J'ai quand même l'impression qu'à LO, côté féminisme, on n'est pas les plus mal placés, au sein de l'extrême-gauche. Je ne parle pas que des discours, mais de la pratique.
On a eu longtemps comme porte-parole une femme travailleuse (employée de banque), Arlette Laguiller.
On a aujourd'hui une femme travailleuse (enseignante), Nathalie Arthaud.
Au moment de choisir qui succéderait à Arlette pour ce poste, on n'avait sélectionné que des femmes. Dont, au passage, une d'origine maghrébine, Farida Megdoud (enseignante), d'Orléans. Et aussi Claire Rocher (infirmière), de Dijon. Et Valérie Hamon (conductrice SNCF), de Rennes. Et Sandra Torremocha (enseignante), de Toulouse. Et Isabelle Bonnet (enseignante), de Toulouse. Et Marie Savre (formatrice), de Clermont-Ferrand. Et Nathalie, de Lyon à l'époque.
Cela nous ramène au fond du sujet.
Aujourd'hui, il est plus facile de gagner aux idées révolutionnaires des hommes que des femmes. C'est une réalité sociale. Dans toutes les organisations d'extrême-gauche, les hommes sont majoritaires. Pas énormément en ce qui nous concerne LO, mais quand même chez nous aussi, et ça ne vient pas de pratiques discriminatoires, évidemment.
Aujourd'hui, il est plus facile de gagner aux idées révolutionnaires des personnes issues de la petite bourgeoisie que des travailleurs. Les origines petites-bourgeoises ne sont pas majoritaires à LO, mais elles sont importantes quand même. L'organisation se débrouille pour que les petits-bourgeois qui ont choisi le camp des travailleurs fassent leurs preuves et les inclut bien évidemment dans ce qui se fait autour des entreprises et dans les quartiers populaires. Le but est qu'ils intègrent totalement les préoccupations des travailleurs et des quartiers populaires, dans leur façon de vouloir changer la société. D'autres organisations recrutent les petits-bourgeois en les faisant mousser et en donnant de l'importance à leurs idées prétendument nouvelles.
Aujourd'hui parmi les travailleurs il est plus facile de gagner aux idées révolutionnaires des français non issus de l'immigration (récente) que des français issus de l'immigration africaine ou maghrébine, et plus facile de gagner ces derniers que des tout nouveaux immigrés Chinois, Ethiopiens ou Polonais. Je schématise, mais c'est quand même assez proche de la réalité. Il ne faut jamais perdre de vue que les plus opprimés ne sont jamais les plus faciles à convaincre. On essaye quand même, mais forcément les camarades d'origine immigrée sont moins représentés dans l'organisation que dans l'ensemble de la société, pas à cause de la politique de LO, mais parce que c'est plus difficile. Dans mon coin, dans le Sud-Est lyonnais (en englobant plusieurs villes), les copains d'origine maghrébine sont bien présents mais assez nettement minoritaires alors que dans la population générale les Maghrébins c'est peut-être 60 %. Mais on a pas mal d'Espagnols et d'Italiens aussi (qui représentent, avec les Portugais, une grande partie de la population "blanche" du coin). C'est le fruit d'un boulot local + d'un boulot dans les usines chimiques + d'un boulot dans la métallurgie + d'enseignants connus dans les lycées du coin + de tout le reste du boulot fait par LO dans l'agglomération lyonnaise et les entreprises et les écoles et les universités. Les populations immigrées, on les connaît, c'est une partie d'entre nous, on vit parmi eux ou avec eux. Ce qui dépasse bien sûr le cadre militant, puisque les familles fusionnent, se recomposent...
(J'ai via une fille de ma compagne déjà deux petits-fils musulmans dont au moins un footballeur acharné, moi qui n'aime pas le football

Via une autre, un "gendre" maghrébin qui fabrique je ne sais pas quoi

Via un fils bossant chez McDo, une "belle-fille" maghrébine végétarienne école de commerce très sensible à la souffrance animale

mais avec des goûts de luxe

malgré ses origines populaires ; par contre elle est très ouverte à l'idée d'un monde sans frontières).
Ce faisant, on se coltine au quotidien les questions d'une part, de racisme et d'islamophobie, d'autre part, de montée des influences religieuses réactionnaires chez certains musulmans notamment. Et donc, de la résistance, et aux unes, et aux autres.
Ensuite, comme je l'ai déjà décrit ailleurs sur ce forum, les milieux immigrés se sont différenciés socialement, et la petite-bourgeoisie maghrébine par exemple est une sacrée réalité. Elle fait comme la française : elle donne le ton, là où elle vit. Elle est d'origine immigrée. Mais petite-bourgeoise. Mais d'origine immigrée. Mais petite-bourgeoise. Elle est donc confrontée aux mêmes discriminations ou presque que les autres immigrés (surtout quand elle ambitionne des postes), elle est elle aussi victime de racisme et d'ostracisme. Mais elle réagit à sa manière. Petite-bourgeoise. A partir d'un fond de réalité - le racisme - certains de ses membres théorisent des trucs, du genre les "racisés". Et ce sont aussi presque toujours ces milieux-là qui portent les revendications religieuses.
Et là, hop, toute cette extrême-gauche qui parle de féminisme mais ne se choisit pas des porte-parole femmes, qui recrute traditionnellement davantage dans les milieux petits-bourgeois que dans les milieux ouvriers, que l'on voit davantage dans les universités que dans les quartiers populaires (OK, il faut y être aussi, dans les universités, et on y est), et qui parvient à recruter quelques jeunes d'origine immigrée PARCE QUE petits-bourgeois, débarque et vient dire à LO :
"quand même, le mouvement ouvrier, il laisse de côté le problème des "racisés" et de l'islamophobie ! C'est bien un truc de "blancs" !"N'empêche que la tendance internationale dont fait partie LO, l'UCI, a construit des organisations et convaincu des militants dans des pays variés. En Martinique et en Guadeloupe, des camarades Noirs. En Haïti, des camarades Noirs. En Afrique noire francophone, des camarades Noirs, qui ont pris pied en Côte-d'Ivoire, ou qui travaillent depuis l'immigration africaine en France, et ont l'air très bien renseignés sur des pays comme le Mali, le Tchad, Madagascar, la Mauritanie, le Sénégal... Aux Etats-Unis, une organisation principalement "blanche" mais qui compte évidemment dans ses rangs des militants Noirs aussi incroyables que notre camarade Sam Johnson (aujourd'hui retraité de chez Chrysler). En Turquie, des camarades militant dans un pays majoritairement musulman. Et vous avez vu le stand des camarades anglais à la fête de Presles ? Des jeunes de toutes les couleurs y passent ! Comme on dit, "la preuve du pudding, c'est qu'on le mange".
Mais bon c'est vrai, j'oubliais,
"quand même, le mouvement ouvrier, il laisse de côté le problème des "racisés" et de l'islamophobie ! C'est bien un truc de "blancs" !"