a écrit :Les syndicats tentés d'embrayer sur le non de la CGT
De nombreuses organisations eurosceptiques, pour le bonheur des opposants PS.
Par Paul QUINIO et François WENZ-DUMAS
vendredi 11 février 2005 (Liberation - 06:00)
e non de la CGT va-t-il faire tache d'huile ? La semaine dernière, la centrale syndicale dirigée par Bernard Thibault, s'est prononcée contre le traité constitutionnel européen. A quelques mois du référendum promis par Jacques Chirac, cette décision constitue un coup dur pour les partisans du traité, Parti socialiste en tête (lire ci-dessous). Il le sera d'autant plus qu'il pourrait encourager les partisans du non au sein des autres organisations syndicales à s'agiter.
A la FSU, première fédération représentative dans la fonction publique d'Etat, en particulier dans l'Education nationale, le non de la CGT a levé un tabou. Très critique sur le projet de Constitution européenne, la FSU hésitait jusqu'à maintenant à donner des consignes de vote. «La question fait débat», reconnaît désormais son secrétaire général, Gérard Aschieri. La position qu'adoptera le Snes, place forte de la FSU parmi les enseignants du second degré pourrait bien emporter la décision. Son congrès se tiendra du 4 au 8 avril au Mans (Sarthe), en pleine campagne du referendum.
Quelques semaines plus tôt, c'est l'Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) qui sera en congrès. Membre de la Confédération européenne des syndicats (CES), l'Unsa a, en septembre 2004, pris position en faveur du traité constitutionnel. Mais les débats préparatoires au congrès font remonter le non à la surface. Alain Olive, secrétaire général de l'Unsa, le reconnaît : «Entre le climat social et l'épisode Bolkestein, il y a en ce moment une cristallisation dont le traité européen peut faire les frais. Cette question constituera un point dur de notre congrès. Le oui ne sera pas une formalité.» Il y a une quinzaine de jours, dans les Pyrénées-Atlantiques, le rapport d'activité du syndicat a ainsi été adopté à 60 % ; «les 40 % contre étant liés à une opposition au traité», confie un dirigeant de l'Unsa. Alain Olive fait état de «sensibilités régionales». Elles sont manifestement encouragées par les militants socialistes membres de l'Unsa, organisation partiellement héritière de l'ancienne Fédération de l'Education nationale (la FEN). A l'époque de la scission syndicale qui a donné naissance à la FSU, la FEN était dirigée par... des fabiusiens. La plupart sont aujourd'hui en retraite, ou se sont désolidarisés, comme Jean-Paul Roux, du non de Fabius. Mais le député de Seine-Maritime dispose encore des relais pour alimenter discrètement le non. Comme les deux leaders du courant Nouveau Monde, Jean-Luc Mélenchon et Henri Emmanuelli. Alain Olive ne perçoit pas encore de «volonté de déstabiliser l'Unsa. Mais les militants socialistes qui sont farouchement opposés au traité le font savoir».
A la CGC, qui dès cet automne s'était déclarée «globalement favorable» au traité constitutionnel, c'est la directive Bolkestein qui commence à susciter le doute. Dans un éditorial du mensuel Encadrement magazine à paraître la semaine prochaine, son président, Jean-Luc Cazettes, écrit qu'il ne saurait «se satisfaire d'une simple suspension de la directive Bolkestein. La CFE-CGC exige (...) le retrait de la règle du pays d'origine. Si tel n'était pas le cas (...) nous serions amenés à nous engager clairement dans une campagne pour le non».
C'est finalement à la CFDT et à FO que le débat interne à la CGT aura le moins d'incidence. A la CFDT, le oui suscite d'autant moins d'opposition que les partisans du non ont quitté le syndicat après l'affaire des retraites, notamment pour rejoindre... la CGT. Quant à Force ouvrière, le refus de donner des consignes de vote est un dogme auquel il n'a jamais été dérogé, pas même contre Le Pen en 2002.