(Le monde a écrit :Allemagne : la gauche radicale reste divisée malgré ses récents succès
Cottbus (Allemagne), envoyée spéciale,Le Monde
Un peu plus d'un an avant les législatives de 2009, Die Linke, le parti de la gauche radicale créé en juin 2007, se prépare à accroître son influence sur la politique allemande : c'est le message délivré par ce parti lors de son premier congrès à Cottbus, près de la frontière germano-polonaise, samedi 24 et dimanche 25 mai. Au cours du week-end, la majorité des 562 délégués a décidé de lancer une campagne contre la retraite à 67 ans et a adopté une motion qui prévoit notamment un programme d'investissements de 50 milliards d'euros par an en faveur de l'éducation, la santé et le travail.
En moins d'un an, ce parti, né de la fusion entre le WASG, composé d'altermondialistes et de syndicalistes déçus par le Parti social-démocrate (SPD), et le Linkspartei-PDS, issu de l'ancien parti communiste de la RDA, a su s'établir dans le paysage politique allemand et bouleverser le jeu habituel des coalitions.
Il est devenu la troisième formation politique du pays et les sondages le créditent de 12 % à 13 % d'intentions de vote au niveau fédéral.
"IMPORTANTS CONFLITS"
En janvier et février, il a confirmé son implantation en Allemagne de l'Ouest en entrant dans les parlements régionaux de Hesse, Basse-Saxe et Hambourg. Cette percée a provoqué une importante crise au sein du SPD, qui gouverne avec les unions chrétiennes CDU-CSU, et a forcé l'ensemble des partis à se préoccuper davantage des questions de justice sociale.
Pour l'instant, ces succès lui permettent de masquer des difficultés. Un an après la fusion entre le WASG et le PDS, les membres des deux formations continuent à s'observer avec une certaine méfiance. "Deux partis se sont trouvés, mais ils ne sont pas encore unis", a souligné Gregor Gysi, coprésident du groupe parlementaire Die Linke au Bundestag.
Quant au style autoritaire et populiste d'Oskar Lafontaine, coprésident charismatique de Die Linke et ancien patron du SPD, il suscite des grincements de dents parmi les délégués de l'Est. M. Lafontaine souhaite se faire réélire en 2009 au poste de ministre-président de Sarre (qu'il a occupé de 1985 à 1998) et prendre seul la direction du parti en 2010. Aussi, même si les délégués ont chaudement applaudi son discours aux accents marxistes samedi, ils lui ont lancé un avertissement en lui octroyant seulement 78,5 % des voix, soit presque 10 % de moins qu'en juin 2007. Lothar Bisky, également coprésident, a obtenu 81,3 % des voix.
Surtout, le jeune parti n'a pas encore été en mesure de présenter un programme, au-delà de grandes lignes. Craignant de faire surgir des divisions, ses dirigeants ont repoussé la rédaction d'une déclaration de principes à 2010. Die Linke recouvre une multitude de courants tels que la plate-forme communiste, le forum du socialisme démocratique, le mouvement en faveur des femmes ou antifasciste. "La question de la privatisation ou des missions de paix à l'étranger risquent de donner lieu à d'importants conflits", prophétise Tobias Pochanke, un jeune délégué du Saxe-Anhalt.
Cécile Calla