a écrit : ... Alors, si je me présente, c’est pour dire aux miens, au monde du travail, qu’il ne faut pas être dupe des marionnettes politiques qui occupent le devant de la scène et qui nous jouent la comédie du pouvoir, alors que, derrière la scène, c’est le grand patronat qui tire les ficelles, quelle que soit la couleur des marionnettes.
Et cela, personne d’autre ne le dira dans cette campagne, et surtout aucun des deux candidats dont toute la presse répète qu’ils s’affronteront au deuxième tour et que c’est l’un d’eux qui inévitablement sera le président de la République.
Que Sarkozy ne le dise pas, c’est dans la nature de la droite. Mais son adversaire désignée, Ségolène Royal, candidate du Parti socialiste, ne le dira pas plus.
Sarkozy, et la droite qu’il représente, est plus près du cœur et du porte-monnaie de la grande bourgeoisie parce qu’il se présente drapeau déployé comme son meilleur représentant. Mais Ségolène Royal est parfaitement acceptée par la bourgeoisie comme une alternative valable.
Mais même les candidats qui se veulent sur la gauche du PS ne défendent pas l’idée qu’il faut avoir le courage politique de s’en prendre au grand patronat !
Marie-George Buffet, bien qu’elle veuille regagner une partie du million et demi de votes de l’électorat du PC perdu à la suite des années Jospin et qui radicalise un peu son langage afin de se différencier un peu de Ségolène Royal, n’en souffle mot.
Certains de ses engagements, tels que les a publiés L’Humanité il y a quelques jours, sont pourtant bien tièdes. Sur le logement, si Marie-George Buffet parle de la création d’un « service public du logement et de l’habitat » et si elle propose que les loyers soient plafonnés à 20 % des revenus des ménages, elle ne dit pas qui obligera les propriétaires à louer à ces prix-là. Et, pour ce qui est de la construction des logements sociaux, elle parle, comme Ségolène Royal, de 600.000 logements en cinq ans.
Même tiédeur pour le Smic. Oh, elle s’engage à porter le Smic à 1500 euros dès l’été 2007, mais elle parle elle aussi de 1500 euros brut, en ajoutant seulement « pour aller rapidement à 1500 euros net ».
Sur ces questions, il faut lire ces engagements avec des yeux très attentifs pour y déceler une différence avec Ségolène Royal.
Pour le reste, pour les salaires supérieurs au Smic, pour ce qu’elle appelle la « sécurisation de l’emploi », elle renvoie à des « conférences nationales », c’est-à-dire à des négociations avec le patronat, qui auraient de quoi satisfaire les dirigeants syndicaux mais certainement pas les salariés.
Oh, il y a quand même quelques engagements plus nets comme l’abrogation de la loi Fillon et des décrets Balladur et le rétablissement du droit à la retraite à 60 ans à taux plein avec 37 annuités et demie de cotisation !
Mais, en réalité, ses promesses n’engagent qu’elle car elle a beau se présenter dans sa campagne comme la représentante d’une « gauche radicale de gouvernement », le seul gouvernement dont elle pourrait faire partie, le cas échéant, sera un gouvernement socialiste. Un tel gouvernement sera sous l’autorité de Ségolène Royal. Et Marie-George Buffet ne pourra que se taire ou démissionner, et elle ne fera pas plus que ce qu’elle a fait pendant les cinq ans où elle a été ministre du gouvernement Jospin.
Voter pour Marie-George Buffet, ce n’est que voter par procuration pour Ségolène Royal et la politique de cette dernière.
José Bové, qui vient d’annoncer sa candidature à l’élection présidentielle, ne dira pas, non plus, ce que je dis.
Ce n’est pas moi qui reprocherais à José Bové de se présenter. Et ce n’est pas moi non plus qui voudrait trancher qui, de lui ou de Marie-George Buffet, représente le mieux le conglomérat fumeux qui se revendique de « l’antilibéralisme », étiquette dont je ne me suis jamais revendiquée. Je ne me sens pas du tout en concurrence avec José Bové car mon combat ne se situe pas sur le même terrain. Je combats ceux qui possèdent l’économie. Ce sont eux qui sont responsables de l’anarchie du marché capitaliste. C’est ce que je serai la seule à dire.
* * * *
Rien que pour revenir en arrière sur la régression sociale des dernières années, il faudra que les travailleurs imposent un certain nombre de revendications. (...)
Voilà pourquoi, même pour leur imposer les modestes objectifs que je viens d’énumérer, il faut que les travailleurs, que les consommateurs, que la population concernée, puissent contrôler le fonctionnement des entreprises, surtout leurs finances et leurs stratégies.
Il faut imposer que la population ait un accès direct à tout ce que les conseils d’administration envisagent pour l’avenir de leurs entreprises. Ce n’est pas une affaire privée car l’activité d’une entreprise et même les dividendes de ses actionnaires résultent de l’activité de l’ensemble de ses travailleurs. Et ce qu’une entreprise devient concerne toute la région où elle est implantée et toute la population.
Sans s’en prendre à ceux qui possèdent et dirigent à leur profit toute l’économie, on ne peut pas empêcher les licenciements, on ne peut pas empêcher les délocalisations, on ne peut pas diminuer, voire supprimer, le chômage,. Sans cela, on ne peut pas résoudre les problèmes de la jeunesse. On ne peut disposer de crèches puis de maternelles et d’écoles primaires en nombre suffisant et, surtout, d’enseignants en nombre voulu pour donner un enseignement adapté à chacun.
Je sais que nombreux sont dans les classes populaires celles et ceux qui veulent avant tout que Sarkozy ne soit pas élu. Je sais que ce qui leur apparaît le plus urgent, c’est de se débarrasser du pouvoir de la droite.
Et moi-même, je peux affirmer que si, après le deuxième tour, Sarkozy était obligé de remballer sa morgue et sa hargne contre les classes populaires, cela me ferait bien plaisir.
Mais ce plaisir ne suffit pas. Ce n’est pas avec cela qu’on pourra payer son loyer, assurer l’éducation des enfants, se soigner ou trouver un travail ou un logement quand on n’en a pas.
Il ne suffit pas de chasser les hommes de droite de la présidence de la République ou du gouvernement pour que la politique de droite en soit chassée pour autant. Cette politique de droite pourra être reprise à son compte aussi bien par un gouvernement de gauche, pour la bonne raison que c’est la politique exigée par le grand patronat. Depuis trente ans que la gauche et la droite se relaient à la tête de l’État, seules changent les équipes qui dirigent, pas la politique qu’elles mènent. Une politique destinée à réduire, toujours plus, la part des salariés pour accroître celle des possesseurs de capitaux.
Je me présente dans cette campagne pour que les travailleurs, c’est-à-dire les ouvriers, les employés, les enseignants, les techniciens, les chômeurs, les retraités et bien d’autres, puissent dire qu’ils ne se laisseront pas tromper par la droite, bien sûr, mais pas plus par ceux qui se disent de gauche. Il faut que les travailleurs puissent affirmer par leurs votes qu’ils ne se font aucune illusion sur les dirigeants politiques, qu’ils n’en attendent pas de solution à leurs véritables problèmes.
Je sais, bien sûr, que je ne peux pas être élue. Ne peuvent être élus dans le cadre des lois électorales que ceux qui sont appuyés par le grand capital, son argent, ses appareils politiques, son influence sur les chaînes de télévision.
Une candidate qui combat leur système n’a qu’une seule chance d’être élue : être portée par un très puissant mouvement social.
Mais, même élue dans ce genre de circonstances exceptionnelles, je ne pourrais rien faire sans que le mouvement social se prolonge bien au-delà des élections et puisse imposer au patronat les décisions qui pourraient, qui devraient être prises contre leurs intérêts privés afin de sauver les intérêts de la collectivité.
Il faut que le mouvement social soit assez puissant pour briser la résistance du patronat lui-même.
Nous ne sommes pas dans cette situation aujourd’hui. Mais je me présente pour indiquer au monde du travail cette voie, la seule pour renverser le mur de l’argent et tous ceux qui le protègent.
Plus il y aura de votes contestataires d’extrême gauche, plus cela redonnera confiance à tous ceux qui en ont assez de recevoir des coups et qui ont envie de les rendre.
Aidez-nous à faire en sorte que nombreux soient ceux qui, dans les classes populaires, en votant pour ma candidature, montrent qu’ils partagent les idées que je viens de défendre. Qu’ils montrent que, s’ils rejettent la droite, porte-parole et serviteur attitré du grand patronat, ils ne font pas pour autant confiance à la gauche qui a toujours trahi ceux qui l’ont élue par refus de toucher au grand patronat et à ses intérêts.
Et, surtout, il faut que les votes en faveur de l’extrême gauche qui conteste l’ordre social soient suffisamment nombreux pour que le grand patronat et ses serviteurs s’inquiètent de l’évolution de l’état d’esprit des classes populaires et qu’ils aient des raisons d’y entrevoir le mouvement social indispensable pour changer l’avenir, notre avenir à tous !