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Selon un sondage de «Libération», Jospin est l'homme qui incarne le mieux la gauche. Suivent Laguiller, Delanoë, Mamère, Besancenot.
Lionel, Arlette, Olivier et les autres....
Par Paul QUINIO
vendredi 26 août 2005 (Liberation - 06:00)
Arlette Laguiller et Olivier Besancenot, stars politiques de l'été. Les deux leaders d'extrême gauche figurent en tout cas à la deuxième et à la cinquième place des personnalités qui incarnent le mieux les valeurs de gauche dans le sondage Louis-Harris-Yahoo-Libération (1). Réalisée avant la salve des universités d'été de ce week-end (le Parti socialiste à partir de demain à La Rochelle, les Verts à Grenoble, la LCR à Port-Leucate, Attac à Poitiers, le MRC à Perpignan), cette enquête semble confirmer que la victoire du non au référendum du 29 mai sur la Constitution européenne a laissé des traces dans l'électorat de gauche.
Eléphants agités. Certes, l'ex-Premier ministre socialiste Lionel Jospin, qui devrait participer samedi comme l'an dernier au traditionnel dîner militant de La Rochelle, arrive largement en tête de notre sondage : 39,1 % des sympathisants de gauche interrogés estiment qu'il représente le mieux les valeurs de gauche. Il écrase tous les éléphants socialistes en suractivité estivale. Mais derrière l'ancien candidat du PS à l'Elysée en 2002, l'égérie de Lutte ouvrière (LO) Arlette Laguiller (21,8 %) devance le maire PS de Paris Bertrand Delanoë (20,9 %) et le député Vert Noël Mamère (20,2 %). Déjà entré à la mi-août dans le top 50 du Journal du dimanche des personnalités préférées des Français, Olivier Besancenot arrive, lui, en cinquième position (20,1 %), cinq points devant l'ex-numéro 2 du PS Laurent Fabius et la patronne du PCF Marie-George Buffet. Dominique Strauss-Kahn et François Hollande étant relégués aux 9e et 10e places avec environ 12 %.
Plus inquiétant encore pour le premier secrétaire du PS, les sympathisants socialistes placent Hollande derrière le postier de Neuilly : 19 % considèrent que Besancenot incarne les valeurs de gauche, contre 15 % à Hollande. Là encore, heureusement que Jospin est là : il est plébiscité par les sympathisants du PS avec 57 %, loin devant Delanoë (24 %) et Fabius (21 %).
Selon François Miquet-Marty, directeur de l'Institut Louis-Harris, «ces hiérarchies inattendues» reposent sur deux facteurs. Le premier devrait faire réfléchir les dirigeants socialistes qui s'apprêtent à s'étriper à La Rochelle : c'est «la distance par rapport aux rivalités partisanes». Les sympathisants de gauche n'ont pas apprécié le festival de petites phrases échangées cet été. C'est ce qui explique, selon Miquet-Marty, la coexistence surprenante de Jospin, Laguiller, Delanoë, Mamère et Besancenot dans le quinté de tête. Il faut y ajouter, concernant Arlette Laguiller, la traditionnelle prime à la «popularité de témoignage» dont elle bénéficie dans l'électorat de gauche. Un dirigeant socialiste parle d'une «identification sociologique» à l'ancienne salariée du Crédit Lyonnais, dont bénéficierait aussi désormais le porte-parole de la LCR.
Stratégie. «Le second facteur», selon Louis-Harris, est «une nette radicalisation» des sympathisants de gauche, socialistes compris. Une sorte de prolongement du non au traité constitutionnel qui donnerait raison à Fabius dans sa stratégie de conquête du pouvoir. S'il reste largement devancé par son éternel rival Jospin, sa prise de position contre la Constitution et son compagnonnage pendant la campagne référendaire avec José Bové permettent à l'ex-numéro 2 du PS de mieux incarner les valeurs de gauche que DSK ou Hollande. Un acquis qu'il entend capitaliser en se rendant, en septembre, à la Fête de l'Huma. Il y croisera peut-être, outre Buffet, Besancenot.
L'automne sera-t-il révolutionnaire pour la gauche ? Dans un entretien au Nouvel Observateur de cette semaine, Hollande reconnaît qu'il est urgent d'«offrir au plus vite un débouché politique à la colère qui monte» contre l'action du gouvernement. Sur la définition de ce débouché, l'enquête Louis-Harris montre que les sympathisants de gauche ne sont pas divisés en deux familles irréconciliables. Qu'ils soient favorables à Fabius, Emmanuelli, Montebourg ou a Jospin, DSK, Hollande, ils assignent aux dirigeants les mêmes priorités : lutte contre le chômage puis contre les délocalisations, réduction des inégalités et baisse des impôts. Même la construction européenne n'est pas une priorité clivante : elle est citée comme priorité par 12 % des sympathisants de gauche pro-Fabius et par 13 % de ceux qui préfèrent Jospin. Les rivalités de personnes pèseraient davantage que les différends idéologiques. Pour le plus grand bonheur de Laguiller et de Besancenot. Mais aussi de Jospin.
Même si les illusions électorales risquent de remonter vite (la popularité de Jospin...), prenons ce sondage pour ce qu'il est : une indication que l'électorat de gauche n'a pas la mémoire si courte que cela et qu'Arlette n'est pas "ringardisée" comme les médias le répètent complaisamment ! Elle est populaire, on le savait déjà, et les caravanes nous l'ont confirmé.
