Armée russe

[Nadia]

46 soldats russes seraient morts hors combats en une semaine
LEMONDE.FR | 15.06.05 | 14h03

La presse russe s'est alarmée, mercredi 15 juin, après la publication de chiffres alarmants par le parquet militaire faisant état de 46 décès en une semaine dans l'armée russe, hors des opérations de combat.

"La société a été choquée par le chiffre de 46 soldats morts hors des combats", écrit ainsi le journal Nezavissimaïa Gazeta, qui consacre sa "une" à l'affaire.

"Statistiques mortelles", titre même le journal officiel Rossiïskaïa Gazeta, d'habitude très consensuel. "46 soldats. C'est le nombre de soldats morts rien que sur la semaine dernière", s'étonne lui aussi le quotidien Novye Izvestia. "Un tel nombre de morts en temps de paix peut être qualifié sans exagération de catastrophique", relève-t-il, à l'unisson d'une presse russe commentant largement ces chiffres.

BIZUTAGES VIOLENTS ET NOMBREUX SUICIDES

La radio Echo de Moscou s'est, elle aussi, largement fait le porte-voix de cette information, alors que les autorités passent généralement sous silence les morts dans l'armée, notamment en Tchétchénie. Les soldats tués quotidiennement en Tchétchénie par des rebelles ou lors de l'explosion d'une mine sont considérés comme "morts au combat" et ne sont pas pris en compte dans ce décompte des morts "hors des combats".

Le parquet militaire, après avoir publié mardi ces données, devait se réunir, mercredi, pour étudier les raisons d'un tel nombre de décès, si loin du champ d'honneur.

La presse évoque, quant à elle, la pratique du bizutage violent, dénoncée dans un récent rapport par l'ONG Human Rights Watch, qui a fait scandale en Russie. Les nombreux suicides parmi les jeunes recrues (il y a 8 suicidés sur les 46 morts) et la négligence des officiers sont également pointés du doigt.

De nombreux quotidiens, s'interrogeant sur l'opportunité de la publication de ces chiffres, évoquent également une piste politique. Le journal Izvestia y voit ainsi la démonstration de la "bataille à distance entre le ministère de la défense et le parquet militaire" après des piques lancées début juin par le ministre de la défense, Sergueï Ivanov, contre le parquet.

AUCUN COMMENTAIRE

Le quotidien Nezavissimaïa Gazeta (NG) va jusqu'à y voir une "attaque sans précédent" contre "le ministre de la défense et possible prétendant à la présidence" en 2008.

"Cela témoigne d'une bonne coordination des adversaires d'un des principaux candidats potentiels à la présidentielle de 2008", ajoute le journal, évoquant une lutte entre les différentes chapelles issues des "structures de force" (services spéciaux, armée et police) dans l'entourage de Vladimir Poutine.

Toujours selon NG, M. Ivanov serait le "favori" du président actuel pour prendre sa succession. "Ils donnent à comprendre à Poutine qu'Ivanov est une figure faible et qu'il ne peut être son successeur", note ainsi Alexeï Makarkine, président du Centre de technologies politiques, parmi les experts cités par le journal.

"Mais le problème d'Ivanov, selon Makarkine, est que les accusations du parquet ne sont pas seulement une intrigue fondée sur des insinuations, mais un constat de problèmes réels dans l'armée", ajoute le journal. Le ministère de la défense n'a fait aucun commentaire sur la publication de ces chiffres.


Avec AFP

[gerard_wegan]

Nadia, quelques questions juste pour info... au cas où tu saurais : qu'en est-il aujourd'hui de l'armée russe ? Reste-t-elle une armée de conscription (c'était encore le cas vers la fin de l'URSS) ou est-elle devenue une armée de métier ? Existe-t-il toujours cette pratique qui permettait à beaucoup d'étudiants -- contrairement aux milieux plus populaires -- d'éviter le pire (le statut de trouffion de base avec, déjà, les pratiques que rapporte l'article...) en suivant un cursus d'élève-officier ?

[Pascal]

qu'en est-il aujourd'hui de l'armée russe ? Reste-t-elle une armée de conscription (c'était encore le cas vers la fin de l'URSS) ou est-elle devenue une armée de métier ? Existe-t-il toujours cette pratique qui permettait à beaucoup d'étudiants -- contrairement aux milieux plus populaires -- d'éviter le pire (le statut de trouffion de base avec, déjà, les pratiques que rapporte l'article...) en suivant un cursus d'élève-officier ?

Je ne m'appelle pas Nadia, mais je peux répondre à la première partie de la question (Nadia corrigera ou complètera si je dis des conneries) :

L'armée russe est une armée de conscription, la durée du service y est de deux ans. Et des appelés sont également envoyés en Tchétchénie. Même si officiellement il n'y a que des volontaires, il est assez fréquent que des gamins (qui ne l'ont jamais demandé) partent pour le Caucase et se retrouvent en Tchéchténie.

Pour ta deuxième question, je ne peux pas y répondre précisément. Jusqu'à l'hivers dernier, il y avait plusieurs dispositions qui permettaient de repousser la période du service militaire (études par exemple) et même d'y échapper (jeune père de famille). Poutine a voulu réformer ces dispositions pour éviter que des jeunes évitent le service militaire, il y a eu quelques luttes sur les campus à propos de cette réforme l'hivers dernier, mais je ne connais pas le résultat final.

De toute façon, au delà des dispositions légales, les gosses de riches arrivent bien sûr, contre quelques billets, à se faire plus facilement exemptés que les gamins des milieux populaires.

[gerard_wegan]

Merci pour les précisions.

[Nadia]

Pareil que Pascal. A priori, les dispositions permettant de repousser, voire d'exemption sont maintenues, mais Poutine s'est plaint qu'il n'y avait pas eu assez d'appelés l'année dernière et a demandé aux miliciens de faire plus de zèle. Donc, si on se setrouve enrolé illégalement (hors délai, ou malgré une exemption), on n'a plus qu'à porter plainte...


Quant au nombre de 46 morts, un ami russe m'a dit que c'était encore un mensonge de la presse capitaliste antirusse... :mellow: