samedi 9 avril 2005, 14h25
Manifestations violentes à Pékin contre le "révisionnisme" japonais PEKIN (AFP) - Plusieurs milliers de Chinois ont manifesté, parfois violemment, samedi à Pékin, s'en prenant notamment à l'ambassade du Japon, pour protester contre la publication au Japon de manuels scolaires minimisant la colonisation et les atrocités nippones commises en Chine.
Dans une première réaction officielle samedi soir, le gouvernement japonais a qualifié les incidents, qui ont visé son ambassade, mais aussi la résidence de l'ambassadeur et un restaurant nippon, d'"extrêmement regrettables".
Partie dans la matinée du quartier universitaire, cette manifestation appelée via l'Internet a de fait été autorisée par le gouvernement communiste qui tolère pourtant rarement les protestations populaires.
Chantant l'hymne national et scandant des slogans comme "A bas le Japon!" et "Boycottez les produits japonais!", dix mille personnes, selon la police, vingt mille, selon les organisateurs, ont marché entre l'Université de Pékin et la représentation nippone, située une quinzaine de kilomètres plus loin.
Les manifestants, qui portaient des banderoles anti-japonaises ou brandissaient des drapeaux chinois, entendaient dénoncer le "révisionnisme" du Japon, accusé de minimiser les atrocités perpétrées lors de sa colonisation d'une partie de l'Asie dans les années 30.
"C'est un rassemblement patriotique. Si vous êtes un patriote, alors vous devez vous opposer au Japon", estimait Zhang Daili, ingénieur récemment diplômé.
"Le Japon a oublié l'histoire de son invasion brutale et a offensé la Chine", accusait Xu Lian, employé de société, assurant que le mouvement allait se poursuivre jusqu'au mois d'août et le soixantième anniversaire de la fin de la guerre avec le Japon.
La manifestation de samedi s'est déroulée quatre jours après la publication au Japon de manuels scolaires qui n'emploient pas le mot "invasion" pour évoquer la colonisation nippone et qualifient seulement d'"incident" le massacre de Nankin, au cours duquel l'armée japonaise a tué 300.000 soldats et civils chinois en 1937.
Cette nouvelle tension entre le Japon et la Chine, aux relations toujours difficiles malgré une coopération économique croissante, intervient dans un contexte bilatéral marqué par plusieurs différends : disputes territoriales, notamment dans des zones pétrolifères, question de Taïwan ou encore celle du siège au Conseil de sécurité de l'ONU réclamé par Tokyo.
"Le Japon n'a pas le droit d'avoir un siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU. Ce serait une insulte au monde et aux Nations unies si un pays qui refuse de reconnaître son histoire se voyait offrir un siège permanent", selon Han Ming, un autre manifestant.
Démarrée dans le calme, la manifestation a quelque peu dégénéré avant une dispersion bien organisée, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Des canettes, des bouteilles et des oeufs ont été jetés sur la mission diplomatique japonaise, la police tentant de son côté de contenir une foule devenant de plus en plus excitée.
La résidence de l'ambassadeur du Japon, dans un autre quartier de la ville, a également été attaquée à coups de pierres.
Non loin de là, un peu plus tôt, des manifestants avaient lancé des pierres contre la vitrine d'un restaurant japonais et des employés, chinois, avaient été insultés.
Les vitres du restaurant "Gassan" ont volé en éclats sous les vivats de la foule et les regards de la police qui n'est pas intervenue non plus pour tenter de dissuader les manifestants de passer à l'acte devant la résidence de l'ambassadeur.
"Ils ont cassé des vitres à l'ambassade mais personne n'a été blessé d'après ce que je sais, personne non plus à la résidence", a déclaré à l'AFP le porte-parole de l'ambassade, Keiji Ide, ajoutant que son pays cherchait à clarifier auprès du gouvernement chinois si cette manifestation avait été autorisée.
"
En Chine, normalement, si vous n'avez pas d'autorisation, on ne vous laisse pas manifester", a dit M. Ide.
