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Un budget pour la Sécu controversé en conseil des ministres
Reuters 12.10.05 | 07h06
Par Dominique Rodriguez
PARIS (Reuters) - Le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, présente en conseil des ministres le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2006, un budget controversé dans ses objectifs comme dans ses moyens.
Le débat parlementaire, à partir du 25 octobre à l'Assemblée nationale et du 14 novembre au Sénat, s'annonce houleux.
Le porte-parole du groupe UDF pour les questions de santé, Jean-Luc Préel, dénonce "une approche purement comptable de la politique de santé" et "le risque d'une médecine à deux vitesses".
Par des "mesures correctrices" supplémentaires, un an après la mise en oeuvre de la réforme de l'assurance-maladie, le ministre de la Santé veut ramener le déficit du régime général à 8,9 milliards d'euros en 2006, contre 11,5 milliards sinon, selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale.
Pour la branche maladie, le gouvernement entend réduire le déficit à 6,1 milliards en 2006, contre 8,3 milliards attendus cette année. Sur la période 2007-2009, il prévoit une évolution des dépenses d'assurance-maladie de 2,2% en moyenne annuelle pour une croissance du PIB projetée à 2,6%.
Le projet a été rejeté par trois des quatre caisses de la Sécurité sociale, consultées pour avis (maladie, vieillesse et trésorerie). Elles ont déploré que le financement soit renvoyé vers les assurés et les assurances complémentaires.
La quatrième caisse, celle des allocations familiales, a rendu un "avis partagé" pour tenir compte d'un nouveau congé parental plus court mais mieux rémunéré au troisième enfant.
Au sein des instances de la "Sécu", les syndicats ont dit leur crainte de voir émerger une "conception moins solidaire", voire un "démantèlement de la protection sociale".
Le patronat n'a guère été plus conciliant. Il s'est au mieux abstenu, jugeant la rigueur budgétaire insuffisante.
La Mutualité française, qui fédère 98% des mutuelles, a pour sa part exprimé son hostilité à la mesure la plus impopulaire du projet, l'instauration d'un forfait de 18 euros à la charge des patients pour les actes médicaux supérieurs à 91 euros, qui sera directement répercuté sur les complémentaires.
MATIGNON "SAISI DU DOSSIER"
Au vu du PLFSS, les mutuelles devront en outre s'acquitter de 85 millions supplémentaires en raison du relèvement de 14 à 15 euros du forfait hospitalier et de 150 millions au titre de la hausse de la taxe finançant la CMU (couverture maladie universelle) pour les plus démunis.
Le ministre a évalué le transfert de charges à 100 millions d'euros, les mutuelles devant par ailleurs économiser plus de 300 millions sur le déremboursement total de 156 médicaments jugés peu efficaces et tirer parti des baisses de prix prévues pour certains autres produits.
La branche santé des AGF estime que les assurances complémentaires seront amenées à augmenter leurs tarifs de 1,5 à deux points en moyenne.
Le gouvernement s'efforce de calmer le jeu concernant plusieurs autres mesures du PLFSS 2006.
Selon la Caisse nationale d'assurance-vieillesse (Cnav), Matignon s'est "saisi du dossier" de la répartition de la hausse de 0,2 point de cotisation pour les retraites, qui suscite un tollé puisque actuellement 0,15 point doit être supporté par les salariés et 0,05 point par les employeurs.
La Cnav s'insurge aussi contre une opération comptable qui vise à réduire la dette du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) à son égard, estimée à 3,7 milliards d'euros cumulés en 2005.
Le PLFSS prévoit d'affecter les excédents 2004 de la Cnav au FSV et non plus au Fonds de réserve des retraites (FRR).
Le FRR, créé pour amortir le déséquilibre financier des régimes de retraite prévu entre 2020 et 2050, doit en principe être abondé à hauteur de 150 milliards d'euros d'ici 2020. Ses réserves atteindront environ 20 milliards à la fin 2005.
Le PLFSS prévoit par ailleurs de supprimer une clause d'exception qui permettait d'appliquer aux enfants nés depuis 2001 la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje), créée en 2004 et plus avantageuse que les dispositifs précédents. La branche famille économiserait ainsi 180 millions en 2007.
De même, les cadres supérieurs verront en 2006 divisé par deux le plafond (182.000 euros) sous lequel les indemnités de licenciement et départ négocié sont exonérées de cotisations.
Le PLFSS revient aussi sur le dispositif de retraite des médecins conventionnés, partiellement pris en charge par l'assurance-maladie en échange de l'encadrement des tarifs. Une nouvelle cotisation d'ajustement serait, selon le syndicat de généralistes MG-France, "de nature à effondrer toute confiance".