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Message Publié : 27 Avr 2005, 22:33
par Front Unique
Hypocrisie européenne

Vingt-quatre mille emplois devraient (source syndicale) disparaître en France en 2005 dans le secteur du textile, en conséquence de la levée des quotas d’exportation au 1er janvier dernier. Les protestations des ministres français et du président du patronat du textile, M. Sarkozy frère, l’annonce par l’Union européenne qu’elle envisageait d’utiliser certains moyens pour contraindre à des limitations des exportations chinoises ? Beaucoup de bruit pour rien. Il s’agit de « raisons politiques comme le référendum sur la Constitution européenne en France le 29 mai » (AFP). Le Parisien y voit « un geste de Bruxelles à cinq semaines du référendum ».

Un « geste », des « raisons politiques », des mots… pour tenter de limiter l’effet désastreux, à quelques semaines du référendum, d’un démantèlement organisé. Mais les 24 000 emplois, eux, que vont-ils devenir ?

Cela fait 30 ans que la date du 1er janvier 2005 a été fixée pour la levée des quotas d’exportation dans le textile. Rarement, catastrophe avait été annoncée si longtemps à l’avance.

C’est un fait : la marche à la « Constitution » européenne a permis et permet de faciliter dans tous les domaines la destruction des emplois !



D’abord, on pourra s’étonner que le gouvernement français ne prenne aucune initiative directe… autre que de demander à Bruxelles de bien vouloir faire un geste. Rien d’étonnant à cela : c’est une anticipation de l’article I-12 de la « Constitution » européenne, qui définit les « domaines de compétences exclusives » de l’Union européenne, c’est-à-dire ceux où les Etats ne peuvent plus intervenir et doivent s’en remettre à elle. Parmi ces domaines : « l’établissement des règles de concurrence, la politique commerciale commune, etc. » (lire page 4 de ce journal).



Quant aux mécanismes qui permettent la destruction massive des emplois dans le textile en Europe, et singulièrement en France, ils procèdent tous de la « Constitution » européenne elle-même (1). Peter Mandelson, commissaire européen au Commerce, l’a dit clairement au début de ce mois : « Les lignes directrices de sauvegarde annoncées par la Commission européenne cette semaine garantiront à la Chine une généreuse expansion de ses exportations en Europe (…). L’industrie textile européenne a procédé à des ajustements et devra continuer à le faire. La part du marché chinoise va croître. »



Qui osera dire que l’Union européenne a pour vocation de défendre les industries et les emplois des pays qui la composent ! A propos de la Chine, Mandelson espère qu’elle ne va pas « accorder des avantages déloyaux aux exportateurs chinois », en particulier qu’elle ne va pas « permettre des niveaux de salaires trop en dessous de ceux qui sont négociés par les syndicats libres dans d’autres pays en développement ». Mais Mandelson de préciser : « Il y a des impératifs également pour l’Europe (…). Cela implique une impulsion vers des marchés du travail plus flexibles au sein de l’Union européenne. » (2)



Telle est la « philosophie » de l’Union européenne et de sa « Constitution » : que le « coût du travail », en France et en Europe, soit systématiquement rabaissé en direction des « normes » chinoises.



Remarquons au passage que la précaution de langage de Mandelson concernant les conditions de travail en Chine sont pure hypocrisie. On apprend cette semaine (3) que 17 000 travailleurs de l’usine Uniden Corporation, à Shenzhen, dans le sud de la Chine, ont fait grève pour obtenir le droit de se syndiquer et une amélioration des conditions de travail. D’après le journal chinois en langue anglaise South China Morning Post, les salariés de l’entreprise travaillent 11 heures par jour pour moins de 50 euros par mois !



Quant au Bangladesh, qui fait partie de ces pays « en voie de développement » sur lesquels, d’après Mandelson, la Chine devrait aligner ses « normes sociales »… c’est exactement l’inverse qui se passe. Pour faire face à la concurrence chinoise dans le textile, le gouvernement du Bangladesh a instauré des zones spéciales de production pour l’exportation (EPZ), dans lesquelles les syndicats sont interdits (4) !



Qui peut le nier ? La marche à la « Constitution » européenne, c’est à la fois la marche à la destruction sans entrave des emplois et des garanties collectives, et, du point de vue du droit syndical, l’alignement vers les « conditions chinoises », et non l’inverse.



Qui, au nom du droit au travail et du droit à l’organisation syndicale, en tirera une autre conclusion que : non, trois fois non à cette « Constitution » ?



Daniel Gluckstein

Éditorial IO 689, semaine du 28 avril au 4 mai 2005

(1) En particulier des articles I-3-2 (« marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée »), III-144 (« Les restrictions à la libre prestation des services à l’intérieur de l’Union sont interdites »), III-279 (« Leur action (à l’Union et aux Etats membres) vise à accélérer l’adaptation de l’industrie aux changements structurels »), III-167 (« sont incompatibles avec le marché intérieur les aides accordées par les Etats membres ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions »).

(2) International Herald Tribune, 9 avril 2005.

(3) The Japan Times, 22 avril 2005.

(4) Communiqué de la Fédération des syndicats des travailleurs du Bangladesh,

15 avril 2005.

Message Publié : 27 Avr 2005, 23:06
par lenzo
a écrit :Cela fait 30 ans que la date du 1er janvier 2005 a été fixée pour la levée des quotas d’exportation dans le textile. Rarement, catastrophe avait été annoncée si longtemps à l’avance.

C’est un fait : la marche à la « Constitution » européenne a permis et permet de faciliter dans tous les domaines la destruction des emplois !

Donc la levée des quotas était annoncée depuis 30 ans, pas la constitution… mais c’est la faute à la constitution. Va s’y comprendre !!!

Avec cet édito les frontières du nationalisme du PT se déplacent de la nation française vers les frontières de l’Europe. Mais le raisonnement calamiteux reste.

Message Publié : 28 Avr 2005, 10:59
par guévariste
..."La marche à la constitution" est-il bien dit, à moins que certains ne sachent pas lire !
La Constitution etant l'aboutissement d'un processus de destruction systèmatique, elle en est aussi la synthèse, dire non à la constitution c'est dire non à tout le processus de la construction européenne bâtit sur la dislocation des nations-cadres historique de la lutte des classes-, et sur la destruction de tous les acquis ouvriers issus de la lutte des classes par le démantèlement des forces productives en Europe !

Message Publié : 28 Avr 2005, 11:54
par guévariste
Toutes les économies Européennes se sont tertiarisées, et la CEE a tout mis en oeuvre pour favoriser le démantèlement des mines et industries et favoriser le commerce, elle a vider l'Europe de ses forces productives ! :mellow:

Message Publié : 28 Avr 2005, 12:46
par titi
(guévariste @ jeudi 28 avril 2005 à 11:59 a écrit : non à tout le processus de la construction européenne bâtit sur la dislocation des nations-cadres historique de la lutte des classes
je n'ai qu'une réponse à cela :
prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

Message Publié : 28 Avr 2005, 12:49
par guévariste
Ben oui, évidemment, ce n'est pas incompatible ! ;)

Message Publié : 28 Avr 2005, 14:19
par guévariste
Combien de mines en 1957 ? Combien aujourd'hui ?
Combien de production d'acier en 1957, combien aujourd'hui ?
Les résultats de la CECA ?
Combien d'usines ont fermées ? Combien d'emplois ont été perdus dans l'industrie depuis 1975 ?
Il s'agit des secteurs les plus touchés , et dans lesquels le plus d'emplois furent supprimés, et tout cela sous l'égide et avec la bénédiction de l'Union européenne !