(Reuters a écrit :Michèle Alliot-Marie démissionne
Selon son entourage, la ministre des Affaires étrangères a remis sa lettre de démission en mains propres au chef de l'Etat français lors d'un entretien à l'Elysée à 15h30.
Elle sera remplacée au Quai d'Orsay par l'actuel ministre de la Défense Alain Juppé, ont déclaré à Reuters des sources gouvernementales concordantes.
"Depuis quelques semaines, je suis la cible d'attaques politiques puis médiatiques véhiculant, pour créer la suspicion, contre-vérités et amalgames", écrit-elle dans sa lettre, dont Reuters a obtenu copie.
"Je ne puis (...) accepter que certains utilisent cette cabale pour essayer de faire croire à un affaiblissement de la politique internationale de la France", ajoute-t-elle. "Je vous demande donc de bien vouloir accepter ma démission."
Nicolas Sarkozy devait faire à 20h00, à la télévision et à la radio, une déclaration qualifiée de "très importante" par l'Elysée sur la situation internationale et ses conséquences pour la France.
Selon un haut responsable du parti présidentiel, l'UMP, il a par ailleurs reçu dans l'après-midi à l'Elysée le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux, ce qui accrédite le scénario selon lequel ce proche du chef de l'Etat quitterait le gouvernement pour occuper d'autres fonctions à l'Elysée.
Alain Juppé, qui a déjà été ministre des Affaires étrangères et jouit d'un préjugé favorable parmi les diplomates français, aura eu à coeur d'exiger d'avoir les coudées franches.
GUÉANT À L'INTÉRIEUR ?
Cela devrait se traduire par le départ de la présidence de la République du secrétaire général de l'Elysée Claude Guéant, qui a joué un rôle important dans la définition et la conduite de la politique étrangère française depuis 2007.
Selon ce scénario, Claude Guéant remplacerait au ministère de l'Intérieur Brice Hortefeux.
Son adjoint, Xavier Musca, principal conseiller économique de Nicolas Sarkozy, semble le mieux placé pour le remplacer au secrétariat général de l'Elysée.
Si c'est le cas, il pourrait faire ses premières armes à ce poste en présentant le nouveau gouvernement.
Le président du groupe UMP au Sénat Gérard Longuet pourrait quant à lui remplacer Alain Juppé à la Défense.
Le conjoint de Michèle Alliot-Marie, Patrick Ollier, ancien président d'un groupe d'amitié France-Libye, resterait en revanche secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement.
Nicolas Sarkozy pourrait enfin être tenté de profiter de ce remaniement pour faire entrer trois centristes à des postes de secrétaire d'Etat - un mouvement qui était initialement envisagé pour le lendemain des élections cantonales de mars.
"Remettre ça dans un mois donnerait un sentiment d'instabilité avec des relents de IVe République", fait valoir un ministre sous couvert de l'anonymat.
L'intervention radiotélévisée du chef de l'Etat durera de huit à 10 minutes et sera enregistrée dans la bibliothèque du palais présidentiel un peu avant sa diffusion, précise-t-on de source proche du président de la République.
Elle portera sur la situation internationale "tellurique" actuelle, et sur ses conséquences pour la France, précise une source proche du président.
"MESSAGE CLAIR"
"Il n'est pas anodin que le chef de l'Etat intervienne maintenant, alors que la situation en Tunisie, en Egypte et en Libye a des conséquences sur la politique extérieure et intérieure de la France", souligne un conseiller.
"Il est important que le président de la République puisse donner une feuille de route et des perspectives d'évolution de la France dans un monde qui bouge énormément", ajoute-t-il. "Notre pays, qui est la cinquième puissance mondiale, doit avoir un message clair pour le monde et rassurant pour les Français."
Nicolas Sarkozy entend ainsi répondre aux préoccupations des Français vis-à-vis de l'évolution du monde, de son impact sur leur quotidien et des menaces que cela implique, notamment en matière de sécurité et d'immigration, explique ce conseiller.
Cela va bien au-delà des questions de personnes, fait-on valoir à l'Elysée, sans nier que celles-ci font partie du "contexte" dans lequel la France se débat aujourd'hui.
Au-delà de la perte de crédibilité de Michèle Alliot-Marie du fait de ses relations avec la Tunisie du président déchu Zine ben Ali, le "printemps arabe" a révélé le profond malaise qui couvait depuis longtemps dans la diplomatie française.
Un groupe de diplomates en activité ou à la retraite a ainsi dénoncé la semaine passée dans une tribune au vitriol la façon dont Nicolas Sarkozy pilote la politique étrangère française.
François Fillon, invité lundi matin par RTL, expliquera les décisions annoncées dimanche soir par le chef de l'Etat, a dit à Reuters l'entourage du Premier ministre.
Edité par Yves Clarisse