Informations Ouvrières N° 71 semaine du 5 Novembre au 11 Novembre
L'EDITO PAR DANIEL GLUCKSTEIN
Les travailleurs ont leurs propres revendications
Un président de la République en procès contre un ancien Premier ministre, membre de son parti. Un autre ancien Premier ministre, membre du même parti, qui appelle à bloquer une réforme voulue par le même président. Un ancien ministre de l’Intérieur condamné. L’affaire Boulin qui refait surface…
Jamais, la Ve République n’avait à ce point été assaillie par les « affaires ». Ce régime ne tient qu’à un fil. Cela ne l’empêche pas, pourtant, de porter les pires coups contre la classe ouvrière et la démocratie. Comme si les soutiens qui lui manquent il les trouvait ailleurs que dans son propre camp…
Ce 2 novembre a été mis en place le comité organisateur des « états généraux pour une politique industrielle » (dont Sarkozy affirme que l’idée lui en a été donnée par le secrétaire général de la CGT). Quarante-trois membres, parmi lesquels les dirigeants des confédérations ouvrières, les représentants des patronats français et allemand, des parlementaires UMP et PS , etc. Il sera présidé par Jean-François Dehecq, jusque-là président du conseil d’administration de Sanofi-Aventis. Sanofi-Aventis : plus de 4 500 suppressions d’emploi annoncées dans les dix-huit derniers mois (dont 1 500 déjà réalisées) et des dividendes (versés aux actionnaires) multipliés par deux en cinq ans. Et aussi un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) dans lequel la direction et les organisations signataires s’engagent à « tout mettre en œuvre pour limiter au maximum les départs contraints en pratiquant la mobilité, la reconversion, etc. ». A quoi peuvent servir des états généraux, de surcroît présidés par un P-DG ayant un tel bilan, sinon à coorganiser les plans de licenciements et leur accompagnement ?
Ces états généraux se déclinent d’abord dans les régions. En avant-première, les Assises du développement de l’industrie durable, tenues à Gardanne le 29 octobre : « Les forces politiques, économiques et sociales » réunies y ont exprimé « leurs convictions collectives » en faveur d’une « industrie économiquement fiable, respectueuse de l’environnement et socialement responsable » et du « renforcement des liens entre mondes académique et industriel ». Qui sont-elles ces « forces » ? Premiers signataires : le préfet de région, les présidents PS de la région et du département, le sénateur maire UMP de Marseille, le maire (PCF) de Gardanne, le recteur de l’académie, le président de l’UIMM (patronat de la métallurgie)... Que signifie « une industrie économiquement fiable » dans la bouche du représentant du patronat de la métallurgie, ou de l’Etat ? Une économie débarrassée des secteurs « non fiables » ! Licenciements et restructurations : c’est le seul menu des états généraux.
Ce même 2 novembre, aux Etats-Unis, les membres du syndicat de l’automobile UAW de la compagnie Ford ont, par un vote, rejeté l’accord signé préalablement entre la direction de l’entreprise et celle du syndicat. Accord qui prétendait imposer une flexibilité accrue, le gel des salaires pour les nouveaux embauchés et l’interdiction de toute grève sur les questions salariales… jusqu’en 2015 !
France, Etats-Unis : les travailleurs ont leurs propres revendications. Ils n’ont rien à gagner – au contraire – à la participation de leurs organisations à des états généraux dont la seule fonction est d’imposer les diktats des patrons et des gouvernements. Plus que jamais, tout se concentre dans le mot d’ordre : interdiction des licenciements. Celui sur lequel travailleurs et jeunes de toutes tendances se rassembleront le 28 novembre à l’appel des comités pour la marche unie pour l’interdiction des licenciements.