doute eu à suivre l’émission pendant toute la nuit.

Le Dadis Show ne fait que révéler ce qui a longtemps été un secret de polichinelle à Conakry. Une foule de Hummer, de BMW et autres voitures de luxe parcourent les rues de cette ville qui compte parmi les plus pauvres du monde. Jusqu’à récemment, on voyait beaucoup de ces véhicules sur le parking de la police des stupéfiants. Celle-ci touchait des pots-de-vin d’une telle ampleur qu’elle était inondée de demandes de transfert émanant d’autres services de police beaucoup moins riches. “Le trafic de cocaïne en Guinée est devenu une préoccupation majeure, à la fois en ce qui concerne l’approvisionnement de l’Europe et pour l’impact corrupteur qu’il a eu sur le gouvernement et la police du pays”, explique un observateur occidental.

Le trafic a pris de l’ampleur en Guinée et dans les pays voisins comme la Guinée-Bissau, le Liberia et la Sierra Leone, il y a quatre ans, quand il est devenu plus difficile d’importer directement en Europe. Les cartels latinos, qui se heurtaient déjà à la saturation du marché américain, ont fait appel à des intermédiaires nigérians pour rechercher des contacts dans la région et ont trouvé de parfaits partenaires chez les hommes politiques, les policiers et les généraux des capitales côtières de l’Afrique de l’Ouest ruinées ou ravagées par la guerre. On estime à 50 tonnes le volume de cocaïne qui transite chaque année par la région.

Les diatribes du capitaine Dadis contre le trafic passent bien auprès des Guinéens ordinaires, pour qui le spectacle des barons de la drogue latinos buvant et courant les prostituées avec les personnalités officielles dans les lieux nocturnes de Conakry n’est que le dernier chapitre du demi-siècle d’abus qu’a connu le pays depuis son indépendance. Les demandes de changement ont toujours été réprimées brutalement. En 2007, plus de 100 personnes ont été tuées par balle lors de manifestations antigouvernementales. “La Guinée, c’est comme l’enfer”, lâche Diallo Ibrahim, 26 ans, qui vend des DVD – parmi lesquels le coffret Best of the Dadis Show – dans une pauvre cabane en tôle ondulée. “On peut souvent rester trois jours sans gagner le moindre sou et on n’a même pas d’électricité ni d’eau à la maison.”
Quand le groupe du capitaine Dadis a investi les studios de la télévision publique après la mort de Conté et annoncé la mise en place d’un gouvernement de transition, la plupart des gens ont donc considéré que c’était une rupture avec le passé. Même si le capitaine était peu connu à l’époque, sa promesse d’organiser des élections libres et régulières d’ici à 2010 a été accueillie avec joie. Les vidéos du coup d’Etat ont montré ses chars traversant la ville pendant que la foule dansait et que les soldats faisaient semblant de jouer de la guitare sur leur kalachnikov. Depuis, on ne semble pas avoir avancé – et pas seulement parce que la junte a laissé une note de plus de 1 million de dollars à la brasserie locale. Selon ses détracteurs, le capitaine Dadis montre les signes classiques de quelqu’un qui est en train de devenir un “gros poisson”. On voit des affiches avec son portrait dans tout Conakry. Les émissions de radio où les auditeurs peuvent téléphoner pour exprimer leurs critiques à son égard ont été interdites. Il a récemment renoncé à la promesse qu’il avait faite à des diplomates et bailleurs de fonds européens et africains de ne pas se présenter aux élections, ce qui fait craindre un trucage du scrutin.
“Nous apprécions son action contre le trafic de drogue et la corruption, mais nous voulons tous que ce soit un civil qui arrive au pouvoir, et par des élections libres et régulières, pas un soldat. Nous savons que la communauté internationale ne soutiendra qu’un civil, confie Diallo Ibrahim. S’il n’organise pas des élections comme il l’a promis, les gens descendront encore dans la rue, et j’ai peur que ce soit un bain de sang”, ajoute Diallo Abdullah, 30 ans, qui a été blessé par balle à l’estomac lors des manifestations de 2007.
C.F.
Antigone
 
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Message par Antigone » 09 Oct 2009, 17:36

On ne connaitra sans doute jamais le véritable bilan de ce carnage. Aux 157 morts dénombrés par les ONG, Il faut ajouter, d'après les témoins, trois camions remplis de cadavres soustraits au comptage par les militaires, 1250 blessés dont 400 graves, certains mourants.

a écrit :Courrier international - 08 oct. 2009

Le 28 septembre, dans le stade de l'horreur

Mariama Diallo, membre du mouvement les Forces vives qui s'oppose à la junte dirigée par Dadis Camara, était présente à Conakry quand les militaires ont ouvert le feu sur les manifestants. Elle raconte la violence aveugle, les viols et toutes les exactions commises par les forces armées.

Pour une fois en Guinée, les leaders politiques étaient coalisés pour créer le Forum des forces vives sous la pression des militants qui leur reprochaient de ne rien faire. C'est cela qui a provoqué l'organisation du grand meeting populaire le 28 septembre à Conakry. Cette manifestation a été annoncée dans tous les médias privés à travers de nombreux communiqués et même lors d'une conférence de presse. Nous avions convenu que si le stade en tant que tel nous était interdit, nous irions sur l'esplanade du même édifice. Mais, dès 6 heures du matin, les militaires tiraient déjà dans les quartiers, tapaient les enfants...

Quand un ministre est allé rencontrer les leaders au cours de la marche pour leur demander de faire arrêter la...marche, il lui a été répondu que ce n'était pas possible. Et quand les jeunes ont appris que leurs leaders avaient été arrêtés pour les empêcher d'arriver au stade, ils ont brisé les barrages et ont affronté les policiers, ils ont cassé les locaux de la Police du quartier et sont arrivés au stade. Quand le Premier ministre a vu que la marée humaine le dépassait, c'est lui-même qui a pris la décision de faire entrer les leaders dans le stade. Et, à partir de ce moment, nous nous sommes dits qu'il n'y aurait plus rien de grave, que les risques étaient écartés. Le calme était revenu, les jeunes dansaient, chantaient dans le stade, sur les gradins, tout cela pendant un tour d'horloge.

C'est à cet instant que les portes du stade ont été fermées. Fermées pour tirer sur la population, sur tout ce qui bougeait. C'était une opération préméditée. Des militaires tiraient et tuaient, d'autres tapaient et battaient des personnes désarmées. Des soldats égorgeaient des gens comme on le ferait avec des animaux, d'autres préféraient violer des femmes qu'ils déshabillaient auparavant ou pas, sur le sol boueux. Demandez-moi par quel miracle je suis sortie vivante du stade, je ne vous le dirai pas ! car je ne le sais pas jusqu'à présent. Ils tiraient de tous les côtés, comme au cinéma. C'était organisé pour tuer, et surtout tuer le maximum de personnes.

Quand les hommes de Dadis ont commencé à tirer, tous les leaders se sont regroupés sur la pelouse du stade. Aucun d'eux n'a cherché à fuir. Ils se sont regroupés en formant un bloc. Et, de manière générale, les personnes les moins sévèrement blessées sont celles qui s'étaient regroupées en masses compactes. A l'intérieur du stade,
j'ai été piétinée par deux fois, car je courais dans tous les sens. J'étais habillée d'un jean noir très solide, et c'est en partie grâce à cet accoutrement que j'ai survécu. Toutes les femmes qui portaient des pagnes ou tenues légères, je les voyais courir les seins nus, car leurs vêtements s'étaient déchirés. Les militaires ont déshabillé de grandes dames, ils les ont violées devant tous ceux qui étaient capables de les voir, au milieu de tout et de rien. Ils jetaient les femmes par terre et montaient sur elles pour faire leurs sales besognes ! Ces images me hantent et me traumatisent. Plusieurs dizaines de personnes me sont tombées dessus quand j'étais à terre. Cela m'a causé des ecchymoses partout sur le corps.

Le drame est que, en courant, personne ne savait où aller. On mitraillait de partout et toutes les issues étaient cernées, les portes du stade hermétiquement fermées. En fait, il n'y avait nulle part où se cacher. Il ne me restait que la foule, et comme je ne voulais pas subir de viol, j'ai toujours fait en sorte d'être là où il y avait beaucoup de monde, une foule compacte.

Quand je me suis relevée et que j'ai constaté qu'il n'y avait aucune issue, j'ai remarqué un jeune militaire qui était très propre par rapport à ses collègues. Il était à cent mètres de moi. J'ai fait le suprême effort de me traîner jusqu'à lui, je me suis jetée sur lui. Il m'a demandé : "Mme, vous êtes journaliste ?", je lui ai répondu : "Oui, je suis journaliste. Prends tout mon argent, mais sauve-moi". Je lui ai ouvert le sac que j'avais autour du cou. Il l'a pris, et au moment où il cherchait ce qu'il y avait dedans, ses copains nous ont aperçus et sont venus nous rejoindre. "Mais c'est qui celle là"?, demande l'un d'entre eux qui braquait son arme sur moi. Le jeune soldat prit ma défense après avoir récupéré tout l'argent : "Non il ne faut pas la tuer, c'est une journaliste", a-t-il dit. Alors, l'autre a commencé à me frapper avec son arme sur le corps. Moi je me protégeais la tête avec mes bras, c'est cela qui m'importait. Un autre avait un gros gourdin. "Le jeune militaire m'a quand même sauvée en m'extirpant des griffes de ses collègues, il m'a jetée dans la cour d'une maison juste en face du stade. J'étais en lambeaux.

La famille qui était là m'a récupérée. Ce qui est terrible et qui n'a pas été dit à ma connaissance, c'est qu'on a demandé aux jeunes qui avaient survécu aux massacres de ramasser les corps et de les mettre dans les camions des militaires. C'est une femme de cette famille qui est venue nous le dire à l'intérieur de la maison. Après, il faut voir si ces jeunes n'ont pas été tués pour qu'ils n'aillent pas raconter ce qu'ils ont vu et ce qu'on leur a demandé de faire.

Par chance, une voiture de la Croix-rouge est passée devant la maison. J'ai pu y prendre place tout en craignant d'être amenée dans un camp militaire. A l'hôpital, il n'y avait presque rien comme médicament. C'est là que j'ai appris que les militaires faisaient le tour des structures hospitalières pour ramasser les blessés, et amener les femmes pour les violer encore. Donc j'ai appelé ma sœur, elle est venue rapidement car elle n'habite pas loin. C'était pour avertir mon mari à Dakar. Il m'a envoyé un billet d'avion pour que je retourne dans la capitale sénégalaise. Pour quitter Conakry, j'ai dû bénéficier de complicités certaines. Tout à l'heure, quelqu'un m'a dit depuis la Guinée que les gens se demandent encore comment j'ai pu sortir du territoire. Dadis et les militaires me connaissent bien, ils savent que je ne vais pas me taire. Mais tant que ce régime assassin gouvernera la Guinée, je n'y retournerai pas.
Antigone
 
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Message par Antigone » 29 Oct 2009, 18:44

Quand la crise fait des ravages, quand la misère dévaste tout, il reste encore le marché des armes.
Actuellement, en Afrique de l'Ouest, zone d'influence de la France, celui des armes artisanales bon marché est en pleine expansion.
Le durcissement des dictatures un peu partout dans cette région crée les conditions de futures guerres ethniques.


a écrit :All Africa - 28 oct. 2009
(Traduction d'un reportage de IRIN - Humanitarian news and analysis)

Afrique de l'Ouest: Le marché florissant des armes de fabrication artisanale

Accra — M. Sarpong, forgeron de 35 ans, gère une petite boutique à Kumasi, la seconde ville du pays. Bien qu'il ait été formé à fabriquer des ustensiles de cuisine, il préfère fabriquer des armes, car cela lui permet de gagner davantage d'argent.

Quand les affaires se portent bien, son magasin peut enregistrer un chiffre d'affaires de 1 000 dollars par semaine, a-t-il dit. D'après lui, les étrangers paient mieux que les Ghanéens. « La plupart de mes clients viennent du Nigeria ou de Sierra Leone ».

« Si vous avez l'argent, je peux vous faire un AK », a-t-il dit à IRIN.

M. Sarpong vend à des clients en utilisant les services de passeur d'armes - bon nombre d'entre eux étant d'anciens soldats de maintien de la paix ou des mercenaires, d'après l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) - au sein d'une industrie clandestine d'armes légères qui ne cesse de se développer, selon Kwasi Apea-Kubi, ministre ghanéen adjoint de l'Intérieur, une information confirmée par des sources policières.

La prolifération des armes légères déstabilise les pays d'Afrique de l'Ouest et a aggravé l'impact humain des conflits dans la région, d'après des experts en armes dans la zone.

M. Apea-Kubi, qui a récemment fait le tour du pays pour découvrir l'industrie des armes légères au Ghana, a rencontré, au cours de ses visites, des centaines d'armuriers qui « reconnaissaient ouvertement qu'ils fabriquaient des armes », bien que la production locale d'armes légères soit illégale.
« Nous savons que bon nombre des cas de vols à main armée auxquels nous assistons ont recours à ces armes légères », a dit à IRIN M. Apea-Kubi.
Environ 80 pour cent des armes à feu confisquées par la police ghanéenne sont de fabrication artisanale, d'après Africa Security Dialogue and Research, une ONG (organisation non gouvernementale) basée à Accra, la capitale.

Les rapports de police indiquent que les vols à main armée sont de plus en plus fréquents au Ghana : on en compte aujourd'hui des centaines par mois. D'après l'UNODC, au Ghana, les armes de fabrication artisanale sont utilisées dans un quart à un tiers des crimes avec violence.
Lors d'un raid policier très médiatisé, effectué mi-septembre dans une base de fabrication d'armes dans la région Centrale, la police a saisi 30 armes, avant de découvrir que ces armes avaient été vendues à des voleurs par des forgerons.

Les estimations de la production d'armes sont variables. La Commission nationale sur les armes légères, mise en place en 2007 pour surveiller la fabrication et les mouvements transfrontaliers d'armes légères, estime à 40 000 le nombre d'armes ghanéennes en circulation ; l'UNODC estime ce nombre à 75 000, tandis que Kwesi Aning, directeur du département de résolution des conflits du Centre international Kofi Annan de formation au maintien de la paix, à Accra, l'estime à 200 000.

« La production locale a récemment explosé », a dit à IRIN M. Aning.
Les forgerons ont les connaissances et le savoir-faire nécessaires pour fabriquer des armes à un coup et des revolvers ou des fusils à plusieurs coups, d'après l'UNODC. Lorsqu'IRIN a mené une enquête sur une vente de pistolets de fabrication locale dans les environs de Tudu - la région de référence à Accra pour les armes légères -, un vendeur connu seulement sous le nom de Musah refusait de vendre un fusil à canon unique à moins de 130 dollars.
« Vous ne pourrez pas trouver moins cher sur le marché », a dit Musah à IRIN. « Renseignez-vous. Mes armes sont fabriquées par les meilleurs forgerons ».

M. Aning, qui a mené, il y a plusieurs années, des recherches sur l'industrie clandestine des armes légères pour la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest, a constaté un lien entre le développement de l'industrie des armes légères et les conflits dans la sous-région.

Le rapport d'évaluation de la menace en Afrique de l'Ouest, publié en juillet 2009 par l'UNODC, établit un lien direct entre le trafic d'armes et l'instabilité dans la région, les principaux clients des trafiquants d'armes clandestins étant des personnes cherchant à renverser ou à défier l'autorité de l'Etat.

« L'instabilité au Togo, au Nigeria et en Côte d'Ivoire a fait monter les prix des armes fabriquées au Ghana », a dit M. Aning.
D'après lui, des armuriers ghanéens ont été invités à transmettre leur savoir-faire à des forgerons de la région du delta du Niger.
Cependant, les acheteurs d'armes ghanéennes sont principalement des individus, les groupes d'insurgés plus organisés se procurant des armes plus lourdes à l'extérieur de la région, d'après l'UNODC.

Le gouvernement cherche des solutions inventives pour résoudre le problème, a dit à IRIN M. Apea-Kubi, ministre adjoint de l'Intérieur, car jusqu'à présent, les arrestations et les emprisonnements des forgerons coupables n'ont fait qu'inciter les trafiquants à se cacher davantage.
« Nous sommes conscients de devoir prendre des mesures, mais nous ne voulons pas avoir recours à la force », a-t-il dit.

Les membres du ministère de l'Intérieur consultent les armuriers à travers le pays afin de trouver des moyens permettant de les attirer vers des moyens de subsistance alternatifs légaux, et cherchent des solutions pour empêcher le trafic transfrontalier.

M. Apea-Kubi espère en outre que les armuriers accepteront que leurs noms et leurs lieux d'exercice soient enregistrés dans une base de données nationale, de façon à ce que leurs activités puissent être surveillées. Cela permettrait au moins de rendre l'industrie un peu plus transparente, a-t-il dit.
Mais M. Sarpong n'est pas convaincu. « Aucune solution alternative ne peut me garantir autant d'argent que ce que je gagne en vendant des armes. Ils ne devraient pas perdre leur temps. »
Antigone
 
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Message par Antigone » 13 Fév 2010, 12:44

a écrit :Syfia Grands lacs (agence de presse) - 11 fev 2010

Sud Kivu: L'oisiveté des hommes ruine leurs familles

Dans les montagnes du Sud Kivu, c'est souvent l'oisiveté des hommes qui mène les familles à la misère. Les femmes, contraintes de cultiver seules et de transporter d'énormes fardeaux pour les nourrir, ruinent leur santé et meurent jeunes. Quand les couples travaillent ensemble, ils vivent mieux.

Il est 5 heures du matin, ce dimanche 24 janvier. Dans le village de Cibumbiro, non loin de Bukavu à l'est de la RD Congo, Venantie prépare les régimes de bananes et les sacs de maïs, produits de son champ. Elle et ses deux filles de 13 et 17 ans vont les transporter sur leur dos jusqu'au marché de Mudaka, à 17 km de là, après la messe. Mêlées à la foule de femmes et de filles qui vont y vendre leurs marchandises, elles marchent tête baissée, le front ceint d'un bandeau qui supporte les dizaines de kilos qu'elles halent péniblement. Les hommes qui se rendent aussi au marché ne portent que leur transistor, une poule, un petit sac... Certains cheminent les mains vides.

Venantie rentre à la maison vers 19 heures. Là, elle s’occupe du ménage, apprête le repas du soir qui n'est prêt qu'à 22 heures. Elle réveille alors ses trois enfants de moins de 10 ans déjà endormis qui ne mangent que la nuit. Au lit, bien qu'épuisée par cette rude journée, Venantie doit encore accomplir son devoir conjugal. "Je ne peux pas le refuser à mon mari, sous peine d’être répudiée", déclare-t-elle.

Il y a quinze jours, elle s’était effondrée sous le poids du gros fagot de bois de chauffe qu’elle allait livrer à Bukavu. "Chaque jour, je dois nourrir ma maisonnée et assurer à mon mari 'sa bouteille de bière quotidienne’", explique cette femme de 35 ans qui a l'air d'en avoir plus de 50. Alfred, son mari, lui, passe le plus clair de son temps avec ses camarades à discuter politique, à écouter la radio ou à jouer au sombi et aux cartes.

Pas de travail des hommes, pas de développement

La plupart des femmes du Bushi, la région montagneuse du Sud-Kivu, portent ainsi seules le poids de leur famille qu'elles font vivre au prix d'un travail incessant, dans la peur permanente de mécontenter leurs maris. Ceux-ci ne font pas grand-chose et attendent tout de leurs femmes transformées en portefaix pour les nourrir et leur payer à boire… Une situation dramatique pour de nombreux ménages, car la santé de ces femmes, esquintées par le port de fardeaux parfois plus lourds qu'elles, se détériore vite. La plupart ne vivent pas plus de 45 ans. Le revenu familial, fruit des efforts d’une seule personne, est faible. Les champs sont peu rentables car les femmes n'ont pas la force d'effectuer tous les travaux agricoles. "Beaucoup de familles vivent de la mendicité et du travail de portefaix même dans des régions fertiles comme Katana, Kalehe et Nyangezi", constate Pacôme Rhugenda-Banga, un étudiant de la région. Dans ces villages, aucun développement ne peut se faire.

Le contraste est saisissant avec les rares couples qui cultivent ou font d'autres activités ensemble : ils jouissent d’un revenu plus important et le foyer se porte bien. "C’est le cas d’un couple voisin où la femme est infirmière et dont le mari s’occupe des champs", déclare Venantie.

La plupart du temps, les femmes subissent ces mauvais traitements sans rien dire. Rares sont celles qui se révoltent comme Mama 80. Un jour, elle a prévenu son mari qu’il ne mangerait plus s’il ne travaillait pas. "Et je l’ai fait ce jour-là. Le lendemain, il avait réparé le clapier", raconte-t-elle. "Désormais, nous allons ensemble au champ trois fois par semaine et je bois moins", reconnaît son mari.

La coutume et les guerres

Cette soumission des femmes est liée à la tradition. En mariant sa fille, la mère lui demande de toujours s'en référer à son mari et de faire sa volonté. "Nous sommes les sujets de nos époux, en déduisent les femmes. Notre lot, ce sont les corvées ménagères." S'appuyant sur ces coutumes, découragés par l'insécurité qui a longtemps sévi dans les campagnes et par le manque d'emploi en ville, les maris ont démissionné de leurs rôles de soutien de famille ce qui ne laisse plus d’autres choix aux femmes que de se démener "pour ne pas abandonner la progéniture et mériter de rester dans le foyer, dit amèrement une paysanne de l’association Rhudosanye à Katana, sinon, votre mari vous répudie."
Les associations et les Églises sont effarées par cette oisiveté des hommes, qu'on retrouve aussi en ville, et par ses conséquences néfastes sur l’économie des familles devenue précaire. Plusieurs essaient de faire évoluer les mentalités et d'aider les femmes. Le Ministère du réveil dans le monde paye ainsi des journées de travail pour les champs des femmes. Le Groupe apprenons à lire et à écrire (GALE) et Action pour le développement intégré au Kivu (ADI-Kivu) organisent des mutuelles de solidarité. Ils sensibilisent aussi la population de Katana et de Kalehe sur le bien-fondé de l’implication de l’homme comme de la femme dans les activités familiales.


Syfia G.L. - 11 fev 2010

RD Congo: Un tiers des enfants-soldats sont des filles

Un tiers des 240 000 enfants utilisés comme combattants dans le monde sont des filles. Esclaves sexuelles, mariées de force aux chefs de guerre, elles ont bien du mal à s'en sortir et réintégrer la société. Murhabazi Namegabe, qui s'occupe infatigablement de ces jeunes à Bukavu, à l'Est de la RDC, lutte sans relâche contre ces crimes de guerre.

"Depuis 2002, environ 40 000 enfants sont sortis des groupes armés. Parmi eux, 10% sont passés directement par notre centre", se réjouit Murhabazi Namegabe, directeur du BVES (Bureau pour le Volontariat au Service de l’Enfance et de la Santé), basé à Bukavu, à l’Est de la République démocratique du Congo, rencontré à Bruxelles. Le BVES, créé en 1992, lutte contre le contre le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats dans ce pays. "Les filles représentent malheureusement 3% des effectifs dans nos centres parce qu’il n’est pas très facile d’obtenir la libération des filles", déplore notre interlocuteur.

Sur les 240 000 enfants qui aujourd’hui encore seraient associés à des groupes armés de par le monde, on estime que, selon les régions, 30 à 40% d’entre eux seraient des filles. "Celles-ci sont enrôlées comme combattantes mais elles sont également destinées à l’esclavagisme sexuel dans la brousse, dans les forêts. Plusieurs d’entre elles tombent enceintes, elles doivent accoucher dans des conditions très difficiles. D’autres attrapent des infections qui les mènent à la mort", explique le directeur du BVES. Cette réalité complexe est encore peu prise en compte dans les programmes de réinsertion, constatent les acteurs de la société civile.

Négocier avec les groupes armés
Le BVES, entre autres missions, va négocier avec les commandants de l’armée officielle, les FARDC et les divers groupes armés pour qu’ils appliquent les textes juridiques nationaux et internationaux qui interdisent de recruter les enfants et libérent officiellement les moins de 18 ans. "On nous présentait toujours des garçons. Après un temps, nous nous sommes demandés ou étaient parties toutes les filles qui avaient été enlevées. Certaines ont dû mourir mais les autres sont souvent cachées, poursuit-il. Nous avons alors décidé d’emmener des femmes pour négocier avec nous et sensibiliser les filles à sortir. On en a vu beaucoup devenir comme folles et dire: moi je dois sortir, ne me cachez pas, je dois rentrer chez moi, raconte Mr Namegabe. Les filles sont nombreuses à avoir été mariées à l’âge de 12, 13 ou 14 ans. Elles ont été domptées comme si elles étaient les épouses de ces seigneurs de guerre. Lorsque nous arrivons, les militaires nous disent: ce sont nos femmes, où voulez-vous les emmener ?

Au fur et à mesure des négociations, de plus en plus de filles quittent les groupes armés. Mais, une fois sorties, le chemin est encore long pour réinsérer ces enfants. "Les sept premiers jours quand les enfants arrivent, nous devons travailler d’arrache-pied parce qu’ils sont dans un état d’animosité incroyable. A ce moment-là, vous vous dites que ce sont de petits léopards blessés, enragés. Il faut travailler pour les adoucir, les rendre encore humains et les amener à cohabiter à nouveau ensemble", explique Mr Namegabe. "On leur dit qu’aucun d’entre eux n’a jamais demandé à la nature ou à Dieu de se retrouver dans tel ou tel camp. C’est une erreur des adultes. On leur explique que c’est faute de cohabitation pacifique qu’ils sont devenus des enfants associés aux groupes armés. Ils doivent bâtir un avenir meilleur, différent de celui des adultes qui les ont utilisés", raconte le directeur du BVES. Montrées du doigt comme ayant des moeurs légères ou mal vues parce qu’elles ont eu des enfants avec l’ennemi, les filles davantage que les garçons auront à faire face aux préjugés. Pour ces raisons, les anciennes combattantes sont encore nombreuses à ne pas se faire identifier.
Antigone
 
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Message par Antigone » 27 Fév 2010, 13:44

a écrit :L'Observateur, rapporté par Santé Plus et Afriqu'infos - 25 fev 2010

Taxe de développement communal : Les Burkinabè ne croient plus en rien

OUAGADOUGOU - Depuis quelques jours, la Côte d’Ivoire et le Niger tiennent le haut du pavé dans les discussions de l’opinion publique nationale, qui ne manque defaire le parallèle rentre la situation dans ces deux pays et l’actualité politique burkinabè, dominée par le débat sur une éventuelle modification de l’article 37 de la Constitution. C’est dans ce contexte que la polémique autour de l’application de la Taxe de développement communal (TDC) a vu le jour, ravissant la vedette à tous les autres sujets avec l’avantage qu’il a d’être national.

Pour rappel, c’est le jeudi 28 janvier dernier que la mise en œuvre effective de cette taxe, instituée depuis la loi de finances 2008 par le gouvernement burkinabè, a été annoncée par le maire Simon Compaoré, au cours d’une conférence de presse, avec la précision d’un délai fixé au 31 mars 2010 pour l’acquisition des vignettes. La TDC se veut une solution pour financer le développement local en ce sens qu’elle est une taxe locale dont le recouvrement doit venir augmenter les capacités d’intervention des collectivités. Cette annonce a donné lieu à un véritable débat, qui a mis aux prises citoyens et autorités politiques par presse interposée.

Pour une bonne partie de l’opinion publique nationale, cette taxe est une double imposition parce qu’elle est déjà perçue sur les produits pétroliers et que son application n’entraînerait pas une baisse considérable du prix du carburant à la pompe. L’édile de la capitale, président de l’Association des municipalités du Burkina (AMBF), s’en défend en expliquant qu’il s’agit d’« une revendication des communes pour les communes », une mesure d’accompagnement de la communalisation intégrale, puisque les montants recouvrés seront entièrement reversés aux communes.

Quoi qu’il en soit, l’on aura constaté, le mercredi 24 février 2010, que la Taxe de développement ne rencontrait pas d’échos favorables au sein de la population, qui s’est fortement mobilisée pour la marche de protestation à l’appel des syndicats. Une fronde généralisée qui n’est pas sans rappeler le sort réservé à l’imposition du port du casque, les émeutes en moins pour le moment. Et l’on peut s’étonner que l’on fasse autant de grabuge pour « si peu ». Ainsi, le retour de la vignette, qui n’a pas laissé que de bons souvenirs, ne fait pas beaucoup d’heureux.

En réalité, si les gens renâclent à payer, ce n’est pas tant en raison du montant de cette taxe que de l’incertitude quant à l’utilisation qui sera faite de cet argent. Le déficit de confiance entre gouvernants et gouvernés est tellement abyssal que les Burkinabè ne misent pas un kopeck sur le principe que 40% de l’argent est affecté à la commune qui le collecte et les 60% sont reversés dans un compte intitulé « Compte de solidarité communale ».

Les gens sont blasés et convaincus que l’argent récolté va servir plutôt à engraisser certains responsables. C’est la faute aux dirigeants si une telle situation s’est installée. Les deniers publics sont l’objet d’une mauvaise gestion et détournés à des fins personnelles, le pays souffre d’une corruption aigüe, et rarement l’autorité a sanctionné de gros poissons quand bien même les faits sont avérés.

Le déficit de confiance est donc criard entre gouvernants et gouvernés. La différence de pouvoir d’achat et de mode de vie a fait apparaître deux pays des hommes intègres : un Burkina de Ouaga 2000 et un autre de Taabtenga (quartier non loti situé dans la périphérie Est de la capitale). Ces deux Burkina, parfaitement opposés, évoluent de façon parallèle, les villas cossues du premier tranchant avec les ghettos du second, qui est à l’image des autres zones non loties.

Ce qui fait dire à d’aucuns que si tu nais pauvre sur la terre des hommes intègres, il y a de fortes chances que tu meures pauvre ; entendez par là que les portes de la réussite sociale s’ouvrent beaucoup plus aux riches qu’aux indigents. Les simulations effectuées indiquent que la majorité des « contribuables burkinabè » auront à payer entre 1000 et 2000 F CFA pour les engins à deux roues et entre 7000 et 10 000 F CFA pour les véhicules. Alors que parmi les croquants de la TDC, il en existe dont la somme qu’ils doivent débourser ne représente même pas le prix d’une journée de bière et de brochettes.

Le problème, c’est donc moins le montant de la taxe que le principe même de son payement. Malheureusement, on voit mal comment la tendance actuelle peut être inversée, et le manque de confiance, effacé des mentalités. Certes, force reste à la loi et le civisme fiscal est un devoir, mais il faut pour ce faire que le citoyen puisse accomplir son devoir civique fort du crédit qu’il accorde à ses administrateurs. Avec la vie chère, les gens croulent sous le poids des problèmes, et le scepticisme gagne du terrain.

Il faut pourtant contribuer. N’oublions pas que l’aide publique au développement est le produit de taxes et impôts des citoyens des pays occidentaux. Et nulle part au monde, on ne paye l’impôt ou les taxes en riant, car on a l’impression de se faire écorcher à vif. Alors il faut qu’on apprenne à casquer pour ne pas demeurer dépendant d’un quelconque soutien extérieur, car comme le dit un adage bien de chez nous : « Si on te lave le dos, frotte-toi le ventre. » Mais encore faut-il pouvoir croire en la destination finale réelle de l’argent que l’on va sortir d’une bourse déjà bien maigre !
Hyacinthe Sanou
Antigone
 
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Message par Antigone » 01 Mars 2010, 17:42

a écrit :AFP, Cyber info - 28 fev 2010

Malawi: la police s'apprête à arrêter des personnalités homosexuelles

La police du Malawi a indiqué samedi qu'elle comptait arrêter plusieurs personnalités homosexuelles, dont des députés de ce petit pays conservateur d'Afrique australe, et les inculper pour «relation charnelle contre nature».

La police a découvert des documents «pornographiques» de nature homosexuelle dans le bureau d'une association de défense des droits de l'Homme où elle avait été appelée après un cambriolage, a expliqué à l'AFP Davie Chingwalu, un porte-parole de la police.
«Ce bureau est soutenu par plusieurs personnalités. Nous avons immédiatement lancé l'enquête pour retrouver ces homosexuels», a-t-il ajouté. «Nos suspects incluent des parlementaires, des prêtres et des universitaires».

Si les preuves sont suffisantes, ils seront inculpés pour «relations charnelles contre nature» et «pratiques indécentes entre hommes», a précisé le porte-parole.
Le code pénal du Malawi interdit l'homosexualité et réprime la sodomie, passible de 14 ans de prison.

Le pays dispose d'un groupe activiste gay, le Centre pour le développement du Peuple (Cedep), qui opère dans la clandestinité.
Le Cedep finance actuellement la défense d'un couple homosexuel, détenu depuis deux mois pour avoir organisé la première cérémonie symbolique de «mariage» gay du pays.
Inculpé d'«attentat à la pudeur», Tiwonge Chimbalanga et Steven Monjeza ont comparu en justice et attendent en prison le verdict, prévu le 22 mars.

La répression de l'homosexualité au Malawi complique la lutte des associations de lutte contre le Sida, alors que le taux de prévalence est de 14% dans le pays.

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Afriqu'infos - 30 dec 2009 (mais toujours d'actualité)

Les droits LGBT mis à mal en Afrique

L’actualité de ces derniers mois illustre la répression croissante de l’homosexualité en Afrique et le constat est accablant. Le Burundi, l’Ouganda, le Malawi, le Rwanda ou encore le Sénégal resserrent actuellement l’étau autour des gays. “En Afrique, rien ne va plus pour les personnes LGBT, agissons !” s’indigne le Centre LGBT Paris IDF dans un communiqué.

Le malaise est là et la tendance n’est pas à l’assouplissement. Hier encore, mardi 29 décembre, un couple homosexuel a été arrêté au Malawi et inculpé “d’attentat à la pudeur” pour avoir organisé une cérémonie symbolique de mariage samedi dernier. Tiwonge Chimbalanga et Steven Monjeza ont été les premiers homosexuels de ce petit pays conservateur d’Afrique australe à célébrer symboliquement leur union en public, lors d’une cérémonie traditionnelle.
Au Malawi, l’homosexualité est illégale et la sodomie est passible d’une peine de 14 ans de prison, rappelle une dépêche AFP.

Pénaliser et criminaliser l'gomosexualité: une tendance croissante
 
Les autres exemples de répression et de pénalisation des relations entre personnes de même sexe ne manquent malheureusement pas ces temps-ci en Afrique.

Le 24 décembre dernier, au Sénégal, 24 homosexuels présumés (sénégalais et français) ont étéarrêtés par la police, alors qu’ils célébraient ensemble le réveillon de noël dans une villa d’une station balnéaire. Leur garde à vue a depuis été levée mais l’enquête continue et ils pourraient faire l’objet de poursuite.

Le gouvernement rwandais révise actuellement son code pénal et finalise l’article 217 visant à pénaliser fortement la conduite homosexuelle et à interdire toute initiative de protection des droits LGBT. Plus tôt cette année, le parlement rwandais avait déjà adopté l’article 191 qui dispose que “toute personne qui encourage ou sensibilise des personnes de même sexe à avoir des relations sexuelles ou n’importe quelle pratiques sexuelles, serait passible d’une peine de prison allant de cinq à dix ans et une amende de 50000 à 500000 francs CFA”, souligne le site sud africainBehind the mask.

En avril dernier, le Burundi a criminalisé pour la première fois de son histoire l’homosexualité. Le président a secrètement promulgué une loi, malgré le rejet de celle-ci par le sénat, qui prévoit des peines allant jusqu’à deux ans de prisons et des amendes de 100000 francs CFA.

L’Ouganda, plus sévère encore, atteint les sommets du non-respect des droits humains en invoquant la peine capitale. Le 13 octobre dernier, une proposition de loi a été déposée au Parlement de Kampala, sous le nom de “Anti-homosexuality Bill 2009?. Elle prévoit des peines d’emprisonnement à vie pour les homosexuels et des peines de mort pour les homos séropositifs, accusés alors d’homosexualité aggravée. La proposition, quipourrait être modifiée, sous la pression internationale qui demande le retrait des dispositions les plus extrêmes, devrait être votée en janvier 2010.

Les cas de ces pays reflètent l’ambivalence de la majorité des pays africains, où les communautés homosexuelles tentent de plus en plus de s’organiser mais se heurtent à des tabous persistants. Sur le continent, où la pratique a longtemps été perçue comme importée de l’Occident, 38 des 53 États ont des lois pénalisant l’homosexualité et seule l’Afrique du Sud a légalisé les unions civiles entre personnes du même sexe.
Antigone
 
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Message par Antigone » 07 Mars 2010, 16:57

a écrit :Arib (association de reflexion et d'information sur le Burundi) - 02 mar 2010

Burundi: L'industrie sucrière au bord de la faillite

La Société sucrière du Burundi (SOSUMO) est aujourd'hui au bord de la faillite du fait d'une "mauvaise gestion administrative et financière", apprend-on de source syndicale à Bujumbura.

Les recettes de l'entreprise (naguère prospère) seraient gaspillées dans la passation "irrégulière" de marchés pour la fourniture d'équipements, fertilisants, emballages et autres machines agricoles comme les tracteurs et le clientélisme, à dénoncé à la presse mardi, le secrétaire général du syndicat des travailleurs de la SOSUMO, Fiacre Ninteretse.

D'après le responsable syndical, le résultat net de ce qui restait de l'industrie nationale, n'oscillerait plus, bon an mal an, qu'entre 400 et 600 millions de francs burundais (entre 400.000 et 600.000 dollars US), alors qu'il n'y a pas longtemps, l'entreprise pouvait réaliser des bénéfices de l'ordre de 3 milliards de francs burundais (environ 3 millions de dollars US).

La production de sucre est allée, elle aussi en fondant et l'on n'en aurait récolté l'année dernière que 14.000 tonnes, contre plus de 20.000 tonnes les années précédentes, selon la même source syndicale.
Le niveau de production actuel couvre à peine les besoins des consommateurs de Bujumbura, la capitale économique du Burundi, précise-t-on du côté du ministère burundais du Commerce.

Les syndicalistes sont montés à leur tour au créneau au lendemain d'une sortie médiatique encore plus surprenante de la ministre du Commerce, de l'Industrie et du Tourisme, Mme Euphrasie Bigirimana, qui a avoué publiquement n'avoir plus d'emprise sur la gestion de l'industrie sucrière du Burundi.

Les conseils d'administration de l'entreprise sucrière se succéderaient depuis un certain temps sans prévenir, ni rendre compte à la tutelle des décisions prises, a-t-elle avoué.
Le sucre est l'un des produits de large consommation dont le prix est encore fixé par l'Etat au Burundi.

Des pénuries sont encore apparues ces derniers jours sur le marché burundais du sucre et seraient directement liées à la conjoncture que traverse l'unique usine nationale de production et de vente de cette denrée de première nécessité dans le pays.
Dans ce secteur agonisant de l'industrie au Burundi, les graves difficultés que traverse la filière du sucre sont venues rappeler à l'opinion la récente faillite du Complexe textile de Bujumbura (COTEBU) et la mise au chômage de plus de 1.500 salariés.
La société sucrière du Burundi emploie en période de pic ( récolte de la canne à sucre), entre 2.800 et 3.000 saisonniers et 512 permanents, selon les statistiques de l'entreprise.



Les OGM, ça va servir à l'alimentation des animaux... et des africains.

a écrit :Les dépêches de Brazzaville - 05 mar 2010

Les OGM dans la lutte contre la faim: nouvelle bordée d'attaques et de soutiens

De nouveau, l'opinion européenne est en émoi et divisée sur la question des organismes génétiquement modifiés, les OGM. Ou plus exactement, la majorité des dirigeants est en divergence avérée avec leurs opinions nationales sur cette question, après le feu vert accordé par le Commission européenne mardi dernier, le 2 mars, à l'introduction d'une variété de pomme de terre génétiquement modifiée et, affirme la Commission européenne, uniquement destinée à l'alimentation animale. 
La pomme de terre visée, l'Amflora de la firme allemande BASF, est supposée n'avoir aucun rôle direct dans l'alimentation humaine.
BASF explique que ses utilisations ultérieures, toujours et uniquement dans les domaines industriels, produiront un amidon qui rend le papier plus brillant, le béton et les adhésifs plus résistants dans le temps. C'est la pulpe de la pomme de terre qui sera ensuite utilisée dans l'alimentation des animaux.

Naturellement, un tollé a suivi cette introduction, dénoncée comme étant en totale contradiction avec le principe de précaution qui prévalait jusque-là, affirment plusieurs associations écologistes. Elles font valoir que la seule culture de ce produit OGM signifiera l'introduction et l'entrée de ces organismes dans la chaîne alimentaire humaine. Parce que l'homme mangera le bœuf qui mangera de l'Amflora ; parce que deux champs voisins se contamineront l'un l'autre et, donc, qui ne veut pas d'OGM ne pourra pas, bien malgré lui, s'en prémunir.

Le débat est ensuite descendu jusque dans le domaine de la coopération internationale. Plusieurs bio-techniciens ont avancé que les cultures OGM seront une réponse efficace contre les problèmes de la faim dans les pays en développement. « Les OGM sont la solution ! » Le professeur italien du département d'oncologie de l'Institut national des tumeurs, à Pordenone, n'a pas une minute d'hésitation. Il affirme que les OGM seront la solution non seulement aux problèmes de la faim dans le monde, mais aussi... dans la lutte contre les cancers ! 

« Les biotechnologies,soutient-il, ont permis l'existence de maïs qui peuvent se défendre des attaques des parasites grâce au gène qui permet à la plante de développer une substance mortelle pour les pyralidés. » Donc, des plantes combattant dans l'organisme humain des cellules cancéreuses, sont tout à fait la bienvenue et possibles. Cqfd !

Même la FAO semble ne plus s'en tenir à l'équilibre dans le propos ces derniers temps. La dernière conférence de Guadalajara (Mexique) sur les biotechnologies dans l'agriculture, conférence technique, a conclu que les OGM pouvaient sauver le monde en quadruplant la production agricole. Mais, sans directement verser dans l'euphorie débridée des bio-techniciens d'aujourd'hui, esprit d'équité oblige, par la voix de son vice-directeur Modibo Traoré, la FAO ajoute qu'une nouvelle approche de l'agriculture est nécessaire. « Ainsi qu'un plus ample et sage usage de la biodiversité dans l'agriculture. » On n'est pas sortis de l'auberge.
Lucien Mpama
Antigone
 
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Message par Antigone » 14 Mars 2010, 09:13

Je commence par une information qui n'est peut-être connue en France qu'à Montreuil (93), seconde ville malienne après Bamako.

a écrit :Mali Jet, Le Républicaini - 10 mar 2010

Mali - Marche des expropriés et déguerpis non recasés : Répression policière
  
A l’appel de l’union des associations et coordinations d’associations pour le développement et la défense des droits des démunis (Uacdddd), des milliers de personnes ont pris d’assaut, hier, la bourse du travail pour une marche pacifique. Sur injonction du ministère de l’administration territoriale et des collectivités locales à travers le gouvernorat du district de Bamako, la police a réprimé la manifestation, faisant au moins 6 blessés. Quatre autres personnes ont été interpellées.
La mobilisation était de taille où les responsables des manifestants estiment le nombre entre 5.000 et 6.000 personnes. Compte tenu du nombre de manifestants, les autorités n’ont vu d’autre alternative que de réprimer la manifestation.

Parmi les personnes arrêtées, de vieilles personnes le plus souvent malades qui ont été violemment brutalisées, une personne avec une jambe fracturée et plusieurs blessés dont le Secrétaire Général du M.S.V Tahirou Bah.
Signalons que de nombreuses femmes parmi lesquelles des femmes enceintes avaient pris part à cette marche, elles ont été également battues, gazées et poursuivie par la police.
Contacté par nos soins, le commissariat du 1er arrondissement s’est refusé de confirmer ou d’infirmer un quelconque chiffre et indiqué que cette marche avait été interdite. «Les policiers ont fait de la marche un affrontement. Nos blessés sont dans un centre de santé» a souligné une responsable de l’Uacdddd.

Pourquoi une telle horreur ?
Le commissaire adjoint du 1er Arrondissement a, pour sa part, expliqué qu’ils ne sont pas venus sur les lieux pour cadrer la marche mais plutôt empêcher la tenue de la présente marche. Les autorités, dira-t-il,  les ont placés en alerte maximum pour empêcher ladite marche. Selon lui, toutes les voies sont ouvertes au dialogue afin de trouver un terrain d’entente. « Nous sommes dans un Etat de droit, un Etat Républicain. On marche dans le cadre des normes établies par la loi et non de manière anarchique » a-t-il ajouté.

Il est à retenir que le 12 février 2010, l’union a adressé une déclaration de marche (avec les références de trois responsables) au gouvernorat et la mairie du district, ainsi qu’à la mairie de la commune III, commune où doit se tenir la marche. Ils ont réaffirmé, le 23 du même mois, à ces structures leur volonté et informé de cette volonté, le 2 mars, les ministères de l’administration territoriale et des collectivités locales, de la justice, du logement, des affaires foncières et de l’urbanisme, de la sécurité intérieure et de la protection civile, ainsi qu’à la primature. Et le gouvernorat n’a pris la décision de l’interdiction de la marche que le 8 mars, c’est-à-dire la veille de la marche. Mieux, le secrétaire aux relations extérieures de l’union nous dira qu’ils n’ont eu connaissance de cette interdiction que sur la scène de la marche, par le canal de la police.

Des dizaines de litiges fonciers concernant des cas de déguerpis et d’expropriations dans les différents quartiers de Bamako et du cercle de Kati donnent du fil à retordre aux autorités depuis quelques années. Le gouvernement va devoir faire face à la recrudescence de la tension née de sa politique d’urbanisation. Les états généraux du foncier viennent de se tenir, il y a quelques mois, mais ces expropriés et déguerpis estiment que leur mise à l’écart rendrait inutile les conclusions de ces assises. Plus d’une centaine de cas de litiges fonciers sont en instance entre les membres de l’union et l’Etat.

L’Uacdddd est un mouvement qui regroupe 43 associations et coopératives, «dont la majeure partie est frappée d’injustice foncière» précisent les responsables de l’union. Selon les responsables de ce mouvement, Les litiges fonciers sont aujourd’hui un véritable problème national et un marché potentiel de spéculation. Les plus démunis se sentent de plus en plus lésés par le processus d’urbanisation du pays où, estiment-ils, leurs propriétés foncières sont «injustement» spoliées. Pour faire entendre sa voix, l’union avait décidé de faire savoir sa préoccupation au gouvernement à l’issue d’une marche pacifique, programmée pour ce mardi 9 mars 2010 avec comme itinéraire de la bourse du travail à la primature.
Seydou Coulibaly/ Moussa Dagnoko/ Mamadou Konaté (MSV)

a écrit :Libération - 12 mar 2010

RDC: Les rebelles passent, les trafics prospèrent...

Les nouveaux maîtres des mines du  Nord-Kivu sont les ex-rebelles du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple), pour la plupart des Tutsis congolais d'origine rwandaise. C'est ce que révèle l'ONG britannique Global Witness à l'issue d'une mission de quatre semaines sur place. Fin 2008, les hommes du CNDP, soutenus activement par le Rwanda voisin, avaient lancé une vaste offensive militaire, balayant les troupes de Kinsahsa et provoquant des déplacements massifs de population. Un véritable désastre humanitaire, condamné par la communauté internationale. Mais, début 2009, coup de théâtre: le chef du CNDP, Laurent Nkunda, était écarté par Kigali, qui décidait de s'allier avec le régime congolais aux Kivus. l'alliance entre Kigali et Kinshasa a redistribué les cartes, permettant à de nouveaux acteurs de s'enrichir. De manière illicite, cela va sans dire.

Visiblement, cette alliance a permis de faire d'une pierre deux coups. A la faveur d'offensives militaires, soutenues localement par les Casques bleus de la Monuc (Mission des Nations unies au Congo), les Hutus du FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda) ont dû lâcher leurs positions, sans pour autant être défaits militairement. Par la même occasion, les ex-rebelles du CNDP, intégrés depuis au sein de l'armée congolaise, se sont emparés des richesses locales, en particulier dans la région de Walikale. "Ils ont ainsi acquis un contrôle bien plus important des zones minières que celui dont ils jouissaient en tant qu'insurgés (...)", écrit Global Witness.

Les cargaisons de cassitérite et de tantale, minerais de haute valeur, très prisés par l'industrie mondiale, qui entrent dans la composition de téléphones mobiles et de circuits informatiques, sortent toujours, principalement, par le Rwanda voisin, sans que personne ne s'en offusque. A commencer par le gouvernement central de Kinshasa qui, semble-t-il, ferme les yeux en échange du maintien d'une paix précaire dans les Kivus. Un "deal" qui pourrait s'avérer illusoire.

"Du fait de leur capacité à détourner les recettes des mines, les anciens rebelles auraient les moyens financiers de se réarmer s’ils décrétaient que la paix ne leur convenait plus", analyse Global Witness, Quant à la communauté internationale, elle fait de même. "Les gouvernements bailleurs de fonds occidentaux ont fait grand cas de leurs engagements visant à rétablir la paix et la stabilité dans l’est de la RDC. Mais ces belles paroles sont en contradiction avec le fait qu’ils persistent à ne demander aucun compte aux entreprises de leur juridiction qui achètent des minerais du conflit", affirme l'ONG.
Jusqu'à récemment, une entreprise britannique, AMC, était très impliquée dans l'achat des minerais congolais du Kivu. Elle a été remplacée par une firme basée en Malaisie, MSC, quatrième producteur d'étain au monde, dirigée par un ressortissant britannique.
Thomas Hofnung

Le processus de fabrication des téléphones portables et de nos chers ordinateurs commence au Congo. C'est là qu'une guerre pour le contrôle des mines de cassitérite et de tantale de la région du Lac Kivu a déjà causé des centaines de milliers de morts. Ce sont les populations civiles et en particulier les femmes qui sont les pricipales victimes.

Les experts de l'ONU (c'est le nom u'on leur donne), dont la fonction est de prendre des notes avec minutie, ont rédigé un rapport qui sera présenté à Genève jeudi prochain, juste avant le déjeuner, devant le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU. Ce rapport denonce la "violence sexuelle utilisée comme arme de guerre par toutes les parties locales au conflit".

Selon ce rapport, "des femmes et des filles ont été exécutées sommairement ou mutilées après avoir été victimes de viols collectifs. Certaines d'entre elles s'étaient fait introduire une arme à feu, du bois, du sable ou de la colle dans le corps.
Les enquêteurs affirment que "des maris, des parents ou des enfants qui tentaient de faire cesser le viol de leurs proches ont également été agressés, tués ou contraints de violer les membres de leur propre famille".
Ils ajoutent: "Des témoignages révèlent que tant des membres des Forces armées de la RDC (FARDC) que d'autres groupes armés ont enlevé des femmes et des filles et les ont détenues pour les utiliser comme esclaves sexuelles et que celles-ci ont été soumises à des viols collectifs pendant des semaines et des mois, parfois accompagnés d'autres atrocités",

Ils auraient recensé et homologué très officiellement 7.500 cas de violences sexuelles à l'encontre de femmes et de filles dans l'ensemble du Nord et du Sud-Kivu. Un chiffre évidemment très très très en dessous de la réalité.

Après ça, difficile de regarder son téléphone portable de la même façon...
Antigone
 
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