("Le Monde.fr" a écrit :La campagne électorale de l'après-Arafat fait étape à Lyon
LE MONDE | 07.12.04 | 14h36
Un an après l'"Initiative de Genève", ses promoteurs soutiennent Mahmoud Abbas.
Lyon de notre envoyé spécial
Invités par le maire de Lyon, le socialiste Gérard Collomb, une quarantaine de maires palestiniens et israéliens se sont retrouvés, lundi 6 décembre, pour animer, ensemble, des ateliers de réflexion au Palais des congrès de Lyon. Voulue par M. Collomb, cette "conférence internationale des maires pour la paix au Proche-Orient" marque le premier anniversaire de l'"Initiative de Genève", un plan de paix non officiel mis au point entre Palestiniens et Israéliens.
Le Palestinien Yasser Abed Rabbo, membre du comité exécutif de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), et l'Israélien Yossi Beilin, président du parti Yahad (6 députés à la Knesset), les deux principaux négociateurs de ce plan, sont les coorganisateurs, avec la ville de Lyon, de cette conférence.
Inédites, ces rencontres israélo-palestiniennes sous égide franco-européenne ont pour objectif de promouvoir la reprise de négociations pour un accord de paix et d'étudier les possibilités de coopération entre les élus des deux parties en conflit, avec l'aide de leurs homologues européens.
Mais en coulisses, Yasser Abed Rabbo et Yossi Beilin ont surtout œuvré afin de convaincre les maires de les soutenir dans leur démarche. Les deux hommes ont par ailleurs exprimé leurs vœux de voir Mahmoud Abbas, candidat du Fatah à la succession de Yasser Arafat, remporter l'élection présidentielle palestinienne prévue pour le 9 janvier.
Une élection qui semblait acquise avant l'annonce de la candidature de Marouan Barghouti.
C'est de la prison de Beersheba, où il est détenu, après avoir été condamné à la réclusion perpétuelle pour "terrorisme", que M. Barghouti s'est déclaré "candidat indépendant", quelques jours après avoir affirmé qu'il soutiendrait Mahmoud Abbas.
A Lyon, chacun à sa manière, les deux chefs de délégation mènent campagne pour Mahmoud Abbas, présenté comme "l'homme de la paix". D'une voix calme et posée, Yossi Beilin considère que, si Marouan Barghouti est élu, "cela veut dire que les Palestiniens ne veulent pas de plan de paix pour le moment". Mais il précise aussitôt qu'il est "persuadé" que M. Abbas l'emportera. "Les Palestiniens savent très bien que Sharon ne va jamais libérer Marouan Barghouti, et Mahmoud Abbas est perçu, dans le monde, comme un partenaire pour un plan de paix très immédiat : alors pourquoi iraient-ils voter contre la paix ?", dit-il.
VIVES DISCUSSIONS
Plus passionné, Yasser Abed Rabbo renchérit : "Marouan Barghouti apparaît aujourd'hui, aux yeux des Palestiniens, comme quelqu'un qui est contre l'unité du Fatah. Il a beaucoup perdu de sa popularité."Pour peu qu'on lui demande plus de précisions sur la façon dont il apprécie la soudaine impopularité du rival de son chef, Yasser Abed Rabbo s'emporte : "On a encore du mal à imaginer un leader palestinien sans ceinture d'explosifs autour de la taille ou menottes aux poignets, mais je maintiens que la manière dont Barghouti s'est présenté à l'élection, après avoir dit qu'il n'allait pas le faire, le disqualifie de façon certaine."
En marge des ateliers, dans des discussions souvent vives, les élus israéliens voulaient savoir comment la nouvelle direction du Fatah comptait gérer un "activiste" comme Marouan Barghouti et un parti "terroriste" comme le Hamas. Yasser Abed Rabbo affirme que M. Barghouti n'aura pas la légitimité populaire. Pour le Hamas, il indique à ses interlocuteurs que Mahmoud Abbas est en Syrie pour discuter avec "les vrais chefs du mouvement" et que les élections locales, avec une dose de proportionnelle, contiendront ce parti radical. "Il n'y a pas que des extrémistes dans le Hamas : on peut parler avec certains d'entre eux", précise-t-il, très vite interrompu par un maire israélien : "On ne peut pas discuter avec eux, ils ne discutent qu'avec Dieu."
Yasser Abed Rabbo, rétorque : "Vous aussi, vous avez des fous de Dieu."En pleine discussion, le téléphone cellulaire de Yasser Abed Rabbo se met à sonner : "Réponds, c'est Marouan Barghouti qui t'appelle", souffle un élu israélien. "Non, à cette heure, ça doit être le Hamas", répond un autre maire. Palestiniens et Israéliens se mettent à rire ensemble.
Tewfik Hakem
Rencontres interpalestiniennes à Damas
Le nouveau chef de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Mahmoud Abbas, en visite à Damas (Syrie), a rencontré, lundi soir 6 décembre, les dirigeants de trois organisations radicales palestiniennes. M. Abbas s'est successivement entretenu avec les dirigeants des mouvements islamistes Hamas et Djihad islamique, puis du Front populaire de libération de la Palestine-Commandement général (FPLP-CG). La délégation du Hamas était conduite par le chef de son bureau politique, Khaled Mechaal, celle du Djihad islamique par Ramadan Challah, et celle du FPLP-CG par Ahmad Jibril. Ils ont discuté des nouvelles orientations de la centrale palestinienne. M. Abbas avait pourtant annoncé que "le dialogue palestinien a commencé à l'intérieur -des territoires occupés- et se poursuivra à l'intérieur", semblant ainsi exclure toute rencontre avec les mouvements d'opposition à Damas. Avec le FPLP d'Ahmad Saadat, ces quatre organisations font partie d'un regroupement de dix formations basées à Damas, baptisé "Alliance des forces palestiniennes", qui était opposé à Yasser Arafat et aux accords d'Oslo. - (AFP.)
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 08.12.04